Il y a toujours deux spectacles en un quand on parle du blob. D’abord il y a la star : cet organisme unicellulaire qui n’est ni un animal, ni un végétal, ni une plante, qui ressemble à une omelette et fascine par ses capacités à résoudre des problèmes complexes. Et puis il y a la scientifique : Audrey Dussutour, qui consacre ses recherches à ce drôle de paroissien depuis des décennies avec une passion intacte et tellement communicative qu’elle vous donnera envie d’embarquer dans ses aventures de science participative où elle a convaincu 15 000 participants d’étudier l’impact du changement climatique sur cet organisme extraordinaire. Elle partagera avec nous les résultats de cette étude unique en son genre, vous ne regarderez plus jamais vos flocons d’avoine du même œil…
Avec Audrey Dussutour, directrice de recherche au CNRS, spécialiste de l’étude du comportement des animaux et en particulier des fourmis et des blobs
Suivez nous sur : - Youtube : https://www.youtube.com/c/lepoint/ - Facebook : https://www.facebook.com/lepoint.fr/ - Twitter : https://twitter.com/LePoint - Instagram : https://www.instagram.com/lepointfr - Tik Tok : https://www.tiktok.com/@lepointfr - LinkedIn : https://www.linkedin.com/company/le-point/posts/ - www.lepoint.fr
Avec Audrey Dussutour, directrice de recherche au CNRS, spécialiste de l’étude du comportement des animaux et en particulier des fourmis et des blobs
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00:00 [Musique]
00:22 Bonjour à tous, on est ravis de vous retrouver pour cette 12e édition de Futurapolis Planète
00:26 dans le cadre toujours aussi magique du Quai des Savoirs de Toulouse.
00:30 On a aussi conçu cette édition autour de vous, vous aurez donc la possibilité de poser vos questions
00:35 lors de la plupart de nos séquences en vous rendant sur le site menti.com
00:38 et en entrant le code 5602 3504.
00:41 Ça a l'air un peu compliqué, mais vous pouvez aussi tout simplement flasher le QR code.
00:46 Si vous voulez qu'on vous voit, si vous voulez être la star de la matinée,
00:49 vous nous indiquez votre nom, votre prénom et votre numéro de siège.
00:53 Et si vous avez envie, vous êtes un petit peu timide de rester anonyme,
00:56 vous n'indiquerez rien du tout, mais on posera vos questions.
00:59 Vous avez aussi accès juste sur le côté à Futurapolis expérience qui vous propose un parcours d'expérience immersive
01:05 en réalité virtuelle, en réalité augmentée pour découvrir des œuvres numériques,
01:08 pour explorer les fonds marins, les sommets du monde, le milieu sauvage de la savane africaine
01:13 ou encore la grotte Chauvet.
01:14 Et vous avez toute une partie qui est dédiée aussi au muséum juste à côté.
01:18 Je vous informe enfin qu'aux alentours de midi, le ministre des Transports,
01:22 Clément Bonne, sera l'invité de Futurapolis.
01:24 Il répondra aux questions d'Etienne Gernel, le directeur du point.
01:27 Et bien sûr, il répondra à vos questions.
01:29 Alors, c'est parti pour une journée particulièrement riche.
01:32 On découvre ensemble la folle histoire du blob.
01:36 Il y a toujours deux spectacles en un quand on parle du blob.
01:38 D'abord, il y a la star, un organisme unicellulaire qui n'est ni un animal,
01:41 ni un végétal, ni une plante et qui ressemble un petit peu à une omelette.
01:45 Il fascine par ses capacités à résoudre des problèmes complexes.
01:49 Et puis, il y a la scientifique. C'est Audrey Dussutour qui consacre ses recherches
01:53 à ce drôle de paroissien depuis des décennies, avec une passion intacte
01:57 et tellement communicative qu'elle vous donnera envie d'embarquer
01:59 dans ses aventures de sciences participatives.
02:01 Ou par exemple, elle a convaincu 15000 participants d'étudier l'impact
02:05 du changement climatique sur cet organisme extraordinaire.
02:08 Elle partagera avec nous les résultats de cette étude unique en son genre.
02:11 Et vous ne regarderez plus jamais vos flocons d'avoine du même oeil.
02:14 On va réserver un accueil de stars à Audrey Dussutour et l'accompagner de Guillaume Grallet,
02:17 rédacteur en chef, science et tech au point.
02:20 Ceux aux applaudissements.
02:22 Bonjour Audrey. Bonjour. C'est super. J'ai eu la chance de parler un tout petit peu
02:36 avec Audrey tout à l'heure. Et vous allez voir ce qui est absolument génial.
02:40 C'est que plus on parle avec Audrey, plus on se rend compte qu'on ne sait rien,
02:44 mais qu'en même temps, c'est super enthousiasme.
02:47 C'est en tout cas, il y a énormément de biodiversité, plus de 9/10 qu'on connaît pas encore.
02:52 Et c'est cette curiosité qui est absolument dingue et qui remonte en grande partie
02:56 à un coup de cœur avec justement ce bloc que vous avez apporté, qui s'appelle L'U.
03:03 Est ce que tu pouvais nous expliquer cette rencontre avec le blob?
03:09 Je crois que c'est arrivé en Australie lorsque vous étiez.
03:13 Oui, tout à fait. Alors de formation, je suis myrmécologue, c'est à dire spécialiste du comportement des fourmis.
03:18 Donc ça n'a rien à voir avec le blob. Et je faisais un postdoctorat en Australie
03:23 à l'université de Sydney. Et un jour, mon superviseur me dit Ah là là, je cherche un organisme
03:28 qui serait beaucoup plus simple qu'un insecte pour faire des expériences de nutrition.
03:33 Et je lui dis je sais pas si tu connais, mais il y a ces travaux de Toshiyuki Nakagaki au Japon
03:37 qui a montré qu'il y a un organisme bizarroïde tout jaune. Il peut sortir d'un labyrinthe.
03:41 Et je crois que c'est un organisme qui est extrêmement simple.
03:45 Et ça tombait bien parce qu'il y en avait dans le laboratoire en Australie.
03:48 Et donc on a rencontré cette personne et nous l'a donné. Et au début, quand je l'ai vu,
03:52 ça ressemblait à une vieille omelette et j'ai pas été enthousiasmée dès le départ.
03:57 En réalité, j'ai posé ça dans un tiroir et le lendemain, quand je suis revenue,
04:01 c'est sorti du tiroir et je me suis dit voilà, finalement, cet organisme est peut être intéressant.
04:06 Et on s'est lancé dans un projet qui, au départ, devait durer deux, trois mois maximum.
04:10 Parce que moi, après, je partais en France, j'étais recrutée au CNRS.
04:13 Et finalement, c'est une histoire qui a maintenant 15 ans et je pense qu'elle va pas s'arrêter
04:18 parce que cet organisme, il m'a démontré que, en fait, on connaissait rien.
04:24 Comme disait Guillaume, on connaît rien de ce qui se passe dans nos forêts, de ce qui croule dans le sol.
04:28 Et ces organismes là, ils peuvent être source de connaissances, de nouvelles connaissances, d'innovation.
04:33 Et on les regarde avec beaucoup plus d'humilité maintenant parce qu'en fait,
04:37 on ne pensait pas que cet organisme pourrait nous apprendre à nous humains des choses.
04:41 Et finalement, on n'est pas grand chose face au bloc. On n'est pas grand chose.
04:45 Et puis, c'est justement un moyen, comme disait Boris, de faire de la science ouverte participative.
04:49 Ça, on va en parler du super projet dans quatre pays francophones,
04:55 parce que vous vous êtes rendu compte que c'était bien que les gens s'approprient les connaissances.
04:59 Mais mais pour revenir justement sur le bloc, qu'est ce qui nous apprend?
05:05 Il est intelligent, vous nous disiez tout à l'heure.
05:08 Alors, il faut d'abord expliquer ce que c'est le bloc. Alors, le bloc, c'est un organisme,
05:12 donc en effet, qui n'est pas une plante, pas un champignon, pas un animal.
05:15 Il appartient à un règne qui est peu connu du grand public. Ça s'appelle les amoebozoa.
05:20 Donc, il faut imaginer que c'est un règne qui a émergé avant que les animaux se séparent des champignons.
05:28 Donc, vous avez des cousins champignons. On est proche des champignons.
05:33 On est plus proche des champignons, on est plus proche d'une truffe que d'un blob phylogénétiquement.
05:38 Et donc, les amoebozoa, ce sont des organismes qui sont unicellulaires.
05:41 Donc, ils ont une seule cellule qui vivait au départ dans les océans et qui ont contaminé le milieu terrestre.
05:47 Et il faut imaginer que ça, c'était il y a un milliard d'années.
05:49 Donc, sur la croûte terrestre, il n'y avait pas d'animaux, pas de plantes, pas de champignons.
05:53 Il n'y avait que des bactéries, des micro-organismes.
05:55 Et donc, les premiers amoebozoa, les premiers aussi représentants des blobs qui s'appellent les myxomycètes,
06:00 en langage scientifique, ont commencé à se nourrir de bactéries.
06:04 Après, quand les champignons sont arrivés, ils ont commencé à se nourrir de champignons.
06:07 Mais c'est des organismes qui sont très anciens et qui ressemblent, vous les voyez sur ces vidéos, à des réseaux.
06:13 Et si vous voyez, ça ressemble à des réseaux vasculaires qui peuvent rappeler notre propre réseau vasculaire.
06:19 Et ça, c'est la première source d'innovation chez le blob.
06:22 C'est que ce réseau, il a un milliard d'années d'évolution.
06:25 Il a été optimisé pour le transport parce que ce réseau de veine que vous voyez,
06:30 c'est ce qui permet à la cellule de transporter les nutriments et aussi de se déplacer.
06:34 Et donc, les scientifiques sont drôlement intéressés à savoir comment le blob construit ces réseaux,
06:39 puisque quand on les quantifie au niveau scientifique, on s'aperçoit que c'est des réseaux extrêmement efficaces,
06:43 peu coûteux et très robustes.
06:45 Et donc, moi, par exemple, je travaille avec une entreprise toulousaine où on essaye de développer des logiciels
06:51 qui se basent sur le comportement du blob pour optimiser les réseaux de télécommunication et les rendre moins énergivores.
06:56 Donc voilà, on n'aurait pas imaginé en allant en forêt que cet organisme pourrait nous aider.
07:01 C'est un petit peu cette science où on s'inspire du vivant.
07:06 Elle avait aussi servi par le passé, grâce à des scientifiques lorsqu'on observait le mouvement des fourmis.
07:12 Oui, au départ, quand je travaillais sur les fourmis, en effet, on traduisait le comportement des fourmis en algorithmes.
07:18 Et ça s'appelait les algorithmes fourmis. Et c'était, par exemple, utilisé pour le fameux problème du voyageur de commerce,
07:25 où c'est un voyageur qui doit rejoindre plusieurs villes. Et en fait, c'est un problème extrêmement complexe.
07:29 On utilisait des algorithmes fourmis pour résoudre ce problème. Et finalement, maintenant,
07:33 les scientifiques utilisent aussi le blob pour résoudre ce type de problème également.
07:37 Et aujourd'hui, vous travaillez sur quelque chose qui nous intéresse tous, sur les secrets peut être de l'immortalité du blob.
07:45 Parce que on ne sait pas vraiment. Il y en a des très anciens.
07:48 Oui, c'est l'expérience qui est actuellement en cours dans mon laboratoire.
07:52 On travaille sur le vieillissement chez le blob parce que, comme tout organisme vivant, il vieillit comme nous.
07:58 Alors, le vieillissement chez le blob, ça se manifeste par des changements de vitesse.
08:02 Il est plus sensible aux perturbations environnementales comme nous, quand on devient plus vieux.
08:08 Sauf que lui, il a la capacité de régénérer. Donc, il a deux façons de régénérer.
08:15 La première, c'est que si on met le blob en dormance, alors un blob en dormance, c'est un blob qui ressemble à un blob séché.
08:22 Mais là, il est encore vivant. Là, il est encore vivant. Il dort. Il dort.
08:26 C'est ce qu'on appelle un sclérote et il peut rester ainsi pendant plusieurs années.
08:30 Et quand on le réveille, il suffit de mettre une petite goutte d'eau. On s'aperçoit qu'il régénère.
08:35 Donc, un blob qui est très âgé, qui montre des signes de vieillissement, si on le met en état dormant et qu'on le réveille, il régénère complètement.
08:42 Et la deuxième façon de régénérer, c'est pour un blob âgé de fusionner avec un congénère qui est jeune.
08:48 Parce que s'il fusionne avec un congénère qui est jeune, il avale plus ou moins sa jeunesse.
08:53 Donc, c'est un phénomène assez unique. C'est ce qu'on étudie actuellement au laboratoire pour découvrir un petit peu les secrets derrière cette forme d'immortalité biologique.
09:01 Alors, juste avant de revenir sur votre projet assez dingue, participatif, on peut tous acheter des blobs, c'est ça ?
09:08 Alors, on peut en acheter sur Internet, en effet, parce que tout se vend. Mais on peut surtout aller les collecter en forêt.
09:15 C'est beaucoup mieux et c'est beaucoup plus excitant parce qu'il y a plus de 1000 espèces de Myxomycète dans la nature.
09:22 En réalité, on estime même le nombre d'espèces à 10 000 parce que finalement, on en connaît très peu.
09:26 Et donc, on peut trouver des nouvelles espèces. On en a partout autour de Toulouse, dans la forêt de Boukoun, etc.
09:33 On peut vraiment en trouver partout. C'est facile à collecter. Vous avez juste à collecter des bouts de bois et finalement, les mettre dans des conditions particulières d'humidité.
09:41 Et vous verrez après quelques semaines émerger des Myxomycètes. Ça marche à 100% des cas.
09:46 Et puis, ça grandit très vite, c'est ça ?
09:47 Et ça grandit très vite. Alors, Physarum polycephalum, celui qu'on appelle blob, il double de taille, voire triple de taille tous les jours.
09:54 Donc, si votre enfant vous demande un blob, sachez le. Et si vous lui donnez pas ses flocons d'avoine quotidien, il va s'échapper un petit peu aussi.
10:03 Mais ça avance pas très vite. Je vous rassure, c'est un centimètre à l'heure grand maximum. Donc, vous avez le temps de le récupérer quand il s'échappe.
10:11 Et petite anecdote, vous avez créé le plus grand blob du monde.
10:14 Oui, c'était suite à un projet qui s'appelait "élève ton blob", qui était un projet coordonné par le CNES et le CNRS,
10:20 dont le but, c'était un projet à but pédagogique. On envoyait un blob dans l'espace et les enfants faisaient une expérience à l'école,
10:27 qui était donc l'expérience contrôle. Et on regardait les effets de la microgravité sur le blob.
10:32 Et le projet a tellement bien marché qu'on s'est donné rendez-vous avec tous les enfants et les enseignants qui avaient participé à ce projet,
10:38 à Châteauroux, au milieu de la France, pour faire le plus long blob du monde.
10:42 Et on a battu le record de la plus longue cellule au monde, puisque c'était détenu par le motoneurone de la baleine.
10:48 C'est un neurone qui va donc de la tête à la queue de la baleine et qui fait 30 mètres.
10:54 Et nous, on a fait une cellule de 53 mètres de long. Donc, par fusion, chaque enfant est revenu avec le blob que je lui avais donné au début de l'année.
11:02 À Châteauroux, on a fait une spirale géante qui a été validée par un huissier de justice, etc.
11:08 Un autre corps français. Alors, ça vous tient à cœur, Audrey, la science participative. Pourquoi?
11:15 C'est une nouvelle façon de faire des sciences. Il y a une crise de confiance dans le sien, dans les scientifiques actuellement,
11:23 suite à la crise Covid et pour renouer en réalité avec les citoyens.
11:29 On s'est dit avec le CNRS qu'on allait monter un projet de science citoyenne qui aurait trois objectifs.
11:35 Le premier, c'était de sensibiliser les gens au réchauffement climatique, puisque c'est un projet où on regardait les effets du réchauffement climatique sur le blob.
11:44 Le deuxième objectif, c'était d'expliquer comment on fait des sciences, comment on fait de la recherche, expliquer la méthodologie que nous, on utilise dans les laboratoires.
11:52 Le troisième objectif, c'était de créer des nouvelles connaissances, comme ce que fait tout chercheur, et de publier ces nouvelles connaissances dans une revue scientifique.
12:00 Les citoyens nous ont accompagnés du début de l'expérience jusqu'à la fin. Ils ont reçu un petit kit blob, comme ça, et ils ont fait une expérience.
12:12 Ils ont élevé des blobs avec différents régimes de température. Ils ont pris des photos, ils ont fait des relevés, ils nous les ont envoyés.
12:19 Ils nous ont même aidés à analyser certaines images. On a reçu plus de un million d'images que j'ai mis quatre mois à observer, les unes après les autres, pour valider les expériences au pas.
12:33 Là, on rentre dans la phase d'analyse où on va utiliser l'intelligence artificielle, le machine learning, pour analyser automatiquement les images.
12:41 C'était une aventure absolument extraordinaire, puisque travailler avec 15 000 personnes, 15 000 non-scientifiques...
12:50 Habituellement, au laboratoire, on a environ 3 ou 4 étudiants qu'on a juste à côté de nous, sur la paillasse, et on leur dit comment faire les expériences.
12:59 Là, vous devez faire des expériences avec des gens qui n'ont pas de formation scientifique, qui ne sont pas à côté de vous, qui sont dans leur maison.
13:04 Il faut leur expliquer, à ces 15 000 personnes, comment faire l'expérience.
13:08 On a utilisé beaucoup d'outils, des vidéos, des protocoles écrits, etc. On a échangé énormément d'emails.
13:14 Mais je suis vraiment satisfaite du résultat, parce que, d'une, les gens ont extrêmement bien travaillé.
13:20 Deux, les gens ont bien compris comment on faisait des sciences. Ils ont compris que c'était beaucoup de rigueur, beaucoup de répétition.
13:27 Il faut beaucoup de patience, beaucoup de frustration parfois.
13:31 Ça a créé des vocations.
13:33 J'espère, puisque notre plus jeune participant a 8 ans et notre plus âgé a 91 ans.
13:39 Et vous, l'amour des sciences, vous l'avez eu en allant dehors.
13:45 Vous disiez mes parents me disaient va jouer dehors. Je trouve ça super marrant.
13:49 Oui, parce que moi, je suis d'un tout petit village de à peine 120 habitants dans l'Aveyron et une famille nombreuse.
13:56 Et du coup, oui, c'est vrai. Mes parents ouvraient la porte et disaient allez jouer dehors.
14:00 Et donc, quand on va jouer dehors, on observe l'environnement, on se pose des questions, on récolte des insectes, etc.
14:05 Et donc, très vite, on devient un petit peu scientifique sur le côté.
14:08 On n'y connaît encore rien de la biodiversité. Je trouve ça passionnant.
14:13 Oui, parce que si c'est ce que je dis souvent aux enfants, parce que les enfants aiment bien qu'on les amène aux zoos.
14:18 Mais finalement, on voit toujours des choses qu'on connaît déjà des éléphants, des girafes, etc.
14:22 Et je leur dis mais vraiment, ce qui est plus intéressant, c'est vous prenez une cuillère à soupe et vous allez en forêt.
14:27 Vous prenez une cuillère à soupe de sol, vous mettez ça dans une boîte, un petit peu d'eau.
14:31 Vous prenez une petite loupe binoculaire et vous regardez.
14:34 Vous avez Jurassic Park en miniature que des organismes que personne ne connaît, qui ont des formes, des couleurs absolument extraordinaires.
14:42 Et on passe à côté de ça parce que c'est sous nos pieds, que c'est tout petit.
14:45 Et c'est dommage parce qu'on voit que le blob, il est source d'innovation.
14:49 Et c'est une espèce parmi mille qui est étudiée chez les Myxomycètes, par exemple.
14:53 Les autres espèces ne sont même pas étudiées.
14:55 Donc, je trouve que c'est dommage. C'est comme si vous aviez une encyclopédie avec des millions, plusieurs millions,
15:01 parce qu'on a plusieurs millions d'espèces, millions de volumes et que vous lisez toujours les trois mêmes volumes.
15:06 On lit toujours les mêmes. C'est ça. C'est dommage.
15:08 En tout cas, ça peut créer des vocations. Il y a encore énormément de choses à découvrir.
15:11 Tout à l'heure, vous parliez d'intelligence artificielle.
15:13 Vous avez découvert aussi que le blob avait une forme d'intelligence, c'est ça?
15:17 Oui, on a démontré il y a cinq ans de ça, que le blob, c'est ce qui l'a rendu d'ailleurs célèbre,
15:23 était capable d'apprendre.
15:25 Normalement, on pensait que l'apprentissage était réservé aux organismes qui avaient un système nerveux,
15:30 donc les animaux.
15:32 Il y avait eu quelques articles sur les apprentissages chez les plantes.
15:34 On disait oui, mais les plantes, c'est multicellulaire.
15:36 Donc, pourquoi pas cette complexité?
15:38 Mais nous, on est les premiers à avoir démontré qu'il y avait des apprentissages,
15:41 même chez les organismes qui avaient une seule cellule.
15:43 Donc, le blob, il est capable d'apprendre.
15:45 Il est capable de mémoriser pendant longtemps de l'information.
15:48 Il est capable même de la transférer à ses congénères par fusion.
15:52 Donc, vous pouvez apprendre quelque chose à un blob,
15:54 le faire fusionner avec un congénère naïf,
15:56 et le congénère naïf récupérera l'information.
15:59 Et ça, c'était quelque chose qui a quand même pas mal fait parler
16:03 et qui a donné plein d'idées à d'autres scientifiques d'aller tester d'autres organismes unicellulaires.
16:07 On a retrouvé ces formes d'apprentissage chez d'autres formes d'organismes.
16:11 Et finalement, on s'aperçoit que l'intelligence,
16:13 elle a peut-être émergé avec la vie elle-même.
16:15 Et elle n'est pas réservée aux animaux.
16:17 Et aux humains.
16:19 Et aux humains, certainement pas aux humains.
16:21 On va bien sûr ouvrir à toutes les questions qu'il y a dans la salle.
16:27 Boris a dit aussi qu'on pouvait regarder la conférence en ligne et vous poser des questions.
16:32 Je voulais dire également qu'on peut vous suivre à travers cette expérience,
16:36 mais également vous lisant à travers moi, le blob, par exemple,
16:40 chez Humaine Science ou aussi un livre sur les fourmis publié chez Grassey.
16:46 Cette découverte, cette science participative,
16:50 est ce que vous pourriez la décliner sur d'autres projets à l'avenir?
16:54 Oui, en réalité, on peut faire.
16:56 Il y a plein de projets de science citoyenne qui sont en cours.
16:59 Je vous engage à regarder sur le site du Muséum d'histoire naturelle à Paris.
17:02 Il y a plein de projets.
17:04 Vous pouvez aller regarder les oiseaux,
17:06 collecter des verres de terre dans votre jardin.
17:08 Ça aide les scientifiques.
17:10 La particularité de notre projet, c'était qu'il y avait un côté actif.
17:13 Ce n'était pas que de la collecte des données.
17:15 Et les citoyens vont être co-auteurs de la publication.
17:18 Ils vont vraiment être amenés jusqu'au bout.
17:20 Tellement que l'idée d'après, c'est de demander aux volontaires
17:23 de proposer eux-mêmes le protocole d'après,
17:25 c'est à dire basé sur les résultats qu'ils ont obtenus.
17:27 Quelle est la prochaine question?
17:29 Et avec les mêmes contraintes que nous, on s'est imposé,
17:31 c'est à dire une expérience faisable à la maison, inédite.
17:34 Quelle serait la prochaine étape qu'on peut faire basé sur nos résultats?
17:37 Alors nos résultats, parce que vous n'en avez pas parlé,
17:40 mais le blob souffre des changements de température,
17:43 en particulier les changements d'intensité.
17:47 Est-ce que vous pouvez avoir des augmentations de température
17:50 qui sont graduelles et des augmentations de température
17:53 qui sont très brusques?
17:55 Et on a vu que le blob, si c'est graduel, il peut s'habituer.
17:58 Une espèce de forme d'apprentissage.
18:00 Mais par contre, si c'est très brusque, il ne peut pas.
18:02 Et il va souffrir énormément.
18:04 On a eu beaucoup de mortalité sur nos expériences.
18:07 C'était le but, c'était de voir comment le blob allait réagir.
18:10 Et on n'a pas juste augmenté la température de 2.1 degrés.
18:14 Parce que ce n'est pas important, l'augmentation de la température moyenne.
18:18 Ce qui est important, c'est comment elle augmente.
18:20 Donc nous, on a regardé l'effet des vagues,
18:23 la fréquence de ces vagues de chaleur, l'intensité de ces vagues de chaleur et la durée.
18:26 Parce qu'on voit que ce sont ces trois paramètres
18:28 qui sont extrêmement importants dans le réchauffement climatique.
18:30 Et on a vu qu'il y avait des paramètres
18:32 qui jouaient beaucoup plus sur le blob que d'autres.
18:34 Et on a travaillé sur deux espèces.
18:36 Et on a vu que certaines espèces étaient aussi
18:38 beaucoup plus sensibles que d'autres.
18:40 Donc c'était assez intéressant. Et les gens ont été touchés.
18:42 Parce qu'ils se sont attachés à leur blob.
18:44 Et ils étaient tristes de le voir souffrir de la température.
18:47 Ils se sont attachés à leur blob et aussi à la démarche scientifique.
18:50 C'est à dire que, vous me disiez ça tout à l'heure,
18:52 on découvre aussi qu'on ne publie pas facilement,
18:55 qu'on ne publie pas trop vite. Il faut vérifier.
18:58 Ça prend beaucoup de temps.
19:00 Comment ça se passe justement une publication scientifique ?
19:02 Là déjà, il fallait récolter toutes les données.
19:05 La récolte des données, ça a pris bien six mois.
19:08 Donc faire l'expérience, ça a pris quatre mois,
19:10 sur une zone de quatre mois.
19:12 Après, on a eu six mois de récolte des données,
19:14 analyse un petit peu. Moi, j'ai mis quatre mois à valider
19:16 les un million de photos.
19:18 Et là, on va rentrer dans l'analyse vraiment statistique
19:20 des données. Ça va reprendre à peu près quatre, cinq mois.
19:23 Puis après, il y a la rédaction.
19:25 Parce que ça se fait en anglais.
19:27 Et en plus, il faut traduire tous les documents
19:29 qu'on a donnés aux participants en anglais.
19:31 Parce qu'une personne qui va corriger notre papier,
19:33 un autre scientifique, il va falloir lui donner
19:35 toutes les clés de comment on a fait ce projet.
19:38 Et ensuite, ça va être envoyé à un éditeur.
19:40 Ça va prendre quelques mois.
19:42 Il va revenir. Et tout ça, on veut le faire avec les citoyens aussi.
19:44 Parce qu'on veut leur montrer comment ça marche.
19:46 Des fois, un éditeur, il va juste refuser votre publication.
19:48 Il va dire, "Non, moi, ça, ça ne m'intéresse pas.
19:50 Allez voir ailleurs."
19:52 Donc on recommence, deux mois, etc.
19:54 Donc ça peut être très long.
19:56 Et c'était l'idée vraiment de montrer comment on fait
19:58 de la science au quotidien.
20:00 Et les difficultés qu'on peut rencontrer, mais aussi les joies.
20:02 Les joies de la découverte.
20:04 Il y a plein de gens qui se sont posé énormément de questions
20:06 sur ce qu'ils ont fait à la maison. Ils ont eu plein d'autres idées.
20:08 Et c'est exactement ça, être scientifique,
20:10 c'est de faire une expérience, voir les résultats
20:12 et se dire, "Ah ben tiens, ça m'ouvre une nouvelle question
20:14 que je ne m'étais pas posée."
20:16 Et puis hop, hop, hop, comme ça, on avance.
20:18 Et ça sera une signature collective, alors ?
20:20 Collective, on sera plus de 4000 auteurs sur la publication.
20:22 C'est la première fois qu'il y a autant d'auteurs
20:24 pour une publication scientifique ? Ou c'est déjà arrivé ?
20:26 C'est déjà arrivé pour des séquençages de génomes.
20:28 Mais c'est des scientifiques.
20:30 Des non-scientifiques, il y en a très peu qui sont auteurs de publications.
20:32 Et je reviens là-dessus parce que c'est vrai que pendant le Covid,
20:36 vous en parliez, on a un peu dit tout et n'importe quoi sur la science.
20:40 Et on a vu des publications, des pré-publications
20:42 qui étaient prises au sérieux.
20:44 Et ça, pour vous, c'est très, c'est très dangereux.
20:46 C'est-à-dire que...
20:48 Oui, parce que la science,
20:50 le secret de la science, c'est le temps.
20:52 Et monter une expérience en un mois,
20:54 comme on vient de le faire,
20:56 ce n'est pas possible en réalité.
20:58 Et parce qu'il faut prendre le temps de la vérification
21:00 et surtout le temps de la réplication d'une expérience.
21:02 On ne peut pas faire une expérience une seule fois.
21:04 Il faut la faire plein de fois pour être sûr du résultat.
21:06 Il faut s'assurer qu'elle est reproductible.
21:08 Et c'est pour ça que nous, dans notre expérience,
21:10 on avait 15 000 volontaires
21:12 et on avait au moins chaque protocole
21:14 qui était fait par 200 volontaires.
21:16 Et chaque volontaire le faisait huit fois
21:18 sur huit blocs différents pour être sûr
21:20 qu'il y avait, que c'était répétable et reproductible
21:22 dans différents endroits,
21:24 à différentes maisons en France.
21:26 Ça peut être aussi une manière de lutter contre les fake news
21:28 qui, avec les réseaux sociaux,
21:30 on s'enferme un peu dans des bulles.
21:32 C'est ça?
21:34 Oui, mais en plus, la science citoyenne,
21:36 l'avantage, c'est que quelqu'un qui a participé
21:38 à la science citoyenne, il va parler,
21:40 il va dire tu sais, les blobs,
21:42 ils sont affectés par le réchauffement climatique.
21:44 Et si moi, la personne, elle me dit ça
21:46 et qu'elle a fait elle-même l'expérience,
21:48 je serais plus enclin à la croire que si elle m'a dit
21:50 j'ai lu dans un article que.
21:52 Et le fait d'être participant, acteur dans la science,
21:54 je pense que ça nous aide à comprendre
21:56 en jeu les vrais défis scientifiques.
21:58 Donc, j'encourage vraiment les gens à participer
22:00 à des projets comme ça de science citoyenne,
22:02 parce que ça vous donne une autre vision
22:04 de ce qu'on lit dans les médias.
22:06 Au CNRS, vous bossez au centre de recherche
22:08 sur la cognition animale. Moi, ça me fait rêver.
22:10 Est ce que vous pouvez nous détailler un petit peu?
22:12 On voit bien cette intelligence
22:14 animale, végétale.
22:16 C'est quoi vos autres projets
22:18 de recherche? Alors actuellement,
22:20 moi, j'ai des projets sur les fourmis aussi.
22:22 Je travaille sur
22:24 la manipulation
22:26 du comportement par les champignons,
22:28 chez les fourmis, par des petits pathogènes.
22:30 C'est une expérience que je fais
22:32 en collaboration avec des collègues.
22:34 Sur le Blob,
22:36 j'ai aussi des expériences avec
22:38 des entreprises.
22:40 Là, c'est sur les réseaux
22:42 de télécommunication, en particulier
22:44 avec l'Appsoft.
22:46 On a aussi travaillé en écotoxicologie,
22:48 parce que le Blob, il a des
22:50 propriétés. Certains
22:52 spécimens de Myxomycète ont
22:54 des propriétés. Ils peuvent accumuler des polluants,
22:56 des métaux lourds qui sont dans les forêts.
22:58 Et on essayait de comprendre s'ils pouvaient
23:00 nous aider à dépolluer
23:02 certains sols. Et nous,
23:04 on avait en particulier étudié
23:06 les nanotubes de carbone qui sont partout
23:08 dans la téléphonie mobile, dans les équipements sportifs
23:10 et qui se retrouvent dans la nature. Et on
23:12 a utilisé le Blob comme un modèle pour
23:14 voir s'ils pouvaient les biodégrader.
23:16 Par exemple, des choses comme ça.
23:18 On a pas mal de projets sur les télécommunications.
23:20 Est-ce que vous pouvez nous redétailler peut-être ?
23:22 Alors, c'est un projet
23:24 que j'ai donc avec l'Appsoft.
23:26 Leur but, à eux, c'était d'essayer de trouver
23:28 des moyens d'optimiser les réseaux de télécommunications.
23:30 Parce qu'on
23:32 parle beaucoup des avions qui polluent
23:34 beaucoup, mais en réalité, ce qui pollue le plus, c'est Internet,
23:36 les terminaux,
23:38 les réseaux de télécommunications.
23:40 Et le but, c'était de trouver des
23:42 chemins moins énergivores, qui seraient moins
23:44 coûteux en énergie. Et pour cela, on utilise
23:46 le Blob. Donc, on met le Blob dans des situations
23:48 avec des villes,
23:50 des data centers, et on lui demande de les connecter.
23:52 Et on crée
23:54 des situations, par exemple, où il y a un data center
23:56 qui est fermé. Quel est le chemin que
23:58 tu nous proposes pour aller vers un autre data center ?
24:00 Et donc,
24:02 après, on traduit
24:04 finalement le comportement du Blob en algorithme.
24:06 Ce sont des petits softwares qui sont basés sur le Blob.
24:08 Et après, ça nous permet de le tester dans d'autres
24:10 situations. Et comme ça, on se fait des petits logiciels
24:12 qui optimisent les réseaux basés sur
24:14 le comportement des Blobs. - Pour revenir à un sujet
24:16 qui est un peu à la mode et qui fait la une du point
24:18 cette semaine, justement, sur... Vous avez dit
24:20 que l'intelligence artificielle vous aidait
24:22 pour analyser des résultats, des photos, par exemple,
24:24 avec le machine learning.
24:26 Est-ce qu'en retour,
24:28 tout ce que vous apprenez
24:30 sur les Blobs, les expériences que vous pourriez
24:32 faire à l'avenir, pourraient servir dans des
24:34 modèles d'intelligence artificielle ? Ou est-ce que
24:36 c'est... - Honnêtement, je ne sais pas.
24:38 Moi, j'utilise au quotidien
24:40 les réseaux de neurones pour
24:42 analyser, en effet, les images.
24:44 Personnellement, je suis une utilisatrice d'intelligence
24:46 artificielle. Est-ce que le Blob
24:48 pourrait nous aider à trouver des nouveaux,
24:50 des nouvelles méthodes ? Pourquoi pas ? Parce que
24:52 finalement, quand on fait du machine
24:54 learning, le machine learning, c'est basé sur le
24:56 fonctionnement du cerveau et donc c'est des réseaux de neurones
24:58 artificiels. Donc on pourrait
25:00 très bien imaginer des réseaux, pas de
25:02 neurones, mais des réseaux basés sur les
25:04 réseaux du Blob pour voir une autre forme
25:06 de fonctionnement, une autre algorithmie
25:08 derrière. Pourquoi pas ? - Et les outils
25:10 que vous utilisez dans l'intelligence artificielle,
25:12 c'est des réseaux de neurones ? C'est
25:14 des réseaux en open source ?
25:16 - Alors moi, ce n'est pas moi directement, parce que moi, je suis
25:18 biologiste. Vous imaginez, je n'ai pas
25:20 plusieurs casquettes. Je travaille avec un mathématicien
25:22 français, mais qui travaille à Arizona State
25:24 University, qui, lui, est
25:26 mathématicien en remande de formation et qui fait ces réseaux de
25:28 neurones-là. On
25:30 les met toujours en open source. Tous nos
25:32 codes sont toujours...
25:34 En tout cas, au CNRS, on appuie
25:36 pour l'open science et donc chaque fois qu'on fait
25:38 des codes, des algorithmes, ils sont
25:40 accompagnés, ils accompagnent la publication scientifique
25:42 et tout le monde peut les consulter.
25:44 Ce n'est pas du tout...
25:46 - Et j'avais une dernière question qui me fait
25:48 aussi beaucoup rêver. C'est toutes les expériences
25:50 autour du Blob dans l'espace.
25:52 Vous aviez dit au départ que ça devait durer
25:54 quelques semaines et en fait, ça a
25:56 mobilisé, ça a fait rêver tout le monde
25:58 pendant... - Oui, il y a eu
26:00 vraiment un effet Blob, on peut dire.
26:02 On a envoyé
26:04 le Blob dans les classes et l'expérience, ça devait durer
26:06 une semaine. On devait observer le comportement du Blob
26:08 dans une petite boîte comme le faisait
26:10 Thomas Pesquet à bord de la station
26:12 internationale. Et voilà, au début,
26:14 ça devait durer une semaine, un octobre.
26:16 Et puis finalement, les enfants, ils ont fait du Blob,
26:18 mais toute l'année.
26:20 Ils ont fait des Blobs en choral,
26:22 ils ont fait des Blobs en pompon, ils ont fait
26:24 des comptes,
26:26 ils ont fait des maths, ils ont fait de tout avec
26:28 le Blob. Tout était vraiment prétexte
26:30 à travailler avec le Blob et ça dure
26:32 encore puisqu'il y a plein d'écoles qui m'ont recontacté
26:34 pour continuer à faire des projets pédagogiques
26:36 sur le Blob.
26:38 Merci beaucoup. Merci Audrey. Bravo pour votre enthousiasme.
26:40 On peut l'applaudir. Et cette passion
26:42 dévorante pour le Blob.
26:44 Évidemment, vous vous en doutez, vous avez
26:46 suscité des questions dans le public. On
26:48 le recommence. Comment le Blob et les fourmis
26:50 cohabitent-ils? Demande Jean-Pierre.
26:52 Alors, ils s'ignorent complètement
26:54 parce que le Blob, il double
26:56 de taille tous les jours. Et
26:58 je me suis dit, on ne peut pas les garder
27:00 tous parce qu'on serait envahis dans mon laboratoire
27:02 et donc on est obligé de jeter le Blob.
27:04 Je me suis dit, un recyclage, je vais le donner à manger aux fourmis.
27:06 Non, ça ne marche pas.
27:08 Dommage. Alors, justement,
27:10 est-ce que le Blob se mange? Si oui, quel goût
27:12 a-t-il? Et plus sérieusement,
27:14 est-ce qu'il pourrait y avoir des usages alimentaires
27:16 du Blob? Demande Anne-Marie. C'est une question qu'on me pose
27:18 toujours, toujours, toujours. Alors, le Blob,
27:20 ce n'est pas toxique, ce n'est pas bon
27:22 parce que quand j'en amène dans les écoles,
27:24 il y en a toujours un qui commence par
27:26 m'en manger un tout petit bout. Et du coup,
27:28 c'est une expérience scientifique. Je demande à quel goût
27:30 ça a. J'ai eu vomi,
27:32 vieilles bananes, yaourts
27:34 périmés. Alors mon préféré,
27:36 ça a le goût de la forêt.
27:38 Mais vous, Audrey, est-ce que vous avez eu le courage de goûter?
27:40 Honnêtement, quand on se mange,
27:42 l'odeur, on n'a pas
27:44 envie de le manger. Là, on n'a pas un odeur
27:46 à mal. Ça veut dire quoi? Ça ne sent pas.
27:48 C'est pas ça. Vous devez
27:50 trouver une analogie. Ça sent quoi?
27:52 Ce n'est pas le sous-bois, ce n'est pas l'humus.
27:54 Il y a un côté un peu, oui, champignon
27:56 un peu, un peu côté sous-bois et
27:58 les usages alimentaires. Alors, le Blob, ça coûte
28:00 cher en avoine, donc il vaut mieux manger l'avoine
28:02 directement que le Blob.
28:04 Françoise,
28:06 le Blob peut-il avoir des vertus curatrices?
28:08 Alors, il y a les myxomycètes en général,
28:10 donc la grande famille des Blobs.
28:12 Quand on trouve une nouvelle espèce,
28:14 c'est souvent, on fait des extraits et on
28:16 va tester ces extraits sur des
28:18 croissances, que ce soit bactériennes, par exemple
28:20 Echerichia coli. Donc c'est actif contre Echerichia coli.
28:22 Ceux qui ont eu des infections urinaires
28:24 connaissent peut-être Echerichia coli.
28:26 Il y a eu sur des croissances aussi de bactéries
28:28 qui sont responsables de la gastroenterite.
28:30 Il y a eu sur des maladies des plantes,
28:32 sur les cellules tumorales aussi.
28:34 Ça a été testé sur différents cancers,
28:36 cancers de l'utérus,
28:38 tumeurs du cerveau. Et il y a des
28:40 principes actifs dans les myxomycètes
28:42 contre ces cellules-là, mais pour l'instant,
28:44 on n'a pas identifié en fait les composés
28:46 qui sont actifs, mais c'est en cours.
28:48 Hier, il y avait un monsieur,
28:50 en l'espèce Gaspar König,
28:52 qui nous a parlé des vers de terre
28:54 et du lombricompostage. Vous avez parlé
28:56 du blob qui aiderait à recycler
28:58 nos déchets ou en tout cas
29:00 à stocker des polluants.
29:02 Vous y voyez des parallèles?
29:04 Alors, les vers sont
29:06 quand même beaucoup plus efficaces que le blob parce que
29:08 des fois, je dis aux gens quand ils ont
29:10 trop de blobs de le mettre dans le compost.
29:12 Et en fait, finalement, c'est catastrophique
29:14 parce que le blob ne fait pas le travail
29:16 du ver. Et le ver mange le blob.
29:18 Du coup, il ne fait plus son travail.
29:20 Donc, ce n'est pas une bonne idée.
29:22 Mais bon, par contre,
29:24 sur les polluants, il peut accumuler.
29:26 C'est plus un accumulateur.
29:28 Et ça, ça a été découvert en Finlande
29:30 et en Russie. Ils ont donc prélevé des blocs
29:32 dans la nature et ils ont regardé qu'ils
29:34 accumulaient du manganèse, du zinc
29:36 et des quantités qui
29:38 normalement ne sont pas viables pour une cellule.
29:40 Mais il ne va pas les désintégrer, il les accumule.
29:42 Pour l'instant, on a vu juste de l'accumulation.
29:44 Comment ça se fait qu'il n'en souffre pas plus que ça?
29:46 Est ce que ça entrave son développement? Est ce que ça entrave
29:48 ses capacités à trouver son chemin?
29:50 Ça, on ne sait pas du tout parce que c'est vraiment des observations
29:52 qui ont été faites. Les gens n'ont pas été beaucoup plus loin.
29:54 On ne sait même pas s'ils sont dans la cellule, s'ils sont stockés
29:56 par exemple à part pour justement pas
29:58 porter préjudice
30:00 à la cellule. On ne sait pas du tout.
30:02 C'est vraiment juste des observations.
30:04 Est ce que vous avez essayé
30:06 de modéliser le globe?
30:08 Moi, personnellement, non. Mais il y a
30:10 beaucoup de scientifiques qui le font.
30:12 Et donc, par exemple, l'Appsoft sait ce qu'ils font.
30:14 Il y a beaucoup de japonais
30:16 en fait parce que le plus grand
30:18 nombre de scientifiques sur le globe est au Japon.
30:20 C'est une culture parce que pour la petite histoire,
30:22 l'empereur Hirohito
30:24 était un fan des myxomissètes.
30:26 Il a écrit des livres. Il a donné des noms
30:28 à des espèces.
30:30 Donc, il a beaucoup
30:32 encouragé la recherche sur les myxomissètes. Et donc,
30:34 historiquement, il y a beaucoup de japonais qui travaillent sur ces organismes
30:36 là et beaucoup de physiciens. Et donc,
30:38 ils ont modélisé le comportement du globe.
30:40 Comment on dit globe en japonais?
30:42 Je ne me rappelle plus. Je l'ai su, je l'ai su,
30:44 mais je ne me rappelle plus.
30:46 Selon vos résultats, quels usages dans notre quotidien
30:48 de cette étude sur le globe sont possibles?
30:50 L'étude était plus pour étudier
30:52 l'impact du changement climatique sur le globe.
30:54 Mais est ce qu'il y a d'autres résultats que vous pourriez
30:56 exploiter? Alors, les
30:58 résultats sur la régénération,
31:00 j'imagine que ça pourrait intéresser beaucoup
31:02 de monde. La régénération
31:04 cellulaire parce que le globe, c'est une cellule
31:06 qui n'est pas animale, mais c'est une cellule qui est très
31:08 proche, qui se ressemble
31:10 beaucoup quand on regarde les caractéristiques
31:12 de la cellule du globe. Elle est très proche
31:14 d'une cellule animale.
31:16 J'imagine que si on trouvait ses secrets
31:18 de la régénération, je pense
31:20 que les gens aimeraient transférer ce secret
31:22 peut être sur d'autres types cellulaires.
31:24 Donc, une question un petit peu corollaire.
31:26 Est ce que des industriels s'intéressent à
31:28 ces travaux ou à vos travaux pour
31:30 des usages du quotidien? Oui, j'ai été approchée, mais pas
31:32 vraiment côté médecine, mais côté
31:34 cosmétique.
31:36 J'ai été approchée par des boîtes de cosmétiques.
31:38 C'est à dire que ça peut faire une belle peau.
31:40 Le globe, si on se l'applique régulièrement, vous ne l'avez pas essayé.
31:42 Ah non, ça, j'essaierai pas. Il y a un certain
31:44 manque de courage scientifique et dans l'expérimentation.
31:46 André Dussutour, il faut y aller.
31:48 Vous ne l'avez pas mangé, vous ne l'êtes pas appliqué sur le visage.
31:50 Qu'est ce qui se passe?
31:52 Les respecte trop.
31:54 Non, c'est ça. Je n'ai pas envie d'avoir du globe sur le visage.
31:56 Mais voilà. Non, oui, on a été approché par des
31:58 boîtes de cosmétiques. Alors une question
32:00 d'association. Ah oui, pardon. De
32:02 quel type d'apprentissage est il capable? Vous l'avez
32:04 testé. C'est pour aller un peu plus loin. Vous en avez déjà parlé.
32:06 Mais alors, c'est ce qu'on appelle
32:08 l'habituation. C'est
32:10 de l'apprentissage. C'est l'apprentissage le plus
32:12 simple. C'est apprendre à ignorer
32:14 quelque chose qui nous gêne,
32:16 mais qui n'est pas létal.
32:18 C'est à dire le blob, il est capable d'apprendre à
32:20 ignorer des substances chimiques
32:22 qui le repousserait habituellement.
32:24 Donc, c'est ce type d'apprentissage. C'est vraiment
32:26 la forme d'apprentissage la plus simple. On n'a
32:28 pas réussi à faire ce qu'on
32:30 appelle par exemple des conditionnements pavloviens,
32:32 c'est à dire associer une source de nourriture
32:34 avec une odeur.
32:36 Ça, on n'a pas réussi encore chez le blob.
32:38 Parce qu'il n'y a pas de mémoire dans le blob.
32:40 Je pense qu'on n'a surtout pas trouvé
32:42 le dispositif expérimental
32:44 parce que tous les
32:46 apprentissages sont faits chez les animaux.
32:48 Un animal,
32:50 c'est rapide finalement dans ses mouvements.
32:52 Le blob, pas du tout. Et donc, il faut
32:54 repenser les expériences pour se mettre
32:56 entre guillemets dans la tête d'un blob.
32:58 Pour voir qu'est-ce qui serait pertinent
33:00 déjà comme stimuli dans l'environnement.
33:02 Parce que, par exemple,
33:04 allumer une lumière, parce qu'on
33:06 l'a fait chez les animaux, ça n'a aucun intérêt chez le blob.
33:08 Parce que voilà, il ne voit pas les couleurs.
33:10 Donc voilà, il faut repenser
33:12 les expériences pour un
33:14 organisme comme le blob. Donc ça demande
33:16 un petit peu de...
33:18 Ce que vous nous expliquiez
33:20 tout à l'heure, c'est la transmission
33:22 de l'apprentissage et de la connaissance.
33:24 Oui, ça, c'est une chose qui est unique au blob.
33:26 Parce que le blob peut fusionner
33:28 avec ses congénères qui sont génétiquement identiques.
33:30 Et donc, il peut se
33:32 transmettre déjà sa jeunesse,
33:34 mais aussi des apprentissages, des informations.
33:36 Alors là, normalement, le temps
33:38 des questions est terminé, mais je vous pose une question personnelle.
33:40 C'est par rapport
33:42 à la domination du monde et au blob.
33:44 Vous savez sans doute qu'il y a un jeu vidéo qui a donné
33:46 naissance à une série qui s'appelle "The last of us".
33:48 Oui. Et en tant que spécialiste
33:50 des champignons, l'idée, c'était un champignon
33:52 qui infestait les humains et qui les faisait
33:54 disparaître. C'est possible avec le blob
33:56 ou il est super gentil ? Non, parce que le blob
33:58 n'est pas pathogène, n'est pas du tout parasite.
34:00 Parce que dans la série "The last of us", c'est Cordyceps.
34:02 C'est un champignon qui est pathogène
34:04 et qui manipule le comportement
34:06 des fourmis habituellement et d'autres insectes.
34:08 Mais le blob, il n'y a aucun blob
34:10 qui soit parasite. Le blob est cool, mais le Cordyceps
34:12 en revend ? Il est un bisounours des forêts, le blob.
34:14 Et le Cordyceps, il est plus violent ?
34:16 Cordyceps, il n'attaque que les insectes
34:18 parce qu'il ne peut pas s'attaquer
34:20 à des organismes à son chaud
34:22 pour l'instant.
34:24 On va terminer là-dessus. Merci Audrey.
34:26 Merci. Très rassurant ce "pour l'instant"
34:28 final. Et je rappelle que vous êtes
34:30 en dédicace, c'est juste derrière.
34:32 Vous m'avez juste un petit peu fait peur à la fin.
34:34 On se retrouve dans quelques instants
34:36 pour la question "l'énergie pas chère,
34:38 c'est fini ?" Point d'interrogation. A tout de suite.
34:40 [Musique]
35:09 [SILENCE]