• il y a 2 ans
Sandra Lorenzo, journaliste et auteur de " Une fausse couche comme les autres" aux éditions First, revient sur sa fausse couche et nous raconte son histoire. De l'annonce de cette fausse couche à son deuil, Sandra Lorenzo, nous livre son témoignage ainsi que la nécessité de soutenir les couples qui traversent cette période.

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Transcription
00:00 la soignante se rend compte qu'on est traversée par une forte émotion, elle me demande si
00:06 j'ai d'autres enfants, donc c'est le cas, j'avais un petit garçon déjà à cette
00:11 époque-là, et elle me dit quelque chose du genre "ça pourrait être pire, vous pourriez
00:20 ne pas du tout avoir d'enfants et là c'est vraiment dur".
00:24 Je m'appelle Sandra Lorenzo, j'ai 34 ans, je suis journaliste, et j'ai été enceinte
00:30 trois fois, et j'ai deux enfants.
00:33 J'ai vécu ce qu'on appelle une fausse couche précoce, et j'en ai écrit un livre qui s'appelle
00:37 "Une fausse couche comme les autres".
00:39 Je crois qu'une fausse couche, même si on est entouré, même si on en a parlé autour
00:46 de nous, il n'y a rien qui remplace ce qu'on vit dans notre corps, et de toute façon c'est
00:57 un processus solitaire.
00:58 La faim c'est quelque chose qu'on pourra régler en étant, en laissant faire un peu
01:04 le temps.
01:05 Le moment où j'apprends que je suis en train de vivre une fausse couche, je suis dans le
01:10 cabinet médical pour une énième échographie, parce que j'ai eu énormément d'échographies
01:15 avant de comprendre, et avant que les médecins me disent vraiment que la grossesse était
01:21 arrêtée.
01:22 Et cette soignante me dit en échographie, je ne sais pas, elle a dû durer quelques
01:29 secondes, c'était extrêmement rapide, elle me dit tout de suite "la grossesse est terminée".
01:34 Et limite, elle range tout de suite son matériel, enfin voilà, elle était passée à autre
01:40 chose, le dossier était classé.
01:42 En fait moi, j'avais beau me préparer depuis plusieurs semaines à ce que le coup près
01:48 tombe, on savait avec mon mari que rien ne semblait bien se passer avec cette grossesse
01:54 qui n'avait pas l'air d'évoluer comme il fallait.
01:56 Ça a été un énorme choc ce moment-là, je me suis mise tout de suite à pleurer,
02:03 mon mari s'est rapproché de moi, tout à coup j'ai l'impression qu'il y a eu un
02:10 tsunami qui nous est passé dessus.
02:13 Et à ce moment-là, la soignante se rend compte qu'on est traversée par une forte
02:18 émotion, elle me demande si j'ai d'autres enfants, donc c'est le cas, j'avais un
02:25 petit garçon déjà à cette époque-là, et elle me dit quelque chose du genre "ça
02:35 pourrait être pire, vous pourriez ne pas du tout avoir d'enfants et là c'est vraiment
02:39 dur".
02:40 Ce n'est pas exactement ces mots-là qu'elle m'a dit, mais dans l'essence c'était
02:43 ça.
02:44 Et ça m'a complètement atterrée de l'entendre faire une hiérarchie de la peine,
02:53 un peu de dire "tu ne vas pas trop te plaindre, ça pourrait être pire".
02:57 Et puis surtout ce qui a été dur, c'est que tout de suite je me rhabille et je suis
03:04 assaillie par des questions.
03:05 Je me dis "mais qu'est-ce qui va se passer maintenant, il y a une fausse couche, ça
03:08 veut dire quoi en fait ? Cette grossesse elle est là, elle est dans mon ventre, je viens
03:12 de la voir sur l'échographie, il y a quelque chose, comment tout ça va sortir et va se
03:17 terminer ?" Et en fait je lui pose la question, peut-être trois ou quatre fois, et en fait
03:24 elle ne me répond pas.
03:25 Elle me dit "ça va être des grosses règles".
03:27 Et surtout elle me dit "vous inquiétez pas", elle me le répète quatre fois "vous inquiétez
03:31 pas, vous inquiétez pas".
03:32 Et en fait j'ai beau lui répéter que moi je ne sais pas que je m'inquiète, c'est
03:36 que je veux savoir, c'est hyper inquiétant de ne pas savoir ce qui va se passer.
03:39 Moi je fais partie de ces femmes à qui on a annoncé la fausse couche, qui sont retournées
03:44 au travail.
03:45 À aucun moment on m'a dit "on va vous arrêter, vous êtes en train de vivre quelque chose
03:50 qui est compliqué, vous allez avoir en plus à gérer la fin d'une grossesse physiquement,
03:56 c'est quand même quelque chose qui peut être un peu éprouvant".
03:59 En fait non, c'est moi qui ai dû aller voir un médecin pour me faire arrêter, pour dire
04:05 "s'il vous plaît je viens vous voir parce que je vis une fausse couche, arrêtez-moi".
04:08 Et le médecin en face de moi a été très bienveillant etc.
04:15 Et à la fin de la consultation il m'a arrêtée et il m'a dit "n'hésitez pas à revenir
04:20 me voir si vous voulez qu'on prolonge l'arrêt".
04:22 Mais en fait encore une fois c'était encore à moi de retourner le voir.
04:26 Il se trouve qu'à la fin de cet arrêt moi j'ai eu besoin de retourner au travail
04:31 et de reprendre ma vie, mais ça aurait été un effort énorme supplémentaire d'avoir
04:40 à retourner, de réexpliquer et de dire "en fait j'en ai encore besoin, s'il vous plaît
04:45 aidez-moi".
04:46 J'ai beaucoup de gens qui m'ont contactée en me disant "telle personne dans mon entourage
04:52 est en train de vivre une fausse couche, qu'est-ce que je peux faire, qu'est-ce que je peux
04:56 dire etc."
04:57 Et je pense qu'il y a pour moi une seule chose à faire, c'est en parler.
05:05 Ça ne veut pas dire que toutes les femmes et tous les couples veulent en parler.
05:08 Il y en a plein qui n'auront pas envie et c'est tout à fait ok.
05:14 Par contre c'est hyper important je trouve de leur tendre la main et juste de dire "vous
05:19 vivez ça, c'est difficile, est-ce que vous avez envie d'en parler ?".
05:25 Ils veulent, tant mieux, ils ne veulent pas, tant pis en fait, mais juste que ce soit reconnu
05:30 et que encore une fois ces grossesses elles existent.
05:34 Ça ne veut pas dire que tout le monde doit en faire un livre, mais juste qu'elles ne
05:41 restent pas dans l'ombre.
05:42 [Musique]

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