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Haïm Korsia, le grand rabbin de France et Chems-Eddine Hafiz, le recteur de la Grande mosquée de Paris, sont invités de BFMTV. Ils portent un message pour la paix au Proche-Orient.

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Transcription
00:00 le grand rabbin de France Raim Korsia, bonjour.
00:02 - Bonjour.
00:03 - Et le recteur de la Grande Mosquée de Paris,
00:05 Shams-Edin Mohamed Hafiz, bonjour.
00:08 Merci beaucoup à tous les deux d'être là ce matin sur BFM TV.
00:12 Quel symbole de vous recevoir tous les deux côte à côte ?
00:15 Vous avez hésité d'ailleurs, avant de venir ?
00:20 - On se parle tous les jours, mais je ne vois pas pourquoi.
00:22 - Non, pas du tout.
00:24 - Vous vous connaissez bien.
00:25 - Oui.
00:25 - Tous les deux. Il y a un vrai dialogue en France
00:29 entre vos deux religions.
00:31 - Entre tous les cultes, il y a un vrai dialogue.
00:34 Avant-hier, on nous a vu à une réunion du Conseil des responsables de culte en France.
00:40 Donc on se parle en permanence sur tous les sujets possibles, imaginables,
00:43 les sujets de société, sur les sujets importants pour nos cultes,
00:47 mais pas uniquement pour les cultes, pour la société,
00:50 et évidemment pour le monde.
00:52 Donc là, il est évident pour moi de répondre à votre invitation,
00:55 qui est une façon de dire, mais on a tellement à partager ici ensemble,
01:00 que rien ne doit nous séparer.
01:02 - Et on a immédiatement réagi.
01:04 Dès le 9 octobre, nous avons ensemble,
01:07 rédigé un communiqué qui était extrêmement, je dirais, symbolique,
01:15 parce qu'il marquait, je dirais, la parole de l'ensemble des représentants des cultes,
01:21 en passant par le christianisme, le bouddhisme, et bien évidemment l'islam et le judaïsme.
01:27 - Alors avant d'entendre vos paroles de paix, justement, et d'apaisement,
01:34 est-ce qu'on peut dire néanmoins que l'heure est grave,
01:38 que la situation est grave, et qu'elle vous préoccupe énormément ?
01:42 Arim Korsia.
01:43 - Elle préoccupe le monde entier.
01:45 Il s'est passé des choses en Israël inconcevables,
01:49 une violence, une barbarie,
01:52 qu'on pensait être uniquement dans les livres d'histoire,
01:55 dont on parlait comme absolument au passé.
01:59 On a vu cette barbarie, cet antisémitisme,
02:04 c'est de l'antisémitisme.
02:06 Déferlé ensuite en France, où en 10 jours on a eu 600 faits antisémites,
02:12 avec quelque chose...
02:15 Je prendrais juste l'un des derniers.
02:17 Hier, il faut m'expliquer le rapport entre ce qui se passe en Israël
02:24 et le portrait de Simone Weil,
02:27 qui a été tagué, un portrait qui avait été inauguré par Brigitte Dunckert,
02:33 qui était ministre à l'époque.
02:34 C'est un portrait d'une femme qui est une grande française,
02:38 qui se trouve être juive.
02:41 Donc en fait, si on tague ou profane son portrait,
02:46 ça veut bien dire que ce qui se passe là-bas,
02:49 ça ouvre de l'antisémitisme.
02:51 Et c'est inconcevable.
02:53 Ça montre bien que oui,
02:55 la définition que l'Assemblée et que tant et tant d'organisations en France ont adoptée,
02:59 est juste, l'antisionisme, c'est de l'antisémitisme aujourd'hui.
03:04 - 588 faits antisémites,
03:06 signalé, vous avez raison, depuis le 7 octobre.
03:08 - Avec 336 personnes interpellées.
03:10 - Absolument, c'est le chiffre que je voulais ajouter,
03:11 336 interpellations.
03:13 Vous vous condamnez ?
03:15 - Bien évidemment.
03:16 - Fermement, ces actes ?
03:17 - Bien évidemment, tous les actes qui peuvent
03:20 aujourd'hui attaquer une communauté, quelle qu'elle soit,
03:24 parce qu'elle est juive, parce qu'elle est musulmane,
03:27 parce que c'est inadmissible.
03:29 Et aujourd'hui, Simone Veyne, malheureusement,
03:33 la bêtise n'a pas commencé hier,
03:36 puisque déjà son portrait avait été tagué une première fois.
03:39 Donc cet antisémitisme rampant existe malheureusement.
03:43 Et donc, à chaque fois qu'il y a eu ce genre d'actes,
03:46 la Grande Mosquée de Paris, les musulmans,
03:48 dans leur grande majorité, il faut le dire,
03:51 je dirais, il faut le signaler, à chaque fois, on réagit.
03:55 À la Grande Mosquée de Paris, nous avons une histoire,
03:57 c'est-à-dire que, je suis le recteur de la Grande Mosquée de Paris,
04:00 mais nous savons tous que pendant la guerre,
04:03 la Deuxième Guerre mondiale, le fondateur de la Grande Mosquée de Paris
04:06 a pris des risques pour sauver des juifs.
04:10 En 1967, Hamza Boubaker, en pleine guerre des Cijoux,
04:15 il faut quand même le rappeler, avait déclaré
04:18 qu'il ne s'agit pas d'une guerre qui oppose les juifs aux musulmans,
04:21 c'est une guerre de territoire.
04:23 Et sur place, à la Mosquée de Paris,
04:25 on avait créé une association, la Fraternité d'Abraham,
04:29 qui est la matrice, qui existe toujours.
04:33 Et Abraham, c'est notre ancêtre à toutes les religions monothéistes,
04:37 c'est le berceau du monothéisme.
04:39 Et nous devons faire attention à cela.
04:41 - Alors, l'antisémitisme en France,
04:44 malheureusement, est récurrent depuis des décennies.
04:49 Est-ce que, selon vous, il se nourrit à nouveau
04:53 du conflit israélo-palestinien, ou au fond, ça a toujours été ça ?
04:57 - De mon point de vue, il révèle quelque chose
05:00 qui était à bas bruit en permanence.
05:03 Moi, je pose une question simple,
05:05 une question que j'aborde avec des fidèles qui me disent
05:09 "Mais comment on fait ? Qu'est-ce qu'on fait ?"
05:11 Moi, je refuse d'abdiquer de l'affirmation du daïsme,
05:15 par exemple, est-ce qu'on porte la kippa ou pas la kippa ?
05:17 Moi, je refuse d'enlever la kippa, j'estime que c'est plus la République
05:20 si on ne peut pas protéger la liberté de pratique religieuse.
05:23 - C'est céder à la peur de ne plus porter de kippa ?
05:25 - Céder à la peur.
05:26 Quand vous avez peur, vous ne pouvez pas dire "je céde à la peur",
05:28 vous prenez des précautions, vous les avez, comme vous le sentez.
05:30 Et moi, qui je suis pour dire aux gens "porte la kippa",
05:33 je ne vais pas forcer les gens.
05:35 - Mais vous la portez.
05:36 - Moi, c'est particulier, mais je dis qu'il y a une forme de défaite.
05:40 Mais je conçois que la peur pousse parfois les gens à faire la défaite.
05:43 Mais je vous pose une question.
05:44 Les gens qui, par exemple, retirent la mézouza,
05:47 ce petit symbole religieux sur la porte,
05:49 pour ne pas qu'on voit à leur maison comme étant a priori
05:52 un domicile d'une famille juive,
05:55 qu'est-ce qu'ils attendront comme geste de l'ensemble de la population
05:59 pour remettre cette mézouza, ce geste ?
06:01 Je crois que vous descendez et que vous dites
06:04 "on va faire profil bas".
06:06 Comment vous dites "je peux réaffirmer cette capacité
06:10 à être ce que je suis dans la société"
06:12 comme n'importe qui porte une croix dans la rue,
06:14 porte une étoile David, porte une main, ce que l'on veut.
06:17 Qu'est-ce qui fait qu'on retrouve la sérénité ?
06:20 Comment on reconstruit de la confiance les uns envers les autres ?
06:23 Voilà ce que c'est une société.
06:25 Tant qu'on ne répondra pas à cette question,
06:27 l'antisémitisme sera bien le marqueur d'un délitement
06:30 dans la société de beaucoup plus profond.
06:32 - Monsieur Toussaint, si vous permettez, je voudrais dire ici devant vous
06:35 qu'il est anormal qu'un musulman soit antisémite.
06:38 Ce n'est pas possible.
06:40 Parce que notre livre sacré, le Coran,
06:43 notre prophète Mahomet a toujours déclaré
06:48 que Moïse, Moussa, est son frère en religion.
06:52 C'est-à-dire qu'on ne peut pas aujourd'hui,
06:54 lorsque nous tournons les pages du Coran,
06:57 lorsque nous lisons les versets coraniques,
06:59 lorsqu'à chaque page, dans chaque verset,
07:02 on pratiquement cite tous les grands prophètes israélites.
07:06 Comment aujourd'hui Mohamed peut s'attaquer à Rahim ?
07:11 Ce n'est pas normal, ce n'est pas possible.
07:14 Et on voit dans l'histoire depuis 14 siècles aujourd'hui,
07:17 depuis que l'islam a été révélé,
07:20 il n'y a pas eu des actes antisémites,
07:23 je dirais organisés, même dans les pays musulmans.
07:27 Nous venons tous les deux d'Algérie.
07:29 Est-ce qu'il y a eu des pogroms dans ce pays ?
07:31 Est-ce qu'il y a eu, je dirais, des attaques contre les juifs ?
07:34 Je ne crois pas.
07:36 Il y en a eu, peut-être, mais du fait de la guerre d'Algérie.
07:39 Pas à Oran, c'est le principal.
07:40 À Oran, il n'y en a pas eu.
07:41 Non. Voilà, c'est l'essentiel.
07:42 Mais il y en a eu.
07:43 Donc aujourd'hui, moi je voudrais quand même
07:45 attirer l'attention de notre communauté ici en France,
07:48 puisque nous sommes des citoyens.
07:51 Je voudrais qu'en tant que citoyens,
07:53 on ne puisse pas aujourd'hui dire que juifs et musulmans
07:56 s'opposent.
07:57 Moi, personnellement, je me battrai tous les jours
08:00 pour que l'antisémitisme ne passe pas par les moutons.
08:03 Mais pourquoi ce message ne passe-t-il pas ?
08:06 Pardon.
08:07 Écoutez, il passe, puisque la grande majorité...
08:09 Attendez, nous sommes une communauté importante.
08:11 Bien sûr.
08:12 Il y a des personnes qui sont peut-être
08:16 de culture arabo-musulmane,
08:18 et qui agissent de cette sorte.
08:20 Mais moi, je veux dire aujourd'hui
08:22 que ce n'est pas possible, aujourd'hui,
08:25 d'aller puiser dans notre religion
08:28 pour attaquer un juif.
08:30 Ce n'est pas possible.
08:32 Il y a simplement un hadith, je le rappellerai,
08:34 c'est la parole du prophète,
08:36 qui dit "Ne me préférez pas à mes grands frères Jésus et Moïse."
08:41 C'est quand même un mot très fort
08:43 et que j'aimerais rappeler à tout un chacun.
08:45 Qu'est-ce qu'on peut faire aujourd'hui ?
08:46 La grande inquiétude en France,
08:48 c'est une augmentation continue de ces actes
08:52 dont vous parliez il y a quelques instants.
08:54 Et même au-delà d'une espèce de contagion
08:58 qui pourrait gagner le pays.
09:01 D'ailleurs, est-ce qu'on est face à une guerre de religion,
09:04 Rahim Korsia ?
09:05 Est-ce que c'est ça, au fond ?
09:07 Ce qu'on ne veut pas dire ?
09:08 Ce serait grave.
09:10 C'est faux.
09:11 Ce n'est absolument pas une guerre de religion.
09:12 Pourquoi c'est faux ?
09:13 Parce que je voudrais voir quelle religion
09:15 demande d'égorger des enfants et des femmes.
09:17 Si on imagine un instant
09:20 que ce serait une guerre de religion,
09:22 dites-moi quelle religion prendrait cela ?
09:24 Donc ce n'est pas une guerre de religion.
09:26 Première chose.
09:27 Tu es d'accord avec moi ?
09:28 Absolument.
09:29 Il est d'accord avec moi.
09:30 Une fois que ce n'est pas une guerre de religion,
09:31 de quoi on parle ?
09:32 Il faut arrêter les formules toutes faites.
09:34 C'est ce que finalement
09:37 le mode de fonctionnement de tout,
09:39 de notre société, impose.
09:41 Il ne faut pas l'importation du conflit.
09:43 Vous avez déjà vu des juifs
09:45 qui en France marchent contre des mosquées
09:48 ou quoi que ce soit ?
09:49 Tu as vu ça ?
09:50 Jamais.
09:51 Quand on parle d'importation du conflit,
09:53 on fait une sorte de mise en égalité.
09:55 Bon, il ne faut pas que vous bagarrez.
09:57 Mais personne n'a jamais voulu dire
09:59 que ce qui se passe quelque part dans le monde
10:01 doit avoir des répercussions ici.
10:03 On construit une société qui est la nôtre
10:05 avec notre histoire,
10:06 avec la profondeur de notre histoire.
10:08 S'il y a un recteur de la grande mosquée de Paris,
10:10 c'est que la France, la République,
10:13 a fait en sorte de construire une mosquée à Paris.
10:16 Oui, la République a construit une mosquée à Paris,
10:19 inaugurée en 1924.
10:21 Cette mosquée était pour rendre hommage
10:24 aux soldats musulmans
10:25 qui ont défendu la Mère Patrie.
10:27 Si depuis le 27 septembre 1791,
10:31 les juifs ont la pleine et entière citoyenneté,
10:33 on a mis deux ans de plus un peu que les autres,
10:35 mais enfin, depuis le 27 septembre 1791,
10:37 c'est le cas,
10:38 c'est parce que les juifs se sont toujours engagés
10:40 pour la patrie, pour la République.
10:42 Et le monument incroyable à Douaumont,
10:45 à côté de Verdun, au nord,
10:46 c'est les soldats juifs qui sont engagés,
10:49 alors qu'ils n'étaient pas français,
10:50 dans la région étrangère,
10:51 pour défendre la France.
10:52 Donc, on a une histoire ici
10:54 qui se construit sur le partage
10:56 et une espérance commune
10:57 qui s'appelle liberté, égalité, fraternité.
10:59 Ça, c'est notre espérance à tous.
11:01 Parce que, au fond,
11:02 vous présentez le responsable de la communauté musulmane,
11:04 de la communauté juive,
11:05 mais en fait, je vais vous dire,
11:06 il n'y a qu'une seule communauté,
11:07 ça s'appelle la communauté nationale.
11:08 Et nous, on a construit cette communauté nationale.
11:10 Donc, quiconque utilise un prétexte à l'étranger,
11:15 en ayant les solidarités qu'on veut,
11:18 moi, j'accepte toutes les solidarités,
11:19 du moment qu'elles n'impactent pas
11:21 la capacité à vivre des choses ensemble.
11:23 Donc, cette augmentation des faits antisémites,
11:25 qu'on avait détectée aussi au moment du Covid,
11:28 parce que le Covid,
11:29 je pense que personne n'y était pour rien.
11:31 Là, j'espère que vous n'allez pas me dire
11:33 que le Covid était une guerre de religion.
11:34 Et pourtant, il y a eu des actes antisémites
11:37 et une montée d'antisémites sur Internet
11:39 qui est à peu près correspondante
11:40 à celle qu'on voit maintenant.
11:41 Ce qu'il y a, c'est qu'il faut, oui,
11:43 que l'ensemble de la société fasse la lutte
11:45 contre l'antisémitisme et le racisme.
11:47 Et l'antisémitisme, qui est vraiment
11:48 le rejet de l'autre, comme moi,
11:50 c'est un plaid de nos sociétés.
11:53 Il faut qu'on fasse de cette lutte
11:54 contre l'antisémitisme une grande cause nationale.
11:57 - On a toujours dit, de toutes les manières,
11:59 lorsque... - Et là, on le demande tous.
12:01 Je crois que tu l'avais demandé aussi avec moi.
12:02 - Lorsqu'un doigt pointe un juif,
12:05 c'est le musulman qui est derrière,
12:07 qui est également pointé.
12:09 Donc, c'est des causes communes.
12:11 Aujourd'hui, je pense qu'il y a,
12:14 effectivement, par rapport à ce conflit,
12:17 soyons un peu plus directs,
12:19 ce conflit a peut-être, à un moment donné,
12:21 accéléré un processus,
12:23 parce que nous voyons, effectivement,
12:26 une guerre de territoire qui est,
12:28 aujourd'hui, longue,
12:30 qui n'a pas réglé les problèmes.
12:32 Parce qu'aujourd'hui, lorsque le peuple d'Israël
12:35 veut vivre en sécurité,
12:36 il est évident, aujourd'hui,
12:38 qu'il faut accoter un deuxième État,
12:40 que le peuple palestinien puisse vivre
12:42 également en sécurité.
12:44 Je crois qu'aujourd'hui, on a compris cette équation.
12:47 Et moi, je le disais à mes amis,
12:49 que le peuple israélien ne pourra jamais vivre en paix
12:52 tant qu'à côté, il n'y aura pas un peuple palestinien
12:54 qui vivra en paix.
12:56 On est en train d'y arriver, je l'espère.
12:58 - Justement, j'allais vous poser cette question.
13:00 À qui est cette terre ?
13:02 - Moi, je crois que c'est pas une bonne question, sincèrement.
13:06 - Mais vous avez le droit de le dire.
13:07 - Oui, je crois, aujourd'hui,
13:09 si on repart sur la propriété,
13:12 est-ce que c'est chez toi ou chez moi,
13:14 on va pas s'en sortir.
13:16 Je crois que même les dirigeants politiques,
13:20 je ne dis pas d'autres organisations,
13:22 mais de nombreux pays arabes,
13:24 qui étaient contre la création de l'État d'Israël en 1948,
13:29 aujourd'hui, se sont rendus à la raison.
13:31 Quel est le pays, aujourd'hui,
13:33 qui refuse la création d'un État israël
13:38 plus à côté d'un État palestinien ?
13:40 Je crois qu'aujourd'hui,
13:41 on n'a plus besoin de se poser ce genre de questions.
13:43 - Votre question est...
13:44 - Construisons ces deux États,
13:47 qu'ils vivent en paix, l'un à côté de l'autre,
13:50 comme tous les autres pays de la région.
13:52 On en a besoin, c'est nécessaire et c'est indispensable.
13:55 - Moi, je vais répondre à votre question.
13:57 Mais, en vous posant une autre question,
13:59 mais je réponds à votre question.
14:01 Dans ce qui est Gaza, par exemple,
14:06 il y a combien de juifs, actuellement ?
14:08 À part les 200 otages qui sont retenus,
14:10 il y a combien de juifs, depuis 2005 ?
14:12 Zéro.
14:13 - Zéro ?
14:14 - Zéro. Vous êtes d'accord avec moi ? Zéro.
14:16 Donc, dans ce qui est l'embryon d'un État palestinien,
14:20 il y a zéro juif.
14:22 Ils ont voulu construire cela sans aucun juif.
14:24 De l'autre côté, en Israël, il y a combien d'Arabes ?
14:27 - Deux milliers.
14:28 - Et de musulmans, 20% de la population.
14:30 Et pourtant, ils arrivent à vivre ensemble.
14:32 Donc, ce n'est pas la question à qui appartient la terre,
14:34 c'est qui fait la terre.
14:35 Qui considère que quand il y a la place pour moi,
14:37 il y a la place pour toi ?
14:38 Qui le considère ?
14:39 Il faut juste dire ça.
14:41 C'est-à-dire que moi, j'ai toujours considéré que
14:44 un espace, quel qu'il soit,
14:46 on peut en être responsable que si on le partage.
14:49 Et je vais même vous donner un autre exemple,
14:51 là, que j'ai pu expérimenter.
14:54 Parce que je ne suis jamais rentré dans Gaza.
14:56 J'ai reçu des gens de Gaza, des entrepreneurs de Gaza.
14:58 J'ai reçu la demande d'un consul général à Jerusalem
15:02 pour échanger avec eux, il y a longtemps.
15:04 Ils manifestaient leur désir de paix.
15:08 Mais je vous pose la question.
15:09 Quand les lieux saints de Jerusalem
15:13 étaient sous domination jordanienne,
15:17 jusqu'en 1967,
15:19 les Juifs avaient accès de manière incroyablement parcimonieuse
15:22 à ce mur, cet espace devant le mur
15:25 qui est un espace contraint de mettre, pas plus, une petite ruelle.
15:29 Quand Israël a récupéré
15:32 le Saint-Sépulcre, etc.,
15:37 tous les lieux saints,
15:39 la première chose qu'il a faite, c'est qu'il a interdit aux Juifs
15:41 de monter sur la planète du Temple.
15:43 Il a permis l'accès à tous les lieux de culte.
15:46 Donc, à qui appartient la Terre ?
15:47 A celui qui l'ouvre aux autres.
15:49 C'est le cas du 3ème calife de l'Islam, Omar,
15:53 lorsqu'il est en Israël.
15:55 Je vous l'ai dit, c'est le 3ème calife de l'Islam.
15:57 Quand on lui a donné les clés de la ville,
15:59 lui aussi, il n'a pas voulu faire sa prière.
16:03 Il a créé une mosquée à côté
16:05 et il a laissé l'ensemble des populations
16:08 continuer à prier dans leurs lieux de culte.
16:11 Et je crois que c'est ça, le respect de cet espace
16:15 qui est le berceau de notre monothéisme.
16:19 Le roi Salomon a déjà répondu.
16:21 Avec cette histoire incroyable où deux mamans viennent
16:24 avec leur enfant par la main,
16:26 l'une revendiquant l'enfant comme le sien.
16:28 Et le roi Salomon dit "parfait, on va couper le bébé en deux,
16:31 vous aurez chacun la moitié."
16:33 Une maman dit "oui, d'accord."
16:35 Et l'autre dit "non, c'est bien, c'est le sien qu'elle garde complètement."
16:37 C'est toujours celui qui est prêt à refuser,
16:43 à sacrifier les choses pour que l'autre ne les ait pas,
16:47 qui n'a aucun lien.
16:49 Celui qui est prêt à partager, à dire
16:51 "si je vis là, il y a de la place."
16:54 Au fond, il y a toujours de la place.
16:56 Il faut juste mesurer qui permet à l'autre de vivre et qui...
17:00 Je vous pose une autre question.
17:02 Le 7 octobre, on a vu ce qui s'est passé
17:04 avec ces massacres horribles.
17:06 Est-ce que le 6 octobre, ou le 5 octobre,
17:09 ou le 4 octobre avant,
17:11 il y avait des bombes qui tombaient sur Gaza ?
17:15 Non.
17:16 - Vous vous rendez compte aussi de ce qui se passe ?
17:19 - C'est terrible.
17:20 - Je me mets à la place de beaucoup de téléspectateurs
17:22 qui nous regardent, et au fond, à qui on dit
17:24 depuis le 7 octobre, maintenant, il faut choisir.
17:27 Donc, soit vous pleurez les Juifs qui sont morts
17:32 le 7 octobre, dans des conditions épouvantables,
17:35 soit vous pleurez les victimes civiles de Gaza.
17:38 Voilà à quoi se résume, malheureusement,
17:42 trop souvent, le débat.
17:44 Qu'est-ce que vous répondez à cela ?
17:45 - Mais là, on est dans un moment d'émotion,
17:48 il faut le comprendre.
17:49 Lorsqu'on perd un être cher,
17:52 on peut éventuellement avoir des...
17:56 par la colère, avoir envie de se venger,
17:59 avoir envie de faire mal à l'autre.
18:01 Et je crois que c'est là où les religions interviennent.
18:04 Parce que, vous savez, quand on a parlé...
18:07 - Je crois qu'Israël a la volonté de faire mal,
18:09 et a la volonté d'éliminer le risque majeur
18:12 que le Hamas a collé de lui.
18:13 Mais je vais te dire pourquoi il n'a pas la volonté de faire mal.
18:16 Parce que quand une armée prévient de l'endroit
18:18 où elle va bombarder à l'avance,
18:20 pour que les gens puissent partir,
18:22 juste pour briser les infrastructures
18:24 d'une organisation terroriste qui a montré
18:26 jusqu'où elle pouvait aller dans le mal,
18:28 c'est qu'elle ne veut pas faire mal
18:30 et qu'elle ne veut pas se venger.
18:31 Elle veut juste garantir sa sécurité,
18:33 comme on l'offrait nous,
18:34 si demain matin, Andorre nous attaquait.
18:36 - Mais il y a quand même un peu plus de 4 000 victimes à Gaza,
18:40 et donc aujourd'hui, de toutes les manières...
18:42 - Mais qui en est heureux ? Personne n'en est heureux.
18:44 - Absolument. J'ai pas dit qu'on était heureux,
18:45 mais de toutes les manières, une guerre est toujours sale.
18:47 Une guerre, elle est toujours inique, qu'on le veuille ou pas.
18:50 Donc, aujourd'hui, je crois que nous devons, bien évidemment,
18:55 compatir aux douleurs, à la fois pour les victimes du 7 octobre,
19:01 où on a vu des massacres abominables,
19:05 mais en même temps, aujourd'hui, moi, je pense qu'il faut raison garder,
19:09 et c'est là où notre rôle doit intervenir.
19:11 On n'est pas là pour jeter de l'huile sur le feu,
19:14 mais moi, je vous dirais que l'islam, déjà, avant les lois sur la guerre,
19:19 le prophète de l'islam, le premier calife, Abu Bakr Sidiq,
19:23 avait donné les règles d'un conflit.
19:25 Ne jamais s'attaquer à des civils, ne jamais les prendre en otage,
19:30 avoir une certaine forme de bienveillance à l'égard des prisonniers,
19:34 jusqu'à dire ne pas arracher les arbres,
19:36 parce qu'à l'époque, la vie était sacrée.
19:39 - Cher M. Dina Hafiz, question importante.
19:42 Est-ce que vous vous reconnaissez dans les propos tenus par Jean-Luc Mélenchon
19:47 et par une partie de la France Insoumise ?
19:50 Est-ce que ce discours-là correspond au vôtre ?
19:55 - Pas du tout. Ce sont des hommes politiques qui ont un projet politique.
19:59 Moi, aujourd'hui, je veux, en tant que musulman,
20:03 montrer que les musulmans de France veulent vivre comme des citoyens
20:08 à part entière avec le reste de la communauté.
20:12 C'est une communauté juive aujourd'hui qui souffre.
20:15 Nous souffrons avec aise.
20:17 - Donc vous dites que le Hamas est un groupe terroriste ?
20:19 - Nous l'avons dit dans notre communiqué commun.
20:21 Donc ce n'est pas la peine aujourd'hui.
20:23 Je ne vais pas venir jeter de l'huile sur le feu.
20:26 Ce n'est pas nécessaire.
20:27 Moi, je veux aujourd'hui, un, qu'on n'importe pas ce conflit.
20:31 Moi, je veux que Khaim reste mon frère à jamais.
20:34 Et tous les juifs de France et les musulmans de France,
20:37 on doit vivre de la sorte.
20:39 Et leur colère, leur tristesse, nous la partageons à ce moment-là.
20:44 Mais aujourd'hui, nous voulons également que les victimes palestiniennes,
20:49 il ne faut pas aujourd'hui que nous puissions, nous, religion,
20:53 faire un distinguo, ce que certains hommes politiques font.
20:57 Moi, je considère que chaque âme que nous perdons,
21:00 que chaque personne qui meurt...
21:02 Moi, je vais vous dire une chose, monsieur Trout.
21:04 J'attends aujourd'hui les otages.
21:06 Et j'espère que le président de la République, puisqu'il est là-bas,
21:10 on va avoir le retour des otages pour que mes frères juifs soient heureux.
21:15 – Est-ce que Khaim Gorsia, vous souscrivez à ce que vient de dire à l'instant le recteur ?
21:19 Est-ce que vous aussi, vous avez de la tristesse pour ces victimes civiles palestiniennes ?
21:25 – Qui peut être heureux de victimes ?
21:27 Qui peut être heureux de victimes civiles qui sont retenues,
21:31 elles-mêmes, en otage par le Hamas, qui s'en sert comme bouclier humain ?
21:35 C'est sa stratégie qui menace de les tuer si elles quittent Gaza City,
21:38 parce que pour le Hamas, c'est la façon de protéger ses infrastructures,
21:42 et donc sa capacité de poursuivre ce combat à mort, de haine,
21:46 qui vise, et malheureusement, qui n'entend pas ce que peut dire le recteur
21:50 qui porte une parole de sagesse, à savoir, il faut qu'il y ait un État israélien
21:54 qui revendique un État palestinien, mais il y a toujours eu cette idée en Israël
21:58 de faire ces deux États, mais pas avec quelqu'un qui n'a comme seule obsession
22:02 de rayer Israël de la carte.
22:04 Donc, moi, évidemment, et je vous le dis d'autant plus que dans la Bible,
22:10 alors faites-moi confiance pour la référence, c'est chapitre 15 de l'Exode, verset 3,
22:14 parce qu'il cite l'Hadith, moi je cite la Torah, on était juste un peu avant vous,
22:17 c'est pas grave, Rachid, le grand commentateur français, dit
22:21 "Voilà ce qu'est la mesure de Dieu, qui est capable de continuer à nourrir
22:26 ses enfants, même quand ils sont en colère contre eux, ils combattent contre eux."
22:30 Ce principe que, moi j'étais évidemment pour que la population civile de Gaza
22:36 puisse être aidée, recevoir de l'eau, mais il faut que, on peut pas être schizophrène
22:41 au point de dire "on comprend qu'Israël réagisse et il doit réagir,
22:46 mais il faut pas qu'il réagisse."
22:48 Donc il doit réagir ou il doit pas réagir, il doit juste faire en sorte,
22:51 mais je note, et je remercie Shams El-Dinafis, parce que lui en plus il vient d'Algérie,
22:57 et qu'il y a beaucoup d'Algériens qui ont fui leur pays dans les années 90,
23:02 quand ils subissaient exactement la même haine, la même rage, les mêmes prêtres égorgés,
23:07 les mêmes personnes assassinées dans les rues, cette haine et cette violence,
23:11 ils ont considéré qu'ils pouvaient pas vivre dans un pays comme ça.
23:14 Mais je vais vous dire, le problème d'Israël c'est qu'il n'y a pas d'autre choix,
23:17 et qu'ils défendront ce pays, et donc, oui ils défendront ce pays,
23:23 ils le feront comme Israël a toujours fait, avec des impératifs éthiques.
23:28 - Je vous propose de vous retourner, et de regarder derrière vous,
23:32 n'ayez pas peur, vous pouvez vous retourner, de regarder derrière vous ces visages.
23:36 Mia, Moshé, Noah, Kfir, Sharon, Daphna, Tami, Eli, Eitan, Aviv,
23:46 ce sont des prénoms, ce sont surtout des visages, des otages.
23:53 Ils sont plus de 225 selon les derniers chiffres communiqués par l'armée israélienne.
24:00 Et ces otages sont actuellement retenus à Gaza, comme vous le savez,
24:04 privés de liberté depuis 19 jours.
24:06 Il y a 9 Français parmi eux, et les équipes de BFMTV ont réalisé ce mur d'images.
24:12 Il y a des opérations de collage qui ont lieu partout en France, à Paris, à Nice.
24:17 - Il y a des organisations, il y a eu à Nice, et il y a une demande des villes de mettre ces visages.
24:22 Je trouve vraiment merci d'avoir fait ce tableau,
24:26 parce que ça montre que ce n'est pas un chiffre, ce n'est pas une abstraction, une statistique.
24:31 Ce sont des vies, des personnes, des gens qui manquent, qui nous manquent,
24:36 qui nous manquent simplement par leur humanité.
24:38 Ce n'est pas parce que je suis juif que je dis ce qui me manque,
24:40 il nous manque parce que, humainement, des otages manquent au monde.
24:44 - Et ce qui est encore plus inhumain, peut-être, c'est que parmi ces 225 otages,
24:49 il y a une trentaine d'enfants tout petits, des bébés,
24:54 qui sont symbolisés ce matin par des berceaux qui ont été installés à Paris.
25:01 Regardez ces images des poussettes.
25:03 C'est au champ de Mars, c'est une image terrible,
25:07 parce que chacun de ces berceaux représente le visage d'un des bébés
25:15 qui est actuellement retenu en otage.
25:17 Je voudrais vous remercier infiniment, tous les deux, d'avoir accepté de venir,
25:21 parce que dans ces moments si troublés, votre présence à tous les deux,
25:27 et on a senti aussi votre fraternité...
25:31 - On va se disputer dès qu'on va sortir.
25:36 - Merci infiniment à tous les deux.
25:38 - Merci beaucoup.
25:39 - Juste, je ne veux pas avoir le déni, mais on riait tout à l'heure sur Oran, Alger.
25:45 Un de mes ancêtres, mon ancêtre, qui s'appelle le rabbin Ankawa,
25:48 qui était un grand rabbin miraculeux, près des anciens,
25:52 qui était de Tlemcen, en Algérie,
25:54 et sur sa tombe, qui est protégée encore maintenant,
25:57 juifs et musulmans et chrétiens, venez, se retrouvez.
26:02 On se retrouve sur la mémoire, on se retrouve aussi sur l'espérance.
26:05 Je trouve que, ici, on doit être capable peut-être de montrer,
26:10 ailleurs, puisque vous avez peur, alors que je vous dis que la formule est impropre,
26:14 l'importation du conflit, si on pouvait exporter la capacité à faire la paix,
26:19 avec nos différences, partout dans le monde, ce serait une idée formidable.
26:23 - Hier, à la grande mosquée de Paris, j'ai reçu Benjamin Stora,
26:27 qui est venu raconter son histoire, de juif,
26:30 et comment il s'est engagé dans l'écriture de l'histoire de la guerre d'Algérie,
26:37 du nationalisme algérien, etc.
26:39 Il y avait foule dans cette salle,
26:41 et vraiment, c'était un moment de fraternité incroyable.

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