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Peut-on avoir un enfant sans être en couple ? Ou quand on est meilleur·e·s ami·e·s ? Océan et Sophie-Marie Larrouy racontent comment “faire famille” lorsqu’on n’est pas dans le schéma traditionnel du couple amoureux cis hétéro

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Transcription
00:00 Les gens n'arrivaient pas à imaginer que, en tant que meilleurs amis,
00:02 on puisse avoir un projet de parentalité.
00:04 C'était vraiment genre "mais vous vous aimez, mais vous êtes un couple,
00:06 mais enfin, assumez !"
00:07 Ils sont pas tout bien comme il faut rangés par deux,
00:10 un homme et une femme,
00:11 "mama, mama", ils s'aiment comme des barbiers de quenne là !
00:13 Du coup, on est ce qu'on appelle des BFF,
00:16 des super potes, des meilleurs copains.
00:17 Et on s'est jamais pécho, contrairement à ce que plein de gens en croient.
00:20 Moi, je suis une meuf cis de 39 ans maintenant,
00:25 je suis hétéro,
00:26 donc forcément on me tâle le cul pour savoir
00:29 pourquoi j'ai pas de gosses,
00:31 est-ce que je vais avoir un gosse,
00:32 est-ce que j'ai un mec,
00:33 est-ce que je veux faire un gosse avec un mec ?
00:35 Mais en effet,
00:36 ce que la médecine française appelle l'horloge biologique
00:39 m'a fait quand même m'interroger à un moment donné.
00:41 Avant ma transition, j'étais lesbienne,
00:43 et il n'y avait pas encore la PMA pour toutes,
00:45 donc c'était quand même des parcours où il fallait être très motivé,
00:47 très, très, très motivé,
00:49 et c'est encore le cas aujourd'hui,
00:50 même si la loi est passée en vrai,
00:51 c'est pas encore tout rose.
00:52 Et après, en transitionnant,
00:53 c'est vrai que ça a un petit peu ouvert d'autres questions.
00:56 Je me disais, ah tiens,
00:57 maintenant que j'ai un corps différent,
00:59 que je suis bien,
01:00 que je me sens à ma juste place,
01:02 tout d'un coup porter un enfant,
01:04 voilà, pourquoi pas ?
01:05 Plus Sophie-Marie qui était donc ma meilleure amie,
01:07 et voisine,
01:08 on était un peu tout le temps ensemble,
01:09 et je me suis dit,
01:10 bah tiens, la coparentalité aussi,
01:12 c'est quelque chose de chouette,
01:13 et puis voilà,
01:14 en constatant que l'amitié est souvent dévalorisée,
01:17 en fait, par rapport à l'amour,
01:18 c'est un peu comme si il y avait une petite pyramide des relations
01:20 dans la société,
01:21 et tout en haut il y a l'amour amoureux,
01:22 oula, alors là,
01:23 c'était en couple, c'est génial !
01:25 Alors que nous, on voulait dire,
01:27 bon, ok, très bien,
01:28 c'est une norme, certes,
01:30 mais il y a aussi d'autres normes qui existent,
01:32 donc il y a le fait de faire en effet un enfant en coparentalité,
01:35 avec des amis ou avec des gens qui veulent aussi être parents.
01:37 Il faut vraiment être conscient que
01:40 ces manières-là de faire un enfant,
01:42 elles sont beaucoup plus
01:45 empreintes d'obstacles
01:46 que de juste, pouf,
01:48 Ken un samedi soir sur un parking.
01:50 Oui, on a découvert par exemple que
01:52 quand on se présente en tant que meilleur ami
01:54 devant la médecin en France,
01:56 elle nous explique qu'on n'a pas,
01:59 elle est censée vérifier la véracité de notre couple,
02:01 donc en fait on n'est même pas censé être là.
02:03 Quand on commençait à parler de ce projet,
02:05 les gens n'arrivaient pas à imaginer que
02:07 en tant que meilleur ami, on puisse avoir un projet de parentalité,
02:10 c'était vraiment genre,
02:10 mais vous vous aimez,
02:11 mais vous êtes un couple,
02:12 mais enfin, assumez !
02:13 Et t'es là, bon, ça va, ça fait 15 ans qu'on traîne ensemble,
02:15 on le saurait si on avait envie de se pécho quand même,
02:18 c'est parti en voyage et on a dormi dans le même lit combien de fois.
02:21 - C'est bon, c'est vraiment bon.
02:23 - C'est une option, ça va pas nous dire ça à la télé ?
02:26 Oui, donc les gens avaient vraiment ce truc
02:29 à vouloir absolument qu'on soit un couple,
02:30 et comme si c'était impensable autrement,
02:32 alors que c'était intéressant,
02:34 d'autant plus ça donnait envie de dire,
02:36 bah non, on peut faire un projet de coparentalité, ça existe.
02:39 À un moment, c'est vrai qu'on se demandait
02:41 qui allait porter l'enfant,
02:42 parce que Sophie Marie commençait à se dire,
02:44 ouais, en fait, je suis pas sûr,
02:45 enfin, j'ai envie d'être parent,
02:46 mais pas forcément de porter.
02:47 Et moi, à l'inverse,
02:49 ayant ce qu'on appelle un "cease passing",
02:51 ayant le corps que j'ai toujours voulu avoir et tout,
02:54 tout d'un coup, porter un enfant me semblait être une expérience,
02:58 c'est vrai, c'est une expérience physique très forte
03:01 qui était possible pour moi.
03:03 Alors qu'avant ma transition,
03:04 ça aurait été genre trop de symboles féminins.
03:09 Et là, tout d'un coup, ça raconte une autre histoire,
03:11 il y a quelque chose de politique aussi,
03:12 parce qu'on voit bien le backlash et la violence
03:14 qu'il y a envers les personnes trans
03:16 qui demandent à être parent.
03:18 Il faut savoir qu'aujourd'hui, les personnes trans
03:19 n'ont pas accès à la PMA.
03:21 Si moi, demain, je demande une PMA,
03:22 elle me sera refusée en France,
03:23 donc je suis quand même traité comme un sous-citoyen,
03:25 moi et toutes les personnes trans, évidemment.
03:27 Donc il y a encore un vrai problème de justice et d'égalité.
03:29 Je pense que c'est un point de cristallisation très fort,
03:31 on l'a vu avec le backlash du planning familial,
03:34 quand ils ont juste dit qu'ils accueillaient les hommes enceints,
03:36 les gens ont pété des câbles.
03:37 On nous tâne avec le fait que la natalité soit au plus bas,
03:41 on est à 1,8 en France,
03:43 et pour dire qu'en fait, arrêtez de chipoter,
03:45 s'il y a des gens qui ont vraiment envie de faire des enfants,
03:48 laissez-les faire plus simplement.
03:51 Et en fait, le premier lieu des violences,
03:52 ça reste quand même la famille, si c'est héro-patriarcal,
03:55 et ce n'est pas moi qui le dis, c'est les chiffres.
03:56 Donc je pense que quand même, on peut...
03:59 Quand on dit "on veut protéger les enfants",
04:01 tous les gens qui disent ça en disant
04:02 "il ne faut pas que les trans ou les queers aient des enfants",
04:04 bon, regardez juste les chiffres,
04:05 et regardez où sont les violences,
04:07 elles sont dans vos familles, pas les nôtres, a priori.
04:09 Donc peut-être on peut y réfléchir un peu.
04:12 Je pense qu'en 2023,
04:13 on est à un moment où à la fois le monde évolue, bouge,
04:17 il y a plus de représentation des personnes queers
04:19 et des femmes célibataires, etc.
04:21 La loi quand même a changé pour la PMA,
04:24 mais il y a aussi des mouvements réactionnaires très forts,
04:26 qui sont toujours comme ça,
04:28 quand il y a une avancée, il y a un recul en même temps,
04:30 il y a toujours des tensions.
04:31 Et donc on est quand même dans un moment de,
04:33 on peut le dire, on peut le constater,
04:35 de droitisation, de fascisation de l'Europe, des États-Unis.
04:38 Et comme il n'y a pas de modèle visible optimiste,
04:41 c'est facile de faire des nouveaux modèles,
04:46 les boucs émissaires de cette société
04:50 anxieuse par rapport à son avenir.
04:52 Donc quand les gens disent "ça va,
04:54 de toute façon maintenant c'est facile de transitionner,
04:56 tout le monde peut faire des enfants",
04:57 non, ce n'est pas vrai, c'est encore très compliqué.
04:59 Il y a beaucoup d'obstacles et nos droits sont toujours menacés.
05:03 Donc je pense que c'est important de rester très vigilant et très ouvert.
05:06 Le message c'est vraiment de dire "allez-y,
05:09 faites la famille de vos rêves et sentez-vous légitime
05:14 de faire la famille qui est juste pour vous".
05:16 Parce que ce qui compte dans la vie, c'est d'être juste avec soi
05:19 et de se rendre heureux et de rendre heureux les autres.
05:21 Ce n'est pas de rentrer dans une case.
05:23 [Générique]

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