Quatre jours après la découverte du corps d'Imran, 7 ans, dans un appartement HLM du Bas-Vernet à Perpignan, les associations de protection de l'enfance dénoncent les "actions marginales" du gouvernement en matière de lutte contre les violences faites aux enfants.
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00:00 En attendant il est 7h46 et avec notre invité ce matin on va revenir sur ce drame, la mort d'Imran.
00:07 C'était jeudi soir, le corps de cet enfant de 7 ans retrouvé dans un immeuble de Perpignan, quartier du Baverné.
00:14 On parle ce matin avec notre invité de prévention des violences et de protection de l'enfance, Suzanne Chaudjahi.
00:19 Nous sommes avec le président de l'association "L'Enfant en Majuscules".
00:23 Bonjour Jean-Louis Gérante.
00:24 Bonjour.
00:25 Comment vous avez réagi lorsque vous avez appris en fin de semaine dernière la mort de cet enfant de 7 ans,
00:30 retrouvé en partie congelé et son corps présenté des marques de violence ?
00:35 Comment est-ce que vous avez réagi ?
00:37 Comment on peut réagir devant un tel acte de barbarie ?
00:41 C'est d'abord l'humain qui parle, c'est dire que c'est pas possible.
00:46 Et l'autre réaction c'est comment est-ce encore possible aujourd'hui en France, un pays civilisé ?
00:53 Vous en traitez souvent des histoires de telles atrocités ?
00:57 Nous on ne traite pas des histoires de telles atrocités, c'est pas notre rôle.
01:00 Notre rôle c'est plus la prévention, l'information.
01:03 Mais ce sont des événements qui arrivent malheureusement régulièrement en France.
01:09 Il faut quand même savoir qu'aujourd'hui les chiffres à peu près admis sont 131 infanticides par an,
01:16 dont 67 uniquement par les parents.
01:20 Donc ce n'est pas des choses rares, on connaît les plus spectaculaires,
01:24 Fiona, Marina, certains comme ça, mais il y en a tellement qui passent sous les radars.
01:28 Vous parlez des infanticides, les enfants qui sont décédés,
01:33 mais les enfants qui sont simplement "victimes de violence".
01:36 Est-ce qu'on a des chiffres précis en France et dans les Pyrénées-Orientales ?
01:39 Non, parce que les chiffres de la Pyrénée-Orientale on en aurait avec la crippe,
01:45 la cellule de recueil des informations préoccupantes,
01:50 c'est elle qui recueille toutes les informations qui peuvent revenir,
01:53 remonter, que ce soit de la justice, de la police ou même du simple particulier.
01:57 Mais ce ne sont que les cas recensés.
02:00 Tous les autres qui passent sous les radars, qui sont méconnus,
02:06 un enfant qui est maltraité ne dit rien.
02:09 Un enfant qui est maltraité ne va jamais mettre en cause ses parents.
02:13 Il est toujours très fidèle à ses parents, il aime ses parents.
02:16 La violence, la maltraitance, de quoi on parle exactement ?
02:19 On parle de tout ce qui va entraver le développement de l'enfant
02:24 et qui va laisser des séquelles à vie.
02:26 On parle souvent des violences sexuelles auprès des jeunes filles,
02:31 mais il y a aussi la violence physique, donc les coups, la violence psychologique.
02:34 Quand on attend ou qu'on veut que son fils ou son enfant soit Einstein
02:39 alors qu'il est "normal", on veut toujours plus, toujours plus, toujours plus.
02:44 La pression ?
02:45 La pression ou l'absence de soins, de relations affectives.
02:50 On le délaisse et l'enfant s'enferme et il devient un peu marginal.
02:55 Et c'est une maltraitance.
02:56 Après, les maltraitances sexuelles, on les connaît, les agressions, les viols, l'inceste.
03:00 La privation de sommeil aussi ?
03:02 La négligence, la privation de sommeil.
03:05 Mais la privation de sommeil, ça fait partie des violences psychologiques.
03:07 C'est vrai que si vous empêchez un enfant de dormir, il ne va pas pouvoir se développer normalement.
03:13 Il va y avoir des retards scolaires, des carences affectives.
03:16 Il y a tout un cheminement.
03:18 Il y en a tellement de facettes que c'est assez compliqué en si peu de temps de le définir.
03:22 Vous, vous estimez que les violences faites aux enfants, c'est un tabou aujourd'hui en France. Pourquoi ?
03:26 C'est un tabou et je donne toujours des exemples.
03:29 Quand on sollicite les personnalités politiques du département,
03:33 ils nous reçoivent toujours sans aucune difficulté.
03:37 Par contre, après, il n'y a jamais de suivi.
03:40 Sachez que nous, on ne demande rien.
03:42 Toutes nos actions sont gratuites, totalement gratuites.
03:44 Quand on se déplace dans les écoles, on ne demande rien à personne.
03:46 Mais simplement le fait de nous mettre en relation avec les piges, avec les périscolaires,
03:52 ça n'arrive pas à se faire.
03:53 Alors que c'est là qu'on peut nous intervenir auprès tant des enfants que des professionnels,
03:58 les professionnels pour déceler les signes des maltraitances.
04:01 Il semblerait pourtant qu'il y ait une prise de conscience ces derniers temps,
04:04 puisque le gouvernement vient de lancer une campagne de sensibilisation la semaine dernière,
04:08 avec des vidéos chocs diffusées à la télévision aux heures de grande écoute,
04:13 pour dénoncer surtout les violences sexuelles, les incestes.
04:15 Est-ce que ce n'est pas là le début de quelque chose ?
04:18 Vous allez me faire sourire.
04:21 Sous le précédent gouvernement, Laurence Rossignol avait lancé un plan triennal d'action contre les violences faites aux enfants.
04:28 Vous en avez entendu parler.
04:30 Alors là effectivement, il y a un commencement de quelque chose qui se met en place,
04:33 mais bon, pour moi c'est encore marginal.
04:38 Il faudrait une action beaucoup plus forte et une information au public pour leur dire quelles sont les démarches à faire
04:45 et qu'est-ce qu'il faut faire quand on a une suspicion de maltraitance.
04:50 Parce qu'on n'aura jamais la certitude, mais on peut être inquiet.
04:54 France Bleu Roussillon, l'invité du 6/9.
04:58 8h10, notre invité, Suzanne Chaudjahi.
05:00 Jean-Louis Gérante, président de l'association "L'Enfant en Majuscule" dans les Pyrénées-Orientales.
05:04 Vous parliez justement de sensibilisation.
05:07 "L'Enfant en Majuscule", c'est l'une de vos missions.
05:09 Elle fait partie des trois associations de protection de l'enfance dans le département.
05:14 Quel est votre rôle ? Quelles sont vos missions ?
05:16 Nos missions, je vais dire plutôt nos actions, c'est surtout l'information et la sensibilisation
05:21 d'abord des enfants dans les établissements scolaires.
05:23 Sachez qu'il y a une loi qu'on baptise la loi de Courson qui est de 2000, c'est de 6 mars 2000
05:29 qui impose à tous les établissements scolaires, à toutes les classes, au moins une heure de sensibilisation par an,
05:35 par enfant et par classe.
05:37 C'est pas mis en place. Nous on n'est pas sollicité ou très peu.
05:40 Il y a des établissements qui nous appellent régulièrement, mais c'est très rare.
05:43 Donc c'est la sensibilisation auprès des enfants.
05:46 C'est la formation, la sensibilisation des futurs professionnels ou des professionnels.
05:51 On intervient dans les établissements de formation.
05:53 De la protection de l'enfance ?
05:55 Non, pas de la protection, pas uniquement, non justement.
05:57 Les auxiliaires de puits agricultrices par exemple, c'est quand même des gens qui sont en lien avec les enfants,
06:04 en contact avec les enfants et c'est eux qui ont besoin parce que ce n'était pas dans leur curse de formation.
06:10 Alors il y a des établissements comme le HPA Perpignan qui nous font confiance depuis des années.
06:14 Là j'interviendrai aussi à Toulouse dans le même cadre parce que c'est un vrai besoin
06:19 parce que ce sont les gens qui sont en contact avec les enfants.
06:21 Donc il y a cette sensibilisation, cette formation, même si le mot formation est un peu fort,
06:25 auprès de ces publics-là pour qu'ils soient plus attentifs et plus vigilants.
06:30 Donc c'est vous par exemple qu'on peut contacter si on a des suspicions dans notre entourage,
06:35 chez nos voisins par exemple, on peut vous appeler ?
06:38 On peut nous appeler, on peut aussi faire un mail, je ne dis toujours pas, des traces écrites,
06:44 des traces écrites et pas uniquement le téléphone, disons envoyer un mail à la CRIP,
06:49 c'est CRIP66@CD66, c'est l'aide sociale à l'enfance, c'est eux qui traitent tous les dossiers.
06:57 Nous, qu'est-ce que nous allons faire ? Nous allons orienter, nous allons renvoyer auprès de la CRIP
07:02 parce qu'on n'a pas des moyens d'investigation, ce n'est pas notre rôle.
07:05 Vous recevez beaucoup d'appels ?
07:07 Alors on en recevait à peu près une quarantaine par an, depuis le Covid ça s'est arrêté
07:12 et surtout ce que j'ai relevé c'est qu'avant dans le journal local, il y avait une rubrique
07:17 qui s'appelait "ce que vous devez savoir" où il y avait tous les numéros d'appels des associations
07:23 dont la nôtre et celle des autres associations du département et cette rubrique a disparu.
07:28 Alors est-ce qu'il y a un lien de cause et effet ? Je trouve ça dommage parce qu'il y avait tous les numéros dessus.
07:32 Est-ce qu'ici dans les Pyrénées-Orientales on est davantage concerné par rapport à d'autres départements français ?
07:37 Non, je pense que c'est général et on ne peut pas parler de...
07:42 Alors surtout on ne parle pas de stigmatisation des publics, la précarité ce n'est pas un symbole de maltraitance.
07:50 Ça peut en arriver dans n'importe quelle famille ?
07:52 Je vous prendrais simplement l'exemple de... vous avez quelqu'un de connu qui s'appelle Céline Raphaël
07:56 qui est régulièrement été avoué sur d'autres faisceaux d'informations.
08:02 C'était comme une famille bourgeoise d'un village très bourgeois, père-chef d'entreprise qui était matraqué
08:07 parce qu'elle faisait des fautes au piano, simplement.
08:10 Il y a un numéro à retenir en tout cas c'est le 119, "Enfance maltraitée si jamais"
08:16 Vous parliez aussi de la CRIP, vous avez donné l'adresse mail, on la mettra aussi au standard de France Bleu Roussillon si jamais il y a des auditeurs.
08:22 Il y a aussi votre association "L'Enfant" en majuscules à Perpignan, il y en a deux autres à Perpignan et à Elde,
08:27 il faudra leur dire et "La Mouette".
08:29 Merci beaucoup Jean-Louis, j'ai hâte d'avoir répondu à notre invitation ce matin.
08:34 Vous êtes le président de l'association "L'Enfant" en majuscules. A bientôt ?
08:37 J'espère bien que non !
08:39 Oui, dans un sens, c'est vrai !