• l’année dernière
Le 7 décembre 2021, Guy Forget annonçait quitter ses fonctions de directeur de Roland-Garros et du Rolex Paris Masters. Un départ motivé par le manque de communication avec la nouvelle présidence de la FFT. Deux ans plus tard, jour pour jour, l'ancien capitaine des équipes de France de Coupe Davis et de BJK Cup est épanoui et ne garde aucune amerturme. Désormais consultant Prime Vidéo, intervenant en entreprise et président de la Fondation Sport for Life, l'ancien quatrième joueur mondial est revenu, au micro de Tennis Actu, sur son départ de la FFT et sa nouvelle vie. L'occasion également de discuter de l'actualité chaude : la nomination de Paul-Henri Mathieu à la tête de l'équipe de France de Coupe Davis, le changement de staff autour d'Arthur Fils ou encore le retour de Rafa Nadal en 2024. Entretien avec un Guy Forget qui n'a éludé aucune question.

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Transcription
00:00 quel regard vous portez un petit peu sur le tennis français masculin ?
00:02 Est-ce que vous êtes optimiste ?
00:04 Oui, je suis optimiste et je suis quand même toujours optimiste
00:10 parce que ce serait presque faire injure à ces hommes et ces femmes
00:16 qui tout au long de l'année, dans les clubs, dans les centres de ligue,
00:19 dans nos centres nationaux, se lèvent et partent avec des jeunes garçons
00:24 ou des jeunes filles pour les faire travailler,
00:26 pour les faire répéter des gammes et faire d'eux leur propre champion
00:32 parce que tout le monde n'est pas Raphaël Nadal ou Serena Williams
00:36 et si un joueur ou une joueuse peut être 50e mondial,
00:40 de l'amener à son potentiel maximal, c'est 50e mondial,
00:43 le contrat est rempli, c'est très bien.
00:46 Après d'avoir la prétention qu'avec une politique sportive
00:49 on va faire gagner des joueurs ou des joueuses Roland Garros
00:52 si on lui le donne, c'est de la malhonnêteté une nouvelle fois
00:55 parce que ce n'est pas un programme qui fait gagner un champion.
00:58 Si on peut parler de joueuses comme Serena Williams,
01:04 comme Roger Federer ou Raphaël Nadal, ils sont nés champions.
01:07 Alors ils ont été assez intelligents pour s'entourer de gens
01:11 qui les ont accompagnés tout au long de ce parcours
01:13 mais ce n'est pas parce que le tennis espagnol a monté une académie
01:21 dans le sud de l'Espagne et que les joueurs ont fait des footings
01:25 ou ont fait du panier ou ont fait des coups droits,
01:27 des revers liftés qu'ils ont gagné Roland Garros.
01:29 Ce serait une nouvelle fois faire insulte à ce joueur extraordinaire
01:35 qui est Raphaël Nadal.
01:36 Raphaël Nadal c'est Pelé, c'est Picasso, c'est Mozart,
01:39 c'est ce genre d'individu dans son ADN qui est hors norme,
01:44 qui n'est pas comme les autres et sans le faire, ça ne se fabrique pas.
01:47 Donc je pense qu'une fédération aujourd'hui a pour rôle
01:50 d'encourager les jeunes à jouer, à les accompagner le plus longtemps
01:54 possible, probablement jusqu'à leur 18 ans, à partir du moment
01:57 où ils sont autonomes financièrement pour à ce moment-là avoir
02:02 une structure autour d'eux qui leur permette de passer le cap supplémentaire
02:06 mais ce n'est pas une fédération qui va faire un champion malheureusement.
02:11 - Et là, vous parlez de l'importance de l'entourage,
02:14 on a vu une décision forte en ce qui concerne Arthur Fils,
02:18 Serge Ibreguera, Sébastien Grosjean autour de lui, ça vous inspire quoi ?
02:22 - Tous les deux sont des garçons qui aiment profondément le tennis,
02:28 qui vont amener tout leur savoir, toute leur passion, leur expérience
02:33 à Arthur qui est une pierre précieuse aujourd'hui dont on est en train
02:38 de tailler les facettes parce que je peux vous dire que son entourage
02:44 n'ambitionne pas pour Arthur d'être juste 10e mondial,
02:50 en plus c'est un garçon qui a beaucoup de talent,
02:53 qui a des qualités physiques hors normes et quand on regarde
02:55 aujourd'hui Nadal, Federer et Djokovic, c'était probablement
02:58 les meilleurs athlètes du circuit, les plus puissants, les plus endurants,
03:02 les plus rapides, les plus tenaces, les plus forts mentalement aussi,
03:05 avec des styles de jeu totalement différents,
03:08 donc la manière dont je pense Arthur va s'entourer aujourd'hui
03:14 et va continuer de progresser, elle est très importante,
03:18 on espère, on lui souhaite qu'en cours de route il ne va pas se perdre
03:24 dans les dérives ou les excès que la vie d'un sportif professionnel
03:29 peut apporter, des fois c'est perturbant quand on est très jeune,
03:33 mais avec son équipe je pense qu'il est bien encadré
03:38 et Sébastien et Sergi connaissent bien tous les excès
03:41 et tous les faux pas à ne pas commettre,
03:44 ils vont l'accompagner et le faire progresser.
03:50 Après, pour en revenir à des considérations beaucoup plus techniques
03:55 et précises, j'ai toujours été étonné, et Dieu sait si j'ai côtoyé
04:01 des joueurs qui étaient en équipe de France pendant presque 15 ans,
04:05 des joueurs que je retrouvais en début de saison à l'Open d'Australie,
04:10 que j'allais chacaler en Australie pour voir les forces de mes joueurs
04:15 et lesquelles je pourrais sélectionner, au-delà du classement
04:18 et des résultats, de voir que certains revenaient l'année suivante
04:23 avec les mêmes lacunes et un jeu qui n'avait pas évolué.
04:26 Je me suis toujours dit que c'était embêtant,
04:29 parce que ce sont des jeunes joueurs qui ont un assez fort potentiel,
04:33 certains aspects du jeu n'ont pas progressé, parce qu'ils sont mauvais,
04:38 ils n'ont pas progressé, parce qu'ils ne les ont pas travaillés.
04:40 Et je crois que ce qui est important chez nos jeunes joueurs aujourd'hui,
04:43 que ce soit Arthur Fiss, que ce soit Van H,
04:45 ils sont plusieurs aujourd'hui avec du talent,
04:49 c'est que leurs entraîneurs respectifs ne jouent pas la carte du court terme,
04:54 à savoir, il faut qu'on joue bien l'Open d'Australie,
04:56 on est en train de construire un joueur à un jour être peut-être
05:01 numéro un mondial, ce que fait d'ailleurs Yannick Siner depuis 2-3 ans,
05:05 ce qu'a fait Alcaraz depuis plusieurs années avec Juan Carlos Ferreiro,
05:10 et c'est dans ce qu'il propose sur le terrain,
05:14 sans voir le score, sans voir les résultats,
05:16 qu'on se dit "ouh là, ça commence à ressembler à quelque chose".
05:21 Là on parle de très haut niveau, au niveau physique,
05:24 au niveau des zones de frappe, de la déduction technique,
05:27 tous les paramètres sont assez complets.
05:33 Là on touche dans l'extrême un peu partout,
05:36 parfois ils se trompent, ils ont du mal,
05:38 ils mettent la mauvaise carte au mauvais moment,
05:41 ou la bonne carte au mauvais moment,
05:43 et ça c'est l'expérience du joueur avec son entourage
05:45 qui va faire que petit à petit on fait des ajustements,
05:48 mais la base elle est déjà extraordinaire.
05:51 Arthur est un joueur remarquable déjà,
05:56 mais avec une belle marge de progression,
05:59 et je souhaite et j'espère qu'aujourd'hui,
06:02 Seb et Sergi vont vraiment l'aider à combler encore ces petites lacunes
06:08 pour pourquoi pas battre les Yannick Sinner et Nova Djokovic.
06:12 Arthur Fils gagnant un Grand Slam,
06:15 c'est tout simplement quelque chose qui doit être visé,
06:18 ça doit être la carotte du quotidien presque.
06:22 Pour lui, je n'ose pas imaginer que c'est quelque chose
06:25 qu'il a dans le coin de sa tête,
06:27 je n'ai pas le droit de l'exprimer,
06:29 parce que tous les joueurs qui l'ont fait par le passé
06:32 ont un peu mangé la feuille derrière,
06:35 donc être ambitieux c'est très bien,
06:37 pourquoi exposer publiquement son ambition,
06:40 dire que je vais être le meilleur joueur possible,
06:43 oui j'aimerais gagner les grands tournois,
06:46 certes, mais fais ton travail dans l'ombre,
06:51 bosse, améliore-toi, approche-toi des tout meilleurs,
06:55 des références, et un jour, à ce moment-là,
06:58 tu pourras gagner un tournoi du Grand Slam.
07:00 Mais c'est s'apporter une pression supplémentaire,
07:03 et je crois qu'à cet âge-là,
07:05 on n'a pas besoin de se mettre une pression sur les épaules.
07:08 Pour moi, Rafael Nadal est le parfait exemple
07:11 du joueur humble, respectueux,
07:13 qui a travaillé plus que d'autres dans l'ombre
07:16 avec son oncle à Mallorque,
07:19 et est devenu le champion qu'on connaît aujourd'hui,
07:22 et encore, il revient après une longue blessure
07:25 et je suis convaincu qu'il aborde sa préparation
07:28 avec la même rigueur et l'enthousiasme
07:30 qu'il avait quand il avait 16 ans
07:32 et qu'il a joué ses premiers tournois de ATP.

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