Édition : trop de livres tue le livre !
La production de livres est en constante augmentation en Europe. Chaque année, trois milliards d'ouvrages sont produits sur le continent. Cette surproduction a des conséquences négatives sur l'environnement, chaque livre générant un kilo de CO2, et sur l'économie, avec l'explosion du prix du papier. Face à ces enjeux, certains poids lourds du secteur ont décidé de réduire leur production et d'aller vers plus de sobriété.
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Transcript
00:00 HOKA, pour construire un monde dans lequel nous sommes tous acteurs de changement,
00:04 vous présente votre programme.
00:06 Audancia, spécialisée dans la formation des responsables de demain
00:10 et l'accompagnement de la transformation des entreprises,
00:13 vous présente Plan B, l'économie autrement.
00:16 Saviez-vous que 3 milliards de livres sont produits chaque année,
00:28 rien qu'en Europe ?
00:30 Qu'il faut 20 litres d'eau douce pour fabriquer un ouvrage ?
00:35 Et que la production d'un exemplaire génère à chaque fois 1 kg de CO2 ?
00:41 Bonjour et bienvenue dans Plan B, l'économie autrement.
00:46 Zoom sur l'édition cette semaine.
00:49 L'industrie du livre n'est certes pas la plus polluante,
00:51 mais comment la rendre plus sobre ?
00:53 Le réchauffement climatique fait monter la pression sur les éditeurs,
00:57 ne rien faire et cornerer leur image,
01:00 alors que leurs marges sont déjà grignotées par l'inflation.
01:03 De grandes maisons disent s'attaquer au tabou de la surproduction.
01:08 Leur nouveau graal ?
01:10 Chaque livre imprimé doit être un livre vendu.
01:13 Pas si simple.
01:15 Finir au panier ou dans les rayons d'un libraire.
01:18 Pour éviter les invendus, les éditeurs cherchent la perle rare.
01:22 Nous, on va chercher un auteur.
01:25 Il va falloir du temps pour l'installer.
01:27 On n'est pas dans une logique de succès commercial immédiat.
01:30 Le potentiel commercial est quelque chose qu'on a toujours en tête
01:34 et qui ne contredit pas l'aspect littéraire d'un texte.
01:37 Pour les éditeurs, le cauchemar, c'est d'avoir à stocker
01:41 ou à détruire des masses d'invendus.
01:43 Car les libraires ont un an pour leur renvoyer les nouveautés
01:46 qui n'ont pas trouvé preneur.
01:48 Gallimard Jeunesse a donc baissé d'un quart ses nouveaux titres en 5 ans.
01:52 Il y a trop de titres.
01:53 Si vous regardez le marché de la jeunesse,
01:55 vous avez plus de 15 000 nouveautés par an environ.
01:57 Mais cette baisse aussi du nombre de titres
01:59 nous permet de beaucoup mieux travailler sur toute la chaîne
02:02 et de donner plus de chance aux livres.
02:04 Limiter les nouveautés, mais aussi le nombre d'exemplaires tirés.
02:07 Car la surproduction coûte cher.
02:09 À la planète, comme aux éditeurs.
02:12 Aujourd'hui, le directeur de la fabrication de Gallimard
02:15 se déplace chez un imprimeur.
02:17 Là, vous avez du papier qui vient de Suède.
02:22 Autriche.
02:23 Et là, Finlande.
02:27 Car la chaîne du livre, ça commence par le papier.
02:30 Premier responsable de l'empreinte écologique du secteur,
02:33 malgré les labels "gestion durable des forêts"
02:36 et "gros poste de dépense".
02:38 Ça vaut très cher et de plus en plus cher.
02:40 Le papier, en un an, un peu plus d'un an,
02:42 a pris pratiquement entre 50 et 100 %.
02:45 Pour limiter les coûts,
02:47 les nouvelles machines numériques permettent d'imprimer en plus petite quantité.
02:51 Stocker des livres qu'on va devoir mettre à la poubelle, ça n'a pas de sens.
02:54 Donc on va essayer d'imprimer au juste stock
02:56 pour essayer de faire en sorte que chaque livre imprimé est un livre vendu.
02:59 Un objectif encore lointain.
03:01 Très lointain.
03:03 Autre outil en devenir, suivre les livres à la trace
03:06 pour satisfaire la demande en évitant les réimpressions inutiles.
03:10 Le tirage de trop, c'est...
03:13 Alors que des ouvrages sont en train d'être renvoyés par les libraires
03:17 parce qu'il ne les vendra pas,
03:19 on ne sait pas, on ne connaît pas ces quantités,
03:22 on ne sait pas quand est-ce qu'on va les recevoir.
03:24 Et en fait, ayant des demandes par ailleurs, par d'autres libraires,
03:27 on réimprime, on stocke, on livre.
03:30 Et là, on se retrouve avec des ouvrages en trop.
03:33 Dernier élément essentiel pour réduire les coûts et les impacts,
03:37 mutualiser le transport.
03:39 Dans ce camion, les livres Gallimard en route vers les librairies
03:42 voyageront avec les ouvrages de maisons concurrentes.
03:46 (Générique)
03:49 ---
03:52 - Quelles sont les pistes pour une édition plus durable ?
03:55 - Il y a des nouveaux outils pour être plus sobre, réduire.
03:58 Ca s'appelle l'éco-socio-conception ou l'éco-design
04:01 qu'il faut forcément penser en amont.
04:03 Ca remet tout en cause notre logique de temporalité de travail.
04:06 Si j'ai éco-conçu dès le départ,
04:08 parce qu'il y a des impacts environnementaux,
04:10 mais aussi sociaux et sociétaux,
04:12 en fonction de qui je fais travailler, à quel moment et dans quel lieu,
04:15 c'est pas du tout le même projet.
04:17 C'est pas arrivé chez l'imprimerie ou mon diffuseur
04:20 que je peux dire "je vais essayer d'économiser telle ressource ou tel coût".
04:23 Il faut le penser bien en amont.
04:25 - La précommande, c'est une solution de sobriété ?
04:27 - Il y a beaucoup d'initiatives et d'expérimentations,
04:30 notamment d'autrices et d'auteurs.
04:32 On se retrouve dans une époque du financement participatif,
04:35 de la précommande.
04:37 C'est appeler sa communauté pour envisager sa production
04:40 et ne pas estimer que mon livre est absolument nécessaire
04:43 et que je suis éditeur et éditrice et que je sais que les gens vont l'acheter.
04:46 On se rend compte que c'est pas tout à fait ça.
04:48 Finalement, on ne produit que ce qui est vraiment demandé.
04:50 Donc on change un peu cette logique qui est très particulière dans le monde de l'édition,
04:53 c'est-à-dire qu'on est un marché de l'offre et non pas un marché de la demande.
04:57 Donc, effectivement, est-ce que c'est industrialisable ?
05:00 Bien, malin, maligne la personne qui pourrait le prouver.
05:04 En tout cas, c'est des modèles qui existent depuis très longtemps.
05:07 - Quels sont les obstacles à ces solutions ?
05:10 - Comment je fais pour garder la même marge, les mêmes recettes,
05:14 les mêmes chiffres d'affaires, en se disant que je vais produire moins ?
05:17 C'est ça la question, c'est ça l'inertie même du système.
05:20 Est-ce que je dois licencier des gens ? Du coup, je détruis l'emploi.
05:23 Est-ce que je détruis l'émulation créatrice en me disant que du coup,
05:27 je vais moins produire de livres par an, je vais moins créer de nouveautés ?
05:30 Il faut se rappeler qu'en France, on est à plus de 70 000 nouveautés par an,
05:33 plus que ce qu'il faudrait moi, toute ma vie pour lire tout ça.
05:37 Ralentir, ça fait peur à tout le monde. La question, c'est si je suis moins d'avant-garde,
05:41 les autres vont pas me suivre, donc je vais perdre toutes mes parts de marché.
05:44 Donc c'est toujours la même question de, est-ce que le marché s'autorégule
05:48 ou l'État doit imposer des lois ?
05:50 - Avant de se quitter, petite fiche pratique pour encourager le livre durable.
05:54 Préférez le papier issu de forêts correctement gérées,
05:58 deux labels internationaux, celui-ci et celui-là.
06:03 Mieux encore, le papier recyclé, que vous reconnaîtrez à ce signe.
06:09 Privilégiez les couvertures non pelliculées, c'est-à-dire sans plastique,
06:13 pour les imperméabiliser. Et puis faites circuler les livres.
06:16 Prêtez-les, donnez-les à vos proches, à des associations ou à des ONG.
06:21 Ciao, ciao !
06:23 - Audancia, spécialisée dans la formation des responsables de demain
06:26 et l'accompagnement de la transformation des entreprises,
06:29 vous a présenté Plan B, l'économie autrement.
06:32 - C'était votre programme avec Ashoka pour construire un monde
06:35 dans lequel nous sommes tous acteurs de changement.
06:38 [Musique]