L'invité de la rédaction - 03/07/2023

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00:00 ...
00:07 -Bonjour à tous.
00:08 Bienvenue dans "La Rédaction".
00:10 Cette semaine, nos caméras ont eu l'autorisation
00:13 de se poser au sein de la maison d'arrêt de Blois,
00:16 un établissement mis en service en 1943,
00:19 il y a donc 80 ans,
00:21 pour nous parler de ce lieu et des activités qui s'y déroulent.
00:24 Emmanuel Léonard, bonjour. -Bonjour, Annemarie Chaplier.
00:28 -C'est l'établissement de la maison d'arrêt de Blois,
00:30 une maison d'arrêt qui compte 114 places sur le papier.
00:34 Combien de détenus sont dans ces murs ?
00:36 -170 personnes détenues et hébergées.
00:38 -Comment ça se passe ?
00:40 Il y a plus d'un détenu par cellule de 9 mètres carrés.
00:44 Comment vous arrivez à créer ces binômes forcés ?
00:47 -Dans les établissements pétanciers,
00:49 on est vigilant sur les affectations,
00:52 que ce soit séparation des prévenus condamnés,
00:54 procédures criminelles, correctionnelles,
00:57 les cas non fumeurs.
00:58 Donc on compose, on doit respecter ces obligations.
01:01 Et puis les cellules ont aussi des lits superposés,
01:04 ils sont dotés de lits superposés,
01:06 ce qui nous permet d'affecter les personnes détenues.
01:09 -Les personnes qui sont ici sont-elles issues du Loir-et-Cher ?
01:13 Comment on arrive, j'allais dire, à la maison d'arrêt de Blois ?
01:16 -Un peu plus de la moitié des personnes détenues
01:19 sont issues du Loir-et-Cher.
01:20 Les autres viennent des juridictions de Tours, d'Orléans, de Chartres,
01:24 pour la majorité.
01:26 -Alors là, on est dehors,
01:28 dans un espace, je crois, qui n'est pas accessible habituellement.
01:32 On le voit, il fait déjà bon, il fait chaud.
01:34 Est-ce que l'été est une période que vous redoutez particulièrement ?
01:38 Est-ce que la chaleur est plus difficile à gérer pour les détenus ?
01:41 -Dans les détentions, oui, c'est toujours difficile.
01:44 Après, on a toute une série de mesures
01:47 qui nous permettent que ce soit moins difficile à vivre
01:50 pour les personnes détenues,
01:51 comme cantiner des ventilateurs,
01:53 être vigilant aussi sur les publics plus âgés,
01:56 sur ceux qui ont des problèmes de santé,
01:58 l'accessibilité aussi au cours de promenade,
02:01 avec des bouteilles d'eau,
02:02 des brumisateurs aussi en cours de promenade.
02:05 On a plusieurs mesures qui nous permettent d'être vigilants
02:08 et de surveiller les personnes détenues.
02:11 -La maison d'arrêt est un lieu d'attente,
02:13 soit de la date de son procès, soit de la fin de sa peine.
02:16 Un lieu où le temps peut être long.
02:18 Récemment, vous avez décidé d'installer
02:20 des jardins en permaculture.
02:22 Il y a quelques-uns autour de nous.
02:24 Pourquoi avoir fait ça ?
02:25 -Du coup, c'était un objectif, déjà,
02:28 de créer une nouvelle activité sur l'établissement.
02:31 J'avais déjà fait un projet similaire à petite échelle
02:34 sur mon poste précédent à la maison d'arrêt de Troyes.
02:37 J'ai été mis en relation avec une association blaisoise
02:40 pour mettre en place ce projet permaculture biodiversité.
02:43 Donc là, nous venons juste de faire les plantations.
02:46 Il y a à peu près 15 jours, nous démarrons le projet.
02:49 Nous avons aussi équipé l'établissement de composteurs.
02:53 Nous créons...
02:55 Nous allons créer aussi dans la cour d'honneur
02:58 des grosses plantations de fleurs.
03:01 Les personnes détenues font une nouvelle activité,
03:04 font des boutures. Nous allons aussi mettre en place
03:06 un tri sélectif, faire l'acquisition aussi
03:09 pour les personnels d'un vélo électrique
03:11 sur l'établissement.
03:12 Et on va avoir à peu près 25 activités sur deux ans,
03:15 à peu près une mensuelle,
03:17 où la membre de l'association vient
03:19 et communique aux personnes détenues.
03:21 Donc c'est vraiment aussi dans un esprit éco-citoyen.
03:25 -Il y aura des récupérateurs d'eau de pluie ?
03:27 -Il y aura des récupérateurs d'eau de pluie installés,
03:30 deux, dans la cour d'honneur.
03:32 Donc voilà, nous nous inscrivons
03:34 dans ce beau projet permaculture biodiversité
03:36 avec toute l'équipe, et notamment notre service technique
03:39 qui est très impliqué sur ce projet.
03:41 -Le 22 juin dernier, vous avez également organisé
03:44 une animation autour des valeurs de l'olympisme.
03:46 Qu'attendiez-vous de ce moment-là ?
03:49 -Toutes les personnes détenues pouvaient s'inscrire.
03:51 Et là, nous avons eu à peu près 78 participants.
03:54 -C'est une réussite ?
03:55 -Oui, c'est une réussite.
03:57 Et au-delà de ça, les personnes détenues se mobilisent.
04:00 C'est aussi une préparation à la sortie,
04:02 c'est aussi le respect des règles, des intervenants,
04:05 lutter contre l'oisiveté, le dépassement de soi.
04:08 Donc c'est aussi les valeurs de l'olympisme.
04:11 Donc on allie à la fois le sport et la culture
04:14 sur un même projet.
04:15 -Vous disiez "lutter contre l'oisiveté".
04:18 C'est quoi, le quotidien d'un détenu ?
04:20 Il reste combien de temps dans sa cellule ?
04:23 -Les personnes détenues peuvent s'inscrire
04:25 à une multitude d'activités.
04:27 Nous avons aussi des personnes détenues qui travaillent,
04:30 qui vont à l'école, qui font des soins,
04:33 beaucoup d'activités proposées
04:35 par le service pénitentiaire d'insertion et de probation.
04:38 Donc nous, ce qui va nous intéresser,
04:40 c'est que les personnes détenues se mobilisent et s'inscrivent.
04:43 Sinon, les personnes détenues resteraient
04:46 une journée en cellule et n'iraient peut-être qu'aux promenades.
04:49 Nous, ce qu'on veut, c'est qu'ils fréquentent la bibliothèque,
04:53 qu'il y ait aussi beaucoup d'audience.
04:55 Les personnes détenues sont beaucoup vues par les partenaires.
04:58 Nous, on veut qu'ils s'inscrivent massivement,
05:01 qu'ils se mobilisent pour préparer leur sortie
05:04 et aussi leur réinsertion.
05:05 -Parmi les autres animations que vous avez mises en place,
05:09 on va parler d'un canard.
05:10 Vous en avez quelques exemplaires à vos pieds.
05:13 C'est un mensuel que vous avez mis en place ?
05:15 -Oui, du coup, l'idée de ce journal,
05:17 donc, j'en avais aussi fait un
05:19 avec la responsable de l'école à Maison d'Arête 3.
05:22 J'ai voulu renouveler, c'était le premier projet
05:25 lorsque j'ai pris mes fonctions.
05:26 Je me suis rapproché de M. Boulet,
05:28 le responsable local de l'enseignement.
05:31 Je lui ai dit qu'on allait faire ce projet sur l'établissement.
05:34 Donc, on a fait une consultation aussi des personnes détenues
05:37 par le biais de l'article 411.2.
05:39 C'est-à-dire qu'on consulte plusieurs personnes détenues
05:42 pour leur présenter le projet.
05:44 L'idée, c'est les personnes détenues
05:46 qui ont choisi le titre, qui ont fait aussi le visuel.
05:50 Et tout partenaire,
05:51 toute personne intervenant sur l'établissement
05:54 peut contribuer à mettre un article sur ce projet.
05:58 -De quoi on parle dans le canard libéré ?
06:00 -On va parler de toute la vie de l'établissement.
06:03 -C'est bien les détenus qui écrivent les articles ?
06:06 -Oui, et notamment aussi notre auxiliaire bibliothèque.
06:09 On va retrouver des rubriques sur le point Info-Justice,
06:12 sur la cuisine, des rubriques sportives.
06:14 On va présenter l'abbédiation animale.
06:16 Nous avons le Défenseur des droits aussi,
06:19 qui a une rubrique.
06:20 Le Centre d'accès aux droits aussi, qui a aussi une rubrique.
06:24 Une rubrique sport, des jeux.
06:26 Donc, nous, ce projet crée aussi une dynamique
06:30 sur l'établissement.
06:32 Et les personnes détenues peuvent nous envoyer des textes,
06:35 des dessins...
06:37 Toutes sortes de transmissions
06:40 que nous, on publiera sur le journal.
06:43 -Vous avez également mis en place de la médiation animale
06:46 pour les enfants des détenus.
06:48 Après le parloir, expliquez-moi à quoi ça sert.
06:51 -Oui, donc, en fait, ce projet,
06:53 c'est pour améliorer les conditions d'accueil des enfants
06:56 des personnes détenues.
06:58 La médiation animale existe depuis longtemps
07:00 dans les établissements pénitentiaires,
07:03 souvent pour les personnes détenues.
07:05 Ici, c'est une vieille structure.
07:07 J'ai refait faire la zone d'attente des familles à leur sortie.
07:10 Il y a un local que j'ai fait entièrement repeindre.
07:13 Il y avait un petit espace perdu.
07:17 On a fait un espace de jeu pour les enfants.
07:20 Et donc, je me suis mis...
07:22 J'ai aussi recruté une jeune service civique
07:24 qui s'occupe des activités sur l'établissement,
07:27 qui s'est mis en lien avec une association blésoise.
07:30 On a mis en place plusieurs séances de médiation animale
07:33 pour les enfants lors des parloirs.
07:35 Donc, la personne vient avec des petits animaux,
07:38 des petits rongeurs,
07:39 qui peut faire une activité aussi avec les enfants.
07:42 -L'idée, c'est que ce soit moins perturbant
07:45 de venir voir papa au parloir,
07:47 qui est quand même...
07:49 Cette petite phase avec l'animal où ça détend l'enfant.
07:52 -Voilà, c'est ça.
07:54 Les enfants rentrent aussi dans les établissements pénitentiaires.
07:57 C'est pas forcément un endroit comme un autre.
08:00 Donc, du coup, ça contribue.
08:02 On voit les enfants qui ont le sourire,
08:04 qui apprécient cette activité.
08:06 Nous, c'est des petits tours de parloir,
08:09 mais... Et puis, les papas détenus en détention
08:11 sont au courant de ce dispositif.
08:13 Donc, ça crée aussi une dynamique,
08:15 c'est aussi un moyen de lutter contre les violences en détention.
08:19 Ca apporte des nouvelles activités proposées sur l'établissement.
08:24 -En mettant en place toutes ces animations,
08:27 vous n'avez pas peur d'être critiqué
08:29 par ceux qui pensent que la prison, ça doit pas être une partie de plaisir ?
08:33 -C'est pas une partie de plaisir.
08:34 Être enfermé, c'est pas une partie de plaisir.
08:37 Il peut y avoir des réactions.
08:39 Mais si vous regardez les projets, on parle aussi beaucoup de culture.
08:43 Donc, du coup, c'est pas de l'amusement.
08:45 Écrire un journal, c'est faire des articles.
08:47 Il y a aussi des articles de tous les thèmes...
08:50 Tous les thèmes sont abordés.
08:53 Donc, du coup, oui, les critiques peuvent avoir lieu,
08:57 mais quand on va décortiquer le projet,
08:59 on va se rendre compte, même sur le projet sport,
09:02 qu'on parle de culture, qu'on fait des expositions.
09:05 Et sur plein d'activités sur l'établissement.
09:08 Donc, ce n'est pas que de l'amusement.
09:10 Mais je peux entendre que des personnes s'offusquent
09:13 de certaines activités en détention.
09:16 -On va s'intéresser à vous, à votre parcours.
09:18 Vous êtes originaire de Saint-Cyr-sur-Loire, en Touraine.
09:21 Vous avez gravi tous les échelons de la pénitentiaire.
09:24 Vous avez commencé en tant que surveillant de prison.
09:27 Qu'est-ce qui vous a attiré dans ce métier si particulier ?
09:31 D'autant plus que vous travaillez, je crois, dans la restauration.
09:35 Vous ne connaissez pas votre univers.
09:37 -Oui, écoutez, moi, je suis issu de la Touraine,
09:40 que j'aime beaucoup.
09:41 Donc, du coup, je travaillais dans la restauration à l'époque.
09:45 J'ai fait mon service militaire dans la Marine nationale.
09:48 Et à l'époque, en 2002, il y avait une grande campagne
09:51 de recrutement dans l'administration pénitentiaire.
09:54 J'avais vu cette campagne.
09:56 J'ai postulé pour le concours de surveillant pénitentiaire.
09:59 C'était pour moi l'inconnu,
10:01 car je ne connaissais pas cette profession.
10:03 -Vous n'étiez pas dans la famille ? -Non.
10:06 Je savais qu'il y avait une maison d'arrêt à Tours.
10:09 D'ailleurs, j'y ai exercé à deux reprises,
10:11 mais je n'y connaissais rien.
10:13 À l'époque, j'ai postulé pour rentrer
10:15 en tant que surveillant pénitentiaire.
10:17 J'ai obtenu le concours.
10:19 -Est-ce que vous comprenez mieux le quotidien
10:22 et les difficultés de vos personnels, j'allais dire,
10:25 pour y être passé vous-même ?
10:26 -Oui, surveillant pénitentiaire, c'est un métier très difficile.
10:30 C'est un hommage à tous les surveillants
10:32 qui exercent cette profession.
10:34 C'est aussi un travail d'équipe.
10:36 Donc oui, j'ai gravi tous les échelons.
10:39 J'ai travaillé dans des établissements difficiles,
10:42 mais j'ai fait effectivement tous les postes qui existent.
10:45 Surveillant, premier surveillant, officier, chef de bâtiment,
10:48 chef de détention, adjoint, chef d'établissement,
10:51 chef d'établissement.
10:53 Ca m'a permis de beaucoup apprendre.
10:55 J'ai encore beaucoup à apprendre,
10:57 mais je connais les difficultés des surveillants.
11:00 C'est aussi d'arriver au même temps que moi.
11:02 Au 1er septembre, on a le même parcours,
11:05 ce qui va nous permettre de mieux appréhender
11:07 les problématiques de nos personnels,
11:10 de les accompagner, de les soutenir.
11:12 C'est un métier très difficile.
11:14 -Quand on est directeur de prison, de maison d'arrêt,
11:17 on a le droit d'être touché par l'histoire d'un détenu ?
11:20 Ou pas ? Ou voilà, on est là...
11:25 Est-ce qu'il y a un côté humain et il faut pas s'en détacher ?
11:28 Il faut pas connaître les histoires de ces détenus
11:31 ou ne pas être sensible à certains détenus ?
11:34 -Nous, leurs histoires, on les connaît.
11:36 On fait beaucoup d'audience, on connaît bien nos publics,
11:39 surtout en maison d'arrêt.
11:41 Avec mon adjoint, on va en détention tous les jours.
11:44 On les côtoie, les surveillants, c'est eux qui les connaissent
11:47 les mieux, les gradés, les officiers.
11:49 Mais oui, on peut être touché,
11:51 que ce soit de bonnes ou de mauvaises nouvelles.
11:54 J'ai le souvenir d'une personne détenue
11:56 qui avait eu son bac au Centre Pynton-Cyr de Lancq.
11:59 C'est quelque chose qui n'arrivait pas souvent.
12:02 On était sur le côté joyeux.
12:04 Après, quand on va annoncer des mauvaises nouvelles,
12:07 chaque histoire va être différente.
12:09 Oui, on peut être touché.
12:10 Après, avec les années, tout le monde est, je dirais, aguerri,
12:14 donc on a l'habitude.
12:16 Mais oui, ça arrive qu'on peut être touché par certaines histoires
12:19 parce que les personnes détenues ont des parcours tous différents.
12:24 On fait des choses aussi avant.
12:26 Il y en a qui ont des parcours atypiques, parfois.
12:29 -Bon, écoutez, merci.
12:31 Merci beaucoup, Emmanuel Léonard,
12:33 de nous avoir gardé un peu de votre temps.
12:35 C'est la fin de cet invité de la rédaction.
12:38 Merci à vous de l'avoir suivi.
12:40 Tout de suite, un nouveau programme sur TV Tour Val de Loire.
12:43 SOUS-TITRAGE : RED BEE MEDIA
12:46 ...
12:50 [SILENCE]

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