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- Grand témoin : Bernard Guetta, journaliste, eurodéputé et auteur de « La nation européenne » (Flammarion)

LE GRAND DÉBAT / Soupçons d'ingérence russe au RN : Marine Le Pen a-t-elle convaincu ?

« Le chrono de Blako » par Stéphane Blakowski

Marine Le Pen a été auditionnée par la commission d'enquête sur les ingérences étrangères le mercredi 24 mai 2023. Selon les révélations de Mediapart, le FN a contracté en 2014, auprès d'une banque tchéco-russe, un prêt de 9,4 millions d'euros pour mener les campagnes électorales et départementales de 2015. Cette opération bancaire fait peser des soupçons d'ingérence de la part du Kremlin sur la campagne électorale française, notamment après les « Macron Leaks ». Au-delà d'une éventuelle collusion avec le Rassemblement National, comment opèrent les réseaux russes en France ?

Invités :
- Jean-Philippe Tanguy, député RN de la Somme
- Laurent Esquenet-Goxes, député Modem de Haute-Garonne
- Cécile Vaissié, professeur en études russes à l'Université Rennes 2 et auteur de « Les réseaux du Kremlin en France » (Les petits matins)
- Nicolas Quénel, journaliste indépendant spécialisé sur les opérations d'influence

LE GRAND ENTRETIEN / Bernard Guetta : l'Europe a-t-elle enfin changé ?
Bernard Guetta se donne deux missions dans son livre la « La nation européenne ». La première : raconter son expérience en tant que député européen depuis 2019, au sein de « Renew Europe ». Au-delà, il se propose d'écrire un essai sur la construction d'une union politique au sein de l'Union européenne. Selon lui, l'UE s'est renforcée politiquement et militairement grâce à l'élection de Trump en 2017, la pandémie et la guerre en Ukraine. Pour preuve, les pays européens ont compris la nécessité d'une défense globale et ont emprunté 750 milliards d'euros en commun pour faire face à la pandémie. Mais cette union est-elle suffisamment solide ?

- Grand témoin : Bernard Guetta, journaliste, eurodéputé et auteur de « La nation européenne » (Flammarion)

BOURBON EXPRESS :
- Elsa Mondin-Gava, journaliste LCP

LES AFFRANCHIS :
- Thomas Lestavel, journaliste économique
- Fanny Guinochet, journaliste économique à FranceInfo

Ça vous regarde, votre rendez-vous quotidien qui prend le pouls de la société : un débat, animé par Myriam Encaoua, en prise directe avec l'actualité politique, parlementaire, sociale ou économique.
Un carrefour d'opinions où ministres, députés, élus locaux, experts et personnalités de la société civile font entendre leur voix.

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Transcription
00:00 [Musique]
00:05 Bonsoir et bienvenue à Savo en garde en direct. Celui qui va passer l'heure avec nous ce soir est un grand amoureux de l'Europe.
00:13 Il l'a observé, chroniqué, arpenté comme journaliste pendant des années. Il en est l'un des élus aujourd'hui.
00:18 Bonsoir Bernadetta.
00:19 Bonsoir à vous.
00:19 Et merci d'être là. Vous signez la Nation Européenne chez Grasset.
00:23 C'est autant le récit de votre expérience de député européen depuis votre élection en 2019
00:27 qu'un essai sur les crises que traverse l'Union et qui l'ont fait avancer à bas de géant.
00:33 Je crois.
00:33 On va en parler longuement dans la deuxième partie.
00:36 Mais on commence ce soir par cette audition de Marine Le Pen par la commission d'enquête parlementaire sur les ingérences des puissances étrangères.
00:44 Pendant près de 4 heures, l'ancienne candidate à la présidentielle s'est appliquée à balayer toute forme de soupçon de collusion avec la Russie.
00:53 Après son emprunt bancaire contracté par son parti en 2014 à une banque russe.
00:57 Alors cette commission a-t-elle permis de faire toute la transparence ?
01:01 Et puis au-delà, comment la Russie essaye très concrètement au jour le jour de nous d'estabiliser ?
01:06 Grand débat dans un instant avec nos invités sur ce plateau.
01:09 Avant de retrouver nos affranchis pour leur parti pris.
01:12 Et puis Bourbon Express bien sûr, l'histoire du jour à l'Assemblée.
01:15 Voilà pour le menu. Vous me suivez Bernadetta ?
01:16 Absolument.
01:17 Fabre Morgan, c'est parti.
01:19 *Musique*
01:30 Des soupçons de lien avec la Russie de Vladimir Poutine.
01:34 C'est donc pour s'expliquer sur ces accusations au cœur du débat public depuis des années
01:38 que Marine Le Pen a été auditionnée très longuement cet après-midi par cette commission d'enquête
01:44 voulue par le Rassemblement national sur les ingérences étrangères.
01:47 Alors, a-t-elle convaincu ? Cette commission avait-elle les moyens d'enquêter ?
01:52 Et puis au-delà, comment le Kremlin tente de nous déstabiliser ?
01:55 Bonsoir Jean-Philippe Tanguy.
01:56 Bonsoir.
01:57 Et merci d'être avec nous. C'est vous le président de cette commission d'enquête.
02:00 Vous êtes député Rassemblement national de la Somme.
02:03 Et vous avez choisi pour des raisons d'impartialité de ne pas présider.
02:07 Vous avez cédé la direction de cette audition de Marine Le Pen à votre collègue du Modem.
02:11 Bonsoir Laurent Esquenet-Goxes.
02:13 On ne prononce pas le S.
02:14 On ne prononce pas le S. Goxes donc.
02:16 C'est dit.
02:17 Merci et bienvenue sur ce plateau.
02:19 Vous êtes député Modem de Haute-Garonne.
02:22 Bonsoir Cécile Vessier.
02:23 Bonsoir.
02:24 Merci d'être là. Vous êtes professeure en études russes à l'université de Rennes.
02:27 Vous avez écrit "Les réseaux du Kremlin en France" en 2016 aux éditions "Le Petit Matin".
02:32 Enfin, bonsoir Nicolas Kennel.
02:34 Bonsoir.
02:35 Merci d'être là. Vous êtes journaliste indépendant.
02:37 Vous écrivez notamment pour "Mariane" et vous travaillez sur ces questions d'influence et d'ingérence russe notamment.
02:42 Ce sujet vous intéresse forcément ce soir.
02:45 Bernard Guetta, n'hésitez pas à intervenir et même à interroger nos invités.
02:48 La parole pour commencer à Maître Stéphane Blakowski.
02:52 C'est un défi ce soir puisqu'il a 200 secondes pour nous résumer ce qu'a dit Marine Le Pen.
02:56 Le chrono de Blakowski. C'est parti.
02:58 Bonsoir Stéphane.
03:03 Bonsoir Myriam. Bonsoir à toutes et tous.
03:06 Alors, cette audition.
03:08 Avant d'essayer de vous faire un petit résumé de cette longue audition,
03:12 je rappelle comme vous venez de le dire que à l'origine, cette commission d'enquête sur les ingérences en France a été créée à la demande du Rassemblement National.
03:19 Je vous montre l'objectif avoué par Jean-Philippe Tambi à l'époque.
03:24 C'était donc de laver l'honneur notamment de Marine Le Pen après les accusations de lien avec la Russie qui avaient été, vous vous en souvenez, proférées par le président Macron lors du débat présidentiel.
03:34 On réécoute un extrait de cette fameuse séquence.
03:36 Vous ne parlez pas à d'autres dirigeants, vous parlez à votre banquier quand vous parlez de la Russie.
03:42 C'est ça le problème, Madame Le Pen.
03:44 Vous n'êtes pas dans une situation de puissance à puissance que vous ne pouvez pas défendre correctement sur ce sujet les intérêts de la France,
03:50 parce que vos intérêts sont liés à des gens proches du pouvoir russe.
03:54 Alors, cet après-midi, Marine Le Pen a donc répondu pendant presque quatre heures à de nombreuses questions sur ce fameux prêt contracté en 2014
04:03 de 9 millions d'euros auprès d'une banque russe qui s'appelle la FCRB, la First Czech Bank Russian.
04:10 Je ne dis pas du jambon d'ordre, mais c'est quand même une bonne tentative.
04:14 Donc le premier argument qu'elle a employé pour se défendre, c'est de dire qu'à l'origine, elle ne voulait évidemment pas du tout emprunter à la Russie.
04:21 Elle avait envie d'emprunter tout simplement à une banque française, sauf qu'elle n'a essuyé que des refus, et donc elle a dû se résoudre, se tourner vers la Russie.
04:29 Et donc, pour preuve de ça, elle a cité une mission parlementaire qui avait confirmé qu'elle avait essuyé un refus de cascade pour les prêts. On l'écoute.
04:38 Cette situation a été d'ailleurs confirmée, constatée par un rapport qui a été à l'époque rédigé par notre présidente actuelle, Mme Braun-Pivet,
04:49 et M. Gosselin, qui attestait qu'en effet, malgré 200 lettres fournies, aucune banque ne voulait prêter ni au parti, ni à moi-même à titre personnel pour une élection présidentielle.
05:03 Alors reste que ce fameux prêt souscrit en 2014 a quand même connu un destin un peu inhabituel. Enfin, ce n'était pas simplement une route toute tranquille,
05:11 puisque la banque qui a prêté a fait faillite, il y a eu un petit tremble-brio, et finalement, la créance, la dette a été récupérée par une société qui fait notamment du matériel militaire en Russie,
05:21 et donc qui est proche du Kremlin. Je ne m'hasarderai pas à prononcer le nom, j'ai déjà raté pour la banque, mais forcément, ça donnait un peu de soupçon,
05:28 parce que notamment lorsqu'ils ont renégocié le prêt, cette société, on a trouvé que les conditions étaient plutôt avantageuses pour le RN,
05:34 puisque le remboursement total a maintenant été décalé jusqu'en 2028. Donc de ce point de vue, la défense de Marine Le Pen consiste à dire que s'il y avait eu une irrégularité,
05:44 elle aurait dû être vue, parce qu'il y a eu de nombreux contrôles sur ce prêt. Il y a eu la banque du RN qui a dû contrôler avant d'encaisser les fonds,
05:50 des commissaires aux comptes qui ont contrôlé ce prêt. On imagine que Trakfin a peut-être mis aussi son nez pour vérifier qu'il n'y avait ni blanchiment, ni argent occulte.
05:58 Elle citait en dernier lieu la CNCCFP, la commission chargée des comptes de campagne, que le RN avait prévenue de ce changement de propriétaire de sa créance. On écoute.
06:11 On est allé voir la CNCCFP, on a dit "mais écoutez, c'est complètement en dehors de notre volonté, mais il se trouve que c'est une société qui a racheté la banque".
06:18 Évidemment que la CNCCFP ne nous en a pas tenu rigueur. Évidemment qu'elle a eu l'honnêteté de prendre conscience que nous ne pouvions absolument pas faire autrement.
06:28 Enfin, il y a surtout une grande quantité de questions qui consistent à éplucher les prises de position de Marine Le Pen sur la Russie pour tenter d'y déceler un parti pris en faveur de Poutine.
06:39 En fait, ce n'était pas non plus très compliqué, puisqu'il faut reconnaître que même si elle a condamné l'invasion de l'Ukraine par la Russie, Marine Le Pen a quand même souvent été assez proche des positions de la Russie et de Poutine.
06:49 Donc pour se défendre, elle fait remarquer qu'elle n'est pas forcément la seule sur ce dossier. Par exemple, en 2014, lorsque la Crimée a été annexée, elle trouvait ça parfaitement légal.
06:59 Mais elle dit "oui, mais regardez, finalement, le président Sarkozy était à peu près d'accord avec moi un peu plus tard".
07:04 Si on prend en 2016, quand elle militait pour qu'on lève les sanctions contre la Russie, elle dit "ben là non plus, je n'étais pas la seule, on l'écoute".
07:13 Il y a une sacrée hypocrisie sur la levée des sanctions que nous avons toujours appelée de nos voeux, et le moins qu'on puisse dire, c'est que nous n'étions pas le seul.
07:20 Monsieur Feckel, encore une fois, qui était secrétaire d'État, réclamait la même chose. Les LR réclamaient la même chose.
07:28 Bref, c'était donc ce résumé de 4h en 200 secondes, un peu compliqué. On pose juste une question.
07:34 Est-ce qu'elle a vraiment réussi à la gestion d'honneur ou est-ce qu'à force de faire le point sur ses liens avec la Russie, ça n'a fait que renforcer les soupçons ? Il y a débat.
07:41 Alors justement, on va commencer par les deux députés et ceux qui ont assisté, auditionné Marine Le Pen aujourd'hui, Laura Eskenégox, puisque vous meniez les débats.
07:51 Vous êtes-elle convaincue ? Plus de 3h, quel est votre sentiment ? Est-ce qu'on peut avoir une intime conviction sur l'absence de contrepartie après ce prêt russe en 2014 ?
08:03 Évidemment, nous n'avons pas les preuves, nous n'avons pas, en seulle, la commission d'enquête, la possibilité de forcer les gens à nous dire la vérité ou pas la vérité, d'ailleurs, même si on le jure au départ.
08:11 Le fait est qu'il y a tout un faisceau d'indices, en tout cas, moi, je pourrais dire de mon côté, qui montrent des coïncidences.
08:18 Certes, le soutien à la Crimée, le prêt, le déplacement de députés européens en Crimée...
08:25 Sur le soutien à la Crimée, parce qu'il faut comprendre, nos téléspectateurs ne sont pas comme vous, ils n'ont pas suivi les 4h, c'est à peu près au même moment, la souscription du prêt, 2014, l'annexion de la Crimée, 2014,
08:37 et elle a pris très clairement position pour la reconnaissance de l'annexion. En tout cas, elle considère que les référendums qui ont lieu en Crimée étaient parfaitement légitimes, alors qu'ils sont contraires aux droits internationaux.
08:48 Est-ce que ce n'est pas, à votre sens, une coïncidence hasardeuse, ce calendrier concomitant ?
08:54 C'est peut-être une coïncidence hasardeuse, après, c'est à chacun de juger, peut-être que le rapport le dira.
08:58 Moi, ce que j'entends, ou que j'ai du mal à entendre de la part de Marine Le Pen, puisqu'elle a changé un petit peu de point de vue vis-à-vis de la Russie depuis l'invasion honteuse et criminelle de l'Ukraine,
09:09 mais elle n'a pas changé d'avis sur la Crimée. La Crimée, elle a continué de nous dire aujourd'hui que ce référendum était légal,
09:15 toutes les autorités internationales et le droit international disent que ce n'est pas le cas. La Crimée était en partie occupée par des troupes russes,
09:22 qui empêchent un scrutin légal. C'est comme si nous, en France, on avait l'armée devant les bureaux de vote d'un pays étranger, ça ne peut pas fonctionner.
09:28 Donc, ce côté-là, je ne comprends pas qu'elle continue à soutenir le fait que la Crimée, j'entends bien son propos historique, elle est remontée jusqu'au dictateur soviétique,
09:38 mais dans le cadre d'un fonctionnement normal, ce référendum n'était pas légal.
09:44 J'ai signé un prêt avec une banque russe, pas avec Poutine. C'est au fond ce qu'elle a répété pratiquement pendant les quatre heures. Là-dessus, convaincu, pas convaincu ?
09:53 Non, pas convaincu, mais bon, c'est pareil, c'est le faisceau d'indices. Cette banque est connue pour être dirigée par quelqu'un qui est très proche du pouvoir russe,
10:02 donc effectivement, le lien avec Poutine n'est pas direct, mais on peut imaginer que dans cette démocrature, rien ne se passe sans l'aval de M. Poutine,
10:11 et d'ailleurs, ça nous a été confirmé par M. Schaufenhauser.
10:14 Jean-Philippe Tanguy, elle l'a souhaité, cette audition ? La commission a été créée par le Rassemblement national, c'est la dernière audition de cette commission, avant le rapport.
10:34 Elle l'a souhaitée ou c'est le président, enfin, M. Gox, vous-même, le bureau, qui ont voulu absolument l'entendre ?
10:43 Non, écoutez, c'est à la demande, d'ailleurs c'est transparent, puisque les comptes rendus de nos bureaux sont publics, il n'y a aucun problème là-dessus.
10:49 C'est à la demande des membres de la majorité présidentielle que Mme Le Pen a été auditionnée à la toute fin de notre commission d'enquête,
10:57 il reste effectivement le rapport de Mme Le Grip qui va être écrit et discuté après avec l'ensemble des membres de la commission.
11:04 Mais dès le début de la commission, nous avons fait savoir que Mme Le Pen n'avait pas de difficulté à se rendre à la commission,
11:08 ni d'ailleurs aucune personnalité liée de près ou de loin au Rassemblement national, mais aussi des personnalités qui pouvaient être très opposées au RN.
11:16 Thierry Mariani a été auditionné pour le RN, Philippe Olivier l'a été aussi.
11:20 Je remercie M. Eskenegox qui s'est à chaque fois libéré pour pouvoir me remplacer, enfin me remplacer ma présidence, et qui l'a fait dans de très bonnes conditions.
11:29 Moi, ce qu'on a voulu, et d'ailleurs, mon intime conviction, si vous voulez, moi je l'ai, sinon je ne serais pas avec Marine Le Pen, qu'elle est innocente de tout ce qu'on lui reproche,
11:37 mais mon intime conviction, à la limite, les Français se font leur opinion.
11:40 Moi, si on a voulu avoir cette commission, c'est que le soupçon ou l'accusation d'ingérence dans n'importe quelle démocratie, c'est du poison.
11:48 Si l'ingérence est soupçonnée, prouvée, les personnes qui en sont coupables doivent être écartées de la démocratie.
11:57 Mais vous avez entendu tous les personnes auditionnées qui disent que l'ingérence est très compliquée à prouver, c'est sans dire de redevabilité.
12:02 On y reviendra si vous voulez, mais si c'est un soupçon infondé, c'est aussi du poison dans les deux cas, puisque vous jetez sur les oppositions,
12:08 quel qu'elle soit, un soupçon de ne pas travailler pour les Français ou de ne pas travailler pour les intérêts de la France,
12:15 ou inversement, si on était de l'opposition, discréditer les forces de la majorité du gouvernement comme un agent étranger est aussi indigne de la démocratie.
12:22 Donc moi, en tout cas, comme président de cette commission, j'ai voulu établir des faits, à savoir si oui ou non, notre démocratie...
12:27 - On va pas refaire l'ensemble de l'audition, mais ce qui ressort, et là, très bien dit, Stéphane, c'est aussi cette société qui, finalement, devient la dernière société
12:37 pour qu'elle s'acquitte de sa créance. On n'est plus sur la première banque russe, sur le sotchek, mais sur la dernière société.
12:45 Cette société russe, elle est proche des services secrets, elle est détenue par d'anciens militaires.
12:50 Vous vous n'êtes pas dit, la provenance des fonds est quand même suspecte. C'est pas un problème ?
12:55 - En l'occurrence, il n'y a plus de fonds, c'est une reprise de créance.
12:57 - Qui va courir avec un échelonnement jusqu'en 2028 ?
13:00 - Oui, avec les intérêts qui sont augmentés du nombre d'années qui dépassent, qui suivent ce rééchelonnement.
13:06 C'est juste un prêt ordinaire. Le fait, ce que j'ai trouvé un peu étrange, mais je n'ai pas spécialement prononcé dessus,
13:11 d'ailleurs chacun pose les questions qu'il veut, c'est que quand vous avez une banque qui fait faillite,
13:14 ce qui d'ailleurs met quand même en question le fait qu'elle soit soutenue par le pouvoir russe.
13:17 - La première banque ?
13:18 - La première banque. Le fait que les créances soient rachetées suite à une procédure de tribunal commercial russe
13:25 n'est pas du ressort du Rassemblement National. Et à aucun moment on nous a demandé notre avis
13:28 pour savoir si c'était Tartempion ou Madame Lustig-Ru qui devait reprendre le prêt.
13:32 Et si, je vais vous dire, si la créance avait été annulée, le Rassemblement National ne serait pas porté plus mal.
13:37 Mais est-ce que ça aurait été accepté par la CNCCFP ?
13:39 A savoir que un prêt ne peut pas être transformé en intérêt financier ? Non.
13:43 Donc moi je trouve que tout ça, si vous voulez, je trouve que parfois on a du mal à accepter que peut-être nous sommes innocents.
13:50 - Donc pour vous l'honneur est lavé puisque c'était l'objectif ?
13:53 - C'est pas moi qui l'ai décidé.
13:54 - Non mais vous avez.
13:55 - Moi je sais que notre honneur est sauvé. Je suis co-directeur de campagne, je sais très bien ce qui s'est passé.
13:59 Mais les Français le verront.
14:01 - Alors, Cécile Vessier, il y a eu pas mal de questions aussi sur l'entourage de Marine Le Pen, Thierry Mariani,
14:07 dont on comprend qu'il est fortement probable qu'il travaille pour la Russie, même si cela n'a pas complètement prouvé.
14:14 En tout cas, il est au comité d'éthique de la chaîne Russia Today.
14:17 Il y a eu aussi toute une série de proches de Marine Le Pen, des élus, qui ont été les observateurs,
14:22 non pas indépendants à la demande d'ONG ou de l'Union Européenne, des élections en Russie, en Crimée, mais de la Russie.
14:29 Ça, c'est un problème ?
14:31 - Oui, c'est un problème, bien sûr que c'est un problème.
14:34 Je voudrais juste revenir sur ce que vous disiez auparavant.
14:37 C'est-à-dire que si les choses étaient tellement claires, étaient tellement simples,
14:41 pourquoi ce premier prêt n'a-t-il pas été public ?
14:45 Pourquoi a-t-il fallu qu'une journaliste, en l'occurrence de Mediapart,
14:49 - Marine Turki, Médiapart.
14:50 - Marie Turki, aille sortir l'information ?
14:54 C'est-à-dire que si les choses avaient été si claires,
14:57 il suffisait de dire "écoutez, nous sommes vraiment discriminés,
15:00 nous n'avons pas trouvé d'argent, nous le trouvons en Russie.
15:03 Surveillez-nous, nous le trouvons en Russie.
15:05 Moi, j'aimerais des relations", c'est dans un monde idéal, c'est dans 20 ans, dans 30 ans,
15:09 "des relations tout à fait pacifiées, commerciales avec la Russie".
15:13 Là, ça n'a pas été le cas.
15:14 Et effectivement, on trouve des propos qui sont absolument surprenants.
15:18 Je reprenais certaines notes, c'est-à-dire qu'on a eu une déclaration de Marine Le Pen
15:23 et une déclaration de son père le jour du référendum, pour dire que tout était...
15:26 -En 2014, en Crimée.
15:27 -Mais bien sûr que tout n'était pas merveilleux.
15:29 Bien sûr que quand M. Mariani va en Crimée, alors que l'Assemblée nationale,
15:35 alors que le Sénat, alors que le ministère lui disent "n'y allez pas",
15:38 parce que la position de la France, je veux dire, on est un grand pays,
15:42 il y a une position de la France, les Français ne vont pas en Crimée.
15:46 Et que M. Mariani y va en entraînant d'autres personnes
15:50 pour leur dire "regardez comme la Crimée est belle"...
15:54 -Ce sont les Républicains, à l'époque.
15:55 -Non, il y avait des gens tout à fait différents,
15:57 mais c'est lui qui les a menés, il les a entraînés.
16:00 Et il y avait effectivement Podzoddy,
16:02 il y avait Embrick, Socrate et Stéphane Ravie aussi,
16:04 qui se sont rendus comme observateurs.
16:06 Tout ça, ça pose des problèmes.
16:09 Je dirais, avant même les prêts,
16:12 quand Mme Le Pen a donné une interview aux Izvestia,
16:15 une très grande interview, où elle faisait...
16:18 Vous savez, les Russes, ils savent qu'ils vont voir,
16:20 ils savent qu'ils vont trouver.
16:22 Elle faisait des appels du pied en disant
16:24 "il faut sortir de l'OTAN, de l'Union européenne,
16:27 "il faut s'éloigner des Etats-Unis et se rapprocher de la Russie".
16:30 Une dame qui ne connaît rien à la Russie.
16:33 Moi, en plus, je pense qu'il y a plus de sa part
16:36 une espèce d'ignorance, vous savez,
16:39 des enjeux internationaux et des réalités internationales.
16:42 -Jean-Philippe Netanyahou, répondez déjà sur...
16:45 Pourquoi ne l'a-t-elle pas dit tout de suite sur le prêt ?
16:48 -Parce qu'aucun parti politique ne communique
16:51 sur ses prêts en dehors de ce qui est communiqué
16:54 à la Commission nationale des comptes de campagne
16:57 du financement des partis politiques,
16:59 qui, chaque année, publie les comptes des partis politiques
17:02 après les avoir audités, et ils sont audités par deux commissaires.
17:05 Il n'y a aucune raison de faire des communiqués de presse
17:08 sur les prêts qui sont faits. -Aujourd'hui, ça n'est plus possible.
17:11 -C'est interdit, d'ailleurs. -Un candidat
17:13 est emprunté en dehors de l'Union européenne.
17:15 -Ce sont des relectures à posteriori de faits
17:17 où on trouve scandaleux des choses
17:19 qui ont l'air de se faire de la même manière.
17:21 Je suis désolé. Pourquoi ai-je voulu faire la différence
17:24 entre ce qui relève des ingérences et du débat politique ?
17:27 Il est tout à fait possible de débattre
17:30 de ce que l'on peut considérer être nos erreurs,
17:32 ce que l'on ne considère pas être nos erreurs,
17:34 ce que l'on considère être les erreurs diplomatiques de la majorité,
17:37 ce que l'on considère être la vérité.
17:39 -Il y a une forme d'hypocrisie à juger à posteriori ?
17:42 -On ne peut pas disqualifier un opposant politique
17:45 ou un gouvernement en disant que vous êtes le parti de l'étranger.
17:48 -Vous n'avez même pas le droit de concrétiser.
17:50 -A l'époque du Pré, quand même,
17:52 déjà, cette banque était qualifiée de douteuse,
17:55 et avait été qualifiée par M. Navalny,
17:57 qui a été emprisonné par M. Poutine,
17:59 comme une banque destinée à blanchir de l'argent.
18:02 -Il a une licence européenne. -Alexei Navalny a dit ça.
18:05 Banque de blanchiment. Bernard Guetta.
18:07 -La première banque.
18:09 -Pour ma part, je ne crois pas du tout
18:11 que Mme Poutine...
18:13 Excusez-moi de ce terrible lapsus.
18:15 C'était vraiment un lapsus.
18:17 Je pense que Mme Le Pen ait pris les positions qu'elle a prises
18:21 et qu'elle continue à assumer sur la Crimée,
18:24 parce qu'elle aurait été achetée par la Russie.
18:27 Je pense que la situation est bien pire que cela.
18:30 Je pense que M. Poutine l'a financée
18:33 parce que, sincèrement,
18:36 politiquement, elle adhérait,
18:39 naturellement, non seulement à l'annexion de la Crimée
18:43 par la Russie,
18:45 aux conditions dans lesquelles cette annexion a été faite,
18:49 mais elle adhérait profondément au régime de M. Poutine.
18:53 -Par conviction. -Absolument.
18:55 Si vous me permettez, encore une phrase.
18:58 Non seulement Mme Le Pen... Je ne voudrais pas refaire le lapsus.
19:02 Mme Le Pen soutenait M. Poutine.
19:05 Aujourd'hui, elle a pris ses distances
19:08 depuis l'agression si caractérisée contre l'Ukraine,
19:11 mais en plus, elle soutenait qui ?
19:13 M. Trump, de l'autre côté de l'Atlantique.
19:16 C'est-à-dire que, politiquement,
19:19 cette dame et le parti qu'elle représente,
19:23 qu'elle préside, je ne sais pas...
19:25 Non, elle ne préside plus, enfin, qu'elle incarne.
19:28 -La chef de la famille politique. -En tout cas, qu'elle incarne.
19:32 Elle représente ce qu'il y a de plus abominable politiquement.
19:36 -Pour l'Arabie saoudite, c'est pas...
19:38 -Permettez-moi de terminer ma phrase.
19:40 Elle représente, je répète, ce qu'il y a de plus abominable,
19:44 c'est-à-dire le soutien à M. Poutine et à M. Trump.
19:48 Et c'est ça, pour moi,
19:50 qui est absolument condamnable et terrifiant.
19:53 -Justement, puisque vous parlez, au fond, d'idéologie,
19:56 on a entendu les arguments du RN, ceux de M. Le Pen,
20:00 l'audition aujourd'hui.
20:02 Elle se défend de toute ingérence.
20:04 Mais les Russes, eux, qu'est-ce qu'ils disent de nous
20:07 et de certains élus personnalités politiques ?
20:10 C'est un extrait d'un documentaire, "La vengeance de Poutine",
20:13 signé Antoine Mikhlin pour Galaxy Productions.
20:16 Ca a été diffusé sur France 5.
20:18 Vous allez entendre un oligarque russe,
20:20 Constantin Malofeyev, proche de Poutine,
20:22 qu'a rencontré Marine Le Pen ainsi que de nombreux membres du RN.
20:26 Regardez cet extrait.
20:28 -L'un des principaux relais entre le Front national et le Kremlin
20:34 est depuis des années l'homme d'affaires Constantin Malofeyev.
20:38 -Marine Le Pen affiche des valeurs et des idées
20:44 proches de celles du président Poutine.
20:47 C'est pourquoi elle est devenue intéressante à ses yeux.
20:51 -Cette rencontre est pour Poutine
20:56 une étape majeure de sa stratégie en Europe.
20:59 Pour y étendre son influence,
21:01 il s'érige en gardien d'un bastion conservateur et chrétien
21:05 face aux changements, aux menaces migratoires, au terrorisme.
21:09 Comme jadis l'Union soviétique,
21:13 il s'appuie sur des personnalités,
21:15 des partis politiques partout en Europe,
21:18 principalement à droite et à l'extrême droite.
21:21 -Quand ils observent la Russie,
21:26 ils se disent "c'est possible".
21:29 Nous pouvons rendre la France ou encore l'Allemagne
21:33 plus grande encore.
21:35 -C'est cet oligarque russe Constantin Malofeyev
21:44 qui s'exprime dans cette séquence qui a été tournée en 2017,
21:48 donc bien avant l'invasion de l'Ukraine.
21:51 Là, sont très clairs, les Russes. -Un Russe ?
21:54 -Ce Russe proche de Poutine.
21:56 -Clairement, Marine Le Pen nous intéresse.
21:59 -Evidemment. Je rejoins ce que disait Bernard Guetta
22:02 quand il disait qu'il y avait une communauté d'idées
22:05 qui finance les Russes.
22:07 C'est plutôt vers ça qu'il faut tendre.
22:10 Il y a quelque chose qui m'a assez marqué
22:13 quand j'ai regardé l'audition de Mme Le Pen.
22:16 Je me suis amusé à regarder ce que disaient
22:19 les réseaux Malofeyev au même moment.
22:22 J'étais assez marqué de voir que dans la demi-heure
22:25 suite aux propos de Marine Le Pen sur la Crimée,
22:28 il y avait déjà un article sur Tsargrad.tv,
22:31 la télé de propagande de Malofeyev,
22:34 oligarque d'extrême droite russe.
22:37 Il y avait déjà des reprises des propos de Marine Le Pen
22:40 dans cet écosystème médiatique
22:42 qui ne se sont pas limités juste à Tsargrad.
22:45 On a vu les propos de Marine Le Pen
22:48 être diffusés sur toutes les chaînes,
22:51 toutes les grosses chaînes de propagande russe,
22:54 notamment dans le cadre de la guerre en Ukraine.
22:57 Ca donne du corps à cette idée de communauté d'idées.
23:00 -C'est ce que dit cette oligarque russe.
23:03 Malofeyev, c'est la grande fédération des droites identitaires.
23:06 -Le Kremlin soutient aussi la Lega en Italie.
23:09 Le Kremlin soutient deux grands partis
23:12 de l'Union européenne,
23:15 la Lega en Italie et le Rassemblement national en France.
23:18 -Aucun soutien. Aucun accord.
23:21 -Il y a un accord avec la Lega, entre Russie-Unie et la Lega.
23:24 Il n'y a pas d'accord entre le RSA. -Il n'y a peut-être pas d'accord,
23:27 mais il y a un soutien. Le soutien est là.
23:30 Madame Le Pen elle-même est allée chercher le soutien
23:33 du président Poutine avant une élection présidentielle.
23:36 -Elle a rencontré un homme politique. -Non, non, non.
23:39 Elle ne l'a pas rencontrée par hasard sur la perspective Nievski.
23:42 Non. Elle est allée demander un rendez-vous à M. Poutine,
23:47 de même qu'elle... Ne dites pas "bien sûr", c'est un fait.
23:50 De même qu'elle est allée à New York
23:53 dans l'espoir d'être reçue par M. Trump,
23:56 qui ne l'avait pas reçue. -Jean-Philippe Tanguy,
23:59 c'est vrai qu'une heure et demie d'entretien au Kremlin
24:02 par Vladimir Poutine en 2017, c'est la première fois
24:05 que Vladimir Poutine soutient aussi ostensiblement
24:08 en Europe une présidentielle ? On n'avait jamais vu ça.
24:11 -Si, le soutien de M. Poutine, il est écrit
24:14 à travers les déclarations de M. Orloff, il allait à M. Fillon.
24:17 D'une manière générale. -D'accord, mais les faits ont fait
24:20 que c'est Marine Le Pen qui a été reçue.
24:22 -Si vous prenez les archives, vous allez trouver beaucoup de fois
24:25 où M. Poutine a reçu M. Fillon. -Quand il était Premier ministre.
24:28 -Non, en dehors. -Non, pas quand il était candidat.
24:31 -En dehors. Et d'ailleurs, moi, ce que j'ai essayé aussi
24:35 de démontrer dans la façon dont j'ai présidé les débats,
24:38 c'est que les faits, qu'est-ce qui a mené des liens factuels,
24:42 pas des reportages avec une musique angoissante,
24:45 des liens économiques de dépendance entre...
24:49 de la France vers la Russie ?
24:51 Ce sont les gouvernements qui se sont succédés.
24:53 Ce n'est pas M. Le Pen qui a construit
24:55 de gazoduc entre l'Allemagne et la Russie
24:57 contre nos alliés européens et contre l'Ukraine.
24:59 Ce n'est pas M. Le Pen qui a autorisé 18 milliards d'euros...
25:02 -Mais elle était pas contre. -Si. Le gazoduc, si.
25:04 -Ah bon ? -L'approvisionnement en gaz russes.
25:06 -18 milliards d'investissements. La politique énergétique,
25:09 c'est moi qui m'en occupe, donc je connais.
25:11 18 milliards d'euros d'investissements.
25:13 Ce n'est pas elle qui a remis la Grande Croix de la Légion d'honneur
25:16 à Vladimir Poutine, c'est Glacier Rac.
25:18 Ce n'est pas elle qui a missionné Jean-Pierre Chevènement
25:21 comme représentant spécial des intérêts de la France en Russie
25:24 de 2012 à 2020. C'est d'abord M. Fabius...
25:26 -Vous dites que ces positions étaient partagées par le passé.
25:29 -M. Le Drian, avec deux lettres obtenues,
25:31 manuscrite de M. Fabius et M. Le Drian,
25:33 qui encourage notamment M. Chevènement
25:35 à recevoir la claudistation du juge russe.
25:37 -Elle a cité Jean-Pierre Chevènement,
25:39 elle a même cité Mathias Feckel, Nicolas Sarkozy,
25:41 et M. Le Pen. -C'est un peu comme la Crimée.
25:43 Qu'est-ce que vous répondez à ces...
25:45 -Que d'autres se sont trompés. -A ces oppositions-là.
25:48 -C'est ce que j'ai dit tout à l'heure en introduction,
25:51 c'est que Mme Le Pen a changé d'avis, en tout cas sur l'Ukraine.
25:54 -Elle dit autre chose. -Oui, elle a un discours différent.
25:57 Mais elle n'a pas changé d'avis sur la Crimée.
26:00 Aujourd'hui, tout le monde reconnaît que l'annexion de la Crimée
26:03 est illégale. -Il y a une contradiction.
26:05 -Quelqu'un qui a un dossier national,
26:07 comme Marine Le Pen, on va bien lui reconnaître,
26:10 mais il faut que la Crimée ne revienne pas en arrière.
26:13 Sur ce que vous disiez sur M. M. M. M. M. M. M. M. M. M. M. M. M.
26:16 J'ai vu le site qui reprenait une demi-heure après
26:19 les propos de Marine Le Pen en disant
26:21 "La Crimée appartient depuis toujours à la Russie
26:24 "et le référendum était extraordinaire."
26:26 -En même temps que l'audition était disputée,
26:29 les réseaux de propagande...
26:31 -Le terme "l'assut", c'est que ce personnage
26:34 est au coeur de l'histoire des prêts.
26:36 Il avait participé à un prêt... -Manouf F.
26:39 -Il avait participé à un prêt de 2 millions d'euros
26:42 pour les Européennes. Ce personnage est poursuivi
26:45 pour avoir déporté les enfants ukrainiens.
26:48 Il est au coeur du truc. C'est très troublant.
26:51 -Cécile Vessier, vous vouliez dire aussi une chose
26:54 sur la manière dont les Russes s'approchent de certains élus,
26:57 pas seulement du RN. Il y a des précédents.
27:00 -L'argument "il y en a d'autres" n'est pas un argument.
27:03 Mais effectivement, il y a d'autres personnes
27:06 qui ont voulu, à la Russie... -Acheter, vous diriez.
27:09 -Ou plus exactement soutenir M. Poutine,
27:12 ce qui est tout à fait différent. Je vous l'ai dit
27:15 lors de mon audition, on a maintenant au moins
27:18 deux preuves qu'il y a des Russes qui vont voir
27:21 des hommes politiques français et qui leur proposent de l'argent.
27:24 On a le témoignage de M. Kuzmanovitch,
27:27 qui était l'adjoint de M. Mélenchon. On ne peut même pas dire
27:30 qu'on persécute le RN. Et qui, d'après M. Kuzmanovitch lui-même,
27:35 un officier du GRU, c'est-à-dire des services secrets
27:38 de l'armée russe, lui a proposé 500 000 euros.
27:42 On avait ce témoignage après celui de M. Beyrou,
27:45 qui avait, en 2004, signalé publiquement
27:49 que des intermédiaires étaient venus au nom des Russes
27:52 lui proposer de l'argent pour financer sa campagne.
27:55 C'est-à-dire que M. Malofeyev, il est connu.
27:59 Il est connu parce que dans toute l'Europe...
28:02 Quand il a une fortune, allez regarder l'origine de sa fortune,
28:05 vous verrez que c'est un cadeau que lui a fait l'Etat russe.
28:08 L'Etat russe lui a fait cadeau de sa fortune, littéralement.
28:11 Donc, on a des études européennes,
28:14 parce que partout dans l'Europe, le problème se pose,
28:17 et effectivement, on propose de l'argent, éventuellement,
28:20 à différents partis. Ca ne gêne absolument pas la Russie.
28:23 La Russie de M. Poutine n'est pas un Etat idéologique.
28:26 C'est plus le Parti communiste, je dirais, qui va nourrir,
28:30 je dirais, les partis communistes de toute l'Europe.
28:33 Ce qu'il veut, c'est avoir des alliés,
28:35 c'est avoir ses alliés au pouvoir.
28:37 Donc, quand vous dites qu'il misait sur Fillon,
28:39 oui, je pense qu'il misait sur Fillon,
28:41 mais on va miser aussi par Marine Le Pen,
28:43 parce qu'elle nous fait tellement de sourires,
28:45 et tellement d'avances, et tellement de propositions,
28:47 quand elle nous dit qu'il faut s'éloigner des Etats-Unis,
28:50 il faut s'éloigner de l'OTAN, il faut s'éloigner de l'Union...
28:53 Même si elle le fait par conviction,
28:55 même si elle le fait par conviction,
28:57 il reconnaît, il reconnaît,
28:59 il ne va pas s'approcher de parti à l'opposé.
29:01 - On va terminer.
29:03 - C'est sa politique.
29:04 - On va terminer sur l'audition, puis on va ouvrir ensuite
29:06 sur les moyens, au fond, d'estabilisation,
29:08 qui sont nombreux, et bien au-delà, d'ailleurs,
29:10 de la question des élus.
29:12 Nicolas Quennell, sur les personnalités politiques en France,
29:15 comment procèdent-ils, les Russes ?
29:17 - Non, alors, moi, avant toute chose,
29:19 cette commission, je trouve qu'elle a un intérêt
29:21 qui est assez important.
29:23 Évidemment, les moyens d'enquête de la commission
29:25 sont extrêmement limités.
29:27 Évidemment, c'est un moyen pour le Rassemblement national,
29:29 aussi, de revenir sur ces sujets,
29:31 en espérant aussi faire le ménage et évacuer ces questions-là
29:33 à l'avenir.
29:35 Maintenant,
29:37 il y a quand même eu des interventions
29:39 qui étaient particulièrement intéressantes.
29:41 Nicolas Lerner, typiquement, le patron de la DGSI,
29:43 qui a pointé, et je crois même
29:45 que c'était la première fois,
29:47 que certains élus qui allaient, par exemple,
29:49 observer des référendums
29:51 à l'étranger, au hasard,
29:53 c'était déjà franchir un petit peu le rubicon.
29:55 Et je pense qu'il y a un repositionnement actuel
29:57 de la France sur ces questions d'influence,
29:59 où on s'en préoccupe,
30:01 alors qu'on s'en est pendant très longtemps
30:03 désintéressé.
30:05 Et je me suis amusé,
30:07 si vous voulez,
30:09 à regarder un petit peu les archives avant de venir,
30:11 parce que, du coup, ça m'amusait.
30:13 Et c'est un peu la difficulté qu'on a, aujourd'hui,
30:15 c'est la différence entre la liberté d'opinion,
30:17 qu'a Mme Le Pen, évidemment,
30:19 et l'influence, le résultat de l'influence.
30:21 - D'ailleurs, il y a même des députés, ici, à l'Assemblée nationale,
30:23 M. Petit, député Modem, pour ne pas le citer,
30:25 qui a même témoigné d'une réunion au Sénat,
30:27 qui n'était pas celle à laquelle
30:29 il pensait assister,
30:31 qui s'est retrouvé dans une réunion pro-russe,
30:33 qui avançait masqué.
30:35 - Mais c'est très compliqué d'arriver à caractériser
30:37 l'infraction d'influence.
30:39 - Pourquoi ? Expliquez-nous ça. Ils l'ont tous dit,
30:41 dans la commission d'enquête.
30:43 - Le problème, c'est justement...
30:45 Enfin, c'est pas, évidemment...
30:47 - Il n'y a rien d'écrit, il n'y a rien de signé,
30:49 il n'y a pas de contrepartie. - N'interprétez pas mal ce que je veux dire.
30:51 En fait, c'est très compliqué d'arriver à caractériser
30:53 l'infraction dans la mesure où les gens,
30:55 même s'ils sont payés, même s'il y a un accord quelconque,
30:57 qu'on n'a pas la preuve de cet accord,
30:59 et qu'eux peuvent se réfugier automatiquement derrière.
31:01 Mais attendez, j'ai ma liberté d'opinion, quand même.
31:03 Et ils ont bien raison de le faire.
31:05 - Alors, on va avancer, je vous donne la parole
31:07 juste après, Jean-Philippe Tanguy.
31:09 Au-delà, donc, du cas du Rassemblement national,
31:11 comment la Russie déstabilise les démocraties,
31:13 cyberattaque, soupçons d'ingérence
31:15 dans certaines campagnes électorales,
31:17 usine à trolls, à désinformation,
31:19 tour d'horizon, signé Marco Pogni.
31:21 - Le site de l'Assemblée nationale
31:29 mis KO par des hackers.
31:31 La cyberattaque remonte à fin mars.
31:33 Une attaque sans vol de données,
31:35 certes, mais loin d'être anodine.
31:37 Derrière cette action,
31:39 le collectif cybercriminel
31:41 No Name, proche du Kremlin.
31:43 - Nous avons décidé de réitérer
31:45 notre récent voyage en France
31:47 où les protestations contre Macron,
31:49 qui a décidé de se moquer des Français,
31:51 et continue de satisfaire
31:53 les néo-nazis ukrainiens,
31:55 sont toujours importantes.
31:57 - Une riposte au soutien de la France à l'Ukraine.
31:59 No Name fait partie
32:01 des 80 collectifs de pirates russes
32:03 et pro-russes qui s'en prennent
32:05 régulièrement à nos sites gouvernementaux.
32:07 En 2022,
32:09 les cyberattaques russes ont augmenté
32:11 par 300 % dans les pays de l'OTAN.
32:13 Cyberattaque, mais aussi ingérence.
32:15 Les Macronleaks en 2017
32:17 marquent les esprits.
32:19 20 000 courriers électroniques
32:21 de la campagne d'Emmanuel Macron
32:23 piratés et divulgués sur les réseaux sociaux,
32:25 deux jours seulement
32:27 avant le vote du second tour.
32:29 Tentative d'influence des élections
32:31 confirmées par les services
32:33 de renseignement américains.
32:35 - Nous étions au courant
32:37 d'activités russes et on en a parlé
32:39 aux Français avant que l'information
32:41 ne soit publique.
32:43 On leur a dit que les Russes les observaient
32:45 et qu'on les voyait essayer de pirater leur système.
32:47 - Tout juste élu,
32:49 Emmanuel Macron accusera aussi
32:51 deux médias russes, financés par le Kremlin,
32:53 d'avoir répandu de fausses informations.
32:55 Face à Vladimir Poutine,
32:57 le président lâche ses coups.
32:59 - Quand des organes de presse répandent
33:01 des contre-vérités infamantes,
33:03 ce ne sont plus des journalistes.
33:05 Ce sont des organes d'influence.
33:07 Russia Today et Sputnik
33:09 ont été des organes d'influence
33:11 durant cette campagne qui ont à plusieurs reprises
33:13 produit des contre-vérités sur ma personne et ma campagne.
33:15 Russia Today et Sputnik,
33:17 deux médias controversés,
33:19 bannis il y a un an de l'Union Européenne
33:21 après l'invasion de l'Ukraine.
33:23 Mais cela n'empêche pas Moscou
33:25 de poursuivre sa guerre de l'information
33:27 au service d'une idéologie
33:29 avec une armada d'usines à troll.
33:31 Leur objectif ?
33:33 Diffuser des fake news et relayer
33:35 l'action du Kremlin sur les réseaux sociaux.
33:37 - Jean-Philippe Tanguy,
33:41 quand on voit ça, on sent que les leviers,
33:43 les moyens d'action de l'Etat russe sont puissants.
33:45 Il y a une fake news qui avait
33:47 beaucoup circulé sur Emmanuel Macron,
33:49 c'est ce fameux compte offshore au Bahamas.
33:51 Vous vous souvenez, c'était la campagne de 2017.
33:53 Elle a été reprise par Marine Le Pen
33:55 en posant une question
33:57 au candidat de l'époque, Emmanuel Macron.
33:59 Est-ce qu'elle le regrette,
34:01 aujourd'hui, de s'être emparée
34:03 de cette fausse information
34:05 en plein débat d'entre-deux-tours ?
34:07 - Je ne sais pas.
34:09 Je ne sais même pas si elle a posé la question
34:11 suite au Macron-Lex ou pas,
34:13 ou si c'est quelqu'un qui lui a renseigné.
34:15 - C'était déjà sur les réseaux,
34:17 c'était avant les Macron-Lex.
34:19 - C'est possible, mais moi qui ai fait plusieurs campagnes présidentielles,
34:21 vous savez, entre l'information qui est publique
34:23 et celle qui arrive au candidat,
34:25 c'est pas toujours le cas.
34:27 Mais je ne vais pas détourner votre question.
34:29 Je n'ai jamais, dans cette présidence,
34:31 refusé les tentatives d'ingérence russe
34:33 ou la réalité des ingérences russes.
34:35 Quand on a reçu Mme Vessier, je ne pense pas.
34:37 Vous avez été mal reçue, vous avez été parlée.
34:39 - Absolument pas.
34:41 - Je n'ai jamais refusé une audition sur la Russie
34:43 demandée par qui que ce soit.
34:45 Je n'ai aucune difficulté à reconnaître
34:47 les ingérences russes.
34:49 Je conteste.
34:51 Je pense que les auditions le montrent,
34:53 que le RN, soit Marine Le Pen,
34:55 soit sous ingérence ou influence russe.
34:57 Ce sont des choses totalement différentes.
34:59 - Vous n'avez jamais nié l'existence
35:01 d'ingérences russes.
35:03 Est-ce que vous avez, comme députée,
35:05 les moyens de trouver des solutions
35:07 pour nous armer, on sent qu'il faut se réarmer,
35:09 d'un point de vue moral,
35:11 d'un point de vue matériel,
35:13 également politique ?
35:15 - Je pense que notre rapporteur,
35:17 Mme Constanze Le Gris, fera des propositions.
35:19 Moi-même, je ferai les miennes.
35:21 Je pense que nous devons soutenir l'effort financier
35:23 qui permet de lutter contre ces ingérences.
35:25 Mais je refus de crier,
35:27 et j'ai pas eu le temps de répondre à ça tout à l'heure,
35:29 la communauté de pensée,
35:31 avec le régime poutinien, par exemple, Malofeyev,
35:33 veut faire une coalition religieuse.
35:35 Le RN est un parti
35:37 extrêmement laïque, voire accusé
35:39 par les extrémistes religieux d'être laïcarde.
35:41 - Malgré la rencontre, elle ne participera pas
35:43 à ce projet de Malofeyev ?
35:45 - Jamais. Ça n'a jamais été un projet.
35:47 Moi-même, je suis qualifié dans le personnel politique
35:49 de personnalité extrêmement laïcarde.
35:51 Je finis là-dessus. Il y a quand même des auditions sous serment.
35:53 Je veux bien que la parole des uns et des autres
35:55 n'ait jamais de valeur, qu'on mette en regard
35:57 celle de la principale chef de l'opposition en France
35:59 et des oligarques qui parlent à la télé.
36:01 Mais j'aimerais quand même un peu...
36:03 Il y a l'Assemblée nationale et nos institutions.
36:05 Et si Mme Le Pen a menti...
36:07 - Beaucoup de choses ont été dites.
36:09 Le temps qui nous est compté
36:11 est arrivé presque à son terme.
36:13 Vous avez le mot de la fin.
36:15 Qu'est-ce qu'on peut faire face à ça,
36:17 ces usines à trolls, ces moyens
36:19 d'influence massif à tous les niveaux de la société ?
36:21 - C'est pas que les usines à trolls.
36:23 - Entre autres, on a bien compté.
36:25 - Comme je vous l'ai dit, j'étais aller voir
36:27 un petit peu dans les archives et je suis tombé sur le rapport
36:29 qui avait été fait par ce qu'on appelait
36:31 la résidence de Paris,
36:33 qui était l'antenne du KGB à Paris en 1961,
36:35 qui avait été fait à Moscou.
36:37 Et il y avait quelque chose qui m'avait plutôt fait marrer.
36:39 C'était les gars
36:41 affirmer avoir orienté
36:43 230 articles de presse,
36:45 11 livres et 32 questions
36:47 et déclarations parlementaires.
36:49 C'est dire si, dans l'absolu, déjà, ça date pas d'hier...
36:51 - L'influence est puissante.
36:53 - Éventuellement, les moyens ont évolué.
36:55 C'est-à-dire que l'outil Internet, maintenant, nous a permis
36:57 d'avoir un potentiel de viralité
36:59 que les pentes du KGB n'auraient jamais pu croire possible.
37:03 Maintenant, ce qu'il faut faire, à mon sens,
37:05 c'est investir de l'argent
37:07 dans la lutte contre la désinformation
37:09 et les opérations d'influence étrangère.
37:11 - Et le défi est de taille.
37:13 - Le presse sur le numérique de Jeannot Elbarro,
37:15 bientôt présent. - On s'arrête là, mais on a appris
37:17 beaucoup de choses. Merci beaucoup.
37:19 - Merci d'avoir participé à ce débat extrêmement précis.
37:23 Vous restez avec moi, Bernard Guetta.
37:25 Dans une dizaine de minutes, les parties prises
37:27 de nos affranchis. Ce soir, très écho,
37:29 vous allez le voir, Fanny Guinochet,
37:31 la fin du "Quoi qu'il en coûte" a enfin sonné à Bercy.
37:33 L'orange, le fruit qui emballe les marchés financiers,
37:35 on verra ça avec Thomas Lestavelle
37:37 et puis, Bourbon Express, ce soir,
37:39 le rapport de la déontologue de l'Assemblée,
37:41 Elsa Mondingava, à tout à l'heure.
37:43 Les amis, mais d'abord, on plonge dans votre livre
37:45 "La nation européenne, chez Grasse",
37:47 ici à Tardes, vous, le fédéraliste
37:49 dans l'âme, Bernard Guetta,
37:51 vous êtes frotté à la réalité de Bruxelles,
37:53 dans un contexte absolument inédit
37:55 de crise qui a fait tomber
37:57 presque tous les tabous en Europe.
37:59 Allez, on voit ça dans l'invitation de Marion Becker
38:01 et on en parle ensemble juste après.
38:03 Si on vous invite,
38:09 Bernard Guetta, c'est pour votre récit
38:11 intime des institutions européennes,
38:13 mais aussi pour votre regard
38:15 et votre analyse
38:17 sur la politique internationale.
38:19 Dans votre dernier ouvrage,
38:21 "La nation européenne",
38:23 vous brossez le portrait,
38:25 sans concession, du Parlement européen.
38:27 Vous, le député journaliste,
38:29 un statut auquel vous tenez,
38:31 car Bernard Guetta,
38:33 vous êtes journaliste
38:35 depuis le début des années 70.
38:37 Au Nouvel Observateur,
38:39 au Monde, puis à France Inter,
38:41 spécialiste de géopolitique,
38:43 vous avez été correspondant
38:45 à Washington, puis à Moscou.
38:47 - Je crois, en effet,
38:49 que c'est extrêmement surprenant
38:51 ce qui vient de se passer,
38:53 si, précédemment, on n'avait rien compris
38:55 à ce qui se passait.
38:57 - Vous êtes élu député européen en 2019,
38:59 sur la liste de la majorité présidentielle,
39:01 et vous vivez votre mandat
39:03 comme un long reportage permanent.
39:05 Vous restez journaliste dans l'âme.
39:07 À travers vos yeux,
39:09 le lecteur découvre
39:11 le fonctionnement du Parlement européen,
39:13 et vous n'êtes pas tendre.
39:15 - Ce qui m'intéresse,
39:17 c'est de découvrir de l'intérieur
39:19 ce qu'est la vie politique,
39:21 et plus précisément, ce qu'est la vie parlementaire.
39:23 Que de temps perdu,
39:25 que de bataille d'amendements
39:27 sur des virgules, uniquement pour se faire valoir
39:29 et dire "je suis intervenu
39:31 d'une manière décisive sur tel texte,
39:33 sur telle législation, etc."
39:35 Ça, je n'aime pas.
39:37 - Vous livrez également votre analyse géopolitique.
39:39 On vous découvre enthousiaste
39:41 face à ce que vous appelez
39:43 la mue de l'Europe,
39:45 le développement d'une politique industrielle
39:47 depuis le Covid,
39:49 la fin du tabou de la défense européenne
39:51 grâce aux menaces de la Russie d'un côté
39:53 et de Donald Trump de l'autre.
39:55 - Tous les pays atlantistes
39:57 ont réalisé que
39:59 ce que disaient la France et la France
40:01 seules depuis plusieurs décennies,
40:03 à savoir que la protection américaine
40:05 n'était pas forcément assurée
40:07 ad vitam aeternam,
40:09 ils ont pris une douche froide
40:11 et le tabou sur la défense est tombé.
40:13 - Face à cet enthousiasme politique,
40:15 malgré votre perplexité
40:17 sur le fonctionnement de Bruxelles,
40:19 Bernard Guetta,
40:21 on se pose une question.
40:23 L'homme politique que vous êtes devenu,
40:25 est-il prêt à remplir ?
40:27 - Alors, réponse Bernard Guetta.
40:31 Vous ne regrettez pas ce changement de vie ?
40:33 - Ah non, pas du tout !
40:35 - Vous voulez continuer la politique ?
40:37 - Non, mais je ne vais jamais cesser
40:39 de ma vie de faire de la politique,
40:41 non pas en étant un homme politique,
40:43 en étant un journaliste.
40:45 Quand j'étais correspondant en Pologne
40:47 pendant la période de solidarité,
40:49 je faisais évidemment de la politique
40:51 en ce sens que je défendais solidarité.
40:53 - Vous défendiez des idées,
40:55 mais vous observiez le monde.
40:57 Là, vous devez le changer,
40:59 ça fait une différence.
41:01 - Je ne sais pas, parce que pour changer le monde,
41:03 il faut le observer, il faut le comprendre,
41:05 c'est ce à quoi j'essaye de m'astreindre.
41:09 Alors, évidemment que je découvre un nouveau monde,
41:13 parce que j'observais la vie politique,
41:17 et là, je fais partie de la vie politique.
41:19 Je suis passé de l'autre côté du miroir.
41:21 De l'autre côté du miroir,
41:23 il y a des choses que je n'aime pas,
41:25 je vous le dis, je le dis là.
41:27 Il y a des choses que je n'aime pas
41:29 parce qu'elles me semblent vaines,
41:31 elles me semblent superflues.
41:33 - On sent que vous aimez beaucoup
41:35 vous confronter à tous ces pays,
41:37 à toutes ces cultures,
41:39 et même à la culture du compromis.
41:41 La chance, si l'on peut dire que vous avez,
41:43 c'est d'être arrivé dans un contexte
41:45 que l'Europe n'a pas connu depuis presque des décennies.
41:47 - Je ne vous dirai jamais, je crois.
41:49 - Jamais ?
41:51 - Je crois vraiment que l'Union européenne,
41:53 qu'on a appelée hier la communauté,
41:55 l'unité européenne,
41:57 que l'unité européenne vit depuis 2016
41:59 l'élection de Trump,
42:01 très précisément,
42:03 un moment comme elle ne l'avait jamais connu.
42:05 Pourquoi ?
42:07 - Vous parlez du troisième moment de son histoire.
42:09 - Exactement.
42:11 - Les deux premiers, et pourquoi le troisième ?
42:13 - C'est très simple.
42:15 Le premier, c'est le traité de Rome et le marché commun.
42:17 Le deuxième, c'est le traité de Maastricht et la Bonnée-Unie.
42:19 Et là, je crois, je suis convaincu
42:21 que nous sommes entrés dans le troisième moment
42:23 de la construction de cette unité,
42:25 celui de la construction d'une unité politique.
42:27 Est-ce que ça aboutira ?
42:29 Est-ce que ça se cassera la figure ?
42:31 Je ne peux pas en jurer.
42:33 Ma conviction profonde est que ça aboutira.
42:35 Mais je ne peux pas en jurer, naturellement.
42:37 - Bien sûr. D'ailleurs, vous le dites,
42:39 vous êtes encore fédéraliste,
42:41 mais il va falloir y aller plus tranquillement.
42:43 Les Etats-Unis d'Europe...
42:45 - Ça a été ma grande mue au Parlement européen.
42:47 - C'est ça, le changement.
42:49 - Parce que je suis arrivé, badaboom, badaboom,
42:51 il faut la fédération tout de suite, etc.
42:53 Non, maintenant, je ne le pense plus,
42:55 mais bon, d'une part, il y a eu tellement de changements,
42:57 tellement de tabous qui sont tombés en 5-6 ans
42:59 qu'il faut reprendre notre respiration.
43:01 Et deuxièmement, le monde est dans un tel chaos
43:03 que les opinions publiques, européennes,
43:05 en l'occurrence, ont besoin de se raccrocher,
43:07 et je les comprends, moi-même, j'ai ce besoin,
43:09 de se raccrocher à des structures connues,
43:11 en l'occurrence, aux Etats nationaux.
43:13 - Et à leurs dirigeants,
43:15 et pas au Parlement européen,
43:17 institution un peu gênante,
43:19 qui a fait un discours
43:21 et à leurs dirigeants,
43:23 et pas au Parlement européen,
43:25 institution un peu jeune, même si elle est transnationale.
43:27 - Absolument. - C'est ça.
43:29 Alors, vous allez jusqu'à écrire que l'Europe s'est remise
43:31 à parler français, dans la mesure où, ça y est,
43:33 elle n'est plus la seule, la France,
43:35 à vouloir avancer sur la question de la défense commune.
43:37 - Oui. - La défense,
43:39 c'est pas forcément les armées. - Non.
43:41 - C'est-à-dire, la défense,
43:43 c'est comme une forme d'otan européen,
43:45 créer des règles communes qui fait que
43:47 si l'un et l'autre les attaquait...
43:49 - C'est certainement pas, contrairement à ce que craignent
43:51 beaucoup de nos partenaires européens,
43:53 l'abandon de l'Alliance atlantique.
43:55 Non.
43:57 La défense commune européenne, c'est l'ambition
43:59 de créer un pilier européen
44:01 de l'Alliance atlantique. Pourquoi ?
44:03 Pour deux raisons. La première, c'est que
44:05 les contribuables américains, et ça, on le voit
44:07 monter depuis de nombreuses années,
44:09 et c'est absolument clair et toujours plus clair,
44:11 ne voudront pas
44:13 continuer à payer
44:15 pour notre défense,
44:17 cependant que nous ne dépensons pas.
44:19 - Oui, Trump l'avait très clairement dit.
44:21 - Mais les démocrates aussi.
44:23 - En attendant, Bernard Guetta, les pays de l'Est,
44:25 ceux qui sont à la frontière avec l'Ukraine,
44:27 c'est vers les Etats-Unis qu'ils regardent,
44:29 et vers l'Otan. Vous dites "formidable Europe
44:31 de la défense", mais on n'y est pas du tout.
44:33 - On n'y est pas, bien entendu qu'on n'y est pas,
44:35 puisque nous avons perdu
44:37 40 ans. Nous avons été,
44:39 pendant 40 ans, les seuls,
44:41 nous, les Français, à défendre l'idée
44:43 d'une défense européenne. Nos partenaires n'en voulaient pas,
44:45 aucun. Les Belges, de temps en temps,
44:47 et encore. Ca dépendait
44:49 du gouvernement en place à ce moment-là.
44:51 Mais bon, maintenant, il faut rattraper
44:53 le temps perdu, mais il faut le rattraper.
44:55 On le voit bien. Pourquoi ?
44:57 Si demain, M. Trump était réélu,
44:59 vous savez, il y a 15 jours,
45:01 même pas 15 jours, il donnait une interview
45:03 à CNN. La journaliste de CNN
45:05 lui dit "Mais est-ce que vous souhaitez
45:07 la victoire de l'Ukraine ?"
45:09 Et il se garde de répondre.
45:11 Et il se garde de répondre, ça veut dire qu'il ne souhaite
45:13 pas la victoire de l'Ukraine.
45:15 Ce qu'il souhaite, c'est un compromis
45:17 entre les Etats-Unis,
45:19 qu'il incarnerait, et la Russie,
45:21 toujours incarnée par M. Poutine,
45:23 et un compromis sur le dos des Ukrainiens,
45:25 naturellement, mais aussi de toute l'Union Européenne.
45:27 - Alors, vous dites, au fond,
45:29 "Merci, Trump, merci,
45:31 "Poutine, les refondateurs",
45:33 dites-vous, de l'Europe,
45:35 à qui il faudrait... - Véroniquement, bien sûr.
45:37 - A qui il faudrait ériger des statues.
45:39 Merci, le virus, aussi, la fameuse Covid.
45:41 - Mais en même temps, on a quand même découvert...
45:43 C'est vrai qu'on a acheté en commun des vaccins
45:45 et emprunté, comme jamais,
45:47 tous ensemble. - Et que maintenant,
45:49 nous achetons en commun des munitions.
45:51 - C'est vrai. Mais les vulnérabilités,
45:53 vous vous souvenez de la comptabilité morbide
45:55 du chacun pour soi pendant le Covid ?
45:57 Ça a été ça, au début, aussi, sur les masques,
45:59 sur les tests. - Ça a été ça pendant
46:01 très peu de temps, ça a été ça pendant
46:03 un moment de panique. - C'est derrière nous.
46:05 - Complètement. Mais surtout, nous avons surmonté
46:07 cette panique et ce désarroi très, très vite,
46:09 en décidant d'acheter
46:11 les vaccins en commun.
46:13 Alors, vous savez, dans les traités,
46:15 rien ne le permettait.
46:17 Rien ne le permettait. Et maintenant,
46:19 quand nous achetons des munitions en commun
46:21 pour l'Ukraine et pour regarder
46:23 nos stocks d'armement, parce que nos stocks
46:25 d'armement commencent à baisser,
46:27 eh bien, rien ne le permet
46:29 dans les traités. Et simplement,
46:31 nous le faisons
46:33 "out of necessity", en bon français.
46:35 - Voilà, l'état bouton. - Parce que la nécessité
46:37 nous oblige. - Mais loi.
46:39 - Mais fait loi. - Alors, la diplomatie,
46:41 parce que la politique étrangère en commun,
46:43 là, c'est quand même une autre paire de manches.
46:45 Je sais que vous avez été assez critique
46:47 sur les propos d'Emmanuel Macron sur la Russie,
46:49 ne pas l'humilier,
46:51 lui faire des garanties de sécurité.
46:53 Ça a ulcéré
46:55 à la fois Volodymyr Zelensky,
46:57 mais aussi les pays européens.
46:59 On peut parler comme il l'a fait,
47:01 alors où l'Ukraine
47:03 joue sa vie, sa survie. - Je vais vous surprendre,
47:05 oui. Pourquoi ?
47:07 Parce que, sur la politique étrangère,
47:09 souvenons-nous
47:11 de l'entrée en guerre des Etats-Unis en Irak.
47:13 À ce moment-là, l'Union européenne
47:15 est vraiment divisée, mais sérieusement
47:17 divisée entre deux blocs.
47:19 Le bloc qui critique
47:21 cette volonté des Etats-Unis, à bien juste titre,
47:23 on l'a vu ensuite,
47:25 et le bloc qui soutient
47:27 cette volonté
47:29 des Etats-Unis d'entrer
47:31 en Irak, à tort,
47:33 comme on l'a vu ensuite.
47:35 Aujourd'hui, les 27
47:37 sont unanimes
47:39 pour critiquer,
47:41 plus que critiquer, pour s'opposer
47:43 et contrer
47:45 l'agression russe contre l'Ukraine.
47:47 Or, cette question
47:49 de l'agression russe
47:51 est aujourd'hui LA question
47:53 principale de la politique internationale,
47:55 de toutes les relations
47:57 internationales. Eh bien,
47:59 sur cette question,
48:01 l'unité européenne
48:03 ne fait pas discussion.
48:05 -On entend votre enthousiasme.
48:07 Lisez "la nation européenne",
48:09 parce que ce mot, il faut peut-être l'expliquer,
48:11 la nation, vraiment, d'un mot.
48:13 -Je dis "la nation" en fusion.
48:15 -Voilà. -Exactement
48:17 comme la nation française
48:19 était en fusion dans les tranchées
48:21 de la guerre de 14. Souvenons-nous
48:23 que jusqu'à la guerre de 14,
48:25 tous les Français
48:27 ne parlaient pas français.
48:29 Le français est devenu réellement
48:31 la langue nationale dans les tranchées.
48:33 -Merci beaucoup. C'est à lire
48:35 chez Grasseg, il y a un très beau texte
48:37 sur la Russie que je vous invite
48:39 à découvrir. "Le rêve russe"
48:41 de Bernard Guetta
48:43 qui fait son chemin, d'ailleurs.
48:45 -Oui, absolument. -Allez,
48:47 vous découvrirez ça en lisant
48:49 ce livre. C'est l'heure d'accueillir
48:51 nos affranchis pour leur parti pris. On vous fait réagir.
48:53 On les accueille tout de suite.
48:55 Fanny Guinochet,
48:57 de France Info, Thomas Lestavelle
48:59 de L'Express, du Figaro,
49:01 entre autres. Deux chroniques,
49:03 deux cartes blanches, très écho ce soir,
49:05 préparelé, parce qu'on commence par "Le Bourbon Express",
49:07 l'histoire du jour.
49:09 A l'Assemblée, nous est racontée par Elsa Montagava.
49:11 Bonsoir, Elsa. -Bonsoir.
49:13 Je vous raconte ce soir l'histoire d'un rapport,
49:15 147 pages, le rapport annuel du déontologue
49:17 de l'Assemblée nationale.
49:19 C'est Christophe Palaise,
49:21 c'est plus exactement l'ancien déontologue
49:23 de l'Assemblée, il a été remplacé en février,
49:25 c'est bien lui qui signe le rapport annuel 2022.
49:27 Alors, le déontologue de l'Assemblée,
49:29 il a plusieurs missions, il doit, entre autres,
49:31 contrôler les frais de mandat.
49:33 C'est une enveloppe dont disposent les députés.
49:35 Avant, on appelait ça l'indemnité représentative
49:37 de frais de mandat, IRFM, et il y avait
49:39 beaucoup d'abus. C'est beaucoup plus contrôlé maintenant,
49:41 ça s'appelle l'AFM, l'avance
49:43 de frais de mandat, c'est 5 561 euros
49:45 par mois.
49:47 Les postes de dépense les plus importants,
49:49 c'est la permanence, la communication ou encore
49:51 les déplacements. Le déontologue,
49:53 il exerce des contrôles annuels ou des contrôles
49:55 aléatoires, mais chaque député est contrôlé
49:57 au moins une fois lors de son mandat.
49:59 Et ce qu'il ressort du rapport, c'est que l'écrasante
50:01 majorité des frais sont
50:03 bien utilisés. En 2021,
50:05 regardez, seulement 1,84 %
50:07 des dépenses
50:09 sont rejetées. Chaque député,
50:11 à la fin de son mandat, il est censé rendre à l'Assemblée
50:13 l'argent qu'il n'a pas utilisé. C'est quand même
50:15 la bagatelle de 10 598 849 euros.
50:19 Ça peut paraître beaucoup, mais en fait,
50:21 ça revient à 2-3 mois non utilisés
50:23 par député. -Il y a une nouvelle mission
50:25 aux déontologues de l'Assemblée, c'est la lutte
50:27 contre le harcèlement sexuel et sexiste.
50:29 -Exactement. Depuis 2020, il existe
50:31 une cellule anti-harcèlement. Elle est ouverte
50:33 aux députés, aux collaborateurs
50:35 ainsi qu'aux personnels. Évidemment, cette cellule,
50:37 elle est indépendante, elle garantit la confidentialité.
50:39 Entre le 1er janvier 2022
50:41 et le 30 juin 2022,
50:43 18 personnes ont contacté cette cellule,
50:45 15 collaborateurs, 2 personnels
50:47 et pour la première fois, un ou une député,
50:49 puisque tout est anonyme dans ce rapport.
50:51 Et puis cette cellule, elle prend en référents
50:53 un déontologue qui peut saisir la justice.
50:55 -Beaucoup plus dure dans cette mission,
50:57 les conflits d'intérêts qu'ils traquent également.
50:59 -Exactement, avec des exemples concrets.
51:01 Je suis députée sapeur-pompier,
51:03 est-ce que je peux participer au groupe d'études
51:05 sur les sapeurs-pompiers ? -Oui, là, c'est bon.
51:07 En revanche, si j'ai gardé un lien avec une société privée,
51:09 j'évite de déposer des amendements sur le sujet.
51:11 Le déontologue s'étonne. Par exemple,
51:13 beaucoup de députés avocats, pendant le budget,
51:15 proposent d'alléger la fiscalité des avocats.
51:17 Évidemment, il y a encore un très fort lobby
51:19 de l'industrie du tabac,
51:21 avec beaucoup d'amendements, toujours dans le budget,
51:23 non sourcés, pour baisser les taxes.
51:25 Et puis, petite anecdote,
51:27 vous le savez peut-être, mais les députés doivent
51:29 déclarer les dons, les invitations,
51:31 les voyages supérieurs à 150 euros.
51:33 Il y a deux députés, on va enquêter pour savoir lesquels,
51:35 eux, ils ont pris le conseil au pied de la lettre
51:37 de la transparence, ils déclarent
51:39 tout, même un livre, à 2 ou 3 euros.
51:41 -Ah ben voilà, on avance.
51:43 Je crois qu'en Europe, voilà,
51:45 il y a des progrès à faire.
51:47 -Il y a des progrès à faire, avec quelques scandales
51:49 qui a défrayé la chronique.
51:51 Fanny, on enchaîne avec vous, ça y est,
51:53 le quoi qu'il en coûte, on nous le dit,
51:55 on nous le répète, cette fois-ci, c'est fini,
51:57 le gouvernement va geler 1% supplémentaire
51:59 des crédits pour le budget 2023,
52:01 annonce de Bruno Le Maire et d'Elisabeth Borne.
52:03 Alors, on serre la vis,
52:05 mais pour quel budget, précisément ?
52:07 -Pour tous les budgets, tous les crédits,
52:09 sauf les salaires des fonctionnaires,
52:11 mais sinon, ça veut dire un petit coup de rabot,
52:13 ce 1% de gel supplémentaire,
52:17 ça représente 2 milliards d'euros
52:19 d'économie qu'il faut faire en plus.
52:21 En fait, ça correspond à une petite réserve,
52:23 une précaution que le gouvernement fait toujours
52:27 quand il prépare son budget pour l'année suivante.
52:29 Cette réserve de précaution,
52:31 d'habitude, c'est 5% de gel des crédits,
52:33 là, on rajoute un petit pourcent supplémentaire.
52:36 En cas d'imprévu, alors, le gouvernement dit,
52:39 c'est pour tenir la trajectoire budgétaire,
52:42 c'est effectivement le signe réaffirmé
52:44 de la fin du quoi qu'il en coûte.
52:46 -Il augmente sa réserve de précaution, c'est pourquoi ?
52:48 Il y a une grosse panique à bord ?
52:50 -Il ne peut pas le dire, parce que l'économie,
52:52 c'est de la confiance, mais effectivement,
52:54 il dit, l'économie, c'est aussi beaucoup de géopolitique,
52:58 on l'a vu, cette année, on a eu plus de dépenses,
53:00 l'inflation a grimpé à cause de la guerre en Ukraine,
53:02 on ne sait jamais ce qui peut se passer.
53:04 Mais il y a beaucoup de fébrilité du côté du gouvernement,
53:07 parce que vous vous souvenez, il y a quelques jours,
53:09 l'agence de notation Fitch a dégradé la note de la France,
53:12 ça a été un coup de semence, même si le ministre de l'économie
53:15 a dit que l'économie française était résiliente, résistante.
53:19 Et là, surtout, se profile, dans quelques jours,
53:21 une attente, celle de la note d'une autre agence de notation,
53:26 mais qui compte, celle de Standard & Poor's,
53:29 et effectivement, si on a une deuxième fois
53:31 une dégradation de la note à quelques jours d'intervalle,
53:35 ça a un mauvais effet, surtout que ça veut dire
53:37 que ça va effrayer les investisseurs.
53:39 Or, aujourd'hui, la France vit largement à crédit,
53:42 on emprunte plus de 110...
53:44 Notre dette, c'est plus de 110 % des PIB.
53:46 - Bon, il y a les taux d'intérêt aussi qui augmentent,
53:49 et ça, ça renchérit la dette.
53:51 - Et ça, c'est un vrai sujet.
53:53 Et ça renchérit la dette, pour vous donner un chiffre,
53:55 aujourd'hui, la charge de la dette,
53:57 c'est-à-dire juste les intérêts de cette dette,
53:59 c'est 41 milliards d'euros.
54:02 C'est un des budgets qui ne cesse de gonfler,
54:05 puisqu'il y a encore pas si longtemps,
54:07 on empruntait de l'argent à pas cher.
54:09 Les taux d'intérêt étaient quasiment nuls, voire négatifs.
54:12 Et surtout, il y a une très grosse inquiétude,
54:14 des nuages, là, qui se profilent,
54:16 parce que dans quatre ans,
54:18 selon les estimations du gouvernement,
54:20 cette charge de la dette, elle va passer de 41 à 71 milliards d'euros,
54:24 soit le premier budget de l'Etat.
54:27 L'éducation nationale sera en dessous.
54:29 Donc, vous comprenez que dans ce contexte,
54:32 on a un peu besoin, sans trop le dire,
54:34 d'envoyer un petit signal... -Bien sûr.
54:36 -A Bruxelles, justement. -Aux agences de notation,
54:38 quelques jours avant leur verdict,
54:40 histoire de leur montrer qu'on est responsable,
54:42 qu'on serre la vis, qu'on ne dépense pas trop
54:44 et qu'on augmente un peu notre réserve de précaution.
54:47 -Un mot là-dessus. Il est temps de serrer la vis,
54:49 ou au contraire, les investissements
54:51 voient tellement important qu'il faut changer les règles.
54:54 -Ecoutez, on est dans une situation
54:56 tout à fait contradictoire.
54:58 Il est évidemment temps de serrer la vis,
55:00 parce que les taux d'intérêt augmentent.
55:03 On va passer à 71 milliards, mais je crains à plus...
55:07 -Une estimation. -Exactement.
55:09 -Un intérêt de la dette uniquement.
55:11 -Je crains à plus très vite, uniquement pour les intérêts de la dette.
55:14 D'un autre côté, nous avons besoin, aujourd'hui,
55:17 d'investir dans les filières d'avenir,
55:20 dans la réindustrialisation
55:22 et certainement dans la lutte contre le changement climatique.
55:25 -Donc, les 3 % ont fini ?
55:27 -Les 3 %, de toute manière, ils sont oubliés.
55:30 Bien entendu. Et ça, heureusement,
55:33 parce que les 3 % étaient une mesure tout à fait imbécile
55:36 dans son rigorisme et son... Comment dire ?
55:39 Son oubli des réalités.
55:41 -Il va falloir aller au-delà, sortir les investissements.
55:44 -En revanche, évidemment qu'il va falloir réfléchir
55:47 à ce pourquoi nous dépensons.
55:50 -Allez, Thomas. Vous êtes venu avec une orange.
55:53 Pourquoi ?
55:54 -Miriam, cet objet précieux. Orange is the new blackjack.
55:57 Le cours du jus d'orange est en train de flamber.
56:00 Il a pris plus de 30 % cette année.
56:02 C'est assez étonnant. C'est devenu la matière première
56:05 fétiche des traders devant le pétrole.
56:07 Comme l'explique "Le quotidien de Les Echos",
56:09 une vingtaine de sociétés financières ont parié sur ce fruit
56:12 avec des profits juteux à la clé.
56:14 -Pourquoi ? Un talent ballement ?
56:16 -Les coupables s'appellent Michael et Yann.
56:18 Je ne vous parle pas d'un couple de retraités de Floride,
56:21 mais de deux dragons qui ont dévasté la Floride fin 2022.
56:24 Si vous y ajoutez la maladie du dragon jaune,
56:27 une bactérie qui rend les arbres malades,
56:29 vous passez tout ça au presse-agrumes
56:31 et vous obtenez la pire récolte américaine depuis 1937.
56:34 -Ca, ça fait forcément les petits profits des spéculateurs.
56:37 -Exactement. Le trading de jus d'orange,
56:39 c'est un vrai business, c'est très sophistiqué,
56:41 c'est complètement amoral. Vous savez peut-être
56:43 que les traders utilisent des images satellites
56:46 pour observer les parkings des hypermarchés
56:48 et pour en déduire des niveaux de consommation.
56:50 -Oui, je connais. -Les traders utilisent
56:52 aussi les satellites pour autre chose,
56:54 ils font appel à des météorologues pour anticiper
56:56 les épisodes de sécheresse, les catastrophes naturelles,
56:59 les inondations, les ouragans, parce que ces événements
57:01 ruinent les récoltes, rendent l'orange plus rare
57:03 et donc plus cher. Je vous invite à vous balader
57:05 sur les sites de traders sur Internet,
57:07 c'est assez flippant. Ils vous encouragent
57:09 à parier sur le réchauffement planétaire,
57:11 je cite les mots, en achetant des contrats à terme,
57:13 des options, des produits dérivés
57:15 et autres joujoux de boursicoteurs.
57:17 La planète brûle et c'est le moment
57:19 de faire les poches. -Gros cynisme
57:21 des traders, des marchés financiers.
57:23 Les conséquences pour nous, les consommateurs,
57:25 c'est les prix qui vont s'envoler ? -Effectivement.
57:27 Il y a le jus d'orange, mais il y a aussi
57:29 le sucre qui a pris 29 % cette année,
57:31 le cacao 18 %, le café 15 %.
57:33 Les marques vont tôt ou tard devoir
57:35 prendre en compte ces hausses et répercuter
57:37 sur les prix de vente. C'est un peu Haro
57:39 sur le petit dej, et moi, je ne sais pas pour vous,
57:41 mais je me suis mis au jeûne intermittent.
57:43 -J'en connais un autre. Mon rédacteur en chef
57:45 est comme vous.
57:47 -Il marche, apparemment.
57:49 Les députés européens, l'Europe,
57:51 elle peut rien faire là-dessus ? -Non.
57:53 -Rien à faire ? -Non. En revanche,
57:55 nous pouvons tous faire quelque chose.
57:57 Ce que vous faites, c'est-à-dire
57:59 consommer moins de sucre, moins de jus d'orange
58:01 et moins de café. -Voilà.
58:03 Jeûne intermittent pour tout le monde.
58:05 J'en ai bien besoin, moi. Merci.
58:07 Merci, les Affranchis, et merci beaucoup,
58:09 Bernadette, d'avoir passé l'heure avec nous.
58:11 -Vous pouvez tourner le bouquin. -La Nation européenne.
58:13 Regardez, il est là, il est beau,
58:15 regardez, regardez,
58:17 avec Bernard Guetta en couverture,
58:19 comment Trump, Poutine et le Covid
58:21 ont transformé l'Union européenne,
58:23 c'est-à-dire chez Grasse. Très belle soirée documentaire
58:25 avec Jean-Pierre Grassien, bien sûr.
58:27 À demain.
58:29 ...
58:41 [Générique de fin]

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