Candidats et scénarios clonés, scandales à la chaîne, concurrence étrangère, sexisme… La télé-réalité est en chute libre. Retour en vidéo sur cet effondrement, qui interroge forcément l’avenir de ce milieu.
La télé-réalité s’essouffle et la cible principale, les ados et jeunes adultes, s’en désintéressent. Incontournables du prisme audiovisuel français, les programmes de télé-réalité enregistrent aujourd’hui des audiences historiquement basses.
Après une décennie de succès fulgurants, des émissions emblématiques comme les Princes et les Princesses de l’amour ou encore les Marseillais sont désormais déprogrammés. Avec trop peu d’audiences, les annonceurs se retirent.
Pour comprendre cette lassitude, nous avons rencontré Victoria Dufaye, casteuse depuis dix ans, Nathalie Nadaud-Albertini, sociologue des médias et Emilie Nef Naf, candidate de télé-réalité.
La télé-réalité s’essouffle et la cible principale, les ados et jeunes adultes, s’en désintéressent. Incontournables du prisme audiovisuel français, les programmes de télé-réalité enregistrent aujourd’hui des audiences historiquement basses.
Après une décennie de succès fulgurants, des émissions emblématiques comme les Princes et les Princesses de l’amour ou encore les Marseillais sont désormais déprogrammés. Avec trop peu d’audiences, les annonceurs se retirent.
Pour comprendre cette lassitude, nous avons rencontré Victoria Dufaye, casteuse depuis dix ans, Nathalie Nadaud-Albertini, sociologue des médias et Emilie Nef Naf, candidate de télé-réalité.
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00:00 La télé-réalité française se tue toute seule si elle se recycle pas.
00:05 C'était Aurélie.
00:06 La télé-réalité s'est très vite imposée comme un incontournable
00:11 du paysage audiovisuel français.
00:12 Mais depuis quelques mois, les programmes de télé-réalité
00:15 enregistrent des audiences historiquement basses.
00:17 Prédisant, des programmes comme "La Ville a des Coeurs Brisées"
00:19 ou "Les Marseillais" sont déprogrammés.
00:20 Trop peu d'audimats, donc des annonceurs qui se retirent.
00:22 Alors on a essayé de comprendre pourquoi la cible principale
00:25 de ces programmes, les ados et les 18-30 ans, sont des intérêts.
00:29 On ne consomme plus la télé de la même manière.
00:32 C'est-à-dire que nous, enfin moi j'ai une trentaine d'années,
00:35 donc je regardais la télé, ensuite on s'est mis à regarder
00:40 le replay il y a dix ans, c'est-à-dire je regardais pas à 18h,
00:43 je sortais des cours donc ça fonctionnait pas.
00:45 Et aujourd'hui, qui est-ce qu'on cible en fait ?
00:46 Les télé-réalités ciblent qui ?
00:48 Est-ce que ça cible des gens de 30 ans qui ont "grandi"
00:50 avec ces candidats, entre guillemets ?
00:52 Ou est-ce qu'on cible les 12-13 ans qui en fait ne regardent pas ce...
00:57 Ils ne consomment pas la télé.
00:59 C'est vrai qu'il y a les plateformes et qu'on nous propose aujourd'hui,
01:01 ben voilà, on peut regarder ce qu'on veut avec Netflix, Amazon, etc.
01:06 Et en même temps, on a facilement plus accès aux télé-réalités étrangères
01:11 et à la qualité qui est différente, et aussi à ce que peuvent faire
01:14 les étrangers. En France, on a le CSA, etc.,
01:16 ce qui nous restreint à beaucoup de choses.
01:18 Il ne faut pas se voler la face, ce qui fonctionne c'est un peu tout ce qui est...
01:22 Ouais, un peu trash.
01:24 Peut-être pas le trash, mais ce qui ressemble à la vie,
01:28 la vie réelle en fait.
01:30 Des histoires de tous les jours, avec des gens de tous les jours.
01:32 Aux Etats-Unis ou à l'étranger, ils sont beaucoup plus jeunes,
01:35 ils ont des coups d'avance, clairement.
01:37 Et ce qui fonctionne aujourd'hui en télé, par exemple les 50 ou d'autres programmes,
01:41 c'est parce que le producteur il est jeune.
01:43 Et lui il sait qui il vise, mais lui il vise des 18-60 ans.
01:46 Les productions françaises ne se renouvellent pas,
01:48 et pour certains candidats emblématiques, c'est pareil.
01:50 On recycle jusqu'à produire des émissions sur leur mariage,
01:52 la naissance de leurs enfants ou tout simplement leur quotidien.
01:55 Ces candidats prennent toute la place et en laissent peu pour les nouveaux participants.
01:58 Ça fait quoi, 5-6 ans à peu près qu'on voit tout le temps systématiquement les mêmes personnes,
02:02 et puis aussi tout le temps les mêmes mécaniques qui sont mises en route,
02:05 c'est-à-dire les histoires de tromperies.
02:07 Aujourd'hui le public arrive déjà à voir où veut nous amener la production,
02:13 où vous nous amenez les candidats.
02:14 Il y a une forme de lassitude, c'est un peu comme le film "Un jour sans fin".
02:19 On a un candidat, on le voit commencer dans une émission,
02:22 puis il va continuer son histoire sur les réseaux.
02:25 Très longtemps, ça a été quelque chose qui a suscité l'engagement du téléspectateur
02:31 parce que ça a joué un rôle dans la familiarité.
02:33 Mais des gens qui arrivent sur les formats ont du mal à les distinguer.
02:37 C'est-à-dire de dire "mais attends, mais finalement, c'est un tel ou c'est un tel ?"
02:42 Quand on n'arrive plus à les distinguer,
02:44 quand on a l'impression qu'on a toujours les mêmes personnes,
02:50 y compris physiquement, qu'on n'arrive plus à les distinguer,
02:53 toujours les mêmes histoires,
02:55 il y a un moment où on n'a plus envie de regarder parce que c'est toujours pareil.
02:58 En fait, c'est une question d'envie.
02:59 C'est les filles qui traînent dans ce milieu.
03:02 Elles voient la nana qui arrive avec une poitrine,
03:04 elles se disent "moi aussi, pourquoi pas ?"
03:06 L'autre arrive avec des fesses alors qu'elle n'en a pas.
03:08 Elle se dit "pourquoi pas, moi aussi je voudrais".
03:10 Au final, c'est un engrenage.
03:11 Ça se fait avec le temps.
03:13 Ou alors avant d'arriver en télé, elles veulent être au top du top,
03:15 donc elles se transforment.
03:16 Par exemple, Love Island, je le regarde parce que j'ai une amie qui est à l'intérieur.
03:20 Et je trouve qu'elles sont bien différentes et qu'elles sont la plupart très naturelles.
03:24 On voit enfin des personnes de couleur,
03:27 une palette de gens complètement différente,
03:29 ça représente vraiment la France.
03:30 Ça, c'est vraiment nous en fait.
03:31 Beaucoup se lancent en téléréalité pour devenir influenceurs.
03:34 Une journée de tournage est payée entre 200 et 900 euros,
03:36 tandis qu'un placement de produits Instagram avoisine les 5000 euros.
03:39 Mais depuis quelques années, une nuée de scandales engloutit sa grande famille
03:43 et pourrit d'emblée l'aura des nouveaux participants.
03:46 Placement de produits douteux, dérives liées à la chirurgie esthétique,
03:49 violences sexistes et sexuelles,
03:50 cagnottes humanitaires opaques,
03:52 bref, la liste est longue.
03:54 Pourtant, la téléréalité a toujours su se nourrir de ces scandales.
03:57 Il y a quelques années, un scandale, c'était de la communication.
03:59 Quoi qu'il arrive, c'est de la visibilité pour une personnalité, pour un programme.
04:03 Donc le scandale peut avoir du bon.
04:05 En revanche, quand on est un candidat,
04:09 qu'on a déjà une communauté, qu'on a une image, qu'on porte,
04:12 on peut porter des programmes et qu'on a,
04:14 non pas un, non pas deux, non pas trois,
04:16 mais genre une espèce de caravane de scandales,
04:21 là c'est un autre délire.
04:22 Et derrière, il y a la responsabilité des productions.
04:25 Ça peut porter préjudice à une émission.
04:30 Surtout quand on sait que la personne a plusieurs casseroles depuis quelques années
04:35 et qu'il y a des warnings.
04:37 Là, tout le monde a sa responsabilité.
04:39 Les scandales peuvent aller jusqu'à éteindre un programme.
04:43 Les anges de la téléréalité, ça s'est terminé pourquoi ?
04:46 Parce qu'en fait, il y a eu de plus en plus de harcèlement qui a été validé.
04:52 Et en même temps, si le public réagit, les gens se disent
04:54 "on va garder, on va laisser ça".
04:56 C'est-à-dire qu'à un moment, il n'y a même plus de recul sur ce qui est bien ou mal.
04:59 On pense programme, on pense chiffre, on pense audience, etc.
05:03 Et du coup, on arrive à dépasser certaines limites qui sont imbuvables.
05:08 Ce n'est pas possible.
05:09 Vrai ou pas vrai, peu importe, mais il y a franchement un abus de pouvoir.
05:12 Et donc du coup, des scandales à la clé.
05:15 La façon de le gérer, c'est de faire comme si le scandale n'existait pas.
05:19 En téléréalité, longtemps, on va dire, on a eu une double dynamique.
05:25 C'est-à-dire, on joue sur le scandale, on l'allume, et d'un autre côté, on l'éteint.
05:29 En sachant que le scandale va ramener justement des téléspectateurs.
05:33 Ce sont des choses qui sont tellement sensibles
05:37 qu'on ne peut pas utiliser le mécanisme de gestion du scandale
05:43 qui jusque-là a fonctionné en téléréalité.
05:46 Là, ça me semble compliqué.
05:47 Pour moi, ces scandales-là n'attirent pas des téléspectateurs.
05:54 Ils vont plutôt les faire fuir.
05:57 Sous-titres réalisés par la communauté d'Amara.org
06:00 [Musique]