• l’année dernière
“Le fait de presque mourir... On prend énormément de recul, tout devient moins grave.”
L’humoriste Constance revient sur sa dépression, des tentatives de suicide aux allers-retours en clinique psychiatrique, et raconte comment elle s’en est sortie. Elle sera de retour en 2024 avec son nouveau spectacle “Inconstance”.

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Transcription
00:00 J'avais l'impression d'être une grosse merde.
00:01 J'ai fait d'abord trois tentatives de suicide.
00:03 Et la quatrième était très violente.
00:04 Le fait de presque mourir,
00:06 on prend énormément de recul par rapport aux choses.
00:08 J'avais jamais compris que la vie, ça pouvait être beau.
00:11 Un jour, je pleurais, je pleurais, je ne pouvais plus me lever.
00:14 Après un mois d'arrêt de travail,
00:15 je suis remontée sur scène dans un état pas possible,
00:18 c'est-à-dire sur scène, je gérais,
00:19 mais en dehors, j'avais l'impression que j'allais mourir.
00:21 Là, je m'arrête et je ne sais pas que ça va durer un an et demi.
00:23 J'ai eu beaucoup de temps où je me disais,
00:25 mais non, je ne fais pas de dépression, c'est les gens faibles qui font des dépressions.
00:29 Ce n'est pas moi, moi, j'avance, je vais de l'avant toujours.
00:31 Et non, en fait, ça peut être une dépression.
00:32 Et ce n'est pas honteux, c'est une maladie.
00:34 Moi qui ai toujours voulu être comédienne,
00:35 je me dis, je ne suis plus capable d'être comédienne.
00:37 Je ne suis plus capable de me lever le matin.
00:39 Je pensais que toute ma valeur venait de mon travail.
00:42 Donc, je me dis, je n'ai aucune valeur.
00:44 Si je ne travaille pas, je n'ai plus qu'à crever parce que je n'ai aucune valeur.
00:48 Et là, il n'y a plus rien qui répond.
00:50 Tu as l'impression d'être une grosse merde.
00:51 En fait, ce qu'on ressent, c'est la mort, c'est le vide.
00:54 Il n'y a plus aucune forme d'espoir.
00:56 Il n'y a plus de notion d'avenir.
00:58 Il n'y a plus d'envie.
00:59 Donc, j'ai fait d'abord trois tentatives de suicide
01:01 qui étaient plus des appels au secours qu'autre chose.
01:03 Et la quatrième était très violente.
01:04 J'ai eu beaucoup de chance de m'en sortir.
01:06 Les gens me disent, oui, c'est égoïste de faire une tentative de suicide.
01:09 Tu te rends compte de la souffrance que tu vas générer.
01:11 On ne peut même pas penser aux autres autour parce qu'on va tellement mal.
01:14 Ce n'est pas de l'égoïsme, en fait, je ne vais pas dire de la survie
01:17 puisque c'est en dessous, en fait, c'est de la surmorte.
01:19 C'est juste au-dessus de la mort.
01:20 Pourquoi est-ce qu'on en arrive là ?
01:22 Parce que c'est long.
01:23 C'est très, très long, un traitement, avant de commencer à être efficace.
01:26 Il faut des mois et on est fatigué.
01:28 Au bout d'un moment, on est vraiment fatigué.
01:29 C'est assez compliqué parce qu'il y a différentes pathologies.
01:32 Par exemple, moi, j'ai été diagnostiquée bipolaire, mais pas tout de suite.
01:36 D'abord, on a cru que c'était juste une phase dépressive,
01:38 mais en fait, dans la bipolarité, quand on commence à aller mieux,
01:42 on va très, très bien, on va beaucoup trop bien.
01:45 Et après, on retombe, mais on retombe très, très, très profondément.
01:48 C'est dangereux, en fait, quand on est tout en bas.
01:50 Donc moi, quand j'ai dû être hospitalisée,
01:52 mon premier réflexe, ça a été de me dire, je ne suis pas tarée,
01:54 je ne vais pas aller chez taré, en fait, je n'ai rien à faire là-bas.
01:56 On a l'espèce de cliché des gens qui parlent tout seul avec un entonnoir sur la tête.
02:00 Pas du tout.
02:00 C'est un endroit où on soigne les gens qui ont des problèmes psychiatriques.
02:03 C'est ce qui était mon cas.
02:04 Financièrement, c'est compliqué.
02:05 Il faut avoir les moyens de se soigner quand on a des problèmes psychiatriques
02:08 parce qu'il y a très peu de mutuelles qui prennent en charge le psychiatrique.
02:11 Je suis allée une fois dans le public après une tentative de suicide.
02:13 Je suis restée une semaine.
02:15 Ça a été la pire semaine de toute ma vie.
02:17 C'était affreux, vraiment.
02:19 Ça hurle, les chambres sont pourries, la bouffée est dégueulasse,
02:23 les soignants sont dépassés.
02:24 Vraiment, c'est l'enfer.
02:26 J'ai pu me payer une clinique privée.
02:28 J'ai fait trois cliniques et c'est seulement sur la dernière clinique
02:32 où je suis tombée sur le bon psychiatre, le bon psychologue.
02:34 Ce que ça m'a appris sur moi, c'est que je suis un être humain.
02:37 J'ai des limites et j'ai des besoins, j'ai des envies.
02:40 Et je ne savais pas ça.
02:41 C'est fou, quand on va mieux, ça ne se fait pas du jour au lendemain.
02:44 Donc déjà, ça fait hyper fort de sortir d'une clinique
02:46 parce qu'on prend toutes les décisions pour toi.
02:48 La bouffe, les horaires, les activités.
02:51 T'es habitué aux gens avec qui tu traînes.
02:53 Tu t'es refait un monde à l'intérieur du monde et il faut en sortir.
02:55 Et le sevrage, c'est affreux.
02:57 C'est vraiment comme une crise de menthe.
02:58 En fait, on a l'impression qu'on ne va pas s'en sortir.
03:00 Puis on s'en sort.
03:01 Le fait de presque mourir,
03:03 on prend énormément de recul par rapport aux choses.
03:05 Tout devient moins grave.
03:07 Ouais, on se réaligne, clairement.
03:09 Aujourd'hui, je dirais que je me sens très bien, mais vraiment.
03:11 Quand je suis fatiguée, je me repose.
03:13 Je vais à mon rythme, au niveau familial et au niveau amical.
03:16 J'ai fait un tri et en fait, la vie est hyper courte, vraiment.
03:19 C'est cliché de dire ça, mais c'est vrai.
03:22 Et on va perdre les gens autour de soi, donc il faut en profiter.
03:24 C'est maintenant, en fait.
03:25 Avant, j'étais toujours dans l'anticipation.
03:28 Maintenant, je suis dans le présent.
03:29 Je peux crever dans dix minutes.
03:31 J'aurais profité à fond de tout et je n'ai aucune envie de mourir.
03:35 Je crois que je n'avais jamais compris que la vie, ça pouvait être beau.
03:39 J'étais en force tout le temps.
03:40 J'allais hyper mal, mais je ne me rendais pas compte jusqu'à ce que je m'effondre.
03:44 Aujourd'hui, c'est si beau.
03:45 *BIP*

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