Rony Brauman (MSF) sur France 24

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Transcription
00:00 Bonsoir, vous êtes l'ancien président de Médecins sans frontières.
00:06 On sait qu'il y a toujours des équipes de MSF sur place dans la bande de Gaza.
00:11 Qu'est-ce qu'elles vous disent de la situation sur place aujourd'hui ?
00:15 Elles confirment ce que nous venons de voir, à savoir que la situation est absolument catastrophique.
00:22 Les blessés ne peuvent plus être opérés, ils ne peuvent d'ailleurs généralement pas aller jusque dans les hôpitaux.
00:27 Donc un blessé, il est condamné à avoir soit sa blessure se transformant en une mutilation permanente,
00:33 soit s'infecter et évoluer vers la mort pratiquement inéluctable.
00:38 Donc parmi les quelques 10 à 11 000 blessés que nous comptons déjà,
00:43 beaucoup risquent de mourir si la situation perdure à ce point.
00:47 Et la question qui se pose, c'est de savoir combien de milliers de morts supplémentaires vont être nécessaires
00:53 pour qu'Israël considère que sa vengeance est assouvie.
00:56 Pour l'instant, c'est un carnage, c'est une boucherie, c'est absolument effroyable.
01:01 Certes, il y avait un carnage et une boucherie à l'origine de cette riposte.
01:07 Là maintenant, on est à deux fois, trois fois les chiffres.
01:10 Combien ? Cinq fois ? Dix fois ? Et on va créer quoi ?
01:14 De la haine, du désir de vengeance et enclencher le cycle infernal des vengeances, des ripostes, des contre-ripostes, etc.
01:22 C'est absolument catastrophique.
01:23 Cela fait 14 jours que les équipes de MSF se sont mobilisées sur le terrain.
01:27 Aujourd'hui, vous dites qu'elles ne peuvent plus travailler parce qu'il n'y a plus d'anesthésiants, c'est ça ?
01:34 Plus de médicaments, plus rien pour soigner ?
01:36 Pour faire fonctionner un hôpital, il faut du matériel jetable, il faut des médicaments, il faut du carburant,
01:42 il faut de l'électricité, au moins pour faire tourbonner les groupes électrogènes, éclairer un bloc chirurgical.
01:47 Tout ça est aujourd'hui manquant. Donc de fait, ils ne peuvent pas ou très très peu travailler.
01:54 Ce sont d'ailleurs pour l'essentiel, ce sont pas pour l'essentiel, pour la totalité, les équipes palestiniennes de MSF,
02:00 il y en a environ 300 selon les sections de MSF.
02:04 Les expatriés de MSF sont au sud pour l'instant, eux aussi exposés aux éventuels bombardements.
02:12 A Raniounès, aux éventuels bombardements de Raniounès, et dans une situation à la fois psychologique et matérielle, désespérée.
02:20 Est-ce que vous attendez beaucoup de l'aide humanitaire qui est censée arriver ?
02:26 Selon Joe Biden, dans les 24 à 48 heures, on parle de 20 camions,
02:30 et l'OMS a déjà qualifié de goutte d'eau dans l'océan des besoins cette arrivée de 20 camions seulement.
02:38 L'OMS a raison, c'est indiscutable, il faudrait des centaines de camions, vous avez vu la destruction,
02:44 on est en train de réduire en cendres l'ensemble des villes de cette bande de Gaza.
02:51 Faire entrer 20 camions, c'est absolument dérisoire, c'est choquant, un tel cynisme a quelque chose de profondément heurtant.
02:59 On espère que les pressions du président américain vont produire quelque chose,
03:03 mais enfin, pour l'instant, il semble totalement impuissant à agir sur quoi que ce soit.
03:10 On imagine que du côté de l'OMS, vous êtes également mobilisé pour pouvoir envoyer des renforts humains pour soigner les gens sur place ?
03:17 Certains sont déjà arrivés.
03:19 Alors comment ils ont réussi à passer justement ?
03:21 Non, non, non, ils ne passent pas, ils arrivent à El Harich en Égypte,
03:24 ils se dirigent vers le Rafah égyptien, et de là, attendent d'être autorisés à entrer, il n'est pas question de...
03:32 Et qu'est-ce qu'on leur dit pour l'instant ? Qu'il n'y a absolument aucun passage possible ?
03:36 Aucun passage possible, les Israéliens refusent.
03:39 Un sommet de la paix est également organisé demain en Égypte,
03:44 est-ce qu'on peut en attendre quelque chose justement ?
03:48 Est-ce qu'il va se pencher sur le sort des Gazaouis, leur quotidien ?
03:52 Au moins, le mot clé est prononcé, la paix.
03:56 On peut espérer que quelque chose de l'ordre d'une initiative visant à presser Israël,
04:03 de modérer et puis de stopper ces bombardements surgissent de ce sommet.
04:07 On peut l'espérer, on n'est pas sûr que cela se produise loin de là.
04:11 L'Égypte, qui effectivement organise ce sommet sur la paix,
04:17 par ailleurs a déjà annoncé qu'elle ne voulait pas accueillir de réfugiés sur son sol.
04:22 Est-ce que vous comprenez cette décision ?
04:24 Est-ce que MSF vous demandait aussi à ce que les personnes gravement blessées
04:29 puissent sortir de la bande de Gaza pour être soignées dans de bonnes conditions ?
04:33 Ce sont des choses très différentes.
04:35 Faire sortir les blessés, oui, incontestablement.
04:37 MSF souhaite qu'une partie des blessés puisse sortir pour se faire opérer.
04:42 Éventuellement, que nous puissions monter un hôpital à Rafah côté égyptien
04:47 pour traiter les blessures, parmi les blessures les plus graves.
04:51 Mais c'est très différent de demander que la population elle-même puisse se fuir,
04:56 c'est-à-dire appeler à une sorte de deuxième Nakba.
04:59 La Nakba, cette catastrophe, c'est ce qu'en arabe, la catastrophe,
05:05 c'est comme cela que les Palestiniens désignent 1948,
05:10 le moment où 700 000 d'entre eux sur un million ont dû partir et ne sont jamais revenus.
05:16 Ils sont aujourd'hui au Liban, en Jordanie, en Syrie.
05:19 Ils n'ont jamais pu revenir dans leurs villes et villages d'origine.
05:23 Ce n'est certainement pas ce qu'une immense majorité des Gazaouis souhaite.
05:27 Ce qu'ils veulent, c'est rester, reconstruire, mais surtout pas exécuter une sorte d'instruction
05:32 de vidage de la banque de Gaza en sachant que jamais ils ne pourraient retourner chez eux.
05:39 Un dernier mot, Rony Broman, sur les otages.
05:42 On a appris la libération ce soir de deux otages américains.
05:45 Il y en a environ 200 qui sont toujours entre les mains du Hamas.
05:49 MSF sur place, les équipes sur place, elles soignent les civils Gazaouis.
05:54 Est-ce qu'elles soignent aussi les combattants du Hamas ?
05:56 Est-ce qu'elles ont pu avoir accès aux otages en mauvaise santé également ?
05:59 Non, nous n'avons pas eu accès aux otages.
06:03 Quant aux blessés que nous soignons, nous ne leur demandons pas leur affiliation,
06:08 comment ils s'habillent, à quoi ils occupent leur temps.
06:10 Un blessé est un blessé.
06:12 Un médecin humanitaire, quel qu'il soit, un médecin sangrentier ou d'autres,
06:16 c'est comme cela que ça se passe.
06:18 On ne demande pas aux gens leur pédigré avant de les passer au bloc opératoire.
06:22 Merci beaucoup d'avoir été notre invité sur le plateau de France 24.
06:27 On va passer à...