• l’année dernière
Transcription
00:00:00 Bienvenue dans cette nouvelle interview en studio du Média en 4/4/2.
00:00:09 Aujourd'hui, je reçois Marie-Estelle Dupont.
00:00:11 Bonjour.
00:00:12 Bonjour Kate.
00:00:13 Bienvenue et merci d'avoir accepté notre invitation.
00:00:16 Je suis vraiment ravie de vous retrouver pour la seconde fois.
00:00:19 Merci, mais moi également.
00:00:20 Merci beaucoup.
00:00:21 Alors, je rappelle rapidement que vous êtes psychologue clinicienne spécialisée en psychopathologie
00:00:26 et neuropsychologie.
00:00:28 Vous êtes également auteur de plusieurs ouvrages et on vous reçoit aujourd'hui pour
00:00:32 la parution de votre dernier livre qui s'intitule "Être parent en temps de crise.
00:00:37 Comment restaurer l'équilibre psychique de nos enfants ?" paru aux éditions Guy
00:00:41 Trédaniel.
00:00:42 Alors, c'est quoi pour vous "Être parent en temps de crise", comment le définiriez-vous?
00:00:47 Alors, en fait, l'idée de ce livre est venue d'un double constat, c'est-à-dire que pendant
00:00:53 la crise sanitaire, on a assisté à une vague pédopsychiatrique très importante et finalement
00:00:57 la santé mentale et notamment la santé mentale des jeunes est devenue une urgence de santé
00:01:02 publique après que la question même du Covid se soit atténuée.
00:01:08 Et donc, moi, je me suis interrogée sur comment donner des outils, après avoir été un peu
00:01:14 une lanceuse d'alerte sur la santé mentale des jeunes, comment donner des outils aux
00:01:17 parents pour les aider à redonner un équilibre et des repères à leurs enfants, parce que
00:01:25 tous les repères ont volé en éclat.
00:01:28 Pour tous les jeunes qui étaient en train de se construire, notamment sur le plan identitaire,
00:01:31 c'était évidemment extrêmement compliqué de continuer leur croissance.
00:01:37 Et puis, le deuxième constat, c'était que finalement, quand on dézoommait, bien avant
00:01:42 le Covid, depuis 40 ans dans la société, l'autorité parentale était réduite à
00:01:45 peau de chagrin du fait d'une démocratie qui est en train de devenir une bureaucratie
00:01:50 obèse, où la notion de famille, la notion d'autorité parentale, la notion de cadre
00:01:59 n'a plus tellement de sens, puisque l'État, de manière pernicieuse, est en train de prendre
00:02:03 en charge toute l'intimité de la vie des gens, en même temps qu'il échoue de manière
00:02:08 patentée sur leur égalien, et qu'il est en train de nous expliquer façon Big Nounou
00:02:13 comment manger, comment penser, comment s'habiller, etc.
00:02:16 Et donc, je me suis dit, finalement, le Covid a été l'aboutissement plus que le début
00:02:22 de quelque chose.
00:02:23 Alors, c'est peut-être aussi le début de quelque chose, mais en tout cas, c'est
00:02:24 l'aboutissement d'un processus à l'œuvre dans la société.
00:02:26 Il faut que j'aide les parents à se le représenter, qu'on lève le nez du guidon,
00:02:30 qu'on ait un peu la big picture.
00:02:32 Et puis, une fois ce constat préoccupant, puisque je fais aussi un bilan épidémiologique
00:02:38 de la santé mentale de la jeunesse en France aujourd'hui, une fois ce constat établi,
00:02:45 je ne peux pas laisser les parents avec le constat de quelque chose d'anxiogène sans
00:02:49 leur donner des clés.
00:02:50 C'est mon métier.
00:02:51 Et puis, moi, je l'ai vécu aussi en tant que maman, cette crise, évidemment, puisque
00:02:54 j'ai trois garçons.
00:02:55 Donc, je donne aussi des clés.
00:02:58 J'avais vraiment envie de leur dire, il ne faut pas se raconter que le monde ne va
00:03:02 pas nous aider à éduquer nos enfants, le monde extérieur.
00:03:04 Par contre, nous, voilà tout ce qu'on peut faire.
00:03:07 Et en fait, je crois que le message du livre, c'est aussi, si nous, déjà, en tant que
00:03:10 parents, on fait tout ce qui est encore en notre pouvoir, malgré la réduction des libertés,
00:03:13 c'est quand même beaucoup, beaucoup mieux que si on ne le fait pas parce qu'on est découragé.
00:03:19 Voilà.
00:03:20 Et donc, je donne aussi des clés dans la deuxième partie et je fais des rappels sur
00:03:22 le développement de l'enfant.
00:03:23 C'est grâce à vous, si nous continuons notre combat, seuls vos dons et vos abonnements
00:03:30 depuis cette rentrée sont notre unique soutien.
00:03:32 Alors, merci à tous et merci de votre fidélité.
00:03:35 Et on va y revenir en plus en profondeur sur votre livre.
00:03:42 Alors, vous revenez surtout sur la période du Covid, puisque c'est ce qui vous a inspiré,
00:03:45 mais aussi révolté, surtout.
00:03:47 Tout commence le 16 mars 2020 avec ce que vous nommez la scène traumatique, d'où découla,
00:03:53 je cite, une réorganisation désorganisante de tous les repères sociaux et temporels.
00:03:58 Pouvez-vous nous expliquer ?
00:04:00 Oui, en fait, je crois que c'est très important pour que les parents, à la fois, comprennent
00:04:05 les enjeux profonds de ce qui s'est passé et se déculpabilisent, de revenir sur la notion
00:04:13 de traumatisme.
00:04:14 En fait, il y a eu une sidération et dans le livre, j'explique vraiment ce que c'est,
00:04:19 sur le plan neurobiologique, que la sidération et le traumatisme.
00:04:22 Évidemment, l'actualité nous donne des exemples tous les jours qui illustrent le
00:04:28 fait que le trauma ne s'est pas joué uniquement, effectivement, au moment du Covid, comme
00:04:34 vous le disiez.
00:04:35 En fait, il y a eu un trauma, c'est-à-dire que la vie s'est arrêtée.
00:04:40 Le trauma, c'est par définition un événement qui vient faire effraction dans les limites
00:04:44 psychiques ou physiques d'un individu.
00:04:47 Quand il y a un trauma, l'idée de mort est convoquée, que ce soit une mort symbolique,
00:04:53 sociale ou physique.
00:04:54 Le trauma peut concerner la personne qui est victime du trauma, mais elle peut aussi concerner
00:04:59 la personne qui assiste en étant impuissante au trauma.
00:05:01 On sait bien qu'on traumatise des gens en leur faisant visualiser des scènes de torture,
00:05:05 par exemple.
00:05:06 C'est-à-dire que par les neurones miroirs, le trauma s'inscrit aussi chez celui qui
00:05:08 est témoin de ce qui est traumatique.
00:05:11 J'explique dans le livre que le moment où tout s'arrête, le 16 mars 2020, où les
00:05:17 restaurateurs ont quatre heures pour licencier le personnel, vider les congélateurs, on
00:05:21 doit signer une attestation pour faire sortir le chien, etc., etc., tous les repères de
00:05:26 l'être humain volent en éclats.
00:05:28 Un être humain n'a pas besoin de beaucoup de choses pour aller bien, mais ce dont il
00:05:32 a besoin n'est pas négociable, et en l'occurrence il a besoin d'avoir des repères et d'avoir
00:05:39 la possibilité de se projeter avec un sentiment à minima de contrôle sur son existence.
00:05:43 Évidemment on n'est pas tout puissant, on avait d'ailleurs peut-être un peu l'illusion
00:05:46 de l'être quand le Covid est arrivé, mais à minima un sentiment de contrôle.
00:05:50 Et en fait tout ça vole en éclats.
00:05:52 On n'avait plus de contrôle, on n'avait plus de repères, on n'avait pas la possibilité
00:05:55 de se projeter, et on n'avait pas de temporalité dans la suspension de la temporalité.
00:06:00 C'est-à-dire qu'on était confinés, mais je ne sais pas si vous vous rappelez ce sketch
00:06:03 d'Arnaud Demange qui disait « ça fait 52 semaines que ça fait 4 semaines », c'est-à-dire
00:06:06 que c'était sans cesse, on n'avait pas un début, un milieu, une fin, donc il n'y
00:06:10 avait pas de narration possible.
00:06:11 Et finalement pour beaucoup de gens, alors on me répond toujours oui, mais il y a des
00:06:15 gens pour qui le confinement était une formidable opportunité de se recentrer sur leur famille,
00:06:19 d'accord, mais en fait ça c'est un peu l'exception qui confirme la règle, et
00:06:23 c'est encore mieux pour ces personnes-là qu'elles aient pu transformer.
00:06:25 Il n'empêche que pour beaucoup de gens ça a été sidérant, que beaucoup de familles
00:06:29 étaient dans des équilibres déjà précaires, et que c'est venu casser cet équilibre,
00:06:33 faire redécompenser des gens qui étaient fragiles, et puis surtout faire décompenser
00:06:39 des gens qui n'avaient pas d'antécédents psychiatriques.
00:06:41 Et donc il y a une réorganisation désorganisante, c'est-à-dire qu'on va réorganiser la
00:06:46 santé autour du chiffre de circulation virale, on va réorganiser la vie autour de l'évitement
00:06:53 de la contamination, et désorganiser tout ce qui structurait la vie, c'est-à-dire
00:06:59 des lieux dans la cité, l'école n'est pas la maison, la maison n'est pas l'hôpital,
00:07:03 des places, un père n'est pas un enseignant, un enseignant n'est pas un policier, un
00:07:07 policier n'est pas un infirmier, et un restaurateur n'est pas un policier non plus,
00:07:12 et un médecin n'est pas un politique, tout ça va voler en éclats, et donc quand il
00:07:17 y a une confusion des places et une inversion des valeurs, il y a un trauma collectif.
00:07:21 J'explique dans le livre comment de ce trauma découle une sidération, qui fait que les
00:07:26 gens pour la grande majorité ne vont pas être en capacité de penser ce qui se passe,
00:07:31 parce qu'ils vont être sous l'effet de la peur, vraiment du cortisol cérébral,
00:07:35 des hormones de stress, ils ne vont plus pouvoir penser les choses, et quel impact quand les
00:07:40 parents sont eux-mêmes sidérés, cela peut avoir sur les enfants, et comment les enfants
00:07:45 vont se suradapter.
00:07:46 D'ailleurs, c'est très intéressant de voir que les adultes se sont mis à aller
00:07:51 mal avant les enfants, parce que les enfants tiennent bon, parce qu'ils ne peuvent pas
00:07:55 se permettre d'aller mal si papa et maman vont mal, donc il faut vraiment qu'ils soient
00:07:58 arrivés au bout de leurs ressources pour aller mal, et c'est pour ça qu'on a vu
00:08:01 les enfants aller mal après les adultes.
00:08:03 Tout ça, je le réexplique dans le livre.
00:08:06 Justement, vous revenez sur cette période que vous qualifiez de traumatisante, associée
00:08:11 à de la maltraitance en ce qui concerne les enfants, et vous racontez, vous revenez sur
00:08:15 beaucoup d'anecdotes qui vous sont arrivées, votre expérience personnelle, et notamment
00:08:20 vous dites que beaucoup vous disaient « mais tout va bien, vous exagérez, ne se plaigne
00:08:24 pas » en parlant des enfants, vous avez même entendu « ils sont contents de ne pas aller
00:08:29 à l'école, et le masque à leur âge, c'est un jeu ». Qu'est-ce que ça vous
00:08:34 a fait ?
00:08:35 Oui, en fait, je crois, je le dis dans le livre, que si j'étais venue d'une autre
00:08:39 planète, j'aurais eu des crises de fourrure, mais comme j'étais prise dans cette humanité
00:08:47 qui était complètement perdue, j'avais plutôt des crises d'effroi.
00:08:50 De voir ces petits enfants qui me disaient en consultation « je ne veux pas embrasser
00:08:55 ma maman parce que quand on s'embrasse, on se touche », « j'avais envie de vomir
00:09:00 dans mon masque et la maîtresse m'a dit d'aller aux toilettes si je voulais respirer
00:09:03 », en fait, là, j'ai trouvé qu'il y avait vraiment de la maltraitance.
00:09:08 Je crois qu'on peut parler de maltraitance à partir du moment où on met l'enfant
00:09:13 dans une injonction paradoxale, où on lui interdit de faire ce dont il a besoin pour
00:09:19 être un enfant en bonne santé physique et mentale.
00:09:22 Ce qui est terrible, c'est que l'OMS elle-même décrit bien la santé comme un
00:09:27 état global d'équilibre, à la fois psychique, physique et social, et que le déni des besoins
00:09:33 pédiatriques, le déni des besoins de l'enfant a été absolument faramuné.
00:09:37 J'ai l'impression que certains médecins avaient simplement séché leur cours de,
00:09:41 même pas de neurologie, mais de pédiatrie, c'est-à-dire que les besoins fondamentaux
00:09:45 de l'enfant, et c'est ça être parentante grise, c'est comment je tiens dans un monde
00:09:51 qui a inversé les rôles, comment je tiens bon sur les besoins fondamentaux de mon petit,
00:09:56 et comment je n'oublie pas que c'est moi sa figure secourable, c'est moi qui élève
00:10:01 l'enfant, ce n'est pas l'enfant qui me soutient.
00:10:04 En parlant de ça, il y a cette anecdote qui est très touchante dans votre livre, de cette
00:10:10 petite fille âgée de 9 ans qui va prendre l'ordinateur de sa maman pour vous envoyer
00:10:15 un message.
00:10:16 Oui, en fait, je crois qu'elle regardait une chaîne où je passais avec sa maman,
00:10:22 et elle a demandé à sa maman si elle pouvait écrire à la dame qui parlait des enfants,
00:10:26 et elle m'a envoyé un message très gentil en me disant « merci, parce que le masque
00:10:30 à la cantine, vous, vous avez compris que c'était difficile ». Et c'est vrai que
00:10:34 je crois qu'on est vraiment dans une société qui a délaissé la proie du vivant pour l'ombre
00:10:41 des algorithmes, comme le disait très bien Roland Gori, et qu'on était complètement
00:10:47 déconnectés.
00:10:48 La réalité clinique, nous, on l'a vu dès le début, mais tant qu'on n'avait pas
00:10:52 les chiffres, tant qu'on n'avait pas les passages aux urgences de Santé publique
00:10:56 France pour gestes suicidaires, tant qu'on n'avait pas la preuve que les aires cérébrales
00:11:01 étaient réduites parce qu'on a fini par faire des études longitudinales sur les bébés
00:11:04 qui étaient nés pendant le confinement, tout ça n'existait pas.
00:11:06 Alors que finalement, si on avait quand même un peu écouté les cliniciens, et notamment
00:11:10 la Société française de pédiatrie qui a quand même tiré la sonnette d'alarme
00:11:13 en disant que oui, les enfants se remettent, mais à quel prix en fait ? Et en ayant laissé
00:11:18 de côté beaucoup de zones de leur développement et de leur croissance, aujourd'hui on aurait
00:11:23 moins de dégâts, et si on a une vision strictement économique des choses, on ferait aussi des
00:11:28 économies en termes de santé publique si on avait moins d'enfants dans un état psychiatrique.
00:11:33 Même si on voit les choses que de cette manière absolument cynique et sordide, ça n'est
00:11:38 pas intelligent la manière dont on s'y est pris.
00:11:40 Et ce que je trouve terrible, c'est qu'il n'y a aucun mea culpa aujourd'hui.
00:11:44 Nous, on galère à rattraper des gens qui ont décompensé des anorexies parce qu'ils
00:11:48 avaient 14 ans, qu'ils étaient confinés avec un parent malade psychiatriquement qui
00:11:51 ne prenait plus ses médicaments. On est toujours en train d'essayer de les rattraper. Alors
00:11:55 oui, ça fait deux ans que Jean Castex a rouvert les barres, mais les gens qui se sont mis
00:11:59 à aller mal, ils ne vont pas remonter dans le train de la vie simplement parce qu'on
00:12:02 dit « c'est fini » et qu'on met le zoom de l'actualité sur autre chose.
00:12:05 C'est aussi un peu l'objet du livre, c'est de dire « aujourd'hui, comment on fait
00:12:13 avec ces enfants qui sont fragilisés ? » Certains vont très bien, heureusement. « Et comment
00:12:18 on fait en tant que parents pour rester des adultes verticaux et debout dans un monde
00:12:22 qui nous demande tous les jours de nous coucher ? »
00:12:24 Alors justement, comment qualifieriez-vous la société, les politiques, les institutions
00:12:30 qui sont restées passives face aux alertes, face à la détresse ?
00:12:35 Je crois que là, on touche à la question sur laquelle je reviens dans le début du
00:12:41 livre, qui est en fait la question de « que veut encore dire le mot « démocratie » aujourd'hui
00:12:47 dans la société transhumaniste post-moderne ? »
00:12:51 Donc, Bernanos décrivait déjà, il y a cinquante ans, de façon très prophétique, les impasses,
00:12:57 puisqu'il disait « on va se diriger vers un monde tellement déspiritualisé, où finalement
00:13:04 on n'a de valeur que ce qui a un prix, alors qu'évidemment, ce qui a de la valeur, c'est
00:13:07 ce qui n'a pas de prix, où le lien n'aura plus d'importance. »
00:13:11 Il y avait Bernanos, mais il y avait aussi Samy Ali, qui est beaucoup moins connu. Samy
00:13:16 Ali, c'est celui qui a amené la pensée psychosomatique en France, et qui disait qu'il
00:13:21 y a une crise du lien, une crise du lien affectif et de l'imaginaire, et donc on est dans
00:13:25 une pensée tellement opératoire, tellement factuelle, tellement chiffrée, tellement
00:13:30 numérique, que le réel est fragmenté, et il est tellement fragmenté que finalement,
00:13:36 on perd de vue le sens même de l'existence. C'est vraiment ça qui s'est joué pendant
00:13:43 la crise, c'est-à-dire que l'imaginaire, la créativité, le vivant, le lien, la douceur,
00:13:49 le bon sens, la possibilité de prendre dans ses bras une personne âgée qui est en train
00:13:53 de mourir de tristesse, même si elle ne mort pas du Covid, c'était criminalisé. Et je
00:13:59 crois que le Covid a illustré à quel point l'offre politique avait basculé dans une
00:14:05 pensée extrêmement binaire. C'est-à-dire que si vous n'étiez pas Covid-au-flippé,
00:14:14 vous étiez un salaud sartrien, vous étiez dangereux, c'était dangereux de penser.
00:14:18 Évidemment c'est inquiétant quand on est psychologue d'entendre que c'est dangereux
00:14:21 de penser, parce que ça veut dire qu'on va faire une société de robots impulsifs,
00:14:26 impulsifs et soumis. D'ailleurs dans le livre je dis, mais je crois que… Enfin,
00:14:29 il y a des gens, si on leur avait dit qu'il fallait marcher dans la rue avec un poule
00:14:33 sur la tête pour éviter le Covid, ils se seraient achetés un poule. C'est-à-dire
00:14:36 qu'on a vraiment fait rentrer depuis trente, quarante ans, avec la baisse de l'instruction
00:14:41 à l'école notamment, et puis une société du divertissement, on le voit avec l'hypersexualisation
00:14:48 du débat public aussi, on a vraiment fait rentrer dans les esprits l'idée que penser
00:14:54 était totalement superflue. Et quand il y a une régression à une pensée binaire,
00:15:01 la société ne peut qu'être violente, mais elle ne peut aussi qu'être avachie
00:15:06 finalement. Et donc là je crois qu'il y a une urgence de pensée qui nous saute à
00:15:11 la figure, à nous les parents.
00:15:13 Alors vous avez évoqué la santé mentale, on va en parler justement, quelles sont les
00:15:17 conséquences qu'on peut observer maintenant avec trois ans de recul, chez les enfants
00:15:22 notamment ?
00:15:23 Alors chez les enfants, malheureusement on voit qu'il y a chez les tout-petits des
00:15:30 retards de parole, puisque les bébés qui sont nés pendant le Covid ont eu pour la
00:15:38 plupart, pour la très grande majorité, affaire à des adultes masqués, donc on sait bien
00:15:43 que le petit apprend à parler par imitation des mouvements des lèvres. Donc il y a des
00:15:48 retards de parole, qui dit retards de parole dit que déjà le psychisme pour se mettre
00:15:52 en route, bon courage quoi, parce que la pensée se greffe sur les mots. Donc il y a des retards
00:16:00 de parole, il y a des dépressions essentielles du nourrisson, c'est-à-dire que ce sont
00:16:07 des enfants qui ont été moins touchés, moins caressés, moins cajolés, parce que
00:16:12 les parents pouvaient être médecins et donc avaient peur de ramener le Covid à la maison,
00:16:15 etc. Ou alors tout simplement ils avaient peur de ce qu'ils entendaient, de toute
00:16:19 la liturgie Covidienne qu'ils entendaient en boucle à la télévision. Donc ce sont
00:16:24 des enfants qui ont été moins stimulés, moins d'interaction sociale, donc on sait
00:16:27 que leurs erreurs cérébrales liées aux compétences sociales et notamment à l'empathie
00:16:32 sont réduites par rapport à des bébés nés avant le Covid. Donc ça, ça fait des
00:16:37 enfants dans la cour de maternelle aujourd'hui qui sont moins habiles socialement, avec déjà
00:16:42 des comportements violents ou dépressifs de retrait. Qu'on retrouve aussi chez les
00:16:47 adolescents. Là en novembre je vais à un colloque sur justement ce syndrome de l'isolement
00:16:53 et du repli chez les adolescents. C'est vraiment la génération la plus repliée que nous,
00:16:57 on a vu les cliniciens la plus repliée sur elle-même. Chez les enfants, il y a eu beaucoup
00:17:03 de phobies scolaires, chez les enfants d'âge primaire, beaucoup de phobies scolaires, beaucoup
00:17:07 de TOC, une construction de l'image du corps très faussée, avec des teintes un peu mélancoliques,
00:17:14 c'est-à-dire en fait le corps ne fonctionne pas, qu'est-ce qui va se passer si je touche
00:17:17 l'autre, etc. Alors que quand on se joue, quand on se bouscule, oui, on se touche. Et
00:17:25 puis beaucoup de troubles alimentaires, une explosion des troubles alimentaires et des
00:17:31 idées suicidaires à un âge où on n'a pas cette notion du suicide qui n'arrive
00:17:34 qu'à l'adolescence. Et en général, dans un contexte soit de harcèlement, soit de
00:17:40 maltraitance à la maison, ou d'abus sexuels, l'idée suicidaire chez l'adolescent n'est
00:17:47 que exceptionnellement liée à des pathologies mentales, mais qui touche quand même une
00:17:52 minorité d'adolescents à des pathologies mentales graves, comme la schizophrénie,
00:17:58 la bipolarité. En général, quand il y a des idées suicidaires, c'est qu'il y a
00:18:01 un événement contextuel. Et là, ça a complètement explosé, il y a eu quand même
00:18:05 299% d'augmentation chez les moins de 15 ans d'idées suicidaires, de tentatives
00:18:09 de suicide et de suicides par rapport à avant la crise. Voilà, donc tout un cortège de
00:18:16 symptômes psychiques, de manifestations psychosomatiques aussi, et puis une augmentation très inquiétante
00:18:24 des addictions. Donc globalement, une génération qui est à la fois plus déprimée et plus
00:18:28 violente, mais bon, ça je crois qu'il n'y a pas besoin d'avoir un master de psychologie
00:18:32 pour le comprendre. Alors, nous on fait le boulot, on est submergés, on fait le boulot,
00:18:37 on arrive à en récupérer certains. Le problème, c'est que parfois, il y a un manque d'offres
00:18:43 qui fait qu'ils sont sur-médiqués pour compenser les symptômes, et le fait d'être
00:18:48 sur-médiqué à cet âge-là n'est pas sans conséquences grave. Donc ça aussi,
00:18:53 c'est un problème. C'est quand on a une augmentation de la demande avec une diminution
00:18:58 de l'offre. On n'a que 35 professeurs de pédopsychiatrie en France, et que très
00:19:05 souvent les médicaments vont remplacer la thérapie. Voilà, donc un constat clinique
00:19:10 assez inquiétant chez les jeunes, mais il y a aussi des jeunes qui vont bien, qui ont
00:19:12 une grande résilience, qui ont un environnement familial qui arrive à faire la différence,
00:19:17 et c'est pour ça que moi j'ai envie d'aider les parents, parce que je sais que si j'aide
00:19:19 les parents, j'aide les enfants. Alors vous-même, vous avez accouché de jumeaux
00:19:24 pendant la période Covid. Comment vous avez abordé cette période, justement ?
00:19:29 Ah, je n'ai pas abordé, j'ai pris dans la tronche. Je suis rentrée avec mes deux
00:19:33 bébés à la maison, confinée avec un enfant qui était encore en primaire et qui avait
00:19:37 l'école à la maison. Et la chance, et je ne remercierai jamais assez cet établissement
00:19:42 scolaire d'avoir affaire à une maîtresse très intelligente qui faisait de son mieux
00:19:48 et qui avait des circulaires différents tous les dimanche soir et qui arrivait à quand
00:19:53 même maintenir le cap pour les enfants. Comment j'ai abordé ? J'ai jonglé entre
00:19:59 les biberons, les nuits blanches, les plateaux télé, les patients et puis mon enfant. Je
00:20:04 crois qu'on a tous improvisé avec nos ressources propres. Après, la peur n'a pas pris sur
00:20:11 moi, mais je pense qu'elle n'a pas pris parce que moi j'ai connu la maladie grave
00:20:15 plus jeune, donc du coup la peur de la maladie, ce n'était pas quelque chose d'inconnu
00:20:20 pour moi. J'avais plutôt peur pour les autres des conséquences que ça pouvait avoir. Je
00:20:27 me souviens à la maternité que les femmes qui accouchaient de leur premier enfant et
00:20:32 qui n'avaient pas le papa, qui accouchaient parfois avec un masque, étaient vraiment
00:20:36 très en détresse. Ça, ça m'a fait vraiment mal au cœur parce que moi j'étais confinée
00:20:40 dans ma chambre avec deux bébés et j'entendais des mamans dans d'autres chambres qui pleuraient.
00:20:44 Je ne pouvais évidemment rien faire parce que déjà j'avais deux bébés et donc
00:20:48 j'étais sur le pont H24, mais j'avais vraiment mal au cœur de me dire qu'on avait
00:20:53 même abîmé ça en fait, c'est-à-dire qu'on accueillait ses enfants dans un monde
00:20:56 silencieux, dans un monde qui était muet en fait, avec pas de visage humain. Donc voilà,
00:21:06 je l'ai abordé. Disons que la possibilité d'être dans les médias à ce moment-là,
00:21:13 je me suis dit même si ça arrive au moment où j'ai des jumeaux, il faut que j'arrive
00:21:17 à tout faire en même temps parce que c'est la première fois aussi que les journalistes
00:21:21 donnent la parole, font émerger la question du psychisme et c'est peut-être un des
00:21:28 avantages de cette crise, c'est qu'on ne peut plus faire l'impasse sur la notion
00:21:31 de santé mentale qui était quand même très absente avant la crise Covid et là je crois
00:21:37 qu'on a vu que le psychisme en fait portait le corps et que même si les gens ne sont
00:21:43 pas malades physiquement, s'ils vont mal psychologiquement, ils sont plus exposés
00:21:47 à avoir des problèmes physiologiques aussi et qu'on ne peut plus faire l'impasse
00:21:50 sur ça.
00:21:51 Il nous faut retrouver notre place de parent. Ce sont des mots qui reviennent souvent dans
00:21:56 votre livre. Pensez-vous que l'on a perdu cette posture de parent ?
00:22:00 On est dans une anthropologie, l'anthropologie moderne de la société occidentale, qui joue
00:22:09 à saut de mouton avec l'autorité parentale. Je l'ai rappelé sur BFM le 28 juillet 2021
00:22:14 quand on a autorisé la vaccination des ados avec l'accord d'un seul parent. C'était
00:22:22 évidemment une attaque contre les familles parce qu'on jouait à saut de mouton avec
00:22:30 l'autorité parentale et on allait mettre le feu à des conflits entre des parents divorcés,
00:22:34 etc. De toute façon, on n'est pas dans une anthropologie qui reconnaît au métier
00:22:39 de parent son importance et sa validité. On n'est pas dans une anthropologie qui
00:22:44 accepte que la cellule familiale soit la base de la société. On est dans une anthropologie
00:22:48 qui mixe des relents de communisme et de l'ultralibéralisme qui donnent quelque chose, où finalement
00:23:00 l'individu devrait être complètement arraché à ses racines, arraché à son identité,
00:23:05 arraché à sa subjectivité, arraché à la particularité de sa famille, pour être
00:23:09 recréé selon les lois décrétées par l'Union Européenne, par des organismes supranationaux,
00:23:17 par des gens qui ont une vision ultra-progressiste, mais qui n'ont pas l'honnêteté de dire
00:23:21 que c'est une idéologie et qu'il y en a d'autres possibles. Non, c'est le bien.
00:23:25 Tout ce qui a été fait avancer, c'est de la merde. Seul le progressisme compte.
00:23:29 Il faudrait faire comme si l'homme n'était pas l'homme, l'arracher à sa finitude
00:23:35 et le recréer selon nos principes. C'est l'État qui sait mieux que vous ce qu'on
00:23:39 doit dire aux enfants sur la sexualité, ce qu'on doit dire aux enfants sur leur corps,
00:23:42 ce qu'on doit faire manger aux enfants, etc.
00:23:45 Évidemment, ce n'est pas ma vision des choses. Je pense qu'un psychologue qui est
00:23:50 cohérent ne peut pas avoir cette vision des choses, puisque un enfant, ça se crée dans
00:23:54 une filiation. Même si les parents sont séparés, même si on est dans une famille monoparentale,
00:23:59 il a besoin de connaître ses racines pour savoir où il va, faire ses propres choix
00:24:06 et préserver son libre-arbitre. Malheureusement, on est globalement dans une idéologie qui
00:24:10 considère que le libre-arbitre, c'est dangereux, mais qui ne le fait pas franchement,
00:24:15 qui le fait avec des petits nudges, des petits coups de coude.
00:24:18 Tocqueville l'avait compris. Tocqueville dit bien qu'en démocratie, on n'en voit
00:24:22 pas au goulag. À l'époque, il ne parlait pas du goulag, mais il n'y a pas de mise
00:24:28 à l'échafaud, il y a une mise aux banses. On ne vous interdit pas les choses en démocratie,
00:24:32 mais il y a une espèce de censure invisible, pas très invisible d'ailleurs, qui vous
00:24:37 empêche de faire certains choix, parce que si vous les faites, vous allez être ostracisés.
00:24:41 Je crois qu'en tant que parents, on doit vraiment ancrer nos enfants de manière à
00:24:46 ce que finalement, s'ils sont un peu ostracisés, un peu marginalisés, dans certains cas, il
00:24:55 faut tenir bon, parce qu'ils ne doivent pas se couper de leurs ressentis, ils ne doivent
00:24:58 pas se dissocier de leurs perceptions, parce qu'on est quand même dans un monde qui
00:25:02 très souvent dit aux enfants de ne pas voir ce qu'ils voient, de ne pas entendre ce
00:25:06 qu'ils entendent. C'est ça qui les détocie, c'est ça qui crée des profils sans empathie
00:25:12 et potentiellement violents, et c'est ça qui est inquiétant pour la société de demain.
00:25:16 Et quelle serait justement la solution pour les parents ? Est-ce que ce serait de retrouver
00:25:20 sa posture de parent en se disant « j'écoute mon cœur, j'agis avec mon cœur, parce
00:25:25 que finalement je suis parent, je ressens aussi les besoins de mon enfant et je sais
00:25:30 bien faire ? »
00:25:31 Oui, oui. Moi je crois que vraiment, il faut que les parents reprennent confiance en eux.
00:25:36 Aucun parent n'a 100% de son temps pour son enfant, on a une logique économique qui
00:25:42 fait qu'en général, les deux parents travaillent, et ce n'est pas à moi de dire si c'est
00:25:46 bon ou si c'est mal, c'est un fait. Donc déjà, on ne doit pas se culpabiliser de
00:25:50 ne pas avoir 100% du temps, et surtout, ça ne doit pas être un argument pour se dire
00:25:53 « de toute façon, comme je n'ai pas le temps et que donc je n'ai pas assez de temps
00:25:58 pour bien m'informer, je ne sais pas, et donc comme je ne sais pas, je laisse les autres
00:26:02 décider pour moi ».
00:26:03 Peut-être que vous ne savez pas tout, et personne n'est expert en tout, et personne
00:26:07 n'est expert à la fois en géopolitique, en microbiologie, en psychologie, et voilà.
00:26:12 Ça ne veut pas dire que vous n'êtes pas légitime, ça ne veut pas dire que vous
00:26:15 n'êtes pas la première figure d'attachement de votre enfant, et je pense que vraiment
00:26:18 dire à nos enfants en vérité « je n'ai pas la réponse à ta question, par contre,
00:26:23 tu vois, je me pose telle question, je m'informe, je me demande si, parce que quand on me dit
00:26:28 ça, je me dis quand même que c'est un peu étrange, parce que j'entends ça aussi,
00:26:31 et toi qu'est-ce que tu en penses ? » là, vous l'aidez à construire sa pensée, et
00:26:35 puis en fait, vous le rassurez, parce que vous lui dites « un adulte, ce n'est pas
00:26:37 quelqu'un d'omniscient, mais c'est quelqu'un qui réfléchit, voilà, et tu as le droit
00:26:42 de ne pas avoir les réponses à tout, par contre, tu n'as pas le droit de ne pas réfléchir.
00:26:45 » Donc, les aider à construire leur pensée, les autoriser à se questionner, les autoriser
00:26:50 à douter, voilà, soyons un peu sceptiques et stoïques aussi, c'est pas mal, ça sort
00:26:54 de la pensée binaire, et puis comme disait Winnicott, moi je suis pédiatre, ou moi je
00:27:00 suis psychologue, Marie-Estelle Dupont, mais donc c'est vous les parents de vos enfants,
00:27:04 et jamais un pédiatre, un psy, un politique, ne sentira aussi bien que vous, si vous vous
00:27:09 connectez à votre rythme et à votre intuition, ce dont votre enfant a besoin. Et on sait
00:27:14 bien quand on a plusieurs enfants, que dans une même situation, chacun de nos enfants
00:27:19 n'a pas le même besoin, parce que chacun de nos enfants n'a pas la même personnalité,
00:27:22 n'a pas les mêmes ressources. Donc oui, faites-vous confiance en fait, vous êtes
00:27:26 légitimes, vous êtes leurs parents, vous êtes leur premier rempart aussi, c'est à
00:27:29 vous de mettre des murs et de dire « ok, tu entends tout ça de catastrophique à l'extérieur,
00:27:33 mais la maison elle a des murs, et jusqu'à nouvel ordre, à l'intérieur du foyer, c'est
00:27:38 moi qui décide ». Et on peut toujours rigoler, on peut toujours créer, on peut toujours
00:27:41 imaginer des choses, on peut toujours être en lien, et là votre enfant, vous le maintenez
00:27:49 dans une dynamique psychique, c'est ça qui est important, c'est ça qui est vital.
00:27:52 Donc faites-vous confiance, vous les aimez, donc voilà, quand on a l'amour, on a tout.
00:27:58 Ce livre c'est aussi une partie de vous, puisque vous y partagez beaucoup d'anecdotes
00:28:03 personnelles. Pourquoi c'était important pour vous, Marie-Estelle Dupont, de parler
00:28:07 de votre expérience en tant que professionnelle psychologue, mais également en tant que maman,
00:28:12 donc en tant que parent ? Parce que la parole m'a été beaucoup donnée
00:28:17 dans les médias, mais je ne voudrais surtout pas donner aux gens l'impression, quand
00:28:24 je parle, que je me mets en position de sachante. J'ai vraiment vécu les choses à la fois
00:28:30 comme psychologue, avec un devoir d'essayer d'apporter des clés et un éclairage, mais
00:28:36 aussi en tant que vraiment maman prise dans ce bazar. Les anecdotes c'est aussi une
00:28:47 manière de témoigner et de dire « voilà ce qui peut se passer dans un foyer, voilà
00:28:54 comment moi j'ai fait quand j'étais comme vous, mise face après la Toussaint
00:28:57 au masque à l'école et que je n'ai pas pu m'organiser, que je n'ai pas pu sortir
00:29:01 mon fils de l'école pour ne pas le masquer, comment j'ai été prise entre deux maltraitances,
00:29:05 le déscolariser et le masquer ». Je raconte ces anecdotes aussi pour dire aux parents
00:29:13 en fait, on ne peut pas faire parfaitement, on peut faire avec humour, on peut faire avec
00:29:18 délicatesse, et parce que je pense aussi que les gens m'ont vu comme ça projetée
00:29:23 sur un écran en ne sachant pas d'où je venais, en ne sachant pas qui j'étais, et ces anecdotes
00:29:27 sont une manière de leur dire en fait « moi je suis exactement comme vous, j'étais autant
00:29:31 dans la merde que vous, en plus j'avais des jumeaux qui venaient de naître, c'était
00:29:34 vraiment… les jumeaux pendant le confinement c'était quand même spécial ». Je crois
00:29:39 que c'est une manière de remettre du lien aussi, de dire avec ces mots à soi « voilà
00:29:45 comment moi j'ai été prise dans ce magma, et voilà comment moi j'ai fait, et ça
00:29:50 m'intéresse de savoir comment vous, vous avez fait ».
00:29:53 Alors il y a une notion qui revient également souvent dans votre livre, c'est celle du
00:29:57 toucher, vous l'avez évoqué tout à l'heure, du contact, et du pot à pot avec son bébé
00:30:03 parce que vous l'avez beaucoup évoqué, cette fonction qu'on a voulu nous interdire,
00:30:08 vitale à l'être humain, à son équilibre, mais encore plus dans le développement des
00:30:11 tout-petits. Dites-nous ce qui est important dans ce contact avec son enfant, et pourquoi
00:30:16 s'en priver, ou priver son enfant peut-être dramatique ?
00:30:21 Alors dans le livre, je rappelle en fait les fonctions parentales, et les toutes premières
00:30:26 fonctions parentales sont liées directement au fait que l'être humain est un mammifère.
00:30:32 Un mammifère, ça veut bien dire que l'enfant est porté, en fait c'est porter à la mamelle
00:30:39 mammifère, c'est-à-dire que le lien entre la mère et l'enfant, extrêmement proche,
00:30:44 se poursuit après l'accouchement, et que ce sont des fonctions biologiques essentielles,
00:30:52 puisque ça stimule l'immunité de l'enfant, que son cerveau est plus stimulé par la voix
00:30:57 de la mère, qu'il a besoin de voir le visage de sa mère bien en face de lui pour commencer
00:31:02 à identifier les traits des adultes et distinguer l'étranger. C'est pour ça qu'à un moment
00:31:07 donné il y a la peur de l'étranger chez l'enfant qui se manifeste, parce qu'il comprend
00:31:10 que le visage en face de lui n'est pas le visage de sa mère ou de son père. Je rappelle
00:31:16 aux gens cette première fonction que Winnicott appelle la fonction de holding, de porter
00:31:22 le bébé, de handling, la manière dont le bébé est manipulé dans les soins. Est-ce
00:31:27 qu'il est manipulé de manière froide et technique, ou est-ce qu'il est manipulé
00:31:30 avec tout l'imaginaire de la mère, toute l'émotion de la mère ou du père, ou de
00:31:35 la nounou. Quand c'est la nounou, il y a des nounous extrêmement aimantes. Quand je
00:31:39 dis la mère, c'est la figure maternante dans la journée du bébé. Si possible, oui,
00:31:47 sa mère au début, quoi qu'on en dise, c'est quand même bien que ce soit la maman
00:31:49 qui s'occupe de son petit. On est des mammifères, je le répète. Et puis la fonction d'object
00:31:55 presenting. L'object presenting, c'est le parent présente la réalité à l'enfant.
00:32:01 On doit lui rendre la réalité assimilable. Le toucher, les caresses, les sourires, les
00:32:09 bercements sont des manières de permettre au bébé d'assimiler des fragments progressifs
00:32:14 de la réalité du monde extérieur, mais ça ne vous viendrait pas à l'idée de lui
00:32:17 faire manger de la nourriture pas moulinée, alors qu'il n'a pas dedans. De la même
00:32:22 manière, son psychisme n'est pas en état d'assimiler tout de la réalité trop vite.
00:32:27 Donc, le bain d'affect de langage et de toucher permet à l'enfant de créer une
00:32:34 enveloppe psychique et petit à petit d'assimiler des morceaux de la réalité. Si on le crie
00:32:39 de ça, le bébé est déprimé. C'est le syndrome d'hospitalisme qui a été décrit
00:32:43 après la Deuxième Guerre mondiale en Angleterre par René Spitz. C'est-à-dire que l'enfant
00:32:49 est nourri au niveau calorique, il est changé par des infirmières qui font bien leur travail,
00:32:54 par des nurses, mais il n'a pas ce surcroît de tendresse dont l'être humain ne peut
00:33:00 pas se passer sans y laisser sa peau psychique et parfois jusqu'au syndrome de glissement,
00:33:06 se laisser mourir. On sait bien qu'il y a des bébés qui sont morts alors qu'ils
00:33:09 étaient nourris, et même des petits singes en éthologie, qui se laissent dépérir parce
00:33:14 qu'ils n'ont pas la tendresse. Tous les psychologues que je cite dans le livre rappellent
00:33:18 ça, à savoir qu'on est dans une société où on ne veut pas se toucher. D'abord, ça
00:33:24 rend l'enfant plus vulnérable aux abus sexuels, puisque comme il a une carence affective,
00:33:27 il est plus manipulable. Et ensuite, toute cette tendresse participe autant à la construction
00:33:34 psychique qu'au renforcement, paradoxalement, des défenses immunitaires du petit.
00:33:38 On va se projeter dans l'avenir, si je puis dire. Nous ne sommes pas à l'abri d'une
00:33:46 nouvelle épidémie, de nouvelles restrictions peut-être même plus liberticides. Quel serait
00:33:51 le meilleur conseil que vous puissiez donner aux parents ?
00:33:55 Eh bien, de ne plus se laisser sidérer, puisque c'est déjà arrivé, de se poser, de réfléchir,
00:34:03 et de finalement convoquer tout ce qu'ils ont appris pendant cette crise. Parce que
00:34:07 beaucoup de parents, aujourd'hui, redébrifent ce qu'ils ont fait, se disent peut-être
00:34:09 que là j'ai été trop, là j'ai été pas assez, etc. Et de ne pas laisser la peur
00:34:18 rentrer à l'intérieur du foyer. C'est-à-dire qu'il y a des choses sur lesquelles on a
00:34:21 pas la main, il y a des choses sur lesquelles on n'a pas la main, mais à l'intérieur
00:34:27 du foyer, je crois que notre liberté, encore une fois, de penser, de maintenir, de ne jamais
00:34:36 se mettre du côté de celui qui fait peur à l'enfant. On ne peut pas se permettre
00:34:42 de faire peur à nos enfants, on leur doit de nous faire confiance. Donc on ne peut pas
00:34:46 les terroriser. Donc moi, quand je vois des parents qui étaient tellement affolés, paniqués,
00:34:52 dissociés, incapables de réfléchir, qui faisaient pleurer des enfants en leur enfonçant
00:34:57 des tiges dans le nez, je me dis « qu'est-ce qui s'est passé dans la tête de ces parents
00:35:02 et à quel point ils étaient en détresse peut-être eux-mêmes, pour se couper de leur
00:35:08 cœur et de leur empathie, qui exigent qu'à ce moment-là on arrête de faire pleurer son
00:35:12 enfant ? » Donc ne vous déconnectez pas des besoins de leur enfant, on n'est pas
00:35:16 à l'abri de vivre des choses très difficiles qui nous mettent dans des situations, pour
00:35:21 plein de raisons, là on parle de la maladie mais il y a les attentats, on est dans un
00:35:24 contexte critique. Mais d'avoir en tête les besoins de l'enfant fondamentaux sur
00:35:32 lesquels nous ne pouvons pas transiger, et de savoir que notre devoir moral c'est les
00:35:37 besoins, je le dis dans le livre « leurs besoins sont nos devoirs », ce n'est pas
00:35:40 l'obéissance, c'est d'abord les besoins de notre petit, notre devoir de protection.
00:35:44 Je crois que même en temps de guerre, nos grands-parents étaient capables de donner
00:35:49 de l'amour, de protéger, de parexciter les enfants de certaines infos trop anxiogènes,
00:35:56 de certaines choses inappropriées. Donc oui, retenons les leçons qu'on a tirées du
00:36:02 Covid, évacuons la peur de la maison au maximum, faisons de notre mieux et ne nous culpabilisons
00:36:11 pas d'être limités, puisque rien dans la société aujourd'hui n'est fait pour
00:36:15 aider les parents. Donc on fait de notre mieux. Il y a des jours où notre mieux n'est
00:36:19 pas terrible, mais il y a aussi des jours où il est génial et où il fera la différence,
00:36:23 il fera que votre enfant aura une immunité psychique et que ses épreuves il les surmontera.
00:36:28 Il les surmontera peut-être en ayant mûri un peu trop vite, mais finalement ça pourra
00:36:33 peut-être faire de lui un adulte plein de ressources, avec un imaginaire très riche
00:36:38 pour se sortir de situations périlleuses.
00:36:40 Même lorsque l'on doit faire face à un système de manipulation de masse, vous en
00:36:45 parlez beaucoup de cette manipulation qu'on a subie pendant toute cette période.
00:36:51 Vous savez, la manipulation, elle n'est pas nouvelle, elle est à l'œuvre dans
00:36:57 la pensée captive. Milhouse, dans Les démocraties populaires, décrit très bien la manipulation.
00:37:02 Dans les démocraties, il y a une novlangue, il y a un langage technocratique qui est créé
00:37:07 de toute pièce dans des cabinets de conseil. En fait, ce n'est pas nouveau, ce n'est
00:37:11 pas depuis le Covid, ce n'est pas depuis 2017, c'est récurrent aujourd'hui dans
00:37:17 ce système démocratique qui est en impasse démocratique, selon moi.
00:37:22 On a le droit d'utiliser nos neurones de parents et de redonner à l'enfant des
00:37:31 éléments de langage, de lui dire « tu sais, un effort ce n'est pas un sacrifice, il
00:37:35 y a une différence ». Là, il y avait une injonction paradoxale, on t'a demandé
00:37:38 de faire des choses qui étaient contraires à tes besoins. Quand on te dit d'être
00:37:44 solidaire alors qu'en fait on te demande de te sacrifier, tu vois, ce n'est pas
00:37:46 la même chose. Là, il y a une espèce de management par la peur, où en fait, les
00:37:54 Anglais… En fait, il y a eu un truc très intéressant. Nous, quand on a eu les chiffres
00:37:58 de la vague pédopsychiatrique en février 2021, au même moment en Angleterre, ils
00:38:04 admettaient qu'ils avaient accentué le danger pour que la population se soumette
00:38:12 aux restrictions. Donc, dire à l'enfant « il y a une communication politique en démocratie
00:38:19 qui n'oblige pas, mais qui invisibilise certaines parties de la réalité, qui n'introduit
00:38:25 pas de nuances, qui te pousse dans un sens, etc. », en fait, votre enfant, vous l'outillez
00:38:31 en faisant ça. Il va garder son esprit critique, il va garder son discernement, donc il aura
00:38:35 du recul. Il ne sera pas tout puissant, mais il aura du recul et il pourra au moins se
00:38:39 dire « je ne suis pas fou de sentir ce que je pense », parce que c'est ça qui est
00:38:42 important pour préserver sa santé mentale. Ce n'est pas la difficulté, en fait, ce
00:38:45 n'est pas d'être coincé, c'est de croire qu'on est fou de sentir ce qu'on
00:38:49 pense. C'est ça l'abus. Donc, oui, de dire qu'aujourd'hui, dans la plupart des
00:38:54 démocraties libérales, au lieu de forcer les gens, on les manipule et que c'est de
00:38:58 la com, finalement c'est de l'éducation civique qu'on fait à la maison. Mais c'est
00:39:04 notre rôle de parents de garder du vocabulaire et du débat à table, d'éteindre la télé,
00:39:08 de faire réfléchir nos enfants et de lui demander ce qu'il en pense et comment lui
00:39:11 y ferait.
00:39:12 Vous consacrez quelques pages à ce que vous appelez la souffrance narcissique identitaire.
00:39:18 Pouvez-vous nous en dire plus ?
00:39:20 Oui, alors en fait, la souffrance narcissique identitaire, c'est quelque chose qu'on
00:39:27 a de plus en plus en consultation, c'est-à-dire qu'on a des individus, et notamment des
00:39:32 jeunes, qui arrivent en nous disant « je me sens vide », c'est-à-dire que la personne
00:39:39 a l'impression de ne pas être dans sa vie. Et je pense, à force de réfléchir sur cette
00:39:48 plainte qui s'exprime dans des contextes familiaux et dans des catégories socio-professionnelles
00:39:55 très variées, que c'est quelque chose qui est lié justement à notre anthropologie,
00:40:02 qui a réduit l'être humain à un statut de contribuable et de consommateur, c'est-à-dire
00:40:08 qui a complètement disqualifié la valeur du lien et la valeur de l'affect. Et donc,
00:40:14 on a des personnes qui sont dans une virtualisation de leur vie, qui les déconnectent de plus
00:40:18 en plus de leur véritable perception. C'est pour ça qu'on a une augmentation des addictions,
00:40:24 parce qu'on a un besoin compulsif de se remplir quand on se sent vide. Et cette souffrance
00:40:27 narcissique identitaire, c'est ce sentiment d'impuissance exprimé par le patient, qui
00:40:35 fait qu'on va rester pendant un certain temps dans une antichambre de la thérapie,
00:40:39 c'est-à-dire qu'on doit déjà aider le patient à se reconnecter à ce qu'il éprouve,
00:40:44 à se sentir vivant dans sa vie. Vivant, souffrant peut-être, mais vivant. Et cette souffrance
00:40:50 narcissique identitaire, elle se caractérise par l'incapacité d'identifier et de verbaliser
00:40:55 des émotions, le sentiment de ne pas savoir ce qu'il pense, de ne pas savoir ce qu'il
00:41:00 veut, de ne pas savoir ce qu'il ressent. Alors, ça inquiète beaucoup les parents,
00:41:03 qui me disent « mais moi, il est toute la journée dans sa chambre et j'ai l'impression
00:41:06 qu'il n'a envie de rien, et je n'arrive pas à savoir si c'est juste la puberté,
00:41:12 ou si c'est quelque chose de plus grave ». Et c'est vrai que si nous, on ne repère
00:41:14 pas cette souffrance, ce bon narcissisme qui ne s'est pas mis en place, où la personne
00:41:22 se sent peut-être mal, mais quand même actrice de sa vie, si on ne l'identifie pas, ça
00:41:30 fait le lit de dépression essentielle, où ces jeunes n'ont envie de rien, c'est-à-dire
00:41:36 qu'ils ne se projettent pas. D'ailleurs, il y a 30% des jeunes femmes qui ne veulent
00:41:39 pas d'enfants, en même temps, quand on leur répète toute la journée que c'est
00:41:43 la fin du monde et que si elles font un bébé, elles vont tuer un arbre, ça ne donne pas
00:41:46 super envie de fonder une famille. Ils n'ont pas envie de finir leurs études, ils se sentent
00:41:52 inutiles, ils se sentent coupables, et donc je pense que l'augmentation dans nos cabinets
00:41:56 de cette souffrance narcissique identitaire est très en lien avec un syndrome d'impuissance
00:42:01 qu'on crée aussi dans la société, en les mettant tout le temps dans un climat hyper
00:42:05 anxiogène, avec des discours… je suis la première à dire que ça ne va pas, mais
00:42:09 je dis que ça ne va pas tout en essayant de dire qu'il y a une espérance, et qu'on
00:42:12 est acteurs, et qu'on peut tous faire quelque chose. Dans notre ligne de nage, on peut tous
00:42:17 faire quelque chose pour nos enfants et les gens qu'on aime, et donc pas rater papillon
00:42:21 pour la société. Du coup, ce que je voulais dire, c'est qu'à force d'entendre aussi
00:42:25 une pensée très binaire et très catastrophiste sur tous les sujets, ces jeunes s'effondrent
00:42:31 en silence. Qu'est-ce qu'on leur transmet ? Est-ce qu'on leur transmet un modèle
00:42:35 d'adulte debout, avec une espérance ? Ou est-ce qu'on leur dit « tout est foutu,
00:42:40 de toute façon la planète crame, c'est la catastrophe », avec en même temps « mais
00:42:47 par contre, tu peux t'affranchir de toutes les contraintes, c'est toi qui décides
00:42:50 quand est-ce que tu meurs, c'est toi qui décides quel sexe tu as ». Et donc en fait,
00:42:55 on les met dans un truc qui est complètement impensable, parce qu'on leur fait éclater
00:42:58 les coordonnées de l'existence humaine. Au lieu de leur dire « ta liberté humaine,
00:43:03 ça n'est pas une absence de contrainte, et il y a un cadre, une différence des générations,
00:43:08 une différence des sexes sur lesquels tu vas t'appuyer pour créer quelque chose »,
00:43:11 on leur dit « t'as le droit de tout décider, mais de toute façon tout est foutu, et tout
00:43:16 est catastrophique, et finalement tu es dangereux pour l'autre, tu es dangereux pour ta grand-mère,
00:43:22 tu es dangereux pour la planète à cause de tes activités qui font du réchauffement
00:43:25 climatique ». Moi je me mets à la place d'un jeune de 20 ans aujourd'hui, franchement
00:43:30 je comprends qu'il y en ait qui a envie de se tirer une balle, ce qu'on leur dit
00:43:32 est totalement désespérant. Et je pense que c'est ça qui fait qu'aujourd'hui,
00:43:36 on a énormément de jeunes qui arrivent avec cette souffrance narcissique, où ils se
00:43:41 sentent derrière une vitre, à côté de leur vie, inutiles, dans quelque chose qui
00:43:46 n'a pas de sens, parce qu'on leur a volé toute la partie spirituelle de la vie, c'est-à-dire
00:43:52 toute l'imaginaire, la créativité, la beauté de la vie, la poésie de la vie.
00:43:57 Moi je trouve qu'on leur a dérobé depuis 40 ans, et évidemment qu'en tant que maman,
00:44:03 en tant que femme de 41 ans, en tant que psychologue, j'ai envie de leur rendre cette beauté de
00:44:07 la vie, parce qu'elle est entre leurs mains en fait, c'est eux l'avenir du monde,
00:44:12 ce n'est pas ce qu'on leur raconte. Et qu'est-ce que vous aimeriez dire aux
00:44:16 parents de ces enfants justement, qui se sentent mal, s'ils vous écoutent ?
00:44:20 D'abord j'aimerais leur dire qu'à partir du moment où ils aiment leur enfant, ils
00:44:28 ont des clés en eux, je le répète, ils ont des clés en eux, et que ce qu'ils doivent
00:44:34 activer, c'est ça qui est très difficile avec un enfant qui va mal, c'est vraiment
00:44:39 leur pugnacité et leur patience, c'est-à-dire que leur enfant va les décourager, leur enfant
00:44:44 va les envoyer chier, leur enfant ne va pas répondre à leurs propositions, ils vont
00:44:49 se sentir dans une impasse, et en fait il faut qu'ils comprennent, ces parents, que
00:44:53 c'est parce que leur enfant leur fait vivre par projection son propre sentiment d'impuissance.
00:45:00 Mais que parfois, aimer quelqu'un, c'est ne pas s'enfuir, ne pas passer à l'acte
00:45:07 non plus, ne pas le sur-médiquer, c'est lui dire "je vois ta détresse, je vois qu'en
00:45:12 ce moment tu ne veux pas que je t'aide, mais je reste là, je reste à côté de toi,
00:45:18 je ne bougerai pas jusqu'à ce que tu ailles mieux, je ne te lâcherai pas la main".
00:45:22 Et je crois que ce soutien inconditionnel, moi je le dis aux parents, ne vous dites pas
00:45:29 que tout est foutu, parce que là du coup vous allez accepter pour votre enfant des
00:45:33 solutions qui ne sont pas celles dont il a besoin.
00:45:35 Il a besoin que vous soyez à côté, peut-être qu'il a besoin de vous faire vivre sa détresse
00:45:39 en vous mettant dans l'impuissance, comme moi il me met en tant que thérapeute à certains
00:45:42 moments dans l'impuissance, et dans l'envie de dire "bon ben je ne peux rien faire,
00:45:46 voilà, j'abandonne".
00:45:48 Mais finalement c'est dans cette empathie, dans ces moments très sombres partagés,
00:45:56 qui va reprendre pied.
00:45:57 Et dans la très très grande majorité des cas, si on ne les abandonne pas et qu'on
00:46:03 est là et qu'on continue de leur donner de l'amour, ils s'en sortent.
00:46:06 C'est vraiment ça que je veux dire aux parents.
00:46:08 Ils ne sont pas condamnés.
00:46:09 Ne psychiatrisez pas trop vite vos enfants.
00:46:11 Le fait qu'ils aillent mal dans un monde qui leur dit que tout va mal, c'est plutôt
00:46:14 sain.
00:46:15 Et avec votre aide en premier, avec celle des gens dont c'est le métier aussi, mais
00:46:24 d'abord avec votre amour et avec du lien affectif, l'immense majorité des jeunes
00:46:31 va s'en sortir.
00:46:32 Mais vous ne devez pas les lâcher.
00:46:34 Et même si vous êtes inquiet, j'ai envie de vous dire, si vous êtes inquiet, ça veut
00:46:38 dire que vous êtes là, ça veut dire que vous êtes lucide, donc c'est beaucoup mieux
00:46:41 que si vous n'étiez pas du tout inquiet, et votre inquiétude les aide dans une certaine
00:46:45 mesure, parce que vous êtes là pour les parer, parce que vous avez conscience du monde
00:46:52 dans lequel ils sont.
00:46:53 Mais voilà, ne lâchez pas, ne lâchez pas, accrochez-vous même si c'est épuisant,
00:46:58 parce que vraiment, pour la très grande majorité des jeunes, il y a la lumière au bout du
00:47:02 tunnel et je suis persuadée que la très grande majorité des jeunes qui vont mal aujourd'hui
00:47:05 peuvent s'en sortir.
00:47:06 Mais par contre, il ne faut pas se précipiter sur les médicaments, il y a vraiment d'autres
00:47:10 choses qui existent.
00:47:11 Avant de terminer, Marie-Estelle Dupont, j'aimerais vous faire réagir sur deux sujets
00:47:16 de société.
00:47:17 Alors le premier, il y a quelques semaines, le Haut Conseil à l'égalité entre les
00:47:21 femmes et les hommes a présenté son rapport sur la pornographie, dans lequel, entre autres,
00:47:26 il est conclu, je cite, que ces vidéos banalisent et érotisent l'inceste et la pédocriminalité.
00:47:31 La présidente du HCE, Sylvie Pierre-Bressolette, prévient, je cite, c'est la fabrique de
00:47:37 futurs violeurs, de futurs auteurs de féminicides.
00:47:40 Oui, et elle a tout à fait raison de le souligner, puisque aujourd'hui, 50% des mineurs consomment
00:47:50 du porno régulièrement et 46% des jeunes, donc à quasiment exactement le même chiffre,
00:47:57 à 4% près, 46% des jeunes disent avoir des éléments de violence dans leur sexualité.
00:48:03 Quand je parle de violence, c'est de strangulation, étouffement, brûlure, autant de choses qui
00:48:12 n'ont rien à voir finalement avec la sexualité.
00:48:13 Donc oui, c'est la fabrique des violeurs, mais c'est la fabrique aussi du consentement
00:48:19 à être une victime, parce que le cerveau a des neurones miroirs, et que quand il voit
00:48:26 une scène traumatique, il y a une sidération de l'amidale cérébrale qui gère la peur,
00:48:36 une dissociation des affects, une dissociation de l'empathie, mais il y a aussi une trace
00:48:40 mnésique qui va se former de ce que l'on a vu.
00:48:43 C'est pour ça que dans d'autres contextes de violence, et notamment des images d'attentats,
00:48:47 ne les montrez surtout pas aux enfants, puisque le trauma peut être passif, vous n'êtes
00:48:51 pas obligé d'être la victime de la scène pour être traumatisé par une scène.
00:48:55 Donc il y a un effet traumatique de ces vidéos pornographiques sur les mineurs, qui est
00:48:59 qu'elles vont créer une empreinte, faire effraction dans le psychisme, surexciter des
00:49:08 mineurs qui ne sont pas en capacité de mettre de la distance, qui vont donc avoir tendance
00:49:12 à reproduire, pour contrôler la charge d'excitation que ça a généré chez eux,
00:49:18 à reproduire ce qu'ils ont vu, du fait des neurones miroirs qui ont créé des traces
00:49:23 mnésiques de ces procédés, de cette manière de ne pas faire l'amour, de faire la barbarie.
00:49:32 Ils vont reproduire ça, parce que c'est une manière de reprendre le contrôle sur
00:49:37 ce qu'ils ont vu, qui était sidérant.
00:49:39 Je crois que c'est très important de dire à nos enfants, entre les mesures concrètes,
00:49:45 c'est-à-dire pas de téléphone la nuit dans la chambre, etc., de dire vraiment aux
00:49:49 enfants que la pornographie, puisque le premier contact avec la pornographie aujourd'hui
00:49:55 a lieu autour de neuf, dix ans, de manière accidentelle, portable d'un adulte, d'un
00:50:00 grand frère, dans la cour de l'école, un grand qui vient faire l'idiot et qui
00:50:05 veut montrer ça aux petits pour faire le malin et les effrayer, de les prémunir,
00:50:09 si jamais accidentellement votre enfant est en contact avec ça, en leur disant bien que
00:50:14 le porno, c'est l'anti-sexualité.
00:50:18 La sexualité, c'est du lien.
00:50:20 La sexualité, ça augmente la confiance en soi.
00:50:22 La sexualité, c'est de la complicité, c'est de l'émotion, c'est du plaisir
00:50:26 partagé.
00:50:27 La pornographie, c'est de la fragmentation du corps, c'est de l'interchangeabilité
00:50:32 des individus qui ne sont même plus des individus.
00:50:34 C'est de la perte de confiance en soi, parce que les garçons pensent qu'ils doivent
00:50:37 être des hardeurs, et les filles pensent qu'elles doivent accepter des choses épouvantables
00:50:41 pour être des bons coups dans la cour du lycée.
00:50:43 Je crois que leur dire que la pornographie, c'est le contraire de la sexualité.
00:50:48 La sexualité, c'est l'imaginaire, c'est l'érotisme.
00:50:51 Surtout la sexualité, c'est subjectif, c'est toi qui crée ta sexualité.
00:50:55 La pornographie, c'est la reproduction d'actes barbares.
00:50:58 C'est vraiment très très important.
00:51:00 C'est vraiment une parole qu'on doit poser, on ne doit pas éviter le sujet.
00:51:04 Parce que c'est vraiment une violence énorme dans leur psychisme, qui a des conséquences
00:51:08 à la raison, il leur a appelé, sur un très grand nombre de jeunes femmes aujourd'hui.
00:51:12 Je rappelle que 97% des violences dans les films pornos s'exercent contre des femmes.
00:51:20 Donc, il y a encore un peu d'archaïque à travailler là-dessus, je crois.
00:51:25 Et donc, à retrouver encore notre place de parent, là.
00:51:28 Oui, il faut y aller.
00:51:29 Les parents, on n'a pas le droit d'être paralysés, on n'a pas le droit d'avoir
00:51:31 peur des sujets, il faut y aller.
00:51:32 Deuxième sujet, la baisse de la natalité en France.
00:51:37 L'INSEE a publié il y a quelques semaines les chiffres de l'année 2022, qui sont
00:51:41 à un niveau le plus bas depuis la Seconde Guerre mondiale.
00:51:44 Alors, selon vous, comment peut-on l'expliquer ?
00:51:47 J'imagine que l'explication est multifactorielle.
00:51:53 Sur le plan psychosocial, encore une fois, quand un être humain n'a entendu que le
00:52:01 mot de crise depuis sa naissance, même moi qui ai 41 ans, j'ai entendu que ce mot.
00:52:05 En fait, il y a 40 ans, c'était déjà la crise tout le temps.
00:52:07 Crise économique, crise écologique, violence aussi dans la sorte de compétition qui a
00:52:18 été instaurée entre les hommes et les femmes.
00:52:19 C'est-à-dire qu'il y a eu un effet pervers d'une radicalisation du féminisme, qui
00:52:25 finalement a mis les hommes et les femmes en compétition, au lieu de les mettre en
00:52:29 complémentarité.
00:52:30 Et en fait, pour faire un enfant, il y a un moment donné où il faut accepter d'être
00:52:34 interdépendant, et que le père a besoin de la mère et que la mère a besoin du père.
00:52:37 Parce que si tout repose sur les épaules d'une seule personne, ça décourage de faire
00:52:44 un enfant, parce que c'est difficile de faire et d'éduquer un enfant convenablement,
00:52:49 en ramenant de l'argent, etc.
00:52:50 Donc, il y a plusieurs facteurs, mais dans les facteurs psychosociaux, de toute évidence,
00:52:56 il y a les difficultés économiques, il y a l'éclatement des repères et la disqualification
00:53:02 de la famille, parce qu'aujourd'hui, une jeune femme à Paris qui a un enfant, très
00:53:05 souvent, elle est seule, elle n'est pas en couple, ses parents ne sont pas là, ou
00:53:09 ils ne sont pas en état de l'aider.
00:53:11 Vous savez, les Africains disent que pour élever un enfant, il faut tout un village,
00:53:17 et l'individu moderne occidental est extrêmement isolé, et c'est difficile de faire un
00:53:22 bébé toute seule, malgré la chanson.
00:53:24 Donc, ils ont moins envie, à cause des difficultés économiques qui les attendent, à cause
00:53:30 de cette désespérance de la relation homme-femme, ils ont moins envie parce qu'on leur dit
00:53:34 que c'est mauvais pour la planète, c'est quand même terrible d'opposer les bébés
00:53:37 et les arbres, ils ont moins envie parce que les sociétés qui font des bébés sont des
00:53:42 sociétés spirituelles, sont des sociétés qui croient.
00:53:45 En fait, on ne fait pas de bébé quand on est transhumaniste, on fait des bébés quand
00:53:49 on s'inscrit dans l'idée d'une transmission, qu'on n'est pas tout puissant, et qu'on
00:53:54 est un élément d'une chaîne et d'une lignée.
00:53:56 Aujourd'hui, on a voulu tellement tuer Dieu et toute transcendance, on se veut tellement
00:54:01 tout puissant que finalement on est ratatiné sur notre ego, on veut prendre toute la place.
00:54:05 Je pense aussi qu'il y a un élément d'intolérance à la frustration, c'est-à-dire que faire
00:54:09 un bébé c'est accepter qu'on va être crevé, il y a des choses qu'on va moins
00:54:12 faire.
00:54:13 Donc, quand on vous a vendu « la vie c'est du kiff et il faut jouir sans entrave »,
00:54:19 c'est lui de vous arrêter de faire des enfants.
00:54:21 Parce que jouir sans entrave, quand on a trois petits dans les pattes qui taguent les
00:54:26 murs en rouge à lèvres et qui mettent de la purée partout, et que vous avez dormi
00:54:29 trois heures, vous kiffez pas tout le temps mais vous kiffez autre chose en fait.
00:54:33 Donc ils savent pas qu'ils vont découvrir un autre bonheur.
00:54:35 Et en fait, je pense qu'un élément anthropologique très important, c'est que les jeunes ne
00:54:40 font pas d'enfants parce qu'on leur a menti sur quelque chose, on leur a raconté
00:54:44 que pour être heureux il fallait pas trop s'engager, et je pense que c'est exactement
00:54:48 le contraire.
00:54:49 C'est-à-dire que je pense que les gens heureux sont les gens qui s'engagent.
00:54:51 Et on a bien vu pendant le Covid que les jeunes qui s'en sortaient le mieux étaient ceux
00:54:55 qui restaient engagés, même si pendant quelques semaines c'était depuis la maison, dans
00:54:59 des choses collectives.
00:55:00 Et un enfant c'est un engagement en fait, et on leur fait croire que l'engagement
00:55:05 c'est du malheur, c'est de la contrainte.
00:55:06 Mais plus on est engagé, plus on est heureux.
00:55:09 Donc moi j'ai trois enfants, je suis crevée et je suis hyper heureuse.
00:55:12 Connaissez-vous Corinne Maier, Marie-Estelle Dupont ?
00:55:17 Pas du tout.
00:55:18 Alors elle est psychanalyste, écrivain, auteur entre autres de L'Humeur, les enfants,
00:55:24 40 raisons de ne pas avoir d'enfants, vous voyez un peu où je veux en venir.
00:55:27 Elle explique, elle, autrement cette baisse de la natalité.
00:55:30 Alors il y a quelques semaines, dans une émission de télé, elle a dit, alors je cite, « la
00:55:35 famille signifie le repli sur soi », c'est-à-dire ce sont des gens qui sont chez eux, ils ont
00:55:40 un 4/4 et il n'y a que leurs enfants qui comptent.
00:55:42 C'est la norme.
00:55:44 Quand on me dit que la famille c'est le lien, pas du tout.
00:55:47 Vous avez un 4/4 Marie-Estelle Dupont ?
00:55:51 Non.
00:55:52 Mais depuis que j'ai eu des jumeaux, ma voiture est trop petite.
00:55:56 Je pense que ce qu'elle décrit est vrai dans certains cas.
00:56:03 En fait je crois que tout peut être une occasion de repli sur soi, tout peut être un prétexte.
00:56:09 C'est-à-dire que le boulot peut être une fuite en avant, la famille peut être une
00:56:13 manière de mettre de côté sa peur.
00:56:15 On sait qu'il y a des femmes qui veulent être mère au foyer et faire plein d'enfants,
00:56:19 parce qu'en réalité elles n'ont pas confiance en elles pour affronter le monde professionnel.
00:56:22 Mais ce que je veux dire c'est que le même choix peut être soutenu par des motifs exactement
00:56:28 contraires.
00:56:29 On peut faire des enfants parce qu'on les aime avant même qu'ils soient nés, et
00:56:31 puis on peut faire des enfants pour éviter certains aspects d'existence.
00:56:34 Il y a des mères qui utilisent la libide être mère pour surtout plus du tout être
00:56:38 femme, et puis il y a des mères qui dans ce lien vont redécouvrir justement toute
00:56:43 l'ampleur de leur féminité.
00:56:44 Moi je n'ai aucun problème avec les gens qui ne veulent pas d'enfants, parce que pendant
00:56:48 très longtemps je ne voulais pas d'enfants, jusqu'à ce que je comprenne que c'était
00:56:51 dans mon cas l'expression d'un traumatisme.
00:56:54 Et puis moi j'ai eu une révélation en ayant mon premier enfant, j'ai adoré ça.
00:56:58 Ça ne veut pas du tout dire que je prêche, que je pense que toutes les femmes qui ne veulent
00:57:03 pas d'enfants ont un problème, pas du tout.
00:57:05 Mais encore une fois, pourquoi effacer la subjectivité ? Il y a des femmes qui ont
00:57:09 vraiment envie d'avoir des enfants, il y a des femmes qui vont avoir des enfants pour
00:57:13 éviter un problème pas résolu, ou pour être en compétition avec leur sœur qui
00:57:17 en a fait cinq.
00:57:18 Ce n'est pas super cool pour les enfants dans ces cas-là.
00:57:21 Et puis il y a des femmes qui n'ont pas d'enfants parce que c'est un véritable
00:57:26 choix libre, et il y a des femmes qui n'ont pas d'enfants parce qu'il y a une peur,
00:57:30 une femme qui a été victime d'inceste, c'est compliqué pour elle de se projeter
00:57:32 dans la maternité.
00:57:33 Donc moi en tant que psychologue et psychothérapeute, je ne peux pas généraliser la signification
00:57:45 d'un désir ou d'un refus.
00:57:47 Je sais juste qu'il y a des subjectivités et que le même choix peut être l'expression
00:57:54 d'un motif opposé.
00:57:55 Donc ce qu'elle décrit, c'est ce qu'elle a observé dans certains cas, et il n'est
00:58:00 pas faux de dire que certaines familles sont très clanniques et ratatiner sur elles-mêmes,
00:58:05 mais on observe, je crois que l'honnêteté intellectuelle oblige à dire qu'on observe
00:58:10 aussi parfois vraiment le contraire, et que des gamins de familles nombreuses sont hyper
00:58:14 à l'aise dans les liens sociaux, vont être les premiers à prendre des initiatives
00:58:17 pour partager quand il y a un problème.
00:58:19 Donc je crois qu'en la matière, il n'y a pas trop de place pour l'idéologie,
00:58:25 encore une fois, même si je comprends que des femmes ne veuillent pas d'enfants,
00:58:28 même si je comprends que des jeunes aujourd'hui me disent « mais dans le monde actuel, pourquoi
00:58:32 je vais aller là-dedans ? ». Mais je crois qu'on n'a pas le droit d'être binaire
00:58:37 et de masquer une partie de la réalité.
00:58:39 Et moi, je ne cacherai jamais aux gens que oui, on peut être très très heureuse en
00:58:43 étant mère de familles nombreuses, même dans un monde qui rend la maternité extrêmement
00:58:47 difficile et qui vous décourage de l'être.
00:58:50 Eh bien c'est sur ces mots que nous allons terminer alors cette interview.
00:58:54 Merci beaucoup Marie-Estelle Dupont.
00:58:56 Merci Kate.
00:58:57 Merci de votre franchise.
00:58:59 Je rappelle votre livre « Être parent en temps de crise » aux éditions Guy, Très
00:59:05 Daniel.
00:59:06 Et il ne faut pas oublier qu'être parent, c'est aussi être oncle, tante, grand-parent,
00:59:10 frère et soeur en fait.
00:59:11 Parce que c'est ça aussi.
00:59:13 C'est toute la famille.
00:59:14 La famille.
00:59:15 Je vais vous inviter, si vous êtes d'accord, à signer notre livre d'or.
00:59:18 Avec plaisir.
00:59:19 Et en attendant, je voudrais rappeler que le Média en 442 est un média créé par
00:59:24 le peuple et pour le peuple.
00:59:25 Donc c'est un média entièrement libre.
00:59:27 Nous ne bénéficions d'aucune aide ni d'aucun soutien et encore moins de subventions.
00:59:32 Nous ne recevons aucun financement extérieur.
00:59:35 Seuls vos dons et vos abonnements depuis cette rentrée sont notre unique soutien.
00:59:39 C'est grâce à vous si nous continuons notre combat.
00:59:42 Alors merci à tous et merci de votre fidélité.
00:59:44 Au revoir.
01:00:10 Ciao.
01:00:36 [SILENCE]