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Chaque semaine, le tour de l'actualité cinéphile avec des sujets inédits, des entretiens, des analyses de séquences, des archives, des montages et des nouvelles rubriques pour combler les amoureux du cinéma.
Transcription
00:00 ...
00:26 -Salut à tous et bienvenue sur "Ciné + Classique".
00:29 ...
00:47 Musique douce
00:49 ...
00:53 -A l'occasion de la rétrospective consacrée au cinéaste
00:56 Victor Justrum, à la fondation Jérôme Cédou-Pathé,
00:59 votre vivat revient sur ce réalisateur
01:01 qui a posé les bases du cinéma suédois
01:03 avant de connaître un succès phénoménal à Hollywood
01:06 dans les années 1920.
01:08 Pour en parler, nous avons rencontré
01:10 à l'Institut suédois Janet Bergstrom,
01:12 professeure en études cinématographiques à UCLA,
01:16 et à la fondation Pathé, au coeur de l'expo Justrum,
01:19 John Wengstrom, conservateur en chef
01:22 du Svenska Filminstitutet.
01:24 ...
01:47 -Il a commencé en tant qu'acteur de théâtre
01:50 et en directeur de scène.
01:52 La production suédoise était très petite,
01:55 au début.
01:56 Et puis, quand la majorité,
01:58 ou plutôt la seule production suédoise,
02:02 la Svenska Biograftheater,
02:04 a été montée du sud de la Suède
02:07 à Stockholm en 1911,
02:09 et c'est là que l'on a commencé
02:11 à faire de la production professionnelle.
02:14 Justrum était l'un des trois gens
02:16 qui ont été employés pour réaliser des films.
02:19 C'est comme ça que tout a commencé.
02:21 Et dans les premiers années,
02:23 entre 1912, quand il a fait son premier film,
02:26 jusqu'en 1916,
02:28 il a fait cinq ou six films par an.
02:31 C'est ainsi qu'il a appris le commerce, je dirais.
02:33 ...
02:41 -Une des choses qui m'intéressent à Justrum en Suède
02:44 sont les personnages féminins.
02:47 Il a des personnages féminins très forts
02:51 dans presque tous les films.
02:52 Et souvent, ils se battent pour quelque chose.
02:56 ...
03:03 -Ingeborg Holm, c'est un très mouvant drame
03:07 sur une femme qui devient une voix de fée.
03:10 Elle a trois enfants.
03:11 Elle a du mal à faire la vie de son fils,
03:15 et au final, c'est impossible pour elle de le faire,
03:19 donc elle doit abandonner ses enfants.
03:22 C'est très triste, mais c'est extrêmement mouvant.
03:26 ...
03:37 Un des films clés de Victor Justrum est "Terjevigen",
03:40 qui a été sorti en janvier 1917.
03:45 C'est un film où presque toute l'action
03:48 est mise à l'extérieur,
03:50 à l'extérieur du studio.
03:52 C'est en location.
03:54 ...
03:57 La façon dont Justrum,
03:59 et il faut aussi mentionner le cinéaste Julius Jansson,
04:03 l'intégration des éléments naturels
04:08 dans le drame
04:10 est aussi assez fascinante.
04:13 Ce n'est pas seulement un background de l'action,
04:15 c'est vraiment une partie de l'action.
04:17 Les gens dans le film doivent
04:20 se rapprocher et réagir aux éléments naturels.
04:23 ...
04:28 On parle souvent de Justrum et de son importance
04:31 et de son rôle dans le cinéma.
04:34 Pour moi, et pas seulement pour moi, mais pour beaucoup d'autres,
04:39 il est un des grands directeurs du cinéma silenceux,
04:42 mais on oublie souvent qu'il était un fantastique acteur.
04:47 ...
04:48 Il était très haut.
04:51 Il pouvait se plier.
04:54 Il était très athlétique.
04:56 Il faisait tous ses propres stunts.
04:59 ...
05:03 Il a des escaliers de rope. Il descend,
05:06 il descend de plus en plus haut.
05:08 Il apporte le masque de la pluie.
05:12 Il descend de plus en plus haut.
05:13 Il prend le rouleau de gestion de ce grand...
05:17 Il fait vraiment son travail.
05:19 ...
05:21 Quand ce film est sorti, c'était un énorme succès.
05:26 Un succès critique, mais aussi un succès commercial.
05:30 Cela a fait que la production
05:33 s'est réfléchie un peu.
05:35 Au lieu de faire 25 films par an,
05:38 ils ont décidé de se concentrer sur ce genre de films.
05:43 Ils ont fait seulement 4 ou 5 films par an,
05:45 mais tous les films étaient plus longs.
05:47 Ils ont été tirés à l'extérieur de l'atelier,
05:51 souvent en montrant l'esprit du combat des hommes.
05:55 C'est devenu une sorte de formule pour le cinéma suédois
05:58 dans les années 1910 et les années 1920.
06:01 Le drame n'existerait pas
06:04 sans ce genre de paysage dans ce film.
06:08 Un autre genre de paysage dans un autre film.
06:11 Un autre dans un autre film.
06:13 Des rivières éloignées,
06:15 des lignes qui ont été coupées
06:18 et qui sont flottées vers le river.
06:22 Cela n'existe qu'en un film.
06:24 Il ne répète pas le même genre de paysage.
06:29 Le Pruskri, qui a été vraiment tiré dans des conditions difficiles,
06:37 est tiré dans une location à Laponie,
06:41 au nord de la Suède, au haut des montagnes.
06:44 Il y avait de fortes ventes, de la neige,
06:46 et de très difficiles conditions pour se mettre les caméras.
06:50 Il se lève de ce câble sur une roche
06:58 qui est en plein milieu de...
07:00 C'est en Lapland, en fait.
07:02 C'est en plein milieu de nulle part.
07:04 Il doit monter dessus, ou il est attiré pour être sauvé.
07:08 Mais c'est lui.
07:10 Il pourrait tomber, il pourrait mourir.
07:13 L'un de ses plus célèbres films jusqu'à ce jour,
07:22 c'est "The Phantom Carriage".
07:25 J'ai lu quelque part
07:28 qu'il n'y a pas seulement
07:31 de superimpositions très célèbres,
07:34 où quelqu'un qui est mort
07:38 se lève, mais il est toujours en bas,
07:42 et son caméraman a fait sept superimpositions.
07:47 Tout ça a été fait dans la caméra pendant le tirage.
07:55 Il n'a pas été fait dans le laboratoire après le tirage.
07:59 Donc le cinématographe a dû exposer
08:02 les mêmes frames dans la caméra.
08:05 Ici, c'est peut-être fait à la perfection,
08:08 dans "The Phantom Carriage",
08:10 pour montrer le monde réel et le monde imprévu,
08:15 le vivant et le mort, dans la même image.
08:18 Depuis, il est superélucidé.
08:24 L'année suivante, il a été employé par Samuel Goldwyn
08:28 pour faire des films aux Etats-Unis.
08:30 Il a réalisé neuf films à Hollywood,
08:32 entre 1923 et 1930.
08:35 Certains de ses films à Hollywood
08:39 sont parfaits pour les meilleurs films de Suède.
08:43 Des films comme "La Vente",
08:46 avec Hélilien Gish,
08:48 et "Il a été battu" avec Lon Chaney,
08:52 qui sont vraiment excellents.
08:54 Dans "La Vente", il y a
08:56 quelques similitudes avec "Il a été battu"
08:59 et ses films en Suède,
09:01 car là, la nature joue aussi une grande partie.
09:05 Son carrière dans les films
09:07 a arrêté avec "Le Réveil".
09:10 L'influence qui parle le plus de Sjostrom
09:14 est Ingmar Bergman,
09:17 qui a pratiquement bénéficié de Sjostrom.
09:20 Sjostrom est un des personnages principaux.
09:26 Et une des motivations principales, probablement,
09:28 pour un des films que Bergman aimait le plus,
09:31 "Les fraises sauvages".
09:33 Le légacy de Sjostrom
09:36 est qu'il est vraiment vrai.
09:40 Il vous dit ce qu'il veut dire d'être humain.
09:45 Que vous faites ou que vous rencontrez dans la vie,
09:48 ça dépend vraiment des circonstances
09:52 ou de votre situation.
09:54 Ce n'est pas à cause de vos qualités intrinsiques.
09:57 Je pense que c'est très moderne.
10:00 C'est pourquoi je pense qu'il a une résonance
10:03 dans ses films, même s'ils sont 100 ans.
10:07 Les films de Sjostrom, cinéaste mais aussi acteur,
10:13 sont à découvrir à la Fondation Jérôme Cédou-Patté
10:16 jusqu'au 10 octobre, qu'on se le dise.
10:24 Le roman de Marguerite Gauthier, 1936,
10:26 c'est l'adaptation par Georges Cucor
10:28 du roman d'Alexandre Dumas, "Fils", "La Dame aux Camélias",
10:32 d'où son titre original, "Camille".
10:34 Marguerite est incarnée par celle qu'on surnomme la divine,
10:37 Greta Garbo.
10:38 Plus grande star de l'époque, elle est parfaite
10:40 en reine des courtisanes dans le Paris-Mondin de 1847.
10:44 Elle joue avec les hommes sans craindre pour sa réputation
10:47 à une époque où celle-ci est aussi précieuse que la vie.
10:50 Je ne savais pas que les riches avaient une visage telle.
10:52 Marguerite est belle, forte, mais évidemment fragile,
10:55 elle qui cache sa tuberculose derrière des bouquets de camélias.
10:59 Cette fleur, symbole de longévité et de mariage heureux,
11:02 est ici mortifère.
11:04 Mais laissons la botanique pour retourner au film.
11:07 Si Garbo est le porte-étendard de ce film MGM,
11:10 elle est ici accompagnée d'un jeune premier,
11:12 encore inconnu du public, Robert Taylor.
11:15 Il est magnifique et parfait en Armand Duval,
11:17 le jeune amant jaloux et transi d'amour de Marguerite.
11:20 Pour lui, elle est prête à renoncer à tout,
11:22 mais la pression de la famille du jeune homme sera plus forte.
11:26 Ce drame passionnel et romantique était fait pour Garbo,
11:29 dirigé avec toute l'élégance et le talent de cul-corps qui dira d'elle,
11:33 elle avait cette qualité de caractère
11:35 sans laquelle on ne peut réussir une véritable scène d'amour.
11:38 Elle était plutôt froide, mais bouillait intérieurement.
11:42 Pourquoi t'es si calme ?
11:44 Pourquoi pas ?
11:45 Assieds-toi ici.
11:48 Quelle belle odeur de terre !
11:56 Plus bonne que de parfum.
11:58 Regarde, j'ai trouvé un fourli de clove.
12:02 C'est mon premier bonheur.
12:04 Quand j'étais petite, je les cherchais partout,
12:06 en pensant que ça me changerait tout.
12:08 Pourquoi t'es si glumeuse ?
12:12 Si tu souris, je te le donnerai.
12:14 - Non, tu le gardes. - Excusez-moi.
12:17 C'est le livre que madame a cherché.
12:19 Ah oui, merci, Jacques.
12:21 Tu lis Manon Escoe ?
12:24 Oui.
12:26 - Je ne te laisserai pas. - Pourquoi pas ?
12:29 Elle était inscrupule, infidèle, un liaison, un con.
12:31 Tu l'aimais.
12:33 Elle l'aimait aussi.
12:34 Il était meilleur que elle pour partager son amour.
12:37 - Les pleurs ne peuvent pas être choisis. - Elle ne devait pas l'aimer.
12:40 - Je ne peux pas. - Armand, tu me harces.
12:42 Donne-moi ce livre.
12:44 Voici ce que tu attendais.
12:49 Lisez-le.
12:50 Vous vendez vos jumeaux.
13:03 Un ring, pour que Michette puisse avoir un vêtement et un petit doigt.
13:09 Pardonnez-moi.
13:10 - Je ne te fais pas toujours ennuyer. - Tu es un ange.
13:16 L'ange Garbeau déclarera que le roman de Marguerite Gauthier
13:19 était le favori de sa filmographie.
13:21 Robert Taylor, quant à lui, éclate aux yeux du public
13:24 et deviendra à son tour une star
13:26 qui portera sur ses belles épaules Covadis ou Ivanoé
13:29 avant de se tourner vers des rôles plus sombres
13:31 pour casser son image de bel âtre.
13:34 Ironie du sort, c'est lui qui mourra d'un cancer du poumon
13:37 après que Garbeau eût mis fin à sa carrière pour peaufiner sa légende.
13:40 Retrouvez Greta Garbeau dans La nuit du cycle consacré à la divine
13:44 avec trois autres grands films très bientôt sur Ciné+ Classique
13:47 et à tout moment sur My Canal.
13:49 - C'est pas très grand. - C'est le ciel.
13:52 Aussi à l'aise à la trompette que derrière un piano droit,
14:10 Guillaume Ponslet alterne album solo,
14:13 collaboration avec des figures de la variété française
14:15 comme Michel Jonas ou Gaël Fay
14:17 et composition pour le cinéma,
14:19 on l'a notamment entendu sur la B.O. de Radzia de Nabil Ayouch en 2018.
14:24 Pour Viva, le musicien nous révèle sa mélodie du bonheur.
14:28 "Telle est la vie des hommes.
14:35 Quelques joies très vite effacées par d'inoubliables chagrins.
14:41 Il n'est pas nécessaire de le dire aux enfants."
14:44 J'ai choisi la B.O. du film "Le château de ma mère",
14:53 film de Yves Robert et composé par Vladimir Kosma.
14:58 Mon père adorait Pagnol, mon père lisait les livres de Pagnol
15:02 et m'a transmis cet amour.
15:04 Je dois dire que souvent, lorsqu'on regarde un film
15:07 issu d'un livre qu'on a aimé, souvent on est déçu.
15:11 En tout cas, c'est mon cas, et là, pas du tout.
15:14 Cette musique aussi, moi, me touche particulièrement
15:24 parce que Kosma est un génie,
15:27 un génie de la musique française, même s'il est né en Roumanie.
15:31 Et c'est un peu notre John Williams à nous, il sait tout faire.
15:35 C'est important qu'on se souvienne de son oeuvre et qu'on lui rende hommage.
15:39 Je trouve que le génie de Kosma, en général,
16:00 et particulièrement dans ce film,
16:02 c'est d'être tellement habile qu'il peut naviguer entre plusieurs styles.
16:05 On entend des influences jazz, on entend vraiment même du jazz.
16:09 Il y a des morceaux de ragtime.
16:11 Et il y a du symphonique,
16:20 où la musique soutient ce côté grandiose, magnifique de la nature.
16:24 On a l'impression de s'évader avec l'orchestre qui nous accompagne.
16:28 J'ai choisi ce film-là en particulier
16:30 parce qu'il y a un thème qui me touche vraiment,
16:33 qui est le thème dédié à la musique.
16:37 C'est le thème de la musique.
16:39 C'est un thème qui est très, très important.
16:41 C'est un thème qui est très, très important.
16:44 C'est un thème qui est très, très important.
16:46 C'est un thème qui est très, très important.
16:49 C'est un thème qui est très, très important.
16:51 C'est un thème qui est très, très important.
16:53 C'est un thème qui est très, très important.
16:56 C'est un thème qui est le thème dédié à Augustine,
16:59 la maman dans le film.
17:01 Et je trouve que ça lui va très, très bien.
17:04 Ça la décrit parfaitement.
17:22 Augustine, c'est un personnage très attachant, très doux.
17:26 Elle est très aimante, elle adore ses enfants,
17:29 elle soutient son mari en permanence.
17:31 Et c'est aussi quelqu'un de fragile.
17:33 On sent qu'elle est malade, on ne sait pas encore ce qui se passe,
17:36 mais on sent que son quotidien n'est pas simple.
17:40 Et on sent cette fragilité, ce côté sombre, finalement,
17:44 parce que je pense qu'elle est consciente de sa maladie.
17:47 Et dans cette mélodie, il y a un peu tout ça.
17:50 Il y a beaucoup de douceur et un peu de souffrance,
17:53 un peu de mélancolie,
17:55 peut-être de regret que la vie ne soit pas plus simple.
17:58 Ce genre de morceaux, en général,
18:05 c'est comme si, même à la première écoute,
18:07 on pouvait deviner ce qui va suivre, tellement ça coule de source.
18:10 C'est simple, oui, mais ce n'est pas simpliste.
18:13 Parce que, croyez-moi, c'est extrêmement difficile à composer
18:16 pour que ça sonne simple, évident, comme ça,
18:18 et surtout pour que ça colle aussi bien à un personnage.
18:22 Il y avait depuis des années une très jeune femme brune
18:25 qui serrait toujours sur son cœur fragile les roses rouges du roi.
18:30 Elle entendait les cris du garde et le souffle roc du chien.
18:35 Blême, tremblante et pour jamais inconsolable,
18:41 elle ne savait pas qu'elle était chez son fils.
18:46 Dans le film, il y a deux thèmes qui se ressemblent beaucoup,
18:50 puisque c'est exactement la même mélodie,
18:51 mais l'orchestration est très différente.
18:54 Il y a Augustine, qui est la version au piano,
18:57 et il y a la valse d'Augustine, qui est la version orchestrale.
19:00 Moi, j'ai une idée.
19:05 L'idée d'Augustine n'était pas mauvaise.
19:09 La valse d'Augustine, la version orchestrale,
19:11 a quelque chose de plus grandiose,
19:14 comme si on était peut-être dans la vision
19:17 que Marcel Pagnol avait de sa mère,
19:19 qui est un personnage central extrêmement important
19:22 qui l'a aidé à se construire.
19:24 C'est une vue avec plus de hauteur
19:28 et peut-être plus d'amour
19:32 qu'Augustine n'en avait envers elle-même.
19:35 C'est vrai que la version orchestre a quelque chose de beaucoup plus grandiose,
19:39 puisque c'est plus massif,
19:42 et jouer à la trompette peut vous donner une idée
19:44 de la puissance que l'orchestre peut dégager.
19:48 (Musique douce)
19:51 (...)
20:15 (Musique douce)
20:16 -Composée loin des terres provençales,
20:18 Durango, le nouvel album de Guillaume Ponslet,
20:21 partage avec les adaptations filmiques de Pagnol
20:23 une entêtante mélancolie disponible partout.
20:26 (Musique douce)
20:27 (...)
20:36 Avec "Duvida", 1973,
20:38 le cinéaste indien Manicol revisitait le film de Fantôme
20:42 pour en faire une chronique du patriarcat,
20:44 reformulant ainsi les codes narratifs du cinéma.
20:47 Le réalisateur Nicolas Saada nous guide
20:49 dans l'univers unique d'un réalisateur oublié,
20:52 cinéma retrouvé.
20:53 (Musique douce)
20:54 (...)
21:03 -On ne peut pas dire de ces films de Manicol
21:05 que ce sont des curiosités.
21:06 C'est pas des curiosités.
21:08 Il y a une oeuvre de cinéaste qui est très importante
21:11 et qui a été complètement oblitérée par l'histoire récente du cinéma,
21:15 par la critique, par les historiens de cinéma,
21:18 pas par volonté de ne pas parler de lui,
21:20 mais simplement par ignorance de l'existence de ces films.
21:23 (Voix d'un film en anglais)
21:42 -Ces films inventent un monde qui est vraiment celui de Manicol
21:46 et qui correspond bien à ce qu'on sait de ce cinéaste,
21:49 de peu de choses qu'on sait de lui.
21:51 Il a grandi dans le Rajasthan, son père était haut fonctionnaire,
21:55 il a été très jeune exposé
21:57 à une éducation artistique vraiment, je dirais, complète,
22:02 peinture, musique, cinéma.
22:04 Il est absolument fou de Robert Bresson, du cinéma européen.
22:09 Il parle plusieurs langues,
22:10 il a un goût qui est très ouvert à des choses très différentes,
22:15 et en même temps, il a un univers qui est d'une très grande cohérence,
22:18 malgré la richesse de sa palette intérieure.
22:21 Je pense que pour entrer dans l'univers de Manicol,
22:33 "Divida", c'est, je pense, le film le plus séduisant,
22:36 le plus accessible,
22:38 et celui qu'on peut rattacher à une tradition du genre,
22:42 presque du film gothique.
22:44 Moi, j'ai appris récemment, en échangeant avec son chef opérateur,
22:49 que Mani n'était pas très reconnu sur la scène internationale.
22:53 C'est quelqu'un qui était sélectionné parfois en festival,
22:57 mais on reprochait, dans les années 70,
22:59 à son cinéma de ne pas être assez militant,
23:01 pas assez politique, pas assez engagé.
23:04 Mais résultat des courses,
23:06 on peut dire qu'un des films les plus forts
23:08 qui n'a jamais été tourné sur ces questions récurrentes du patriarcat,
23:12 c'est "Divida".
23:13 C'est la force des films de Manicol,
23:34 parce que les thèmes qu'il aborde nous touchent tous.
23:37 Ils ne sont pas du tout liés à des traditions locales.
23:41 Il raconte des histoires universelles.
23:43 C'est le choix d'une femme qui décide d'aimer un homme
23:46 qui le sosie d'un autre, qui le sait,
23:49 mais qui l'assume,
23:50 et qui utilise cette hypocrisie du mariage
23:53 pour vivre une histoire d'amour absolument intense.
23:56 Le thème de "Divida" comme de "Nazar", c'est le couple.
24:00 C'est comment quelque chose vient dérégler les couples,
24:03 déranger le couple.
24:04 À quoi peut survivre un couple ? Jusqu'où peut tenir un couple ?
24:08 C'est un cinéma pictural.
24:28 On a l'impression que Manicol,
24:30 même pour être sûr que son geste de cinéaste est entendu,
24:34 n'hésite pas à arrêter l'image, à faire des images fixes,
24:38 à prendre des photogrammes et à les utiliser comme des plans.
24:42 Mais ce ne sont plus des plans.
24:44 Ce ne sont pas non plus des images arrêtées,
24:46 comme Scorsese les utilise pour arrêter l'action dans une narration.
24:50 C'est vraiment un tableau.
24:53 Et ce tableau nous pousse à comprendre
24:56 qu'un événement nouveau est arrivé dans l'intrigue.
25:00 Ce n'est jamais décoratif.
25:01 Ça apporte toujours quelque chose de profondément philosophique.
25:28 En général, la bande-son soutient l'image,
25:30 ou la bande-son l'est conçue pour améliorer
25:33 ou porter l'image là où elle n'arrive plus à être.
25:36 Mais là, on a l'impression, chez Manicol,
25:39 que l'image est tellement hypnotique,
25:42 elle est tellement travaillée sur notre attention,
25:45 que cette attention fait qu'on entend aussi les choses.
25:49 On entend ce texte en voix off, on entend les mots.
25:52 On a l'impression de mieux les entendre
25:54 parce qu'on est visuellement intrigués par ce qu'on regarde.
25:58 C'est pour ça que les films de Manicol sont dépourvus de discours,
26:03 parce qu'ils savent bien qu'observer suffit à comprendre.
26:06 C'est un pur cinéaste, en fait.
26:09 Et c'est un cinéaste très important.
26:11 Duvida est à voir actuellement sur MyCanal,
26:15 accompagné de trois autres films de Manicol,
26:18 "Nazar", "Uskiroti" et "Un jour avant la saison des pluies".
26:22 Et n'oubliez pas, votre Viva vous attend à tout moment
26:24 sur les réseaux sociaux du Ciné+ et sur MyCanal.
26:27 ...
26:31 ...

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