ESSENCE - Dominique Schelcher, PDG de Système U, est l'invité de Amandine Bégot

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Leclerc, Carrefour, Intermarché, Système U (4.000 stations) vont vendre leur essence à prix coutant. Pourquoi acceptent-ils de vendre à prix coutant et refusent-ils de vendre à perte ?
Regardez L'invité de RTL du 27 septembre 2023 avec Amandine Bégot.

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00:02 RTL matin
00:06 RTL 7h44, excellente journée à vous tous qui nous écoutez. Amandine Bégaud, vous recevez ce matin le PDG de Systému, Dominique Schellcher.
00:13 Systému, on le rappelle, c'est près de 1700 magasins en France, 860 stations-service.
00:18 Vous étiez hier, Dominique Schellcher, à la réunion organisée à Matignon pour tenter de trouver une solution pour faire baisser les prix du carburant.
00:25 Leclerc et Carrefour ont annoncé qu'ils allaient vendre leur carburant à prix coûtant dans toutes leurs stations-service, et ce, tous les jours, dès vendredi, dès après-demain.
00:34 Chez Systému, vous avez opté pour des opérations ponctuelles. Ça veut dire quoi ? Tous les week-ends ? Un week-end par mois ?
00:40 Le premier week-end de chaque mois, à partir des 6 et 7 octobre prochains, donc ce sera la semaine prochaine.
00:46 Et je vais vous expliquer pourquoi on a pris cette décision-là.
00:49 La première chose, c'est la presse l'a dit cette semaine, le carburant le moins cher en France, actuellement, il est chez Leclerc et chez Systému.
00:57 Il se trouve d'ailleurs qu'on achète le carburant ensemble.
00:59 Donc, faire du prix coûtant chez nous ne va pas être spectaculaire puisqu'on est déjà à prix bas permanent toute l'année.
01:07 Du prix coûtant chez vous, juste pour qu'on comprenne bien, c'est un ou deux centimes en moins, c'est ça ?
01:11 C'est un ou deux centimes en moins au litre. Ça veut dire quoi ? Un euro le plein.
01:14 Et j'ajoute une chose très importante.
01:16 Nous sommes essentiellement à la campagne. À la campagne actuellement, les clients ne font plus le plein complet pour beaucoup de leurs voitures.
01:25 Ils prennent 20 euros, ils prennent 30 euros. Donc l'impact sera encore plus limité.
01:28 Mais pourquoi pas l'avoir fait tous les jours comme Leclerc au Carrefour ?
01:31 Parce que nous sommes avec le raisonnement suivant qui est de dire, un, l'impact comme on est à prix bas serait faible.
01:38 Et d'autre part, on est dans des zones rurales où c'est des plus petits supermarchés.
01:45 Et je note que les autres, c'est des hypermarchés.
01:48 D'ailleurs, chez Carrefour, ce ne sont que les hypermarchés, pas les supermarchés qui le font.
01:52 Et surtout, on ne voulait pas impacter l'alimentaire par ailleurs.
01:55 Parce qu'une station, c'est quoi ? C'est de l'électricité, c'est payer des salaires, c'est rembourser l'installation de la station-service.
02:01 À un moment, il y a des frais quand même. Il faut couvrir ces frais.
02:03 Ça veut dire que ceux qui vont vendre à prix coûtant risquent de le répercuter sur l'alimentaire ?
02:07 Je le crains. Je le crains.
02:09 Mais je vous annonce ce matin qu'on va prendre le contre-pied chez System U de cette opération-là.
02:17 Et on va proposer une opération plus impactante en pouvoir d'achat à compter des 20 et 21 octobre.
02:23 Donc, 15 jours après la première opération à prix coûtant sur le carburant.
02:27 On va faire 10 % sur tout l'alimentaire de nos magasins, les produits de beauté, la droguerie.
02:34 Tous les 15 jours, ce sera hors alcool. Voilà, simple pression, ce sera hors alcool.
02:39 Il faudra être porteur de notre carte de fidélité.
02:42 Mais du 20 et 21 octobre jusqu'à début décembre, tous les 15 jours, 10 % presque sur l'ensemble du magasin.
02:49 10 % sur l'ensemble du magasin à condition d'avoir la carte sur un chariot, ça fait quoi en moyenne ?
02:55 Un chariot moyen chez vous, c'est combien ?
02:56 10 %. Alors, le chariot moyen est relativement élevé chez eux.
02:59 On va être aux alentours de 60 €.
03:02 Moi, j'ai des clients qui ont pas 100 €.
03:04 Voilà, ça va faire entre 6 à 10 € selon le panier.
03:07 Je reviens Dominique Schellcher sur un point très intéressant que vous nous dites.
03:11 Vous craignez que ceux qui vont vendre à prix coûtant ne répercutent ça sur l'alimentation.
03:16 C'est un peu la double peine pour le consommateur.
03:18 Un, il va pas vraiment voir la différence sur un plein.
03:20 On le disait, ça fait 1 € à l'arrivée de remise, entre guillemets.
03:24 Et en plus, il va payer ses courses plus cher.
03:26 C'est le risque. Chacun va s'organiser.
03:29 Mais voilà, nous, on veut des choses concrètes pour nos clients.
03:31 On veut des choses impactantes.
03:33 Quelques centimes, c'est bien, on y contribue aussi.
03:37 C'est l'appel du gouvernement et on l'entend.
03:39 Mais on voulait faire plus fort et plus fort, ça va être sur l'alimentaire où on a la capacité à le faire.
03:45 Si on voulait vraiment faire baisser le prix de l'essence, sur quoi il faudrait agir ?
03:48 Sur les taxes ? Pour être réaliste ?
03:51 Après, c'est un autre sujet.
03:53 C'est un autre choix, c'est un choix politique.
03:54 C'est un autre choix, c'est un choix politique que le président de la République a fermé la porte dimanche soir.
04:01 Pourquoi ? Il a expliqué que ces taxes financent la transition écologique en France.
04:06 Donc c'est un choix politique.
04:07 Il ne me revient pas de juger ce choix-là.
04:09 Mais c'est ça qui ferait baisser le prix.
04:11 On est d'accord.
04:12 Même si, je vous le dis, quand je suis sur le terrain, dans mon magasin, que les clients m'interpellent et ils m'interpellent,
04:17 ils me demandent des baisses de prix sur le carburant.
04:19 Leur premier réflexe, c'est de dire "et les taxes, et les taxes".
04:21 Mais là, la décision ne nous appartient pas, évidemment.
04:25 Revenons sur les prix de l'alimentaire.
04:26 Le gouvernement présente tout à l'heure un projet de loi qui prévoit d'avancer les négociations commerciales
04:31 entre la grande distribution et les industriels.
04:33 Ce moment, on le rappelle, où vous fixez les prix pour les mois à venir.
04:37 L'idée, c'est que ces négociations, elles aboutissent avant le 15 janvier.
04:40 D'habitude, c'est aux alentours du 1er mars.
04:43 Et donc, de faire baisser les prix.
04:45 Sur le papier, j'ai envie de vous dire "très bien".
04:47 Le problème, c'est qu'il faut que les industriels acceptent de renégocier.
04:50 Et là, c'est plus compliqué, non ?
04:52 Alors, ça va changer ce matin, puisque ce matin même, le gouvernement présente en Conseil des ministres
04:59 un projet de loi qui vise à obliger au retour, à anticiper aux négociations commerciales.
05:05 Ils sont obligés de revenir, mais pas forcément de baisser leurs prix.
05:07 Ils peuvent revenir en vous disant "ok, mais Dominique Schellcher, c'est +5%".
05:10 C'est un autre sujet.
05:12 On va discuter.
05:13 Je ne peux pas vous dire comment la fin de la discussion va atterrir.
05:17 Et malheureusement, je le partage avec vous aussi,
05:20 les premiers signes que j'ai des tarifs qui nous arrivent pour préparer ces futures négociations
05:25 sont plutôt à la hausse et plutôt aux alentours de 10%.
05:29 Donc nous, on va se battre.
05:32 D'ailleurs, c'est ce qu'on essaie de faire depuis des mois.
05:34 Il y a eu un appel à la bonne volonté.
05:35 Les grands industriels, les très grands, souvent qui sont à l'étranger,
05:38 n'ont pas voulu jouer le jeu.
05:40 - Qui ça ? Coca ? Pepsi ? - Voilà, mais par exemple, avec des sièges à l'étranger.
05:44 Ils n'ont pas voulu jouer le jeu.
05:46 Donc, il faut cette loi et on espère qu'on va arriver à des baisses pour nos consommateurs.
05:52 - Vous n'avez pas les moyens de les forcer à baisser leurs prix ?
05:55 - Non, il n'y a pas de moyens de les forcer.
05:56 - Est-ce que ce matin, vous pouvez nous dire,
05:58 ceux qui me diront c'est plus 10% sans raison, je ne les prends plus ?
06:02 - On va faire des choix, mais absolument, et on en a déjà fait ces derniers mois.
06:05 Quand la relation est dans l'impasse, quand on n'a pas de geste de bonne volonté,
06:10 on a fait des choix.
06:11 - Et vous êtes privé de quels produits, par exemple ?
06:13 - On s'est privé de quelques produits cet été.
06:15 Il y a eu des gâteaux dont on s'est privé.
06:17 Au début de l'année, on s'est privé de certaines chips.
06:20 - Donc les chips Lay's, des gâteaux Lu ?
06:22 - Des gâteaux de certainté à boire.
06:24 C'est des périodes transitoires.
06:26 Mais ce que je note, je vais vous dire,
06:28 les clients sont toujours embêtés, évidemment, à juste titre,
06:31 quand leur produit manque.
06:32 Mais quand on leur explique maintenant, attendez, on mène des combats,
06:36 parce qu'on défend votre pouvoir d'achat,
06:38 ils nous disent "vous avez raison, menez ces combats pour nous,
06:40 nous on a besoin que vous nous aidiez".
06:43 - Emmanuel Macron a évoqué dimanche soir la possibilité,
06:45 il parlait de contrôleurs de marge.
06:48 C'est possible de contrôler les marges ?
06:50 On va avoir des gens qui vont venir éplucher les comptes de chaque industriel ?
06:56 Ça paraît lunaire, dans un pays comme la France où les prix sont libres.
07:00 - Je suis très curieux de la mise en place de ce sujet-là,
07:03 et notamment il a parlé d'un sujet qu'on a déjà vécu il y a quelques années,
07:07 un accord de modération sur les marges.
07:09 Donc là, on va se mettre autour de la table.
07:11 Je pense que sincèrement, les plus concernés là sont,
07:14 encore une fois, les industriels de l'agroalimentaire,
07:16 c'est ce que j'ai compris dans cette expression dimanche soir.
07:19 On sera autour de la table pour discuter de tout ça,
07:22 et on va y contribuer.
07:22 - Mais ça va être sur la bonne volonté.
07:24 Ceux qui s'en fichent depuis des mois, ça n'a pas changé.
07:27 - Sauf si le gouvernement à un moment prend une décision plus coercitive,
07:31 en disant "voilà, on limite etc."
07:33 - Mais on limite quoi ?
07:34 Il faudrait prendre quoi comme décision coercitive ?
07:37 - Non mais là, en l'occurrence, c'est limiter les marges excessives.
07:42 - Donc comme une taxe sur les super-profits,
07:45 comme on a pu le faire sur certaines ventes reprises ?
07:47 - Il faudra interroger le gouvernement
07:48 pour lui demander exactement ce qu'il a derrière la tête sur ce sujet-là.
07:51 - Dominique Selcher, je voudrais juste qu'on comprenne bien quelque chose.
07:54 On a souvent tendance, vous avez souvent tendance à dire
07:57 "ce sont les industriels les méchants",
07:59 et puis quand on pose la question aux industriels,
08:00 ils nous disent "ouais, la grande distribution, ils sont gentils",
08:03 et eux aussi, ils prennent leur part du gâteau.
08:05 Si je prends l'exemple d'une bouteille de soda, 1,75L,
08:08 j'ai regardé hier sur le site de SystemU,
08:10 elle est vendue en ligne, en tout cas 2,23€.
08:13 Combien vous prenez de marge sur ces 2,23€ ?
08:16 - Je ne sais pas de quel produit vous parlez.
08:18 - C'est une bouteille de Coca.
08:19 - Écoutez, ce qui est important de comprendre et de faire de la pédagogie,
08:22 il ne faut pas faire de caricatures sur ces sujets.
08:25 Quand un client dépense 100€ dans un magasin U,
08:27 il reste au commerçant entre 2,50€ et 2,50€.
08:30 Quand vous dépensez 100€ de produits d'une même grande marque internationale,
08:36 le résultat à eux, ça peut être 15, 16, 17€ qui restent à la fin.
08:40 Et en moyenne, pour un industriel de base,
08:43 et d'ailleurs c'est eux qui l'ont dit devant les parlementaires la semaine dernière,
08:46 c'est 5 ou 6€.
08:48 Où sont les marges les plus grandes ?
08:50 Je vous le dis, elles ne sont pas chez nous.
08:52 Donc arrêtons les caricatures.
08:54 Et ce qu'on dit, c'est juste chez SystemU que chacun prenne sa juste part
08:59 du combat de l'inflation actuellement.
09:01 Le gouvernement ne cesse de dire que plutôt les distributeurs la prennent.
09:05 Je crois qu'il y a un maillon, la production,
09:07 mais à part les PME,
09:09 n'ont pas forcément joué le jeu cette année.
09:12 C'est un fait maintenant acquis par tous les observateurs quand même.
09:16 Merci beaucoup Dominique Schellscher.
09:19 de la France.
09:20 Merci à vous.
09:20 [SILENCE]

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