Municipales et régionales en Côte d'Ivoire : des scrutins sous tension ?

  • l’année dernière
Huit millions d’électeurs sont appelés aux urnes le 2 septembre en Côte d’Ivoire pour renouveler les conseils municipaux et régionaux. Avec une forte présence de candidatures indépendantes : ils sont 341 candidats validés par la Commission électorale indépendante. Mais les principales formations politiques ne voient pas d'un bon œil ces candidatures et ont décidé de sanctionner, voire d'exclure de leurs partis les candidats perçus comme des dissidents.
Une émission préparée par Aziza Nait Sibaha, Mohamed Chenteur et Jessica Fahed.

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00:00 Bonjour et bienvenue à tous dans ce nouveau numéro de Demain à la Une.
00:06 Quelques 8 millions d'électeurs sont appelés aux urnes le 2 septembre en Côte d'Ivoire
00:10 pour renouveler les conseils municipaux et régionaux.
00:13 Pour rappel aussi, la commission électorale indépendante a exigé un quota de 30% de
00:18 candidats dans les listes des conseils régionaux et municipaux.
00:22 Pour discuter de ce sujet, j'ai le plaisir d'avoir à mes côtés ici dans les studios
00:27 Hassan Diop qui est journaliste spécialiste de l'Afrique.
00:31 Bonjour Hassan.
00:32 Bonjour Aziza.
00:33 Merci d'être avec nous et Jean-Claude Félix Tshikaya, chercheur à l'Institut de Prospective
00:37 et de Sécurité en Europe.
00:38 Bonjour.
00:39 Bonjour.
00:40 Merci à vous aussi de vous joindre à nous.
00:41 Je vais commencer avec vous Félix Tshikaya.
00:43 Quels sont les enjeux de cette élection à laquelle sont invités aujourd'hui les
00:48 Ivoiriens et qui intervient surtout peu de temps finalement, quelques années seulement
00:53 après l'élection de 2020, l'élection présidentielle et deux ans avant la prochaine présidentielle?
00:59 C'est vécu comme un moment crucial et de recomposition politique.
01:04 Le RHDP est donc une machine qui devient de plus en plus puissante sur le plan de l'organisation
01:11 politique et économique devant un score de croissance de M. Ouattara assez haut et donc
01:19 ils sont en ordre de bataille.
01:21 Il y a aussi une autre question, c'est quel va être le score du nouveau parti de PPDCI,
01:26 le PPCI de M.Bagbo, qui recompose là encore pas seulement son parti mais aussi la gauche.
01:34 Il n'a pas pu faire union avec sa femme qui a aussi créé son parti.
01:40 Il a fait une union pas complète avec le parti du défunt, le PDCI-RDA, le parti historique
01:47 du défunt M.Bédié d'ailleurs, sa perte va planer sur ce scrutin.
01:55 Et puis il y a un fait aussi, même deux, sur les 341 indépendants qui sont soit sortis
02:05 de manière dissidente, dirait HDP et autres.
02:07 Quand je parle de moment de recomposition, nous sommes un petit peu au XXIe siècle en
02:13 Côte d'Ivoire et un peu partout, je pense sur le plan politique.
02:16 On les reçut beaucoup, on leur demandait souvent d'attendre que le chef, donc là
02:21 certains sortent pour essayer d'accélérer les changements et de changer un peu ce paysage
02:29 politique.
02:30 Donc c'est un moment de recomposition politique.
02:32 Alors en parlant de ce moment de recomposition justement Hassan, j'ai envie de parler de
02:36 l'ancien président Laurent M.Bagbo.
02:37 Il est sous le coup d'une condamnation à 20 ans de prison en Côte d'Ivoire pour le
02:41 braquage de la Banque centrale des Etats d'Afrique de l'Ouest en 2011.
02:44 Il a été radié des listes, de la liste électorale.
02:48 Le PPACI, c'est le Parti des Peuples Africains Côte d'Ivoire, donc c'est le parti de Laurent
02:52 M.Bagbo, reste quand même une des principales forces d'opposition aujourd'hui.
02:56 Absolument.
02:57 Et dans le cadre de cette élection, je suis tenté de parler de baromètre.
03:01 Toute élection est en somme une sorte de baromètre politique.
03:04 Mais là encore plus.
03:05 Effectivement, on va savoir ce que pèse ce parti des Peuples Africains Côte d'Ivoire
03:12 fondé par Laurent M.Bagbo en 2021, dans la foulée de son retour en Côte d'Ivoire
03:18 après 10 ans passés dans les prisons de la CPI.
03:21 Il a été donc innocenté en 2019.
03:25 Parce que ce parti PPACI a été fondé sur les décombres de l'ancien FPI qui avait
03:30 porté au pouvoir le Parti populaire ivoirien, qui avait porté Laurent M.Bagbo en 2000 à
03:35 la tête du pays.
03:36 Et ce parti a été fondé donc, le PPACI, sur les décombres du FPI originel, si je
03:42 puis dire, puisqu'il y a Simone Bagbo qui a effectivement créé son mouvement.
03:47 Il y a Afin Gessan, Pascal Afin Gessan, qui est resté maître de l'ancien parti populaire
03:56 ivoirien, FPI, qui est d'ailleurs aujourd'hui seul reconnu, et qui a rallié depuis la présidentielle
04:01 le camp du président Ouattara.
04:04 Et donc, au fond, à l'issue de ces élections, on va savoir qui du PDCI ou du PPACI va camper
04:14 véritablement le leadership dans l'opposition.
04:17 A noter d'ailleurs que Bagbo ne présentera il me semble que 22 candidats dans les 31
04:22 régions que compte la Côte d'Ivoire, surtout dans le sud, en sachant que le nord est plutôt
04:28 constitué de bastions du RHDP.
04:31 Alors justement, en parlant du PDCI, c'est l'autre parti d'opposition, le Parti démocratique
04:36 de Côte d'Ivoire.
04:37 Ses responsables ont déjà annoncé depuis plusieurs mois qu'il y avait une hémorragie,
04:42 qu'il y avait beaucoup de départs, justement, vers le RHDP qui est au pouvoir.
04:47 Quid de l'avenir de ce parti politique, justement, après la mort récemment d'Henri-Colain Bézier ?
04:55 Oui, ce qui souligne d'ailleurs le moment test de ce scrutin, qui est un peu précipité
05:00 par ce décès d'un historique, monsieur Bézier, mais surtout d'un parti historique.
05:07 Bon, ils sont tous oufouettistes maintenant, même si certains étaient parfois opposants
05:12 avant, mais aujourd'hui c'est une question qui se pose.
05:16 Beaucoup sont allés rallier le RHDP au sein de son parti, mais pas seulement son parti.
05:23 Mais ça ne veut pas dire que le RHDP va véritablement peut-être s'imposer, c'est la question qui
05:30 se pose, parce qu'il y a des bons chiffres sur le plan de la croissance économique.
05:33 Mais paradoxalement, malgré que ce soit un "début de mandat des grands travaux",
05:39 mais ça souligne une question sociale, où le pouvoir d'achat des Ivoiriens baisse,
05:44 où il y a beaucoup, sur le plan salarial, sur le plan des attentes sociales, ils veulent
05:51 aussi participer au fruit de la croissance, que ça puisse se traduire dans leur vie.
05:56 Donc cette gauche qui se recompose, et je parle là de plus du parti de Bagbo et de
06:01 Madame Bagbo, mais aussi, on peut dire, un centre-gauche, nouvelle version de ce parti
06:06 de Conor Bedier qui a fait une alliance, pas complète, mais avec le nouveau parti de M. Bagbo.
06:12 Donc eux aussi doivent jouer sur leur projet programmatique politique, sur cette question sociale.
06:17 Est-ce que ce fruit économique va aller vers les Nantes habituelles, où il va bien se
06:23 répandre sur toute la Côte d'Ivoire ? Parce que c'est intéressant, M. Oufedouani, l'illustre
06:30 président, lui, était très habile sur le plan de la géopolitique intérieure, sur
06:33 ce patchwork, même dans son gouvernement.
06:36 Est-ce que M. Ouattara et les autres vont pouvoir, même s'ils ne sont pas tous bien
06:43 dissimés, en tout cas ils ne coudent pas tous bien les régions et les localités,
06:49 mais ces deux questions-là, c'est-à-dire le fruit économique et la question sociale,
06:54 et là, les yeux vont être rivés sur les projets programmatiques, ce qui est intéressant,
06:58 parce que souvent en Afrique, malheureusement, les présidentielles parfois vampirisent trop
07:02 les élections intermédiaires.
07:04 Vous avez complètement raison, et c'est de ça que je voudrais justement parler avec
07:07 vous, Hassan, c'est cette présidentielle qui est en perspective, qui est dans deux
07:11 ans, comme je disais, c'est pour ça que, est-ce qu'on peut dire que cette élection
07:14 actuellement, ces municipales régionales, sont aussi un test pour Alassane Ouattara,
07:18 pour le président qui est à la tête du parti au pouvoir, donc je rappelle le rassemblement
07:23 des offuitistes pour la démocratie et la paix, quand on parle de RHDP pour ceux qui
07:27 ne suivent pas.
07:28 Les résultats de ces élections sont importants parce qu'il y a une croissance qui est positive
07:33 et clairement positive, mais la question sociale se pose aussi sur le terrain.
07:36 Et puis la question politique, c'est-à-dire qu'on se souvient qu'en 2020, la dernière
07:40 élection présidentielle a été controversée, contestée, l'opposition avait appelé au
07:45 boycott, ça avait créé des tensions, il y avait eu des morts, enfin bref, le triste
07:49 souvenir également de 2010, de la crise postélectorale.
07:52 Donc effectivement, ces élections sont un test sur la popularité d'Alassane Ouattara,
07:57 évidemment avec en toile de fond ses réalisations, c'est vrai que depuis qu'il a été réélu,
08:05 c'est un homme qui est au travail et puis qui tente, qu'on le veuille ou pas, de bonne
08:09 foi à apaiser le climat politique national tout en faisant preuve de grande fermeté.
08:16 Je pense notamment à Guillaume Soro aujourd'hui exilé.
08:20 Donc oui, ça sera un test pour Alassane Ouattara et dans la perspective de 2025, ça sera très
08:25 intéressant aussi et au sein même du RHDP parce que si on ne le dit pas ouvertement,
08:31 il y a probablement au sein du RHDP également des positionnements en vue de cette présidentielle
08:36 au cas où Alassane Ouattara qui normalement à vertu de la constitution a droit à un
08:41 nouveau mandat, à supposer qu'il ne se présente pas évidemment, il y a des figures du parti.
08:46 Je pense notamment à Adama Biktogo qui est en compétition dans la plus grande commune
08:53 d'Abidjan contre Michel Mbakbo et donc qui est quasiment en compétition aussi avec la
09:01 ministre des affaires étrangères, Madame Kandia Kamara qui est candidate elle à Aboubou,
09:07 l'autre grande commune.
09:08 Donc au sein même du RHDP, ces élections...
09:11 Il y a aussi des guerres pour un éventuel remplacement ?
09:13 Pas forcément des guerres, même si pour l'instant...
09:15 Il y a de la compétition en tout cas.
09:16 Il y a de la compétition, ce qui est d'ailleurs très sain pour un parti politique.
09:19 Donc une fois de plus, ces élections effectivement seront aussi un baromètre pour mesurer un
09:25 peu le poids des uns et des autres et puis pour mesurer effectivement la popularité
09:31 d'Alassane Ouattara pour savoir si ça a été véritablement entamé par le troisième
09:36 mandat que un certain nombre de personnes avaient contesté.
09:39 Alors justement, en parlant de contestation, on parle de la présidentielle bien évidemment
09:43 d'octobre 2020 qui avait vu justement Alassane Ouattara réélu pour un troisième mandat.
09:48 Ça avait provoqué une crise dont on se rappelle, en tout cas ceux qui suivent ce qui se passe
09:52 en Côte d'Ivoire, il y a fait des morts, un demi-millier de blessés aussi.
09:57 Est-ce qu'on s'inquiète de ça pour ce nouveau scrutin ou est-ce qu'une présidentielle,
10:03 c'est différent ?
10:04 Il y a quand même en arrière-fond, en fond d'écran, une inquiétude.
10:07 Beaucoup sont intervenus, que ce soit la commission indépendante d'organisation des élections,
10:13 mais tous les partis ont demandé que ce soit apaisé, même dans le discours et la conférence
10:18 de presse fleuve de M.
10:20 Bagbo ou autre.
10:21 Là vraiment, c'est l'unanimité sur un climat apaisé.
10:25 Même si M.
10:26 Bagbo, qui ne peut pas participer parce qu'il n'a pas été amnistié, plus personne ne
10:34 veut avoir de crise et avoir des décès dans sa famille politique.
10:41 Il faut que ce soit un moment de paix et de recomposition politique.
10:47 Il y a des luttes intestines, certains font des dissidents.
10:51 Donc ça se passe sur le champ politique, sur le plan programmatique.
10:56 Voilà ce qui est mis en avant.
10:57 C'est pour ça que c'est aussi, de ce point de vue, sur le plan sécuritaire, sur le plan
11:01 de la paix sociale et politique, c'est un test pour le président de la République,
11:07 mais tout le monde.
11:08 C'est-à-dire que tout le monde doit être un peu co-organisateur du citoyen au chef
11:12 d'État et toutes les personnes qui sont, comme M.
11:17 Bagbo, des figures.
11:18 Mme Simone Bagbo aussi, M.
11:21 Blégoudet, tout le monde, même avant de décéder, M.
11:26 Conor Bedier avait fait montre aussi de pareilles déclarations pour que ce soit un scrutin
11:32 apaisé.
11:33 Très bien.
11:34 C'est un peu ce que vous disiez tout à l'heure, c'est qu'il s'agit d'un baromètre
11:36 sur tous les niveaux, à tous les niveaux, aussi bien sécuritaire, mais aussi, bien
11:42 évidemment, en politique à suivre de très près.
11:44 Ça sera le 2 septembre.
11:46 Merci infiniment à Saint-Diop d'avoir été avec nous.
11:48 Jean-Claude Félix Tshikaya, merci à vous aussi d'avoir été des nôtres.
11:52 Merci à vous tous de nous avoir suivis pour ce nouveau numéro, le premier de la rentrée,
11:56 de demain à la une.
11:57 Très bon week-end à tous et à la semaine prochaine.
11:58 Merci.
11:59 Au revoir.
11:59 ♪ ♪ ♪

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