Policiers mis en examen dans l’affaire Mohamed: "On se pose des questions sur la légitimité de l'emploi du Raid dans pareilles circonstances", explique Vincent Hergott (Alliance Police nationale)

  • l’année dernière
Les trois policiers du Raid auparavant placés en garde à vue dans l'affaire Mohamed, un homme de 27 ans décédé en marge des émeutes à Marseille, ont été mis en examen pour "violences avec arme ayant entraîné la mort sans intention de la donner" et ont été placés sous contrôle judiciaire.

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Transcript
00:00 L'état d'esprit au sein du RAID, c'est compliqué.
00:02 C'est compliqué pourquoi ?
00:03 Parce que c'est une unité qui est ultra professionnelle,
00:05 qui est habituée à respecter des règles d'engagement
00:08 pour lesquelles elle s'entraîne des milliers de fois,
00:10 des centaines de fois sous différents aspects.
00:12 Et mettre en doute le fait que nos règles d'engagement
00:16 n'auraient pas été dûment en rapport avec la loi
00:20 et avec ce que nous sommes assujettis à respecter,
00:24 pour nous c'est difficile.
00:25 L'incarcération, en tout cas, pas l'incarcération, pardon,
00:28 mais en tout cas la mise en garde à vue de nos collègues,
00:31 c'est très compliqué.
00:32 Pour un flic, c'est difficile d'aller en prison,
00:34 c'est difficile ne serait-ce même que de se retrouver en garde à vue.
00:38 Parce que c'est pas pour ça qu'on est programmé.
00:39 Et surtout pas quand on consacre sa vie et son quotidien à une unité
00:45 comme peuvent le faire ses collègues du RAID
00:48 et comme peuvent le faire finalement l'intégralité de nos collègues
00:51 dans les différents effectifs de police.
00:53 Nous ne sommes pas programmés pour ça.
00:58 – Des hommes du RAID, malgré tout,
01:00 ce n'est pas véritablement votre cœur de métier
01:02 d'intervenir peut-être dans ce contexte d'émeute.
01:04 Qu'est-ce que vous répondez à ceux qui utilisent ce genre d'argument ?
01:07 – Vous avez utilisé le terme émeute.
01:13 Le terme émeute, effectivement, il aura été utilisé par vous,
01:17 en l'occurrence, moi j'ai entendu un contexte insurrectionnel.
01:20 Ce que les collègues ont vécu, ce n'est pas des violences urbaines,
01:24 c'est une émeute, c'est des émeutes avec un niveau de violence
01:28 qui n'avait jamais été atteint à ce jour.
01:30 En tout cas, pour ce qui est du vieux flic que je suis maintenant
01:33 et pour ce qui est de la plupart de mes collègues,
01:35 rares sont ceux qui ont pu me dire avoir vécu pareilles situations,
01:39 même sur des théâtres d'intervention étrangers,
01:42 dans le cadre desquels, je vous rappelle, le RAID est souvent engagé.
01:45 Il ne m'appartient pas de juger, finalement,
01:49 les décisions qui ont été prises quant à l'emploi du RAID.
01:53 Maintenant, effectivement, je ne juge pas des décisions politiques
01:59 ou des décisions administratives qui ont été prises pour l'emploi du RAID,
02:03 mais nous, au sein de l'unité, on se pose de vraies questions
02:08 sur la légitimité de l'emploi anti-RAID.
02:11 Dans pareilles circonstances, à partir du moment où on n'est pas capable
02:14 d'assumer les conséquences d'une méthode de travail et d'une manière de travailler.
02:19 Nous sommes une unité qui sert à interpeller, qui sert à neutraliser,
02:23 à figer des situations.
02:25 Nous ne sommes pas là pour faire du maintien de l'ordre,
02:28 nous ne sommes pas là pour disperser les émeutiers.
02:31 Nous n'avons pas, encore une fois, ni cet entraînement,
02:33 ni cet ADN au sein de cette unité.
02:36 – Donc ce n'était pas votre rôle, vous nous dites, d'intervenir ce soir-là ?
02:42 – Il appartient à mes autorités d'en juger.
02:44 Nous, on fait partie d'un système hiérarchisé.
02:47 Je vous donne un sentiment, ce n'est pas notre rôle,
02:51 ce n'est pas pour ça qu'on s'entraîne,
02:53 ce n'est pas pour ça que les gars du RAID s'entraînent,
02:55 ce n'est pas leur job.
02:56 Maintenant, effectivement, le RAID a résolu certaines situations
03:00 en drogue comme Martinique, Mayotte, peut-être que ça a donné l'impression
03:08 que le RAID était une unité qui pouvait répondre à ce type de besoins.
03:13 Moi, je pense sincèrement que ce soir-là, le RAID a fait le nombre,
03:15 les services de police étaient dépassés, le contexte était calamiteux,
03:20 et le RAID a fait le nombre, je le rappelle encore une fois,
03:22 qu'il faudrait peut-être d'abord commencer par se pencher
03:24 sur les effectifs de police et leur ventilation et leur répartition
03:29 avant d'engager des unités anti-terroristes dans ce que l'on appelle,
03:33 là maintenant, des MOT.

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