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Grand témoin : Aquilino Morelle, ancien conseiller politique de Lionel Jospin et de François Hollande, auteur de « La parabole des aveugles » (Grasset)

GRAND DÉBAT / Europe : la tentation populiste ?

« Le chrono de Blako » par Stéphane Blakowski

Mercredi 22 novembre 2023, le candidat du « Parti de la liberté », Geert Wilders, a remporté les élections législatives aux Pays-Bas. Il est ouvertement islamophobe et anti-européen. Cette victoire marque une étape supplémentaire dans la conquête du pouvoir par l'extrême droite en Europe. Georgia Meloni en Italie, Robert Fico en Slovaquie, Viktor Orban en Hongrie : les dirigeants populistes européens prospèrent. En Finlande, Lettonie et en Suède, les populistes font partie d'une coalition gouvernementale ou soutiennent ses prises de position. En Allemagne, dans les derniers sondages, le parti d'extrême droite AFD est le deuxième parti avec 21% d'intentions de vote. Alors que Javier Milei, qui idolâtre Donald Trump, vient d'être élu à la tête de l'Argentine, faut-il s'inquiéter de cette percée de l'extrême droite ? Va-t-elle s'arrêter ou au contraire arriver à son paroxysme lors des élections européennes en juin 2024 ?

Invités :
- Yaël Goosz, éditorialiste et chef du service politique à « France Inter »,
- Laurent Joffrin, directeur du quotidien en ligne « LeJournal.info »,
- Richard Werly, correspondant France/Europe pour « Blick »,
- Louise Corradini, correspondante en France du journal argentin « La Nación ».

GRAND ENTRETIEN / Aquilino Morelle : haro sur la gauche !

Marine Le Pen pourrait remporter les élections présidentielles en 2027. Il faut désormais l'envisager et combattre cette « menace » selon Aquilino Morelle. Cet ouvrage retrace le processus de normalisation du Rassemblement National qui leur a permis de gagner des électeurs. De Jean-Marie Le Pen à Jean-Luc Mélenchon en passant par François Mitterrand, l'auteur analyse l'évolution des courants politiques en France. Il appelle Emmanuel Macron à organiser une réunion avec tous les partis pour faire barrage au Rassemblement National. Les partis politiques pourront-ils s'unir pour mettre fin à l'ascension de Marine Le Pen ?

Grand témoin : Aquilino Morelle, ancien conseiller politique de Lionel Jospin et de François Hollande, auteur de « La parabole des aveugles » (Grasset)

LES AFFRANCHIS

- Mariette Darrigrand, sémiologue,
- Bertand Périer, avocat,
- « Action planète » : Léa Falco, membre du collectif « Pour un réveil écologique ».

Ça vous regarde, votre rendez-vous quotidien qui prend le pouls de la société : un débat, animé par Myriam Encaoua, en prise directe avec l'actualité politique, parlementaire, sociale ou économique.
Un carrefour d'opinions où ministres, députés, élus locaux, experts et personnalités de la société civile font entendre leur voix.

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Transcription
00:00 ...
00:06 -Bonsoir et bienvenue.
00:08 Très heureuse de vous retrouver.
00:10 Ce soir, comment stopper l'ascension de Marine Le Pen ?
00:13 Bonsoir, Aquilino Morel.
00:14 Merci d'être notre grand témoin.
00:16 Vous publiez "La parabole des aveugles"
00:19 chez Grasset. C'est un essai passionnant,
00:21 percutant sur la favorite de 2027
00:23 et les raisons qui la placent aujourd'hui
00:26 aux portes du pouvoir.
00:28 Une question très violente, notamment sur la gauche.
00:30 Votre famille politique, vous nous direz s'il n'est pas trop tard.
00:34 Dans la deuxième partie, notre grand débat ce soir,
00:37 l'extrême droite à l'assaut de l'Europe.
00:40 La victoire éclatante du Parti pour la liberté
00:42 de Geert Wilders aux Pays-Bas confirme la poussée
00:45 d'un courant anti-immigration et anti-islam
00:48 sur tout le continent.
00:50 Italie, Hongrie, Slovaquie, et maintenant Pays-Bas.
00:53 La progression des populistes va-t-elle renverser
00:56 la donne au prochain scrutin européen de juin ?
00:58 Nous en débattons dans un tout petit instant
01:01 avec mes invités.
01:02 Enfin, nous affranchis ce soir le billet d'humeur
01:05 de l'avocat Bertrand Perrier, le mot de la semaine
01:08 de Mariette Darrigrand, et Action Planète,
01:11 la chronique écolo signée Léa Falco.
01:13 Voilà pour le menu. On y va.
01:15 Aquilino Morel, Savourga, c'est parti.
01:17 ...
01:28 -Jusqu'où ira la vague populiste en Europe ?
01:31 Il était le favori, mais le triomphe de Geert Wilders
01:34 aux législatives aux Pays-Bas est un choc.
01:37 Ils sont partis. Le PVV est largement arrivé en tête
01:40 et risque de peser lourd sur la recomposition
01:42 des rapports de force en Europe. Bonsoir, Laurent Geoffrin.
01:46 -Bonsoir. -Merci d'être avec nous.
01:48 Vous êtes le directeur du quotidien en ligne,
01:51 le journal Info. On connaît bien votre signature.
01:54 Longtemps patron de Libération et de L'Obs.
01:56 Bonsoir, Yael Ghos. -Bonsoir.
01:58 -Ravie de vous retrouver, éditorialiste et chef
02:01 du service politique de France Inter.
02:03 Bonsoir, Richard. -Bonsoir.
02:04 -Richard Verly, visage familier de cette émission.
02:07 Vous êtes le correspondant France-Europe pour Blic.
02:10 Blic, qui, à les petites promos, a désormais son podcast hebdo
02:14 sur la France que vous produisez.
02:16 Enfin, bonsoir, Louise Corradini. -Bonsoir.
02:19 -Bienvenue à vous. Vous êtes la correspondante en France
02:22 du journal argentin La Nation.
02:24 On va parler tout à l'heure de la victoire
02:26 de Javier Millei, élu président de l'Argentine dimanche dernier.
02:30 Aquilino Morel, ce débat est un peu fait pour vous,
02:33 puisqu'il prolonge directement votre réflexion
02:35 dans la parabole des aveugles.
02:37 On commence par planter le décor.
02:39 N'hésitez pas à intervenir. -Merci.
02:41 -On plante le décor. Qui est-il, ce Gert Wilders ?
02:44 Qu'est-ce qu'il peut provoquer ?
02:46 Un mouvement de bascule en Europe ?
02:48 C'est dans le chrono de Blaco qu'on accueille.
02:51 Bonsoir, mon cher Stéphane. -Bonsoir, Myriam.
02:54 Bonsoir à toutes et tous.
02:56 -On l'appelle le "Captain Peroxide".
02:58 -J'ai entendu votre question. Qui est Gert Wilders ?
03:01 En France, il n'est pas du tout connu,
03:04 alors qu'au Pays-Bas, c'est un vieux routier de la politique
03:07 qui siège au Parlement depuis 25 ans.
03:09 Sa première élection, c'était en 98.
03:12 Il était sous une étiquette de centre droit modérée.
03:14 La bascule, pour lui, c'est 2004,
03:16 lors de l'assassinat de Théo Van Gogh par un islamiste.
03:20 Vous vous souvenez peut-être de ça.
03:22 Il avait publié ce jour-là un tweet
03:24 où il s'engageait à dire librement ce qu'il pensait de l'islam.
03:27 Ça fait 20 ans qu'il dit librement des insultes en permanence
03:31 sur l'islam, au point qu'il vit sous protection policière.
03:34 Je pourrais faire la liste de ses propos choquants.
03:37 Je vous signale que, en 2009, il a été refoulé à Londres
03:41 parce que ses propos sont si excessifs
03:43 que les Britanniques craignaient que ça puisse créer
03:46 des émeutes lors de sa venue.
03:48 Comment quelqu'un d'aussi extrémiste
03:50 a pu arriver en tête, aux législatives, au Pays-Bas ?
03:53 Il faut reconnaître qu'au départ,
03:55 il y avait un problème de sécurité lié à l'immigration.
03:58 C'est un des thèmes de Gerd Milders.
04:00 Vous vous souvenez peut-être que l'an dernier,
04:03 un gang marocain avait carrément projeté
04:05 d'enlever soit la princesse héritière,
04:07 soit le Premier ministre,
04:09 soit leur chef qui était en prison.
04:11 Pourtant, si Gerd Milders est arrivé en tête,
04:14 ce n'est pas seulement parce qu'il a des propos radicaux
04:17 sur l'immigration ou l'islam,
04:19 c'est le contraire.
04:20 Il a mis de côté tous ses propos
04:22 où il proposait d'interdire le Coran,
04:24 de mettre les mosquées pour faire apparaître
04:27 un côté plus modéré.
04:28 Je vous propose de l'écouter.
04:30 -Les mosquées et le Coran sont un point crucial de notre campagne.
04:33 Est-ce que l'on dit que si nous ne pouvons pas mettre en place
04:37 ces noms, il y a d'autres points qui sont plus importants ?
04:40 -Vous voyez, dans le fond, il a suivi l'exemple
04:43 donné en France par Marine Le Pen
04:45 en cherchant à se dédiaboliser.
04:47 C'est un mot que j'ai du mal à dire.
04:49 Mais pendant la campagne, il a pas mal axé sa campagne
04:52 sur le pouvoir d'achat.
04:54 Il proposait de supprimer les taxes sur l'essence,
04:56 comme Marine Le Pen.
04:57 Ne soyez pas étonnés si elle se réjouit de son succès.
05:00 -Je me félicite de cette victoire
05:02 parce que Gerd Milders et son mouvement
05:05 sont des alliés du RN.
05:07 Ils participent du groupe Identité et démocratie
05:10 au Parlement européen.
05:12 Et ils démontrent que de plus en plus de pays
05:15 au sein de l'Union européenne
05:17 contestent son fonctionnement.
05:20 Il y a vraiment de quoi.
05:21 -On sent qu'elle a une dent contre l'Europe.
05:24 Elle ne propose plus de quitter l'Union européenne,
05:27 comme c'était le cas jusqu'en 2017.
05:29 En revanche, lui, Gerd Milders, reste attaché à ça.
05:32 Il proposait un référendum sur le maintien des Pays-Bas
05:35 dans l'Union européenne.
05:37 Vous savez que dans l'Union européenne,
05:39 dès qu'on parle de maintien dans l'Union,
05:41 c'est un peu la panique.
05:43 C'est ce que dit le Parisien, un sueur froid à Bruxelles.
05:46 Au-delà de Gerd Milders,
05:48 il y a une montée de la droite nationaliste en Europe.
05:51 C'est une carte où on voit la représentation
05:54 de la droite nationaliste dans les parlements.
05:56 Plus c'est bleu, plus c'est à droite.
05:59 C'est le bleu très marine, c'est la Hongrie d'Orban.
06:02 La Pologne, où une majorité progressiste s'est installée,
06:05 on voit que les conservateurs sont encore très présents.
06:08 Il y a de l'extrême droite qui participe en Finlande,
06:12 en Suède, au gouvernement.
06:13 Même l'Allemagne, qui est plutôt pas si foncée que ça,
06:17 il y a 20 % d'intentions de vote pour l'AFD,
06:20 qui est un parti néo-nazi, vraiment d'extrême droite.
06:23 Forcément, les partisans de l'Europe s'inquiètent d'autant plus
06:26 que dans six mois, ce sont les élections européennes.
06:30 -C'est pour ça que toutes les élections qui vont venir,
06:33 elles sont aussi essentielles, aussi fondamentales.
06:36 On n'a jamais eu un moment aussi décisif dans notre histoire.
06:40 Vous savez qu'aujourd'hui, Poutine est en train de gagner son pari.
06:43 Son pari, c'était que si on met sous pression l'Europe,
06:47 si on met l'Europe dans une situation
06:49 où elle est obligée de se mobiliser,
06:51 elle n'y arrivera pas.
06:53 -C'était tout ce que je voulais vous dire.
06:55 Avec ce que je viens de vous dire,
06:58 il y a de quoi lancer un débat.
06:59 -Richard Verlis, je commence avec vous.
07:02 J'ai regardé quand même les taux de croissance et le chômage
07:05 dans ce pays, les Pays-Bas, et là, on se dit que ça fait rêver.
07:09 Franchement, ils sont à 3 % de chômage,
07:13 4,5 % de croissance,
07:16 et pourtant, c'est l'extrême droite qui gagne.
07:18 Comment vous l'expliquez ?
07:20 Uniquement par les fameux 3 I,
07:22 insécurité, immigration, islam ?
07:24 -Je rajouterais un élément, c'est l'usure du pouvoir.
07:27 Quand Ruté, le Premier ministre, a démissionné en juillet
07:30 parce qu'il n'arrivait pas à trouver une majorité
07:33 sur un nouveau texte consacré à l'immigration,
07:36 il est resté 10 ans au pouvoir.
07:38 Il y avait une usure personnelle liée à Ruté,
07:40 qu'on appelait "Téflon-Marc",
07:42 parce qu'il arrivait à s'en sortir,
07:44 mais ça n'a pas été le cas.
07:46 La deuxième chose, c'est un affaissement de la gauche
07:49 et des verts.
07:50 Il faut voir la victoire de Gerd Wildorff,
07:53 mais il faut regarder l'ensemble du spectre.
07:56 Le "L'Ouest et les Verts", mené par Franz Timmerman,
07:58 l'ancien vice-président de la Commission européenne
08:02 chargé du Green Deal, les grandes ambitions écologiques,
08:05 n'est qu'à 25 sièges.
08:06 Les 3 I, comme vous l'avez dit,
08:08 insécurité, immigration,
08:10 mais aussi l'usure de Ruté et une gauche qui n'est pas arrivée,
08:14 et là, on trouvera des parallèles avec la France,
08:17 a apporté une alternative aux préoccupations
08:19 des électeurs néerlandais.
08:21 -Gael Gause, il était ultra-libéral,
08:24 et, envers Gerd Wildorff, il est devenu un peu étatiste,
08:27 voire très clairement enclin à ouvrir les vannes
08:30 de la dépense publique. Il s'est marinisé ?
08:32 -C'est ce que Marine Le Pen dit en coulisses.
08:35 Elle dit, elle remercie Gerd Wildorff
08:37 d'avoir "aérénisé" son programme,
08:39 c'est-à-dire d'avoir gardé les 3 I dont vous parliez,
08:43 notamment la lutte contre l'immigration,
08:45 mais d'avoir ajouté du social, de la sécurité,
08:48 de la santé, de l'Etat-providence, peut-être fictif et factice,
08:52 mais en tout cas, c'est rajouté dans le programme.
08:55 La fin de campagne de Gerd Wildorff,
08:57 il met un peu de côté l'outrance.
08:59 On se souvient, c'est quelqu'un qui compare le Coran à Mein Kampf.
09:03 On est à ce niveau de violence verbale et idéologique.
09:06 Il ajoute en fin de campagne des choses
09:08 qui sont beaucoup plus sensibles
09:10 pour les classes moyennes néerlandaises.
09:13 Donc, il y a cette dimension-là,
09:15 et j'ai envie de dire, le libéralisme de Gerd Wildorff
09:18 n'a presque rien à voir
09:20 avec l'étatisme de Marine Le Pen.
09:22 Il faut considérer que toutes ces extrêmes-droites
09:25 qui ont le vent en poupe,
09:27 et relativisons l'Espagne et la Pologne,
09:29 on ne peut pas faire une cartographie unique.
09:32 -Le parti d'extrême-droite, le PiS, a perdu.
09:34 -Marine Le Pen reste sur un registre très différent.
09:37 On se demande ce que ces extrêmes-droites
09:40 ont parfois à faire ensemble,
09:42 tellement leur logiciel économique diffère.
09:44 C'est sur des questions identitaires qu'il y a rassemblement,
09:48 et Georgia Melloni, c'est le grand écart.
09:51 Georgia Melloni, finalement, s'est européanisée,
09:54 malgré elle, au contact du pouvoir,
09:57 en faisant adopter le pacte Asie-immigration.
09:59 Les eurodéputés de son camp ont voté au Parlement européen
10:03 pour ce pacte-là, que Marine Le Pen conteste.
10:05 -Elle est atlantiste, elle est plutôt pro-Ukraine,
10:08 contrairement à d'autres extrémistes en Europe.
10:11 -Je me suis écarté du sujet.
10:13 Restons sur les Pays-Bas.
10:14 Gerd Wildorff a bénéficié du carburant des autres.
10:17 Toutes les autres parties autour de lui, ses adversaires,
10:21 ont repris l'argumentaire anti-immigration.
10:23 Finalement, les électeurs sont allés chercher l'original,
10:27 et pas la copie, et ça, c'est exactement la bascule
10:29 dont on est en train de vivre en France avec Marine Le Pen.
10:33 Vous avez les LR, l'illiputien, la droite française,
10:36 qui court derrière les mots et les arguments de Marine Le Pen
10:39 et qui lui fournit un carburant.
10:41 C'est elle qui monte avec d'autres supporters.
10:44 -L'original préféré à la copie.
10:46 Laurent Geoffray, sur l'Europe, là aussi,
10:48 il y a des distinctions, parce que ce Giusseppe Wildorff,
10:52 il veut le nexit, la sortie des Pays-Bas
10:54 de l'Union européenne, il veut faire un référendum.
10:57 Là, il y a une distinction avec Marine Le Pen,
11:00 qui le souhaitait, mais qui ne le souhaite plus.
11:02 Vous, vous voyez des grands invariants
11:05 chez ces populistes venus de la droite radicale,
11:08 de l'extrême droite.
11:09 Qu'est-ce qu'ils ont en commun ?
11:11 Est-ce que c'est immigration, islam, insécurité uniquement ?
11:15 -Uniquement, non, mais principalement, oui.
11:17 -Principalement. -C'est ce que les gens de gauche,
11:20 mes amis, refusent de voir.
11:22 Ils expliquent que c'est à cause du social,
11:25 c'est à cause de l'Etat-providence qui ne fonctionne pas,
11:28 de la crise économique, le chômage, etc.,
11:30 toutes choses qui n'existent pratiquement pas aux Pays-Bas.
11:34 Donc, il y a un problème.
11:35 Si on cherche une causalité, simple, résumée,
11:38 c'est l'immigration,
11:40 c'est-à-dire l'identité et la crainte pour l'Etat-providence.
11:43 C'est les deux.
11:44 Tant que la gauche refusera de voir cette réalité,
11:47 elle se fera battre.
11:49 Non pas qu'il faille, comme vous l'avez dit,
11:51 reprendre le discours du Rassemblement national,
11:54 l'extrême droite ou des populistes, il faut assumer l'accueil,
11:57 mais il faut que l'accueil soit équilibré
12:01 par un sentiment de maîtrise.
12:04 C'est le point clé.
12:05 Les gens ont le sentiment qu'on ne maîtrise pas l'immigration.
12:09 Si on dit à la population, voilà, l'immigration, c'est juste,
12:13 c'est utile, regardez,
12:14 30 % dans le bâtiment, c'est des gens qui viennent de l'étranger.
12:18 Les services à la personne, ce sont des immigrés, souvent.
12:21 Les travailleurs de première ligne qu'on a vus et célébrés
12:24 pendant la crise du Covid, ce sont souvent des immigrés.
12:27 Les gens comprennent bien qu'on en a besoin
12:30 et qu'on peut vivre avec eux.
12:32 On le fait tous les jours dans les entreprises.
12:34 -Le nid en régularise en Italie ?
12:36 On en a besoin pour l'économie vieillissante.
12:38 -Il y a un corollaire à ce que je dis.
12:41 Il faut dire aux gens, on contrôle, on maîtrise.
12:45 D'abord, il y a des conditions d'entrée.
12:48 Il faut s'intégrer à la vie sociale,
12:50 apprendre la langue, apprendre les valeurs de la société,
12:54 il faut s'intégrer.
12:55 Je ne dis pas s'assimiler, mais en tout cas s'intégrer.
12:58 Deuxièmement, les flux doivent être maîtrisés.
13:01 On ne peut pas dire...
13:02 Il y a des lois en France, il y a des lois.
13:05 Personne ne veut les bouleverser.
13:08 Il y a des lois qui disent qu'on accueille les réfugiés,
13:11 il y a des règles, et ceux qui ne sont pas dans les critères
13:14 sont renvoyés chez eux, mais ils ne sont pas renvoyés.
13:17 Les gens se disent qu'ils baratinent.
13:20 Ils ne maîtrisent rien,
13:21 et donc cette classe politique est incompétente.
13:24 Ca s'applique à d'autres sujets, mais ce sujet-là est central.
13:27 -Votre thèse, vous, vous êtes extrêmement dure
13:30 avec la gauche, cette gauche morale,
13:32 cette gauche du camp du bien qui a plongé dans le déni.
13:36 -Pire ! Alors, là, c'est... Voilà.
13:38 -Mais qui aime bien châtie bien.
13:40 -Vous pensez vraiment qu'on paye quoi
13:43 avec cette montée des populismes un peu partout en Europe ?
13:46 Une forme de cécité sur l'identité,
13:49 ces questions liées à l'identité même de l'Europe ?
13:52 -Trois petites remarques par rapport au débat
13:55 qui vient de se nouer.
13:56 Si on a autant de mal à caractériser
13:58 des groupes qui sont si différents
14:00 et qu'on appelle néanmoins "populisme extrême droite",
14:03 c'est peut-être parce que l'usage de ce mot ne convient pas.
14:06 C'est une manière très commode.
14:08 Un petit mot caoutchouc qu'on peut tordre dans tous les sens.
14:11 -Qu'est-ce qu'il faut dire ? Les populismes au pluriel ?
14:14 -Au minimum. Il y a des populismes d'extrême gauche,
14:17 de gauche radicale, d'extrême droite,
14:19 et même d'extrême centre.
14:21 Le président de la République, en 2017,
14:23 s'est présenté comme un populiste.
14:25 -C'est vrai, je m'en rappelle.
14:27 -Il a fait plusieurs déclarations.
14:29 "Être populiste, être proche du peuple,
14:31 "alors je suis populiste."
14:33 On ne peut pas dire qu'il n'a pas chevauché la vague des gagistes.
14:36 C'est peut-être trop commode d'utiliser.
14:38 On voit bien qu'aux Pays-Bas,
14:40 c'est pas la même chose qu'en France,
14:42 car c'est pas la même histoire.
14:44 On n'est pas du tout au même moment.
14:46 Ensuite, sur la question des origines,
14:49 il y a les migrations.
14:50 Bien sûr qu'il faut la contrôler.
14:52 C'est pas seulement un sentiment pour les gens qu'on ne contrôle pas,
14:56 c'est une réalité.
14:57 Le mot a l'air de faire peur à Laurent Joffrin,
14:59 mais ce qui est important dans la migration,
15:02 c'est pas seulement de contrôler les flux,
15:05 mais pourquoi on fait venir des gens ?
15:07 On ne peut pas les faire venir
15:08 parce qu'ils sauraient ce qu'ils ne sont pas,
15:11 des bras ou des cerveaux.
15:12 Ils viennent avec leurs femmes, leurs enfants,
15:15 leur culture, leur religion, leur histoire.
15:18 Ils ont bien raison.
15:19 L'objectif, c'est l'assimilation.
15:21 Moi, je pense que chaque immigré,
15:23 chaque étranger, j'en ai été un,
15:25 qui vient en France, doit devenir français.
15:28 C'est ça, l'objectif.
15:30 C'est un objectif magnifique.
15:31 -C'est un débat.
15:33 On fait circuler, vous pouvez répondre.
15:35 -En disant que le troisième moteur
15:37 qui existe pour le vote populiste,
15:39 pour utiliser cette formule un peu facile,
15:41 c'est pas seulement l'immigration,
15:43 c'est pas seulement la pauvreté,
15:45 puisque, par exemple, aux Pays-Bas,
15:47 c'est pas un ressort principal,
15:49 mais c'est la question de l'Union européenne.
15:52 C'est une question centrale dans le débat.
15:54 -Que vous fustigez. -Je ne fustige pas.
15:57 -Ce tournant de l'Europe des années 80.
15:59 -Il y a des choses sur lesquelles il faut revenir.
16:02 -On va prendre un peu de hauteur sur le scrutin de juin.
16:06 -L'assimilation, en fait, c'est un mot assez flou.
16:09 Qu'est-ce que ça veut dire ?
16:10 Ca veut dire qu'ils doivent abandonner
16:13 toute identité particulière ?
16:14 Abandonner leur religion, leur manière de manger,
16:17 leur manière de s'habiller ?
16:19 -Leur prénom, parfois.
16:21 -Faut interdire les foulards dans la rue, par exemple,
16:24 parce que c'est pas de l'assimilation.
16:26 -Vous n'aimez pas ce terme ?
16:27 -Je crois pas qu'il soit possible.
16:30 -On ne demande pas aux étrangers d'abandonner
16:32 toute personnalité à l'entrée du pays.
16:35 On n'en demande pas. On n'a jamais demandé ça.
16:37 -On l'a demandé à mes parents et à des millions.
16:40 -Parce qu'ils ont voulu le faire. -C'est bien la question.
16:43 Il ne s'agit pas d'abandonner, mais d'aller dans une direction.
16:47 -On demande pas d'abandonner,
16:49 mais de devenir français.
16:50 Un français peut être musulman, juif, catholique.
16:53 -Il aura des mœurs particulières. -Bien entendu.
16:57 -On va continuer. C'est intéressant.
16:59 C'est pas nouveau, cette bagarre sur ces termes-là.
17:02 -C'est un des points clés. -Oui, c'est un point clé.
17:05 Louise Corradini, quand on regarde,
17:07 on a retrouvé la carte qu'a montrée Stéphane,
17:09 c'est la carte des poids électoraux
17:12 des partis d'extrême-droite,
17:15 d'ailleurs, tous d'extrême-droite,
17:17 pas d'extrême-gauche, dans ce qu'on a montré là.
17:20 On se dit, est-ce qu'en juin prochain,
17:24 il pourrait y avoir, par le jeu des coalitions,
17:27 un nouveau rapport de force, une nouvelle majorité,
17:30 à Bruxelles, entre l'union des droites,
17:33 une droite dure et une droite extrême ?
17:35 Où est-ce qu'on joue à se faire peur ?
17:37 -C'est vraiment un grand danger.
17:39 Bien sûr que si.
17:41 Ca pourrait exister.
17:44 Le problème, c'est l'équilibre de l'Europe.
17:46 Qu'est-ce que va-t-il se passer
17:48 avec les équilibres géopolitiques,
17:51 surtout de l'Europe ?
17:53 Que va-t-il se passer vis-à-vis de la guerre en Ukraine ?
17:57 Que va-t-il se passer avec la Russie ?
18:00 Que va-t-il se passer ?
18:02 N'imaginons pas si, aux Etats-Unis,
18:04 Trump gagne encore les élections.
18:08 Ca va être vraiment un autre monde.
18:10 Moi, je préfère ne pas imaginer.
18:13 Mais il faudrait quand même se préparer.
18:16 De toute manière, moi, je crois
18:18 qu'en ce qui concerne l'avance de l'extrême-droite,
18:22 on oublie une variable fondamentale.
18:24 C'est l'essence du déclassement des gens.
18:27 Parce que ça n'existe pas que en Europe.
18:31 Ca existe aussi partout en Amérique latine.
18:34 On va peut-être parler de... -On va en parler.
18:37 -Alors, quelle est la variable commune
18:41 qui pourrait expliquer cette avance partout dans le monde ?
18:45 Moi, je pense que c'est beaucoup plus sociologique
18:48 que les problèmes des immigrants,
18:51 ce qui, naturellement, est normal.
18:53 Mais les hommes, quand ils ont des problèmes,
18:55 quand ils ont des problèmes d'intégration,
18:58 quand ils ont des problèmes dans leur vie quotidienne,
19:01 ils pensent toujours que l'autre est l'enfer.
19:07 Donc il y a toujours...
19:08 -C'est du vote protestataire, de colère, pour vous.
19:11 -Voilà. Mais le problème est beaucoup plus profond que ça.
19:15 Je pense que c'est vraiment les sentiments de déclassement
19:18 des petites classes moyennes, des jeunes,
19:21 qui n'ont pas de futur.
19:23 Et ça, je ne sais pas si les gouvernements
19:26 sont capables de répondre à ce phénomène fondamental
19:30 et profond, et quelque chose d'extrêmement difficile.
19:33 Je suis très pessimiste.
19:35 -Ca va être la ligne de fracture,
19:37 de clivage de la campagne en juin.
19:40 En gros, les nationalistes euro-sceptiques
19:43 contre les progressistes europhiles ?
19:46 -Oui, je pense qu'on a pointé du doigt les deux grands thèmes.
19:50 Le premier, ce sera l'immigration.
19:52 C'est évident que sur ce thème-là,
19:54 les partis que j'appelle "nationaux populistes",
19:57 ils vont foncer, parce qu'ils voient que ça rapporte des voix,
20:00 et ils mettent le doigt sur des réalités
20:02 que les gouvernements n'arrivent pas à résoudre.
20:05 La meilleure preuve, c'est que le pacte asile-immigration,
20:09 ce paquet législatif européen, il a été présenté en 2020,
20:12 et il n'a toujours pas été voté,
20:14 et je ne suis pas sûr qu'il le sera avant les élections européennes.
20:18 Deuxième point, je reviens à ce que disait Morel,
20:21 le fonctionnement de l'Union européenne.
20:23 Il faut dire qu'on ne peut pas comparer
20:25 ce qui se passe aux Pays-Bas à ce qui se passe en Italie ou en France
20:29 car les Pays-Bas sont un contributeur net à l'Union européenne.
20:33 Les Pays-Bas paient pour l'Union européenne.
20:35 C'est beaucoup plus facile pour lui, Geert Wilders,
20:38 de dire qu'on ne veut plus payer pour des problèmes qui ne marchent pas.
20:42 Il ne peut pas dire qu'on ne veut plus payer car elle le reçoit.
20:45 Il a beaucoup d'argent dans le pipeline.
20:48 Autrement dit, lui, il a vraiment tous les arguments
20:51 en tant que leader d'une formation politique
20:54 dans un pays riche, fondateur de l'Union européenne.
20:57 Ca peut être très dévastateur. -Yael Goz.
20:59 C'est compliqué, les partis en Europe,
21:01 car ce n'est pas les mêmes que dans nos pays.
21:04 Est-ce que vous pensez qu'au vu des différents rapports de force
21:08 de ces élections, on peut assister
21:10 à une sorte d'union des droites
21:12 au niveau des partis qui siègent,
21:14 non pas par nationalité, je le rappelle,
21:17 mais par grande famille politique en Europe au Parlement ?
21:20 -On rentre un peu... On va zoomer sur le Parlement européen.
21:24 Il y a deux extrêmes-droites.
21:26 Si on peut résumer, il y a deux groupes,
21:28 ECR et le groupe Identité et Démocratie, ID,
21:31 qui se tirent un peu la bourre.
21:33 Il y a concurrence entre ces deux groupes.
21:35 -Ils sont divisés.
21:36 -Geert Wilders, par exemple,
21:38 est avec Marine Le Pen,
21:40 parce que Marine Le Pen ne siège plus,
21:42 dans le groupe ID,
21:43 avec la FD, l'extrême droite allemande.
21:46 Mais cela ne se mélange pas avec ECR,
21:49 qui est dominée par Mélanie,
21:50 qui est un peu fer de lance de ce groupe-là.
21:53 En termes de vote, ça peut tout à fait se coaliser
21:56 au Parlement européen.
21:57 Et vous avez une partie du PPE, la droite européenne,
22:01 partie populaire européenne,
22:02 qui est tentée aussi par des forces centrifuges
22:06 d'aller vers là où est la force aujourd'hui,
22:08 c'est-à-dire dans ce vote de droite dur.
22:11 -Les députés d'Orban sont au PPE.
22:13 -Il est possible que le 9 juin prochain,
22:15 après, c'est la campagne en Europe qui le décidera,
22:18 et la bataille d'arguments,
22:20 qu'apparaissent des minorités de blocage
22:23 dans le fonctionnement futur du Parlement européen.
22:26 Les pro-européens, qu'ils soient socialistes, écologistes,
22:29 centristes ou centre-droits,
22:31 tous ensemble, ne fassent pas forcément le poids
22:34 face à ces votes-là.
22:35 Mais ça, pour l'instant, c'est de la science-fiction.
22:38 -C'est de la fiction. -C'est ça.
22:40 -A quoi va ressembler la campagne ?
22:42 -L'épée de Damoclès de la campagne,
22:45 c'est ça. Est-ce que oui ou non, à la fin,
22:47 on arrive à un Parlement européen bloqué par des minorités
22:50 de blocage ? Pour le coup, tout le fonctionnement
22:53 remis en question, que ce soit sur les questions
22:56 climatiques, sur les questions d'immigration,
22:59 de gestion commune, à 27, il est là, l'enjeu.
23:01 C'est une expérience qui n'a pas commencé.
23:04 Le camp d'Emmanuel Macron, depuis quelques semaines,
23:07 est très mou sur sa campagne européenne.
23:09 On a l'impression que personne n'a envie d'aller au charbon.
23:12 -Sauf Macron. -Sauf Macron,
23:14 il n'est pas encore apparu là-dessus.
23:16 C'est un concours de défaut.
23:18 "Je ne serai pas tête de liste, toi non plus,
23:21 "Bernot Le Maire, non, etc."
23:22 La bataille mérite d'être menée beaucoup plus férocement
23:25 qu'elle ne l'est aujourd'hui du côté d'Emmanuel Macron.
23:29 -A quoi peut ressembler cette campagne,
23:31 avec ce risque de paralysie,
23:33 face à une vague eurosceptique au Parlement ?
23:36 -Depuis le Brexit, l'extrême droite a changé.
23:39 Peut-être pas à Vilders, je ne suis pas assez spécialiste,
23:42 mais l'extrême droite, en général, en France, en tout cas,
23:45 a changé. Elle veut toujours détruire l'Europe.
23:48 Ils sont nationalistes, ils ne veulent pas de l'Europe.
23:52 Mais ils ne veulent plus la détruire en la quittant.
23:55 -Ils veulent la transformer d'intérieur.
23:57 -Non, pas populaire du tout. Ils veulent la détruire,
24:00 la bloquer, en fait, bloquer les coopérations,
24:03 et surtout faire campagne,
24:04 c'est le plus dangereux, à mon avis,
24:06 contre toutes les conventions qu'on a pu passer
24:09 et qui protègent les droits individuels
24:12 et les libertés publiques.
24:13 C'est leur cible.
24:14 Il n'y a qu'à lire Le Figaro,
24:16 dans sa partie la plus à droite,
24:18 et il n'y a qu'à écouter toutes les idées de l'extrême droite.
24:22 Ils vous disent que c'est le gouvernement des juges,
24:25 que c'est insupportable, qu'on ne peut pas faire ce qu'on veut
24:28 en matière de droits de l'homme,
24:30 que c'est des abstractions, qu'il compte la nation...
24:33 -C'est l'adaptation de l'Etat de droit en France.
24:36 -En plus, l'Etat de droit,
24:37 par la souveraineté populaire, par le vote, le référendum,
24:41 c'est ça, leur nouvelle tactique.
24:43 Elle est plus redoutable, parce que ceux d'en face
24:46 ne peuvent pas dire "quittez l'Europe, regardez les Anglais".
24:49 Ils ne veulent pas quitter l'Europe et pas l'euro.
24:52 -Laurent Geoffrin, vous avez raison,
24:55 cette idéologie-là a contaminé la droite républicaine française,
24:58 qui aujourd'hui porte exactement les mêmes choses.
25:01 Vous verrez en mois de décembre,
25:03 une proposition de loi constitutionnelle
25:06 qui vise à sortir des traités européens,
25:08 et c'est Eric Ciotti qui la porte,
25:10 et Laurent Wauquiez lui-même, qui mène la guerre
25:13 contre l'Etat de droit et les autorités indépendantes.
25:16 -Je voudrais qu'on avance, je vous redonne la parole,
25:19 mais quand même, il faut qu'on parle de phénomène populiste,
25:23 parce que c'est suffisamment important
25:25 et c'est produit cette semaine.
25:27 La question, c'est l'Argentine, on l'appelle le Trump de la pompa.
25:31 Ravier Milleil a été élu à une très large majorité
25:34 dans un pays écrasé par l'inflation et la pauvreté.
25:37 Son portrait avec Elsa Mondragava.
25:39 -Le soir de son élection,
25:47 Ravier Milleil a troqué sa veste en cuir
25:50 pour un costume plus sérieux.
25:52 Mais il n'a pas mis de côté son franc-parler.
25:55 -Vive la liberté, carajo !
25:57 -Dimanche dernier, l'Argentine a porté à sa tête
26:00 cet économiste de 53 ans,
26:02 tendance anarcho-capitaliste.
26:05 -C'est une joie incroyable, vraiment.
26:07 C'est la fin d'un déclin sans fin.
26:09 Alors, aux corrompus, dehors.
26:11 -Aussi que les corruptes, à foir.
26:13 -Il n'est plus possible de vivre avec les augmentations,
26:16 avec la violence, avec les voleurs qui entrent par une porte
26:19 et sortent par l'autre, et les gens voulaient un changement.
26:22 Cheveux ébouriffés, allure de rockstar.
26:26 On le surnomme
26:29 le Donald Trump de la pampa.
26:32 -Je suis le léon !
26:34 Rouque au lavette et au milieu de l'avenue !
26:38 -Mais si son style peut faire sourire,
26:40 son programme lui inquiète.
26:42 Son emblème, la tronçonneuse, pour couper dans toutes les dépenses.
26:46 Le nouveau président veut privatiser tout ce qui peut l'être,
26:49 remplacer le peso par le dollar,
26:52 supprimer la banque centrale du pays.
26:54 Ultra-libéral sur le plan économique,
26:57 ultra-conservateur sur le plan social.
27:00 Opposé à l'avortement, qu'il désigne
27:02 comme un assassinat aggravé par ascendant,
27:04 Ravier Milei veut supprimer le ministère du droit des femmes
27:08 et les cours d'éducation sexuelle.
27:11 Un programme plus que radical
27:13 qui a pourtant convaincu une majorité d'Argentins
27:16 sensibles à son discours antisystème
27:18 dans un pays écrasé par une inflation à trois chiffres,
27:22 plus 140 % en 2023.
27:25 -Louise Corradini, j'ai une question simple,
27:28 parce qu'au-delà du portrait climato-sceptique,
27:32 antisystème ultra-libéral, ultra-grossier aussi,
27:35 la question, c'est s'il est sain d'esprit.
27:37 Est-ce qu'il est fou, Ravier Milei ?
27:39 -S'il est fou, moi, je crois que oui.
27:41 Mais de toute manière,
27:43 ce sont les Argentins qui l'ont choisi.
27:46 Donc est-ce que les Argentins sont fous aussi ?
27:49 Mais Ravier Milei est la preuve
27:53 que tout peut être pire.
27:55 On parle avec préoccupation de ce qui arrive en Europe,
28:00 voyez ce qui se passe en Argentine.
28:02 Alors, je crois que c'est une mauvaise définition
28:05 de dire que Ravier Milei est un Trump de Pampas,
28:11 parce qu'ils n'ont rien à voir.
28:13 -Alors, la différence ? -Voilà.
28:15 Ravier Milei est un homme
28:17 sorgi de nulle part,
28:19 un phénomène de la télévision.
28:21 Il a travaillé 15 ans à la télévision,
28:23 il a appris tous les codes de la télévision.
28:26 Je l'appelle un personnage TikTok,
28:28 et c'est ça qui est...
28:29 -Trump aussi est venu passer par la télévision,
28:32 pas que, mais il avait son show aussi.
28:34 -Il est économiste, il a été juste conseiller
28:38 de l'homme le plus riche de l'Argentine,
28:41 mais il a ses revanches
28:43 avec la casta, comme il l'appelle,
28:46 je vais dire, les castes dirigeants.
28:50 -Il a surgi rapidement, aidé par qui ?
28:53 Qui l'a financé ?
28:54 Qui lui a permis de faire campagne
28:57 et d'être appuyé à ce point ?
28:58 -Cet homme qui est propriétaire
29:01 d'une énorme chaîne de télévision
29:03 qui s'appelle Eonekian,
29:05 il est le propriétaire de tous les aéroports
29:07 en Argentine et en Amérique latine.
29:09 Il a une corporation de médias gigantesque.
29:13 Il a travaillé pendant 15 ans dans ces médias.
29:17 Et donc, il s'est fait connaître par ses outrances,
29:20 par ses insultes, par cette façon d'être...
29:24 Par exemple, il apparaissait dans les plateaux de télévision
29:28 habillé en super-héros, genre homme araignée,
29:32 avec tout masqué, avec sa tronçonneuse.
29:36 -On voit les outrances, la tronçonneuse,
29:38 les coupes sombres dans les dépenses publiques,
29:41 il supprime un maximum de ministères.
29:43 Il remplace le PSO par le dollar.
29:45 Quelles conséquences ? -Ca, c'est fondamental.
29:48 Dans l'imaginaire collectif pour les Argentins,
29:52 c'est fondamental.
29:54 Un pays qui a été gouverné, maltraité
29:57 pendant 70 ans par le peronisme,
30:00 le premier populisme en Amérique latine,
30:03 et qui est devant 140 % d'inflation
30:07 avec 4 millions de pauvres de plus en 8 mois,
30:13 comme avait créé l'autre candidat du ballotage,
30:17 qui était peroniste, ministre de l'Economie,
30:20 ces gens, tout simplement,
30:22 pensaient, et on parlait de déclassement tout à l'heure,
30:25 qu'ils étaient hors du monde.
30:27 L'Argentine était sortie du monde,
30:30 elle n'existait plus.
30:31 Alors, qu'est-ce que ça signifie, que les dollars ?
30:34 C'est le moyen de revenir au premier monde.
30:38 C'est pour ça que ce sont surtout les jeunes
30:40 et les petites classes moyennes qui ont voté pour Mealey.
30:44 -J'aimerais bien avoir votre regard sur le phénomène Mealey.
30:47 Pour terminer ce débat, Richard Vanney,
30:49 est-ce que c'est pas Trump qui, par cette élection,
30:52 que personne n'avait vu venir, autorise ce genre de vote ?
30:57 Le tout est permis.
30:58 Est-ce qu'il a pas ouvert les vannes, au niveau mondial,
31:02 à ces irruptions de populistes ?
31:04 -Ce qui est certain, même si Louisa a noté les différences,
31:08 c'est qu'il y a des analogies continentales
31:10 entre l'Amérique du Sud et l'Amérique du Nord.
31:13 L'Amérique du Sud regarde vers le Nord
31:15 et tous les codes de Trump ont été importés par Mealey.
31:18 Oui, Trump a été l'homme qui a tout bousculé
31:21 et, à partir de ce moment-là, qui permet beaucoup de choses.
31:24 Cela dit, ça a été à noter.
31:26 Gerd Wilders est en politique depuis 25 ans.
31:29 Marine Le Pen, je ne vous fais pas le portrait,
31:32 elle est quasiment depuis toujours.
31:33 Mélanie, c'est aussi une vétéran de la politique italienne.
31:37 On n'est pas en Europe dans la même configuration,
31:40 mais Trump a ouvert les vannes.
31:42 Une chose, dans le cas de Mealey,
31:43 il faudrait se poser la question, à qui va profiter le crime ?
31:47 Si l'on considère que son élection, il veut privatiser,
31:50 qui va acheter tout ce qui va être privatisé ?
31:53 Ca intéresse qui de passer au dollar ?
31:55 J'ai l'impression que la fameuse caste qu'il dénonce,
31:58 en fait, elle a intérêt à son élection
32:00 parce qu'elle sera la première au guichet
32:03 lorsqu'il s'agirait d'acheter des sociétés privatisées.
32:06 Je ne sais pas si je me trompe,
32:07 donc il faudrait qu'on creuse pour savoir qui a payé
32:10 et qui y aura intérêt.
32:12 -Marine Le Pen ne commande pas cette élection,
32:14 ne félicite pas, en tout cas, outre mesure,
32:17 ne parle pas de Mealey comme d'un homologue futur.
32:20 Au contraire, elle se tient à distance
32:22 et ça, c'est très intéressant,
32:24 parce qu'elle a compris ses erreurs avec Trump.
32:26 Elle pleurait en bas de la Trump Tower
32:29 et voir Donald, qu'elle n'a jamais vu,
32:31 qu'il l'a snobé.
32:32 Le capitol est un traumatisme aussi pour le RN,
32:35 qui ne veut pas être associé à des poutchistes.
32:38 Donc, elle se tient à distance.
32:40 C'est intéressant, parce que Mealey devient presque
32:43 un contre-modèle pour Marine Le Pen,
32:45 voulant devenir présidente.
32:47 -C'est sûr qu'en termes de normalisation,
32:50 Mealey, c'est le contre-exemple.
32:52 Merci beaucoup. On s'arrête là.
32:53 C'était passionnant. Merci pour ce beau décryptage.
32:57 Restez avec moi, Akilina Morel.
32:58 Dans une dizaine de minutes, les parties prises
33:01 de nos affranchies.
33:02 Bertrand Perrier va revenir sur le duoday,
33:05 mais pas vraiment, convaincu par cette inclusion
33:08 pour trouver un emploi aux handicapés.
33:10 Le mot de la semaine qu'a choisi Marie-Edouard Darigran,
33:13 c'est "territoire", à toutes les sauces,
33:15 cette semaine.
33:16 Et puis, Léa Falco, de quoi nous parlez-vous
33:19 ce vendredi ?
33:20 -C'est un vendredi spécial,
33:22 c'est le Black Friday, donc on parle publicité.
33:24 -A tout à l'heure, les amis.
33:26 A tout à l'heure, parce que maintenant,
33:28 c'est l'heure de plonger dans la parabole des aveugles
33:31 chez Grasset, votre livre, Akilina Morel.
33:34 C'est dans le tableau de Bruegel qu'on voit en couverture.
33:37 On comprend très bien ce que vous voulez nous faire comprendre.
33:40 Attention, nous marchons, telles des aveugles,
33:43 sans même nous en rendre compte, vers l'abîme.
33:46 Regardez, c'est dans "L'Invitation" de Léa Hosseux,
33:49 et on en parle tous les deux juste après.
33:54 Si on vous invite, Akilina Morel, c'est parce que vous réglez
33:57 ses comptes à une gauche que vous connaissez bien.
34:00 Vous avez été la plume de Lionel Jospin à Matignon,
34:03 avant de devenir un proche conseiller de François Hollande
34:06 à l'Elysée. Vous, le haut fonctionnaire
34:08 et médecin vous dressez dans votre dernier livre,
34:11 "La parabole des aveugles", un terrible réquisitoire
34:14 contre votre propre camp, à l'origine, selon vous,
34:17 du délitement de la vie politique, qui profite donc
34:21 au Rassemblement national.
34:23 Retour sur une irrésistible ascension.
34:26 Nous sommes en 1983,
34:29 l'année du tournant libéral de François Mitterrand,
34:32 prince des politiciens, écrivez-vous,
34:34 qui porte le projet d'une Europe fédérale.
34:37 -Je considère la construction de l'Europe économique et politique
34:41 comme la chance principale de l'avenir français.
34:44 -Une Europe construite par et pour la dépolitisation,
34:49 dites-vous, un terreau pour l'extrême droite
34:51 sans part de thème que la gauche délaisse.
34:54 Une gauche qui s'enferme dans le déni et les bons sentiments,
34:57 quitte à instrumentaliser la marge des beurres
35:00 avec SOS racisme.
35:02 Vous y voyez un dispositif politicien et cynique,
35:05 conçu pour ressouder la gauche en lui donnant un ennemi commun,
35:09 le FN, sans jamais s'attaquer à la racine du mal,
35:12 que sont l'immigration, le chômage
35:14 ou la désindustrialisation.
35:16 Résultat, pour vous, le 21 avril 2002,
35:20 c'est cette décomposition politique qui s'étale au grand jour.
35:23 -Énorme surprise, Jean-Marie Le Pen,
35:25 sortir les conclusions en me retirant de la vie politique.
35:29 -Un choc pour la gauche que vous accusez
35:31 d'avoir abandonné la condition ouvrière
35:34 au profit des minorités ethniques, sexuelles ou de genre.
35:37 Avec ce livre, vous appelez les forces politiques
35:40 de votre camp à reconnaître les fautes du passé
35:42 et à reprendre la nation au Rassemblement national.
35:45 Alors, Achilleen O'Morel, à 40 mois de la présidentielle,
35:49 il reste une question.
35:50 Qui peut incarner cette gauche de la reconquête ?
35:53 -Réponse.
35:56 -Aujourd'hui, personne.
35:58 -Personne. On va vous montrer...
36:00 On a choisi quatre profils.
36:02 On a choisi de vous montrer Bernard Cazeneuve,
36:04 Fabien Roussel, François Ruffin, Jean-Luc Mélenchon.
36:07 On aurait peut-être pu rajouter François Hollande.
36:10 Aucun de ceux-là ne sont capables, à votre avis,
36:13 de reconquérir la gauche que vous appelez de vos vœux,
36:16 une gauche qui se serait enfin réveillée ?
36:19 -J'aimerais que l'un d'entre eux, au moins, en soit capable.
36:22 Mais...
36:23 Pour réussir ce tour de force,
36:26 il reste 40 mois, c'est peu,
36:28 de faire revenir à la gauche
36:31 les catégories populaires, principalement,
36:34 les ouvriers, les employés, qui ont été dégoûtés
36:37 et qui se sont détournés d'elles,
36:38 il faudrait, et c'est le préalable,
36:41 c'est le sens de mon livre, être capable
36:43 d'un minimum d'introspection
36:45 et de faire son méa culpa.
36:46 -On y va sur le diagnostic.
36:48 -Je n'ai entendu aucun de ceux-là le faire.
36:51 Le seul, peut-être,
36:52 je partagerais, de ce point de vue-là,
36:55 le jugement que le regretté Jacques Jullière
36:58 avait fait sur lui,
36:59 le seul qui, aujourd'hui, sauve l'honneur de la gauche,
37:03 c'est Fabien Roussel,
37:05 mais il n'est pas socialiste.
37:07 C'est peut-être aussi pour ça.
37:09 -Ah oui ? Parce que les socialistes
37:11 n'ont absolument aucune capacité à l'autocritique
37:14 et à l'inventaire, aujourd'hui ?
37:16 -Aucune. On est passés d'une époque
37:18 où vous avez montré des images de Lionel Jospin.
37:20 En 95, juste avant la présidentielle,
37:23 il avait expliqué qu'il était temps
37:25 et que lui, il demandait
37:27 de pouvoir exercer son droit d'inventaire.
37:30 -Depuis quand ?
37:32 -C'est plus un droit, c'est un devoir d'inventaire.
37:35 -Depuis quand la gauche a perdu les ouvriers ?
37:37 Depuis quand la gauche a, au fond,
37:39 abandonné véritablement le peuple ?
37:42 -C'est un processus qui s'est étalé
37:44 sur plusieurs décennies, c'est long,
37:46 mais le décrochage initial, c'est le tournant de mars 83.
37:50 C'est le moment où François Mitterrand décide
37:53 que le socialisme qui lui a permis d'arriver à l'Elysée
37:56 s'est terminé. Il fait cette mystification
37:59 qui consiste à escamoter le socialisme
38:01 et à faire surgir l'européisme,
38:03 cette idole nouvelle qu'est l'Europe,
38:05 à laquelle tout le monde doit se tourner
38:07 et vénérer, c'est à partir de ce moment-là.
38:10 Je vais répondre aussi plus précisément.
38:12 Quand on étudie les votes des ouvriers,
38:16 à partir de 1995,
38:18 le premier parti ouvrier, ça devient le Front national.
38:21 Ce n'est plus le Parti socialiste.
38:25 En 1981, 70 % des ouvriers ont voté François Mitterrand,
38:30 en second tour.
38:31 En 2002, 13 %.
38:34 Et déjà, en 2002, le 21 avril,
38:37 30 % des ouvriers avaient voté pour Jean-Marie Le Pen.
38:40 -Vous êtes extrêmement cinglant avec les années Mitterrand,
38:43 avec François Mitterrand lui-même,
38:45 l'apprenti sorcier, au fond,
38:47 qui est le premier responsable de cette poussée
38:50 de Jean-Marie Le Pen dans les années 80.
38:52 Il a eu cette phrase, 30 ans après,
38:54 c'est sidérant, vous le citez,
38:56 "C'est une force comme les autres,
38:58 "il ne faut pas avoir peur du Front national."
39:01 C'est lui qui, au fond, a permis la banalisation, le premier.
39:04 -Le premier et le plus grand banalisateur
39:07 du Front national, c'est François Mitterrand.
39:09 -Oui, il a été d'une habileté extraordinaire et perverse,
39:12 c'est que, dans le même temps, il a été le diabolisateur suprême.
39:16 C'est lui qui, un, a ouvert les portes
39:19 de l'audivisuel public à Jean-Marie Le Pen,
39:21 il a fait accéder à "L'heure de vérité",
39:24 au Club de la presse, au tribunal des flagrants délires,
39:27 toutes les émissions où il est apparu
39:29 comme la bête de scène où il a pu faire entendre ses idées,
39:32 et, dans le même temps, François Mitterrand faisait naître
39:36 SOS Racisme, dont l'unique combat
39:39 était de mettre à terre Jean-Marie Le Pen.
39:41 -Le camp du bien contre le camp du mal.
39:43 -C'est le même homme qui a fait les deux choses,
39:46 c'est François Mitterrand.
39:48 -Pour vous, la gauche n'a plus questionné l'immigration.
39:51 Dans son histoire, l'immigration, c'est un véritable sujet.
39:55 Il n'y a pas un angle mort sur l'immigration à gauche.
39:59 Si on reprend Jaurès, on peut trouver des discours.
40:01 Vous dites qu'aujourd'hui, et depuis quand,
40:04 cette question-là est asphyxiée par la morale ?
40:08 -Depuis que, par exemple, on l'a vu à l'écran,
40:11 depuis que le mouvement SOS Racisme et Herlèm Désir
40:14 ont écrit, puisqu'il l'a écrit,
40:16 et c'était le, comment dire, l'axe de leur idéologie,
40:20 l'immigration n'est pas un problème,
40:22 c'est le racisme qui en est un.
40:24 Donc, si on dit ça, et lorsqu'on dit ça,
40:27 on fait sortir l'immigration du champ rationnel
40:29 de la discussion politique,
40:31 puisqu'évidemment, il reste le racisme,
40:34 et personne ne peut se revendiquer comme raciste.
40:37 Tous ceux qui disent, et aujourd'hui,
40:39 c'est devenu, évidemment, à front renversé,
40:41 tous ceux qui disent aujourd'hui,
40:43 plus une force qui dit le contraire,
40:45 il faut maîtriser l'immigration,
40:47 ce sont des racistes, au sens d'Herlèm Désir.
40:50 -La diabolisation du RN a conduit, selon vous,
40:53 à l'épuisement du front républicain
40:55 et à l'exaspération de millions de Français.
40:58 Vous dites qu'il faut parler à ces électeurs
41:02 sans mépris, sans les infantiliser.
41:05 Comment jugez-vous la position du gouvernement
41:08 sur la présence de Marine Le Pen
41:09 dans la manifestation contre l'antisémitisme ?
41:12 Le RN n'a pas sa place dans les cortèges.
41:14 -Mais...
41:15 Ca date de maintenant quelques semaines,
41:18 mais je vais répondre plus précisément
41:20 à ce que vous dites, avec des choses
41:22 qui sont très faciles à comprendre.
41:24 Lorsque Jean-Marie Le Pen s'est présentée
41:27 à l'élection présidentielle de 1974,
41:29 il a recueilli 190 000 voix, 0,74 %.
41:31 En 1981, il n'est même pas capable de se présenter,
41:34 sans parrainage.
41:35 Le 21 avril 2002, il obtient 4 800 000 voix,
41:39 16,86 % des voix.
41:41 En juin, en mai 2022,
41:43 Marine Le Pen a obtenu 13 288 686 voix,
41:47 c'est-à-dire 41,45 %.
41:49 Retenez ça, c'est 70 fois
41:52 le score de son père en 1974,
41:55 trois fois le score du 21 avril.
41:57 Donc, quand vous passez d'un groupuscule
42:00 dirigé par un marginal, le FN et Jean-Marie Le Pen,
42:03 à un parti, qui est aujourd'hui quasiment interclassiste,
42:06 qui s'adresse et obtient 13 000 voix...
42:09 -Il y a plus que 5 millions d'écarts
42:11 entre Macron et Le Pen.
42:12 -On ne peut plus dire "vous êtes des fascistes,
42:15 "des extrémistes".
42:16 Le président de la République a rappelé
42:18 à la Première ministre qu'on ne pouvait pas dire
42:21 à 13 millions de Français qui avaient voté
42:24 Marine Le Pen en 2022 qu'ils étaient des pétainistes.
42:27 -Dans l'huis-clos d'un conseil des ministres.
42:29 Alors, aujourd'hui,
42:31 cette politique du "no pasaran", c'est un peu ça,
42:34 alto-fascisme, le fameux cordon sanitaire,
42:36 on l'a vu qu'il était quand même encore efficace,
42:39 car il s'est réveillé dans les trolleys de tour
42:41 de la dernière élection présidentielle,
42:44 à la grande surprise de Marine Le Pen,
42:46 et d'une certaine façon, pour l'instant,
42:48 elle ne gagne pas les élections, elle n'a pas d'alliés.
42:51 Comment vous jugez la position du gouvernement,
42:54 reprise par Emmanuel Macron, qui dit que le RN n'a pas sa place
42:58 dans ce type de cortège ? -Moi, je pense...
43:00 C'est personnel, mais d'autres personnes
43:03 partagent cette analyse, notamment Serge Klarsfeld,
43:06 qui, lui, est un chasseur de nazis,
43:08 qui a traqué toute sa vie... -Lui, il considère
43:10 que ça les engage et que s'ils sont là,
43:13 c'est déjà ça de gagné. -Il considère que lorsque
43:15 la cause est supérieure, et la lutte contre le racisme,
43:18 l'antisémitisme, qui est de la haine à l'état brut,
43:21 qui vise même pas une religion, mais une origine,
43:24 une culture, une trajectoire, est un objectif prioritaire,
43:28 et tout le monde doit être accepté.
43:30 Vous n'êtes pas obligé de manifester
43:32 si vous trouvez que la personne à côté de vous est plaisante.
43:35 Vous pouvez vous mettre 50 mètres derrière, 50 devant,
43:38 mais de dire à la fois que la lutte contre l'antisémitisme
43:42 justifie une manifestation de masse, mais vous n'y avez pas votre place,
43:46 me paraît incohérent. -Et Jean-Luc Mélenchon ?
43:48 Vous faites le procès de la gauche socialiste et mitterrandienne.
43:52 Vous dites qu'il est passé du côté obscur de la force
43:56 qui est la sienne. Qu'est-ce que ça veut dire ?
43:58 -J'ai écrit cette phrase avant les événements du 7 octobre.
44:01 Le livre était terminé au mois de septembre, donc avant.
44:05 Vous voyez que je m'étais pas beaucoup trompé.
44:07 Je ne visais pas, évidemment, je ne pouvais pas l'imaginer,
44:11 son comportement ambigu et de moins en moins ambigu
44:14 par rapport à la question des crimes et des massacres du 7 octobre.
44:18 Je visais par là le fait qu'on voyait bien
44:20 qu'il était dans une démarche où, tout en valorisant
44:23 son talent personnel d'analyste, de stratège,
44:26 de tribun, qui est indignable,
44:29 il était en train de perdre la possibilité
44:32 de rassembler autour de lui non seulement des électeurs de gauche,
44:36 mais même des électeurs allant au-delà,
44:38 puisque son objectif, semble-t-il, serait de se représenter
44:42 à l'élection présidentielle, et que plutôt, il se raccornissait
44:45 sur un électorat qu'il connaît bien, celui qui l'a fait
44:48 obtenir beaucoup de députés dans des quartiers
44:51 où l'immigration est très forte, la Seine-Saint-Denis et ailleurs,
44:55 et que, à mon sens, ça, c'est passer du côté obscur
44:58 de sa propre force, car sa force existe,
45:00 mais il ne s'en sert pas pour rassembler,
45:03 il s'en sert pour conforter des bastions
45:05 qui n'ont d'ailleurs guère besoin de l'aide,
45:08 puisqu'ils votent déjà à 60 % pour Jean-Luc Mélenchon
45:11 ou pour l'LFI. -Vous expliquez bien
45:13 que pour vous, le piège du rassemblement national
45:15 tendu il y a 30 ans par François Mitterrand,
45:18 Emmanuel Macron est tombé dedans.
45:20 Quel sursaut ?
45:21 Vous parlez d'une union nationale, c'est ma dernière question,
45:25 contre l'ERN, une forme d'accord
45:27 de toutes les forces politiques contre l'ERN ?
45:29 -Pas une union nationale, un sursaut national.
45:32 Je pense que vous voyez bien, tout à l'heure,
45:35 on le montrait, aujourd'hui, aucune des forces politiques
45:38 prises isolément, ni la gauche qui est pulvérisée,
45:41 ni la droite qui est complètement tassée,
45:43 n'est capable de barrer la route à Marine Le Pen.
45:46 -Alors ? -Alors, d'un mot,
45:48 il faut que tous ces gens-là se mettent d'accord
45:50 sur un programme minimal d'action sur les trois thèmes
45:53 qui taraudent le pays et qui alimentent le vote ERN,
45:56 c'est-à-dire le déclassement, on en parlait tout à l'heure,
45:59 la pauvreté et la désindustrialisation,
46:02 qui sont des plaies terribles, l'immigration du fait accompli
46:05 et le sentiment de dilution d'une France
46:07 dans une Europe de plus en plus fédéralisée.
46:10 C'est sur ce programme-là qu'il faut s'entendre et agir,
46:13 car le temps est compté.
46:14 -J'invite nos téléspectateurs à poursuivre ce dialogue
46:18 en lisant "La parabole des aveugles",
46:20 Marine Le Pen aux portes de l'Elysée,
46:22 c'est chez Grassef.
46:23 Vous restez avec moi, Akelino Morel.
46:25 C'est l'heure d'accueillir nos affranchis.
46:28 Ils vont vous faire réagir avec leur chronique.
46:31 On les accueille tout de suite.
46:32 Le duo du vendredi, Mariette Darrigrand,
46:35 notre sémiologue qui décortique un mot chaque semaine
46:38 et maître Bertrand Perrier pour un billet d'humeur,
46:41 à Salé-Asoué, je l'espère.
46:43 Préparez-vous, on commence avec vous, Léa Falco.
46:47 Vous voulez revenir sur ce spot de l'ADEME,
46:49 un spot décroissant qui n'a pas plu à tout le monde.
46:52 -Et plus spécifiquement sur ce qu'il y a
46:54 derrière cette réaction gouvernementale,
46:57 la question de la publicité.
46:59 On en parle peu, mais c'est une des grandes contradictions.
47:02 D'un côté, on a en France des engagements étatiques
47:05 sur les questions de réchauffement climatique
47:08 qui vont impliquer la réduction de la consommation.
47:11 Et pourtant, à côté, en tant que consommateur,
47:13 en tant que citoyen, on est matraqué chaque jour
47:16 par à peu près 1 200 pubs en moyenne,
47:18 rien que ça, qui vont, évidemment, nous inciter à consommer.
47:21 Et ce que vendent ces pubs-là, c'est aussi un idéal,
47:24 c'est aussi la consommation comme acte de réussite sociale.
47:28 Il y a une vocation informative, évidemment, de la pub,
47:31 c'est-à-dire vous faire savoir que le produit existe,
47:34 mais il y a aussi une vocation persuasive,
47:36 vous convaincre que ce produit-là va rendre votre vie plus cool,
47:39 plus sympa, et donc que c'est important de l'acquérir.
47:43 C'est comme ça, par ailleurs, qu'on se retrouve
47:45 avec des gens qui sont énergivores
47:47 et qui se baladent en pleine montagne ou dans des déserts,
47:50 alors que dans la vraie vie, ils sont plus souvent
47:53 dans des embouteillages. -Qu'est-ce qu'on fait ?
47:56 -C'est possible, au moins au niveau local,
47:58 sur l'espace public. Il y a des règlements locaux
48:01 de la publicité, peu usités aujourd'hui,
48:03 mais Lyon, par exemple, en a édicté un,
48:05 et va réduire de 60 à 90 % le nombre de panneaux publicitaires
48:09 dans la ville. C'est un premier axe.
48:11 Ca a été lourdement exploré par tout un tas de dispositifs.
48:14 La Convention citoyenne pour le climat,
48:16 d'il y a quelques années, avait fait figurer
48:19 dans ses recommandations finales la réduction drastique
48:22 de la publicité pour, je cite, "éviter une incitation quotidienne
48:26 "et non choisie à la consommation".
48:28 Mais sans effet, parce qu'il faut aussi rappeler
48:30 que derrière l'industrie de la publicité,
48:33 il y a des forts intérêts industriels.
48:35 En France, en 2019, c'est 34 milliards d'euros
48:38 investis dans la publicité et dans beaucoup de secteurs
48:41 qui sont soit défavorables à notre santé,
48:43 et la nourriture très grasse,
48:45 ou à l'habitabilité des conditions de notre planète,
48:48 la fast fashion, l'aviation low cost, etc.
48:51 Donc, derrière, c'est un vrai problème,
48:54 parce qu'on arrive à quelque chose qui va être fondamental
48:57 dans la perception qu'on va avoir de ce qui est désirable à l'avenir.
49:01 Les interdictions sur la publicité, ça existe déjà.
49:03 En France, on a la loi Evin, notamment,
49:06 qui interdit la publicité sur le tabac, sur l'alcool.
49:09 En plus, je me pose la question,
49:11 mais qui apprécie la publicité au quotidien,
49:13 partout autour de nous, en permanence ?
49:15 79 % des pro-français considèrent qu'il y en a trop,
49:18 85 % qu'elle est envahissante,
49:21 et plus de la moitié, 65 % exactement,
49:24 seraient prêts à interdire la publicité
49:26 pour les produits qui contribuent au réchauffement climatique.
49:30 Donc, n'en déplaise au gouvernement,
49:32 qui est aux abois pour une publicité de l'ADEME
49:35 qui incite à repenser ces modes de consommation,
49:38 et qui ne permet pas d'interdire la publicité.
49:40 -Les fameux dévendeurs. -Ils déconseillent d'acheter
49:43 quand on n'a pas usage d'un outil.
49:45 Une ponceuse mieux vaut l'allouer plutôt qu'autre chose.
49:48 Malgré ça, il faudra, dans les prochaines années,
49:51 réduire ce qui est une emprise, aujourd'hui,
49:53 de la publicité sur nos cerveaux. -Merci.
49:55 -Léa Falco, vous l'avez vue, ce spot ?
49:58 -Je l'ai vue, mais on voit bien que le gouvernement
50:00 est très embarrassé, car la croissance s'effondre.
50:03 Donc, toute mesure qui permettrait de relancer
50:06 par la consommation est positive.
50:08 En même temps, à moyen et long terme,
50:10 le but de lutter contre le réchauffement climatique
50:13 devrait en porter toute autre considération.
50:16 Mais là, le nez dans le guidon, on a besoin d'essayer...
50:19 -Fin du monde, fin du mois. Ca demande un autre débat.
50:22 On enchaîne avec vous, Bertrand. Vous voulez revenir
50:25 sur le duodet qui s'est tenu hier.
50:27 -C'était la 6e édition de cette opération dite "duodet",
50:30 cette journée au cours de laquelle les collectivités publiques,
50:34 les organisations, les entreprises privées,
50:36 sont invitées à accueillir des personnes
50:38 en situation de handicap qui vont former un duo
50:41 avec une personne valide et les deux personnes
50:43 vont passer la journée ensemble. Il s'agit, en quelque sorte,
50:47 d'assurer une expérience immersive pour les personnes
50:50 en situation de handicap dans le monde du travail
50:52 avec l'espoir qu'elles vont peut-être trouver un emploi.
50:56 Et de fait, dans 20 % des cas,
50:58 ça débouche sur une offre de stage,
51:01 de CDD ou de CDI. Il faut savoir que c'est un réel succès.
51:05 Il y a eu presque 30 000 binômes en divalide hier
51:08 dans notre pays.
51:09 -Vous y voyez aussi une opération de com' ?
51:11 -Oui. Il suffisait d'aller sur les réseaux sociaux hier.
51:14 C'était frappant. Il n'y avait pas un ministre,
51:17 pas un parlementaire, pas un journaliste
51:20 qui ne se mettait en scène avec la personne
51:22 en situation de handicap qu'il ou elle avait accueillie,
51:25 le président de la République, la Première ministre,
51:28 Clément Beaune, Franck Riester, Fatih Lakatabi,
51:31 la ministre en charge des personnes handicapées.
51:34 Et donc, évidemment, il y a, dans cette journée,
51:37 un petit côté trompe-l'oeil aussi.
51:39 Cette journée ne nous exonère pas
51:41 de nos obligations en termes d'insertion
51:44 sur le marché du travail des personnes
51:46 en situation de handicap les 364 autres jours de l'année.
51:50 -Il faut dire que les discriminations
51:52 demeurent largement dans notre société,
51:55 notamment dans l'accès à l'emploi.
51:57 -Le taux de chômage des personnes en situation de handicap
52:00 dans notre pays est de 12 %,
52:02 ce qui est quasiment deux fois plus que la moyenne générale.
52:06 Et il y a des emplois qui sont aussi plus précaires,
52:10 qui sont souvent dans un secteur protégé,
52:12 alors que les personnes pourraient accéder à un secteur classique.
52:16 Et même si le taux de chômage, c'est vrai, est en baisse,
52:19 la durée de chômage est plus importante.
52:22 Quand on est en situation de handicap,
52:24 au chômage aussi plus âgé,
52:26 avec des difficultés dans le retour à l'emploi,
52:28 beaucoup de personnes en situation de handicap
52:31 renoncent à chercher un emploi
52:33 et sortent en quelque sorte des statistiques,
52:35 mais si on fait le taux d'emploi,
52:37 c'est-à-dire le rapport entre le nombre de personnes handicapées
52:41 et le nombre de personnes qui travaillent
52:43 en situation de handicap, ce taux est très faible, c'est 38 %.
52:47 En gros, il y a une personne en situation de handicap
52:50 sur trois qui travaille dans notre pays.
52:52 -On peut mieux faire. -On peut mieux faire.
52:55 Depuis 1987, il y a une loi, le fameux quota des 6 %,
52:58 où les entreprises de plus de 20 salariés
53:00 doivent embaucher 6 % de personnes en situation de handicap.
53:03 Seuls 30 % des entreprises concernées respectent la loi,
53:07 les autres payent la contribution financière équivalente,
53:11 ce qui n'est pas satisfaisant.
53:12 On a besoin que ces personnes aient un emploi,
53:15 non pas que l'AGFI perçoive, ce qui est un moindre mal,
53:18 cette allocation. Il faut bien comprendre
53:21 que malgré tout, cette question du handicap
53:23 touche 12 millions de personnes en France,
53:26 c'est un problème absolument majeur.
53:28 Il y a 3 millions de personnes qui sont en situation
53:31 d'être actives et qui sont porteuses d'un handicap,
53:34 et notamment d'un handicap invisible.
53:36 C'est très important. Il y a les personnes
53:38 qui ont des difficultés avec l'accessibilité.
53:41 Il faut pas oublier les personnes qui ont un handicap invisible.
53:44 Il y a beaucoup de progrès à faire sur l'aménagement des postes.
53:48 La photo pour le duodé, c'est bien,
53:50 mais un contrat de travail, c'est mieux.
53:52 -Merci. Et c'est dit avec le coeur.
53:55 Merci beaucoup, maître Bertrand Perrier.
53:58 On va enchaîner avec votre chronique.
54:00 Le mot de la semaine, ça va vous intéresser.
54:02 Vous en parlez, d'ailleurs. Ce mot, c'est "territoire".
54:05 Il vous agace, ce mot, vous lui préférez la province.
54:08 Vous avez retenu "territoire" parce qu'on en parle,
54:11 les territoires occupés, en Cisjordanie notamment,
54:14 mais aussi en France, à propos de certains faits divers.
54:18 -Oui, ce mot est dans l'air, ce mot est monté,
54:20 et moi non plus, je ne l'aime pas, ce mot,
54:23 je dois dire que je l'ai vu arriver,
54:25 j'avais une vague méfiance, je n'ai pas creusé,
54:28 mais l'actualité et cette chronique m'a obligée à le faire
54:31 et j'ai compris pourquoi je ne l'aimais pas.
54:33 Il est très guerrier, un territoire,
54:35 ça se prend ou ça se défend,
54:37 toujours avec des moyens plus ou moins violents.
54:40 Et puis, ce mot est très hypocrite, en fait,
54:43 il se donne à nous sous un jour sympathique, moderne,
54:46 on ne dit plus province, on ne dit même plus région,
54:49 il faut dire la France des territoires.
54:51 Donc, il se met dans l'écosystème de la nature, de la campagne,
54:54 c'est un peu potager, bio, ça va avec tout ça,
54:57 donc il a quelque chose de très authentique,
55:00 même un peu rocailleux. -C'est vrai.
55:02 Je me souviens d'un Premier ministre,
55:04 Jean Castex, à la tribune de l'Assemblée nationale,
55:07 qui l'a répété, je ne sais plus combien de fois,
55:10 c'était son mantra, avec son accent du Sud, les territoires.
55:13 -Exactement, et donc là, je crois que dans notre imaginaire commun,
55:17 on mélange deux choses, territoire et terroir,
55:20 comme s'ils avaient la même racine. -C'est pas le cas.
55:23 -C'est pas le cas, c'est ambigu.
55:24 Il y a deux racines qui s'amalgament,
55:27 la terre, bien sûr, mais il y a une deuxième racine,
55:30 beaucoup moins sympathique, la terreur.
55:32 La notion latine de "territorium",
55:34 elle mélange les deux, et les Romains,
55:36 par exemple, quand ils annexaient une terre avec violence,
55:40 ils parlaient, ils ne disaient pas "terrifié",
55:42 mais ils disaient "terra" un peu comme "alibi".
55:45 Donc, ça, nous en sommes complètement les héritiers,
55:48 et il y a même eu, dans le droit médiéval,
55:51 cher Bertrand, la "just terrendi",
55:53 c'est-à-dire le droit de terrifier.
55:55 Donc, on pouvait organiser un espace par violence
55:58 avec un droit de terrifier, c'est absolument abominable.
56:01 La terreur française s'en est bien servie,
56:04 et mon impression, c'est que, effectivement,
56:06 l'actualité internationale, où, effectivement,
56:09 certains faits divers nous font penser
56:11 que ce droit de terrifier est revenu.
56:13 Et dernier point, pour éclairer,
56:15 pour en remettre une couche négative,
56:18 c'est que c'est dans la langue des éthologues,
56:20 des gens qui observent les grands fauves
56:22 qui émarquent leur territoire, ou les grands oiseaux.
56:25 Et là, ils ne sont pas sur la terre,
56:27 ils sont dans le ciel, donc on voit bien
56:29 que "territoire" se détache de la terre.
56:32 En revanche, un dernier mot qui est dans son écosystème,
56:35 c'est le mot "terrible", qui, aujourd'hui, est un peu mou,
56:38 mais qui, au départ, voulait dire "terrifiant".
56:41 Pour moi, dans tout territoire, il y a quelque chose de terrifiant,
56:44 c'est-à-dire potentiellement violent.
56:47 -Vous pouvez vous faire un mot ? Ca vous parle ?
56:49 -J'ignorais ce rapprochement avec l'idée de terreur et de terrible.
56:53 En revanche, je partage ce que vous disiez,
56:55 c'est-à-dire c'est un mot hypocrite et un mot,
56:58 comme je le disais, à propos du populisme, caoutchouc.
57:01 Vous pouvez le tordre dans le sens que vous voulez.
57:04 Le territoire, ça peut être l'Union européenne, la France,
57:07 une commune... -Alto, mot techno.
57:09 -Oui, ce sont des mots qui... C'est presque de la neuve langue.
57:13 -Merci beaucoup. On s'arrête là.
57:15 Merci pour vos chroniques, Léa Falco,
57:17 Mariette Darré-Grand, Bertrand Perrier,
57:20 et merci à vous, Akilino Moral, d'être venu nous voir sur LCP,
57:23 la parabole des aveugles,
57:25 c'est-à-dire chez Grasset, Marine Le Pen,
57:28 aux portes de l'Elysée.
57:29 C'est la fin de cette émission, la fin d'une belle semaine.
57:32 Merci à toutes les équipes de la chaîne parlementaire
57:35 qui ont rendu possible ces émissions.
57:38 Très belle soirée. C'est le week-end.
57:40 Profitez bien. A la semaine prochaine.
57:42 SOUS-TITRAGE : RED BEE MEDIA
57:44 ...

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