Heurts au Sénégal : "On a visé à déstabiliser l'Etat du Sénégal", assure le ministre Abdou Karim Fofana

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Transcript
00:00 Après plusieurs jours de violence déclenchée par la condamnation de l'opposant Ousmane Sonko,
00:04 le Sénégal est sur le qui-vive, la population est inquiète
00:07 et craint que la situation ne dégénère de nouveau.
00:10 Le bilan des violences est lourd, au moins 16 morts et plus de 300 blessés.
00:15 On en parle tout de suite avec Abdou Karim Fofana,
00:17 ministre du Commerce, de la Consommation et des PME et porte-parole du gouvernement.
00:22 Bonsoir, merci beaucoup d'être avec nous ce soir.
00:25 On va d'abord aborder la question des violences.
00:27 Craignez-vous un nouvel embrasement ?
00:30 Bonsoir madame.
00:34 D'abord, je présente mes condoléances au nom du président de la République
00:38 et du gouvernement du Sénégal à toutes ces personnes décédées
00:41 mais aussi ceux qui ont subi des préjudices.
00:43 La situation s'est calmée depuis le week-end.
00:46 Nous avons noté une forte accalmie.
00:48 Les populations ont repris leurs activités économiques et sociales.
00:51 Vous le notez partout à Dakar et dans les régions qui ont été impactées.
00:58 Il faut noter aussi qu'avec cette accalmie,
01:02 on a levé la suspension sur les données mobiles.
01:06 Donc internet n'était pas suspendu, ce sont les données mobiles qui étaient suspendues
01:11 parce que c'était un processus progressif.
01:14 D'abord c'était les applications parce que beaucoup de messages haineux
01:18 et beaucoup aussi d'activités criminelles étaient coordonnées à partir de ces applications mobiles.
01:24 Après c'était les données mobiles.
01:26 Maintenant les données mobiles sont revenues et puis les applications sont toujours bloquées.
01:31 Alors vous dites qu'il y a un retour au calme
01:33 mais beaucoup de Sénégalais craignent que cette violence réapparaisse,
01:38 qu'il y ait un nouvel embrasement,
01:39 notamment parce que l'opposant Ousmane Sanko a été condamné et qu'il doit être arrêté.
01:43 Les autorités sénégalaises ont déclaré
01:45 qu'une condamnation pénale doit être exécutée
01:49 et beaucoup craignent qu'à l'arrestation d'Ousmane Sanko,
01:52 de nouvelles violences surgissent dans le pays et que la violence revienne.
01:58 – Naturellement quand on vit un week-end comme on l'a vécu au Sénégal depuis jeudi-vendredi,
02:06 on reste avec un sentiment de préoccupation très fort.
02:09 Mais ce qu'il faut noter c'est que depuis samedi on a une désescalade.
02:13 Les manifestations ont été concentrées sur deux régions,
02:18 des parties de ces deux grandes régions, c'est Dakar et Zigangshor.
02:22 Quelques communes, je ne sous-estime pas, on ne minimise pas du tout,
02:26 mais quelques communes à Dakar, notamment dans la banlieue, à Zigangshor.
02:29 Et aujourd'hui, vous avez noté qu'il y a des écoles qui ont commencé à fonctionner,
02:34 des banques qui ont commencé à fonctionner, l'activité économique.
02:37 Parce que ce qu'on a connu, ce sont des attaques assez particulières
02:41 avec des personnes qui habituellement ne sont pas connues.
02:46 Ce n'est pas les mêmes méthodes de manifestation.
02:48 Donc aujourd'hui la situation est maîtrisée.
02:52 On y va petit à petit et la vie reprend son train de travail quotidien.
02:56 – Alors je le disais, les autorités sénégalaises,
02:58 un de vos collègues ministres avait déclaré que la condamnation pénale doit être exécutée.
03:05 Pourquoi Ousmane Sonko n'a pas été arrêté après le verdict ?
03:10 Et quand sera-t-il arrêté ?
03:11 C'est la question que se posent de nombreux Sénégalais aujourd'hui.
03:17 – Oui, mais l'exécution d'une décision de justice pénale
03:21 dépend des autorités judiciaires.
03:23 Donc l'exécutif n'a rien à y voir, il revient au tribunal
03:27 pour rendre disponible la décision de justice
03:30 et puis après au procureur de la mettre en exécution.
03:33 Mais aujourd'hui, ce qu'il faut noter principalement,
03:35 c'est que les activités ont repris.
03:37 L'internet a été remis du point de vue des données mobiles,
03:40 l'activité a repris normalement et les enquêtes sont en cours
03:44 pour déterminer aussi les causes de ces attaques stratégiques
03:47 qui ont été menées vis-à-vis du Sénégal.
03:50 Parce qu'on a visé à déstabiliser l'État du Sénégal.
03:52 Les centrales d'approvisionnement en eau, d'électricité,
03:56 les grands marchés d'approvisionnement, les banques.
03:58 On a voulu terroriser les Sénégalais pour qu'ils ne puissent pas sortir.
04:01 – Qui a voulu terroriser les Sénégalais ? Qui est derrière cette action ?
04:06 – Mais les enquêtes vont le déterminer parce que nous avons bien dit
04:10 que des manifestations politiques, il y en a toujours eu au Sénégal.
04:14 Il y a toujours eu peut-être des jets de pierre, des jets de cocktails Molotov.
04:18 On a vu depuis quelques années que maintenant, c'est les habitudes des opposants.
04:22 Mais les messages haineux, les messages à caractère subversif,
04:25 les appels à l'insurrection ont été notés sur les réseaux sociaux.
04:29 On a vu des pages, excusez-moi de nommer la marque,
04:32 sur Youtube, sur des plateformes vidéo et autres,
04:35 qui ont montré qu'il y avait des gens qui avaient des buts précis.
04:39 Parce que manifester, on peut le comprendre,
04:41 mais aller chercher à arrêter des infrastructures d'approvisionnement en eau,
04:46 en électricité, brûler la bibliothèque universitaire.
04:49 On a toujours eu des tensions à l'université,
04:51 mais personne n'a jamais pensé à brûler la faculté de droit,
04:55 l'école de journalisme ou encore ces symboles, la bibliothèque universitaire.
05:00 – Alors, qu'en est-il de la répression de ces manifestations ?
05:03 Elle a été dénoncée par l'Organisation de défense des droits de l'homme,
05:06 mais aussi par l'opposition qui parle de cas de torture,
05:08 d'utilisation de milices privées, d'arrestations,
05:11 notamment des membres du PASTEF.
05:14 Qu'avez-vous à répondre ?
05:16 – Oui, j'aimerais qu'on parle d'abord de ces appels à la manifestation.
05:21 Depuis des mois, on voit des appels où on indique des maisons d'autorité de la majorité,
05:27 on insulte des magistrats dans les réseaux sociaux,
05:30 on insulte des personnes, on appelle à la haine.
05:34 Et moi, j'aimerais aussi que ces organisations de l'association civile…
05:36 – Mais les forces de l'ordre sont garantes de l'ordre ?
05:38 Il y a eu 16 morts et 300 blessés, donc le bilan est lourd ?
05:47 – Le bilan est lourd, mais la responsabilité du bilan
05:50 vient aussi de ces personnes qui ont appelé des jeunes à donner leur vie,
05:54 ces personnes qui ont utilisé des jeunes, des enfants,
05:57 pour en faire des boucliers, pour leur demander de se mettre
06:00 entre eux et les forces de l'ordre.
06:02 Donc chacun doit prendre ses responsabilités,
06:04 nous sommes très désolés de ces morts,
06:08 nous sommes l'État, nous mesurons notre responsabilité.
06:11 Mais attention, sur les réseaux sociaux, sur Internet,
06:14 nous avons assez de preuves de personnes qui ont appelé à l'insurrection,
06:18 je ne parle pas d'un appel à manifester, d'un appel à l'insurrection,
06:21 qui ont indiqué des maisons, qui ont montré des méthodologies,
06:24 qui ont appris, qui ont montré des vidéos même pédagogiques
06:28 pour se rassembler, pour faire des cocktails molotovs,
06:31 pour attaquer des forces de l'ordre.
06:32 Et ça, je pense que toute la communauté internationale l'a vu.
06:35 – Alors, Ousmane Sonko, l'opposant, affirme depuis des mois
06:40 qu'il s'agit d'un procès politique pour l'empêcher
06:43 de concourir à la présidentielle 2024.
06:48 – Oui, tout le monde a entendu ces assertions d'Ousmane Sonko.
06:53 Moi, je pense que depuis 1960, il faut noter que les procès
06:56 qui ont eu et qui ont été caractérisés de politique,
06:59 c'est d'abord le procès du président Momondu Diaz,
07:02 c'était l'État contre Momondu Diaz,
07:05 le président Abdelouaheouad contre l'État du Sénégal,
07:07 attrait en justice, le président Edouard Sassek,
07:09 Ousmane Sonko a été le seul opposant qui a été attrait par des personnes.
07:13 – Alors justement, il y a des précédents dans l'histoire politique du pays
07:16 qui font que ce discours est audible auprès de ses partisans, d'Ousmane Sonko.
07:22 – Oui, naturellement, il a ses partisans,
07:25 mais moi je représente l'État du Sénégal et je parle à l'ensemble des Sénégalais.
07:29 Je dis que les faits qui ont été reprochés à Ousmane Sonko,
07:32 il a été attrait à la barre par des personnes et non pas par une institution,
07:36 non pas par l'État du Sénégal.
07:38 Donc ça aussi, ce sont des faits qu'il faut rétablir et dire la vérité
07:42 et ne pas chercher à manipuler les masses
07:44 puisque nous sommes dans une situation où ce sont des commerçants.
07:47 Écoutez, la dernière fois, quand il y a eu des manifestations,
07:50 on pensait que oui, c'était des multinationales comme Auchan
07:53 qui ont été les plus impactées.
07:54 Mais aujourd'hui, les personnes les plus impactées,
07:56 c'est des commerçants sénégalais, c'est des entreprises sénégalaises,
08:00 c'est des stations-service.
08:01 On est allé au-delà des multinationales,
08:04 on est allé au-delà de France dégage qu'on entend souvent.
08:06 Ce sont des biens de Sénégalais, ce sont des personnes qui sont entrées dans les rues,
08:10 qui ont attaqué des maisons de personnes, n'est-ce pas,
08:13 qui n'ont rien à voir avec la politique.
08:14 Donc il y a une part de vandalisme
08:17 et aussi une part de mission destructrice de façon criminelle.
08:21 – Alors, dernière question concernant le président Macky Sall.
08:24 Sera-t-il candidat ?
08:25 Ne pensez-vous pas que l'ambiguïté autour de sa candidature
08:29 alimente ce climat de tension dans le pays ?
08:33 – Madame, vous avez évoqué tellement de causes
08:35 que moi-même, je vous repose la question.
08:37 Est-ce que vous pensez que pour une histoire de candidature,
08:39 on veut qu'on doit attaquer une centrale à eau ou une centrale à électricité ?
08:44 – La candidature d'une personne dépend de sa volonté personnelle.
08:52 Le président ne s'est pas encore exprimé,
08:54 on n'a pas à lui imposer un calendrier.
08:57 – Sauf qu'il y a débat constitutionnel, Monsieur.
08:59 – Il y a le Conseil constitutionnel.
09:01 – Justement, il y a un débat constitutionnel.
09:03 C'est pour ça que ça crée un climat de tension.
09:05 S'il n'y avait pas eu ce climat de tension, effectivement, vous avez raison,
09:09 mais il y a un climat de tension lié aussi à cette candidature,
09:12 à ce troisième mandat.
09:14 – Tout à fait, quand il y a un débat constitutionnel,
09:16 il faut toujours laisser aux personnes leur liberté.
09:19 On ne peut pas substituer à une personne sa volonté.
09:22 Le président Macky Sall, lorsqu'il devra s'exprimer sur le sujet,
09:25 il va s'exprimer.
09:26 D'ailleurs, vous l'avez entendu à l'ouverture du dialogue national,
09:29 le mercredi, face à une bonne partie de l'opposition
09:32 et au First Vibes de la Nation,
09:33 il a dit que "ma troisième candidature n'est pas une question taboue,
09:37 si vous voulez qu'on en discute, on peut en discuter".
09:40 Donc ça, je pense que c'est faire preuve de responsabilité,
09:42 ce n'est pas un sujet tabou.
09:43 Il a demandé à ce que l'opposition ou aux personnes
09:47 qui sont contre cela puissent en discuter,
09:50 mais dans le cadre d'un dialogue national,
09:52 parce que le Sénégal a une tradition de dialogue politique
09:55 qui nous a permis depuis 1960 d'avoir une démocratie apaisée,
09:58 une démocratie avec des alternances et une démocratie exemplaire.
10:02 – Merci beaucoup à Abde Karim Fofana,
10:04 ministre du Commerce, de la Consommation
10:07 et des PME, porte-parole du gouvernement.
10:08 Merci infiniment d'avoir accepté notre invitation.

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