Dans son édito du 13/09/2023,Paul Sugy revient sur le discours d'Ursula von der Leyen sur l'état de l'Union européenne.
Category
🗞
NewsTranscription
00:00 La politique avec vous, Paul Sujit. Bonjour Paul.
00:02 Bonjour Romain.
00:03 C'est la rentrée au Parlement européen et ce matin, la présidente de la Commission européenne,
00:06 Ursula von der Leyen, va prononcer devant les eurodéputés
00:11 son discours sur l'état de l'Union européenne.
00:14 En quoi ça consiste exactement déjà, Paul ?
00:16 Il y a deux façons de vous répondre, Romain.
00:17 Si on s'en tient au texte, ce discours, c'est un événement annuel
00:20 où le président de la Commission présente au Parlement les orientations de l'année,
00:23 les grandes propositions législatives.
00:25 Sans surprise, Ursula von der Leyen va donc sans doute évoquer le Pacte migratoire,
00:28 encore le Green Deal, ces derniers textes qui restent à voter avant les prochaines européennes.
00:33 Dans une effervescence politique qui contraste, il faut bien le dire,
00:36 avec la relative indifférence qu'inspire en dehors du huis clos des institutions bruxelloises
00:40 cette liturgie européenne encore méconnue.
00:42 Alors maintenant, il y a la lettre et il y a l'esprit.
00:44 Dans son principe déjà, ce discours sur l'état de l'Union,
00:47 c'est une invention récente qui date du traité Lisbonne, le premier a eu lieu en 2010.
00:50 Ça évoque de toute évidence le State of the Union Address,
00:53 c'est-à-dire le discours annuel du président des États-Unis au Capitole,
00:57 devant le Congrès.
00:59 Donc tout à l'heure, dans un étrange exercice de pastiche,
01:01 on va voir Madame von der Leyen jouer à n'être plus vraiment la présidente de la Commission européenne,
01:07 mais quasiment la présidente des États-Unis d'Europe.
01:10 Mais pour qui se prend-elle donc ?
01:11 Vous trouvez qu'elle prend trop de place ?
01:13 Oui, et pour le comprendre, on peut se rappeler d'une anecdote.
01:15 Souvenez-vous, c'était en 2021, Erdogan recevait conjointement la présidente de la Commission
01:20 et le président du Conseil, Charles Michels,
01:22 sauf qu'il avait réservé à ce dernier un siège qui était à côté de lui
01:25 et qu'il avait donc relayé Madame von der Leyen à un sofa,
01:28 on avait appelé ça le "sofa gate", un sofa un peu plus loin dans la pièce.
01:31 Alors maligne, celle-ci avait maquillé cette delegation en une forme de provocation sexiste, pourquoi pas,
01:36 et elle avait exigé des excuses.
01:37 Mais la vérité est ailleurs, c'est que cette décision du protocole rappelle
01:41 qu'en Europe, la représentation à l'étranger des institutions revient d'abord au Conseil,
01:45 qui est le porte-parole direct des États membres.
01:47 La blessure d'orgueil qu'engarde Ursula von der Leyen
01:50 dit au fond à quel point son mandat a été celui d'une invraisemblable montée en puissance de la Commission.
01:55 On l'avait croyé d'abord techno, très peu politique, c'était une ministre de la Défense allemande,
02:00 c'est-à-dire effectivement plutôt réservée sur l'arrière de la scène.
02:03 En réalité, la présidente de la Commission a peu à peu imposé son visage
02:08 sur toutes les photos officielles, elle est devenue l'incarnation majeure d'une Europe en proie à des crises sans fin.
02:14 Enfin, pour qui se prend-elle donc ?
02:16 C'est elle aujourd'hui le vrai visage de l'Europe ?
02:18 Oui, la politique étrangère c'est elle, la politique économique c'est elle, la politique sanitaire c'est elle,
02:22 il suffit de regarder les photos.
02:23 En 2008, la crise de l'euro, les grands sauveteurs de l'euro à l'époque, c'est Sarkozy-Merkel.
02:29 Le couple s'est consacré comme le leader bicéphale de l'Union.
02:32 Quinze ans plus tard, avant même qu'Emmanuel Macron ne se rende à Kiev pour aller visiter le président Zelensky,
02:37 c'est Ursula von der Leyen qui pose devant les journalistes, au côté du héros de Kiev.
02:42 Symptôme d'un temps de crise jamais révolu où le leadership compte davantage que l'application des traités,
02:47 traités d'ailleurs qui ont été, si vous me permettez, particulièrement mal traités ces dernières années.
02:51 Et bien, Ursula von der Leyen a peu à peu évincé les chefs d'État en prenant à leur place l'initiative politique en Europe.
02:57 Sa toute puissance a été consacrée une première fois par la crise du Covid,
03:00 avec l'émission de Robon et le plan de relance européen, et puis l'achat des vaccins.
03:05 Aujourd'hui, c'est la guerre en Ukraine qui achève d'en faire la reine d'un continent au chevet de son voisin malheureux.
03:10 Du reste, son accession au trône doit si beaucoup, il faut bien le dire, à l'espace laissé vide par Angela Merkel elle-même,
03:15 qui depuis son déclin et sa chute, a laissé un trône vacant.
03:19 Tout à l'heure, sa majesté Ursula von der Leyen va détailler longuement ses vues en oubliant un peu trop vite qu'en Europe,
03:24 ce sont aussi les sujets qui ont leur mot à dire.
03:27 Paul Sujit avec nous le matin dans La Matinale. Merci beaucoup Paul.
03:31 (Générique)