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Plongez dans l'univers singulier de Michel Houellebecq, auteur iconoclaste et lauréat du Prix Goncourt 2010, lors de sa rencontre mémorable à la Fnac Montparnasse.

Cet événement unique nous offre un aperçu intime de la pensée et de l'œuvre de cet écrivain controversé.

Au cours de cet entretien captivant, Houellebecq se livre à une conversation sans filtre, abordant des thèmes chers à son écriture :

La société contemporaine et ses dérives.
La solitude et la condition humaine.
Le rapport entre l'homme et la femme.
Le sens de la vie et de la mort.
Son parcours d'écrivain et ses inspirations.

Avec son humour caustique et sa lucidité implacable, Houellebecq décrypte le monde qui nous entoure et nous confronte à nos propres contradictions.

Il n'hésite pas à bousculer les codes et les conventions, provoquant le rire et la réflexion.

Le public, fasciné par la personnalité charismatique de l'auteur, est suspendu à ses lèvres.

Cet échange enrichissant nous permet de mieux comprendre l'homme derrière l'œuvre et de saisir la profondeur de ses réflexions.

C'est une rencontre incontournable pour tous les admirateurs de Michel Houellebecq et pour tous ceux qui s'intéressent à la littérature française contemporaine.

Voici quelques éléments clés de cette rencontre :

La franchise et l'authenticité de Houellebecq.
Ses réflexions profondes sur la société et l'existence.
Son humour noir et son sens de la provocation.
L'interaction avec le public et ses questions.
L'éclairage apporté sur son processus d'écriture.

Si vous recherchez une rencontre littéraire hors du commun, cette vidéo est un véritable trésor.

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Transcription
00:00 Bonjour, bienvenue à cette rencontre avec Michel Houellebecq, auteur de La carte et
00:07 le territoire qui a obtenu, comme vous le savez, le prix Goncourt cette année. La première
00:13 question qui me venait à l'esprit c'est comment tu as reçu toutes les lectures qui ont été
00:20 faites de ton livre, enfin celles dont tu as fait part depuis la sortie, parce que je
00:25 sais que tu es toujours extrêmement attentif et que tu considères même qu'une grosse
00:30 partie du travail reste à faire par le lecteur. Alors comment tu as reçu ça et est-ce que
00:34 tu as été surpris par ces lectures ?
00:36 Disons qu'il y a des gens qui sont ressurgis, par exemple, mettons par exemple Claire de
00:49 Varieux à Libération, je pense qu'elle avait parlé d'Extension et de la lutte et après
00:56 à Libération c'est d'autres personnes qui ont fait les critiques. Donc là c'est elle
01:01 qui a fait les critiques et je me suis aperçu qu'elle avait lu les autres livres entre temps.
01:06 Donc il y a une espèce de ressurgissement de personnes. Bon ce livre a reçu un bon
01:14 accueil on peut le dire, critique, et en grande partie pour ça, parce que des gens qui en
01:21 ma faveur se sont exprimés alors qu'ils ne s'étaient pas exprimés avant, ou moins
01:28 nettement. Raphaël Rérol au Monde n'avait jamais eu autant d'espace je pense. Donc
01:35 il y a eu quelque chose de positif dans la réaction générale de la presse et de la
01:43 presse, des médias français à ce livre. - Mais moi j'ai été frappé quand même
01:48 par une chose, c'est que beaucoup de gens ont insisté sur une relative nouveauté de
01:55 ce livre par rapport au précédent. Ils auraient découvert un Michel Houellebecq plus gentil
02:03 en quelque sorte. - Mais toi aussi d'ailleurs, mais tu le dis différemment. C'est pour ça
02:09 en fait, ce que tu n'as pas eu le temps de dire dans l'interview Mediaport, à Michel
02:15 Houellebecq, toi tu disais plus sinueux. Il y a un côté sinueux dans ce livre, enfin
02:22 sinueux c'est un peu connoté négativement, disons plus suave. Suave, sinueux, enveloppant.
02:29 - Mais sinueux comme les routes. - Comme les routes oui. Mais c'est fait exprès ça,
02:36 c'est effectivement nouveau. J'ai essayé de faire quelque chose où le lecteur ne voit
02:43 pas les coutures et se laisse envelopper, que je puisse l'emmener où je veux.
02:58 - A une certaine hauteur, tu disais à hauteur d'une voiture basse.
03:00 - A hauteur d'une voiture basse, oui, on a une vision différente du paysage, c'est-à-dire
03:07 avec plus de surprises. Une voiture haute, on voit le paysage de plus loin. Une voiture
03:17 basse, on a plus un contact direct avec le paysage qu'on traverse.
03:24 - Il y a beaucoup de différences entre, enfin il y a des différences entre la carte et
03:29 le territoire et la possibilité d'une île. Mais il y a un point commun peut-être, dans
03:35 la construction générale du livre, c'est que la dernière partie tranche quand même.
03:40 C'est-à-dire que là, c'est pas seulement sinueux, c'est qu'il y a un virage quand même
03:44 assez prononcé. Il y a d'ailleurs des gens qui s'étonnent du caractère différent de
03:52 cette dernière partie, comme d'autres s'étaient étonnés des 100 dernières pages de la possibilité
03:56 d'une île.
03:57 - Ça c'est très... C'est sûrement vachement intéressant, mais j'ai rien à dire, sauf
04:04 que je m'aperçois malgré moi que je retombe toujours sur une structure en trois parties
04:11 et que les trois parties n'ont pas, l'une par rapport à l'autre, le même rapport de
04:15 taille. Et je le fais pas exprès. Et donc ça doit être une constante très forte structurelle
04:21 chez moi de faire trois parties, de leur donner un peu le même rapport de taille et de marquer
04:28 des transitions fortes entre parties, des changements de point de vue forts entre parties.
04:33 Et là, oui, il y a un changement de point de vue très fort entre la deuxième et la
04:37 troisième, comme dans "La Poste Faite d'une Île", il y en avait un.
04:40 - C'est pas un rapport avec le fait de terminer, d'achever un roman ?
04:47 - Bah, achever... Non, mais je... J'achève toujours de la même manière, en plus, par
04:54 une espèce de lente fusion vers le blanc, ce que Pierre Pousset appelait la "walking
05:03 ghost phase". Et c'est tout à fait ça. Il y a les personnages... Tout devient fantôme
05:11 et avance vers le blanc, vers la dissolution du blanc. Et c'est parce que j'ai une fascination
05:18 très forte pour ça, pour l'apaisement, la douceur, le blanc qui recouvre tout, la neige,
05:26 le flou, la dissolution des figures.
05:31 - Il y a une autre chose dont on a déjà parlé, mais sur laquelle je voulais revenir, qui
05:37 est une différence par rapport à "La Possibilité d'une Île", mais même par rapport à d'autres
05:42 textes, c'est à quel point une certaine forme de poésie, notamment lyrique, est absente
05:48 de ce livre. Moi, c'est une des choses qui m'a frappé en lisant "La Carte et le Territoire".
05:53 Est-ce que ça procède d'un choix ou est-ce que c'est le projet lui-même qui faisait
05:58 qu'il n'y avait pas de place pour cette tonalité-là, qui pourtant est extrêmement présente dans
06:04 beaucoup de tes écrits depuis le début ?
06:07 - Non, mais je pense que j'avais atteint mon objectif dans ce domaine à la fin de "La Possibilité
06:14 d'une Île". J'étais vraiment content de l'immersion dans la poésie de la troisième
06:23 partie. J'avais vraiment atteint les objectifs, donc j'avais atteint une fin de quelque chose.
06:31 Mon artiste, par exemple, il arrête une phase de création sans pouvoir expliquer pourquoi.
06:38 Il arrête parce qu'il a atteint une espèce d'aboutissement dans ce qu'il voulait faire.
06:43 Pour moi, la troisième partie "La Possibilité d'une Île" était un aboutissement d'un
06:48 truc que j'avais cherché à faire depuis longtemps. Et j'avais pas envie de remettre
06:53 de la poésie du tout dans celui-là. Du tout. Ça m'est même pas venu à l'idée.
06:57 - De la poésie, tu continues à en écrire ?
06:59 - Oui, rarement. Ça a toujours été rarement remarqué. Là, il n'y a pas de quoi faire
07:06 un recueil, pas vraiment. Si, je publierai sûrement un autre recueil de poèmes, un
07:11 jour ou l'autre.
07:13 - Pour revenir à ce par quoi on a commencé, la réception du livre, la chose importante,
07:23 évidemment, dont on a beaucoup parlé, c'est ce prix Goncourt. On peut avoir le sentiment
07:30 sans provocation aucune qu'au fond, c'est plus le prix Goncourt qu'il y a eu Michel
07:37 Houellebecq. Michel Houellebecq a eu le prix Goncourt.
07:39 - Je pense que c'est une opération assez win-win. C'est une bonne chose pour nous
07:49 deux. Si je ne l'avais pas eu, ça aurait...
07:54 - Ça aurait été un problème pour la France.
07:56 - Non, enfin, mineur quand même. Mais disons que le même problème se serait reposé avec
08:03 de plus en plus d'énervement général. Donc le titrage, enfin, était assez justifié.
08:10 Donc le problème est résolu. On n'en reparlera plus jamais.
08:14 - Une bonne chose de faite.
08:16 - C'est ça, un souci de moins pour tout le monde. Pour moi, pour eux. Non, c'est win-win.
08:22 Vraiment.
08:23 - Avec La carte et le territoire, il y a des gens qui ont découvert que pour écrire des
08:30 livres, parfois, tu procédais par collage, par emprunt.
08:35 - Oui, mais oui.
08:37 - Et qu'ils s'en sont émus.
08:40 - Oui, ils se sont émus. Pas nouveau. J'ai dit que je ne voulais pas.
08:45 - Pas nouveau. J'ai déjà fait... Je l'ai beaucoup fait. Par exemple, La possibilité
08:55 d'une île. J'avais recopié de brefs passages, en fait très brefs, moins de deux lignes,
09:05 je pense, d'une revue qui s'appelait The Hack Academy, une revue de hackers qui était
09:11 bizarrement publiée, qui se trouvait dans les kiosques, une revue très bizarre. Les
09:17 animaux sont une vieille préoccupation chez moi. J'avais pris les insectes mangeurs de
09:23 cadavres, d'un particulier mentaire, un de mes passages les plus réussis, je dirais.
09:29 Les différents insectes qui succèdent sur un cadavre. Et là, on s'est émus. C'est
09:35 un peu bizarre. On s'est émus, oui.
09:39 - La nouveauté, c'est qu'il y a quelque chose qui s'appelle Wikipédia. Qu'est-ce que
09:44 toi, tu penses du style Wikipédia, si on peut parler comme ça ?
09:47 - Moi, je ne trouve pas qu'il y ait un style Wikipédia. C'est un style assez proche d'une
09:55 encyclopédie Larousse. Ces dernières années, tu as passé beaucoup de temps dans deux
10:05 pays qui sont différents l'un de l'autre, mais qui ont des points communs. Je ne veux
10:10 pas faire la relation entre le mauvais état de leur économie et leur notation par les
10:16 standards un pour. Mais entre l'Espagne et l'Irlande, il y a une crise extrêmement aiguë,
10:22 spécialement en Irlande ces derniers jours. On dit que l'Espagne pourrait être après
10:26 le Portugal sur la liste, peut-être avant la France. Comment tu as vécu ça ? Est-ce
10:33 que tu l'as vu venir ?
10:35 - J'aimerais bien répondre que oui, mais en fait non, je n'ai rien vu. Je ne suis pas
10:50 plus doué qu'un analyste économique moyen. Je peux vous dire après que ça vous a fait
10:55 normal. Ils ne pouvaient pas noter autrement. Ce que font les analystes économiques en
10:59 général, ils expliquent très bien le passé. Non, mais c'est vrai, ils sont bons pour
11:04 le passé. Donc l'Irlande, c'est simple. Ils sont devenus riches en raclant des fonds
11:11 européens, puis en faisant du dumping fiscal. Sauf qu'il y a les pays de l'Est de l'Europe
11:18 qui ont fait la même chose en pire. Et donc l'Irlande s'est effondrée. En gros, c'est
11:22 ça. Après, il y a des histoires de banques qui sont plus ou moins irresponsables, mais
11:26 en fait non, je n'avais rien vu. Je n'avais rien prédit. Sinon, l'Espagne, c'est moins
11:44 grave déjà parce qu'ils se sont élevés moins haut. Ils ne sont pas devenus aussi
11:50 riches que les Irlandais, donc ils tomberont de moins haut. Maintenant, c'est plus grave
11:56 parce que dans ce genre de situation, les gens se replient sur des solidarités de type
12:05 familial et générationnel qui ont plus rapidement disparu en Espagne qu'en Irlande, en fait.
12:11 Le rapport au catholicisme est quand même assez commun dans les deux pays.
12:15 Oui, dans les deux cas, le catholicisme s'est effondré, mais ça c'est un sujet non économique
12:22 où là je suis beaucoup plus compétent. L'Espagne, c'est clairement pour des questions
12:28 de mœurs. L'Irlande, c'est parce que quand on a de l'argent, on s'intéresse moins
12:32 à Dieu.
12:34 Merci Michel Houellebecq.
12:36 Je vous remercie.
12:37 Merci à vous.
12:38 (...)

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