• il y a 2 ans
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00:00 Voilà, donc nous allons aller très très vite à la conférence de Valérie Speth.
00:05 Vous voyez ce qu'elle est, professeure des universités,
00:09 et je pense que pour gagner du temps, nous n'allons pas aller plus avant pour la présentation,
00:14 si tu en es d'accord Valérie ?
00:16 Bien sûr, bien sûr, merci.
00:18 Merci d'abord vraiment à Corinne et à Ariane de m'avoir conviée à participer à ce webinaire,
00:25 et merci pour tout ce que je viens d'entendre, franchement.
00:28 D'abord c'est très courageux, c'est émouvant, très émouvant,
00:33 et ça permet de voir effectivement les deux faces de la médaille,
00:40 ce qu'on a pu entendre, et moi je vais faire référence à tout ça.
00:43 Je voudrais rapidement dire quand même que,
00:46 d'abord je voudrais rendre ici un hommage à toutes ces familles ukrainiennes
00:50 qui sont dans la douleur, dans le deuil,
00:55 et il y a aussi tous ces enfants dont on voit qu'ils sont extrêmement courageux,
00:59 et on ne peut qu'admirer la manière dont ils essayent de s'inscrire dans d'autres projets.
01:07 Le titre de ma conférence, en fait je l'ai modifié, vous voyez j'ai mis trois petits points,
01:11 et pas un point d'interrogation.
01:14 En même temps, vous voyez, j'ai indiqué ici les voix, voix, le chemin et voix aussi,
01:18 parce que pour se faire entendre,
01:20 et je pense que ça va nous permettre de discuter autour de cette question des plurilinguistes,
01:27 je les ai mis au pluriel, parce que j'ai beaucoup apprécié la manière dont tout a été mis,
01:32 la question des langues a été proposée ici déjà à notre réflexion.
01:37 Et je voudrais commencer par, alors moi je suis didacticienne linguiste,
01:41 historienne de la politique linguistique, de l'enseignement,
01:45 de la diffusion de l'enseignement du français dans des situations de français langue seconde,
01:50 c'est ma spécialité.
01:52 J'interviens ici, vraiment c'est un éclairage,
01:55 je ne suis pas confrontée directement à ces questions d'accueil des élèves ukrainiens et des élèves ukrainiennes,
02:03 mais l'éclairage que je peux apporter ici, c'est peut-être l'éclairage de quelqu'un
02:08 qui travaille depuis très longtemps sur des questions de plurilinguisme.
02:11 Alors déjà, effectivement, je fais référence, Madame la réélectrice l'a souligné,
02:15 mais dans le rapport de la Cour des comptes qui vient de paraître, en 2001, il y a quelques jours,
02:20 il est bien notifié qu'effectivement, il y a deux académies qui en France ont accueilli le plus proportionnellement
02:26 d'élèves ukrainiens, c'est Nice et Versailles.
02:29 Et je vous renvoie d'ailleurs au chapitre 3 sur la question des réfugiés ukrainiens,
02:33 qui est très intéressante, mais l'ensemble du rapport est vraiment passionnant.
02:36 Donc on apprend beaucoup.
02:37 Je m'appuie aussi sur l'idée que vient d'ailleurs de développer la psychologue que nous ontent,
02:44 et que je remercie beaucoup franchement, parce que là, l'apport de son analyse est essentiel selon moi.
02:51 Et je fais référence aussi à la notion de l'enseignement et apprentissage des langues en milieu sensible,
02:59 que nous avons développé avec une de mes doctorantes, qui est maintenant docteure à Malkalifa.
03:04 Et on avait organisé une journée d'études avec elle, Amal et moi, en 2019, sur l'enseignement en milieu sensible.
03:11 Elle a fait toute sa thèse sur le camp de réfugiés des Syriens Azaatari en Angerdonie.
03:18 C'est un travail remarquable.
03:20 Elle a eu le prix de thèse d'ailleurs sur cette question-là.
03:22 Son livre va paraître à la fin de l'année.
03:24 Je m'appuie donc sur...
03:26 C'est elle qui a travaillé sur cette relation entre résilience et enseignement en milieu sensible.
03:33 En sachant que milieu sensible veut dire quoi ?
03:36 Milieu de guerre, d'emprisonnement, etc.
03:38 Alors, on me dira, ici, il n'y a pas d'emprisonnement.
03:40 Mais il y a évidemment ce que nous venons de voir, ce que nous venons d'entendre.
03:44 Donc, là, toute la dernière intervenante nous indique quand même qu'il y a de l'enfermement.
03:51 Oui, il y a de l'enfermement psychique.
03:53 Et en tout cas, il y a un milieu de guerre initial, qui est extrêmement traumatisant.
03:57 Donc, pour moi, cette réflexion sur l'enseignement des langues en milieu sensible,
04:03 elle est extrêmement pertinente.
04:04 Et donc, je vais m'appuyer beaucoup sur ce qu'a fait Amal Khalifa dans ce domaine.
04:10 Ce que nous venons de voir, effectivement, tout a été dit,
04:14 c'est que les élèves ukrainiens, adolescents et enfants, sont réfugiés.
04:18 C'est très important.
04:20 Ils sont réfugiés, selon d'ailleurs les accords de Genève.
04:24 Ils ne sont pas migrants.
04:25 Et je pense que ça, c'est très important pour nous d'un point de vue didactique, j'y reviendrai.
04:29 Traumatisés, séparés, mais bien scolarisés.
04:33 Et surtout, très important pour moi, ça a été évoqué plusieurs fois,
04:37 ils ont déjà un répertoire plurilingue.
04:40 Ukrainiens, russes, anglais.
04:42 Je pense que ça, c'est fondamental pour notre réflexion.
04:45 Quand je parle de répertoire, là, c'est la linguiste qui parle,
04:48 c'est-à-dire ce qu'on appelle notre répertoire langagier, linguistique,
04:52 c'est-à-dire la manière dont nous construisons nos langues,
04:55 les langues d'ailleurs, peu importe qu'on les parle ou pas,
04:58 parce que dans notre répertoire, il y a beaucoup de langues,
05:00 les langues qu'on aime, les langues qu'on parle, les langues qu'on a apprises,
05:02 les langues qu'on aimerait apprendre, etc.
05:04 Il se trouve que dans le répertoire des Ukrainiens et des Ukrainiennes, des élèves,
05:08 il y a déjà ces langues-là.
05:10 Et je pense que la position du russe a aussi à voir.
05:13 D'ailleurs, je remercie Julia qui a bien indiqué que,
05:16 elle, par exemple, elle avait appris les maths en russe.
05:19 Donc, elle apprend de ses élèves ukrainiens les maths en ukrainien.
05:24 Je crois que là, il y a déjà des choses,
05:26 il y a quelque chose à comprendre aussi sur la relation particulière,
05:30 la construction particulière de ces êtres plurilingues.
05:34 J'insiste sur le fait qu'effectivement, on a bien affaire à des réfugiés
05:38 et pas des migrants, ça change tout,
05:40 sur la question de l'enseignement, d'un point de vue didactique,
05:43 mais aussi, pourquoi ?
05:44 Parce qu'on a affaire finalement, là, à deux situations.
05:47 D'ailleurs, ça a été évoqué dans les questions, déjà,
05:49 sur la question du français langue étrangère ou du français langue seconde.
05:52 Bon, là, pour moi, je n'ai pas le temps de développer,
05:54 mais évidemment, on voit très clairement que la manière,
05:59 et ce sont deux didactiques différentes,
06:01 deux manières d'enseigner et deux manières d'apprendre aussi différentes.
06:05 Il me semble que là, la question qui a été posée à chaque fois
06:08 concerne l'enseignement du FLE.
06:10 Moi, je pense effectivement que là, il y a quelque chose à penser
06:13 parce que, de toute façon, il faut entrer dans le FLS
06:18 par le français langue étrangère, ça, c'est certain.
06:20 Pourquoi ? Parce que le français langue étrangère offre une ouverture
06:24 sur la langue qui est beaucoup plus forte que celle du français langue seconde
06:27 et qui est moins située, moins dirigée sur la scolarisation.
06:32 Donc, il me semble que ça répond, même si on a l'impression
06:35 que dans un premier temps, il faudrait tout de suite aider les élèves
06:38 à être scolarisés.
06:39 Il me semble que l'intervention de madame Arkhipova nous indique très bien
06:45 qu'il faut être très prudent sur cette finalité,
06:49 même si nous, nous pensons que la scolarisation, c'est l'objectif.
06:53 Moi, il me semble que l'objectif est un peu différent.
06:56 Alors, l'autre principe aussi, je m'appuie sur l'idée,
07:00 je reprends le travail qui a été fait par Boris Cyrulnik dès 2003,
07:04 qui est un psychologue, un grand psychologue,
07:06 qui a importé la notion de résilience dans notre domaine franco-français.
07:10 Et moi, je reprends l'idée que tuteurs, il a inventé ce terme,
07:14 je trouve très beau, de tuteurs de résilience.
07:17 Et pour moi, le plurilinguisme, c'est vraiment un tuteur de résilience.
07:20 C'est dans ce sens-là que je vais aller.
07:22 Alors, pourquoi ?
07:23 Parce qu'en fait, et nous l'avons vu, les langues, ce n'est pas seulement du savoir,
07:27 ce n'est pas seulement de la grammaire, ce sont des expériences de vie
07:31 et ce sont surtout des expériences de construction de soi.
07:34 Là, je m'appuie aussi sur toute la démarche,
07:37 tout le travail qui a été fait par d'autres psychologues
07:40 qui ont repris la notion en termes de qu'est-ce que c'est que la résilience,
07:47 sinon donner du sens.
07:48 Quand on a tout perdu, il faut retrouver du sens.
07:51 Et nous l'avons entendu, quel sens donner ?
07:53 Et vous voyez, quand on dit que les enfants se trouvent dans une impasse,
07:56 et oui, une impasse, ça veut dire pas de sens.
07:59 Au sens propre, il n'y a pas de sens.
08:02 Au sens directionnel, il n'y a pas non plus de sens au niveau général.
08:05 Il n'y a pas de sens de la vie, il n'y a pas de direction,
08:07 mais il n'y a aucun sens non plus.
08:09 Là, il y a la polysémie du mot, je pense, qu'il faut entendre absolument.
08:13 Alors, qu'est-ce que c'est que le plurilinguisme, justement, dans cette…
08:17 après, on va arriver à des questions linguistiques,
08:19 mais qu'est-ce qu'on peut dire déjà sur le plurilinguisme ?
08:23 D'abord, il est question d'ancrage et pas d'enracinement.
08:26 Et ça, je pense que c'est important.
08:28 Si on parle du plurilinguisme en termes d'enracinement,
08:31 on se trouve tout de suite immédiatement confrontés
08:34 à ce qui vient d'être évoqué par Anna,
08:37 si vous permettez que je vous l'appelle par votre prénom,
08:39 c'est-à-dire le futur qui se ferme avec l'enracinement.
08:43 Parce que, au contraire, l'ancrage permet de donner du sens situé,
08:50 conjoncturel, mais peut-être temporaire,
08:52 mais nous avons entendu à chaque fois,
08:54 attention, la guerre un jour finira, et je l'espère.
08:57 La guerre finira.
08:59 Donc, la transition, il est possible qu'il y ait des gens
09:02 qui souhaitent rester en France ou aller ailleurs,
09:05 ou retourner en Ukraine, ce qu'on souhaite aussi pour eux.
09:09 C'était tout le travail d'Amal dans le camp de réfugiés de Zaatari,
09:14 des gens qui sont nés dans le camp de réfugiés
09:16 qui a été construit en Jordanie il y a plus de 20 ans,
09:21 et qui a été, avec la guerre en Syrie,
09:25 complètement, je veux dire, est devenue une vraie ville.
09:28 Et il y a des gens, quand même, qui continuent à espérer
09:30 qu'ils vont retourner en Syrie,
09:31 et puis il y a d'autres qui continuent et qui pensent
09:33 qu'ils ne vont pas aller en Syrie.
09:34 Et on voit qu'à chaque fois, cette question de l'ancrage
09:37 et non pas de l'enracinement est fondamentale.
09:40 Le futur doit rester ouvert.
09:42 Ce sont des questions éthiques qu'on a abordées ici
09:44 qui sont fondamentales pour, justement, éviter
09:48 qu'on arrive à des blocages qui vont se manifester
09:52 par les langues.
09:53 Le dernier point, pour moi, d'introduction,
09:55 qui me paraît important, c'est qu'on s'adresse plus
09:57 à la personne qu'à l'élève.
09:59 Oui, et là, je fais référence à quelque chose de très...
10:02 Alors, c'est bien sûr archi-connu, et vous le savez très bien,
10:04 je m'adresse ici, bien sûr, à tous nos collègues,
10:06 tous les collègues travaillent sur les personnes.
10:08 On n'est pas dans une relation avec des élèves seulement.
10:11 Mais quand même, on doit se souvenir de la proposition
10:14 d'Alain Damasio, un des psycholinguistes,
10:18 neurosciences, qui quand même fait une proposition
10:21 dès 1995, qui est absolument avérée actuellement.
10:25 Deux cerveaux ne sont jamais identiques,
10:27 et chaque cerveau individuel est continuellement modifié
10:30 par son expérience.
10:31 Donc, ça veut dire que même s'il y a de la transversalité
10:34 dans ces expériences, il y a quand même de la singularité.
10:38 Et ça, je pense que c'est fondamental aussi
10:41 pour reconnaître ce qui se passe avec les enfants.
10:45 Alors, un petit rappel pour de formation rapide
10:50 sur le plurilinguisme, et qu'est-ce que c'est que les langues ?
10:52 Les langues, c'est nous.
10:53 Qu'est-ce que ça veut dire ?
10:54 Quand je dis ça, ça veut dire quoi ?
10:56 Ça veut dire que les langues, ce ne sont pas des outils.
10:59 On a souvent la manière de proposer le travail linguistique
11:03 comme des outils.
11:04 On prend un outil, on en prend un autre, etc.
11:06 Mais en fait, ce n'est pas du tout comme ça que ça fonctionne
11:08 dans notre répertoire cognitif.
11:10 Nous sommes construits dans et par le langage,
11:13 quel qu'il soit.
11:14 Et ça veut dire que cette construction,
11:17 qu'on le veuille ou non, qu'on soit d'accord ou pas,
11:20 ça ne change rien.
11:21 Maintenant, on a des études suffisamment avancées
11:23 pour comprendre comment ça fonctionne.
11:25 Ça veut dire qu'évidemment, soit on n'en tient pas compte,
11:28 soit on en tient compte.
11:30 Il vaut mieux en tenir compte pour savoir comment ça fonctionne.
11:32 Et on voit bien que ça s'articule au moins,
11:35 je dis au moins parce qu'il faut faire vite,
11:37 au moins à deux échelles.
11:38 Et nous l'avons très bien vu dans tous les témoignages
11:42 qui ont précédé.
11:43 Il y a deux échelles toujours.
11:45 L'échelle collective, fondamentale,
11:47 pour comprendre la question des langues et le partage des…
11:50 notamment quand on est dans le plurilinguiste,
11:53 et l'échelle personnelle.
11:54 Et on voit d'ailleurs que souvent,
11:55 il y a des tensions entre les deux.
11:57 Et ce sont ces tensions qui vont provoquer beaucoup de…
12:00 je dirais, qui vont avoir des effets
12:02 sur la manière dont on va se servir de nos langues.
12:05 Alors, je le rappelle, on le sait tous,
12:07 mais nous sommes des êtres communicants en réseau.
12:10 Ça veut dire quoi ?
12:11 Et là, on a toutes les études,
12:13 même les paléoanthropologues,
12:15 maintenant, sont sur ces questions-là.
12:18 Et donc, ça veut dire qu'on travaille déjà
12:21 dans l'idée que notre cerveau humain,
12:23 nous sommes des humains parce que nous travaillons toujours…
12:26 parce que nous sommes en réseau.
12:27 C'est-à-dire qu'à la fois, nous avons un cerveau de langage
12:31 construit sur l'idée de la parole,
12:35 mais aussi, de toute façon,
12:37 donc c'est une approche cognitiviste,
12:39 on a ce fameux réseau sillon-langagier
12:42 qui a été bien démontré dès la fin du XXe siècle,
12:45 mais nous sommes aussi en réseau culturel.
12:48 Ça veut dire que, d'un point de vue linguistique,
12:51 ça a deux incidences très fortes.
12:52 D'abord, la parole, elle est personnelle, bien sûr.
12:55 Je prends la parole dans une langue
12:56 et vraiment, j'admire la manière dont nous avons pu entendre
13:01 des jeunes prendre la parole comme ça en public,
13:04 devant d'autres, dans une langue qui n'est pas la leur.
13:07 C'est admirable.
13:08 Et ce que nous voyons très bien,
13:09 c'est qu'effectivement, cette prise de parole personnelle,
13:11 c'est toujours un risque,
13:12 mais en même temps, c'est une affirmation de soi
13:15 qui est très forte
13:16 et je reprends vraiment la proposition d'Anna
13:20 sur l'idée que, oui, prendre la parole,
13:22 c'est affirmer ce qu'on a d'une certaine manière
13:25 et outre quelle que soit la langue dans laquelle on parle.
13:29 Mais quand même, ce qu'on peut voir,
13:31 c'est que cette parole, elle s'organise en discours,
13:33 qui sont des discours sociaux.
13:35 On va voir que les discours sociaux,
13:36 évidemment, ils ont un effet extrêmement fort
13:38 dans nos représentations, surtout à l'école.
13:41 Et ça peut s'exprimer dans une ou plusieurs langues.
13:43 Donc, vous voyez là, cette configuration très riche,
13:47 très complexe, très riche, chaque fois personnelle,
13:50 mais qui fait que nous avons des répertoires langagés
13:53 qui sont très plastiques, et nous venons de le voir,
13:55 très plastiques, malléables, pluriels,
13:58 et surtout métissés, mélangés,
14:01 et spécialisés, les deux ensemble.
14:04 Nous l'avons très bien vu avec la manière dont,
14:07 par exemple, Yolira, professeure de français
14:10 à l'Alliance française, que je salue,
14:12 et qui, on le voit très bien,
14:14 s'est spécialisée en français,
14:16 mais en même temps, on peut imaginer,
14:18 et on voit cette spécialisation très poussée,
14:21 français parfait, mais en même temps,
14:24 on peut imaginer que ça s'est passé
14:26 par beaucoup de métissages,
14:27 et ces métissages linguistiques, on les entend
14:29 quand les jeunes gens qui viennent
14:31 pratiquement d'apprendre le français
14:33 s'expriment déjà très, très bien en français,
14:35 mais on entend le métissage.
14:37 Il est là, ça fait partie de la construction plurilingue.
14:40 Nous sommes donc des acteurs langagiers,
14:42 ça veut dire quoi ?
14:43 Ça veut dire que nos langues sont organisées
14:45 dans des discours spécifiques.
14:47 Le discours de l'école, le...
14:49 Bon, voilà, je ne peux pas trop...
14:52 aller trop dans cette démarche-là,
14:54 parce que, ici, ce qui nous intéresse,
14:56 c'est le plurilinguisme,
14:57 mais les rôles sociaux, ces rôles sociaux
14:59 que nous avons acquis dans les langues,
15:02 ils sont acquis dans l'enfance,
15:04 et tout au long des expériences de vie.
15:06 C'est pour ça, d'ailleurs, qu'il y a une très grande fragilité
15:09 à quitter ces rôles sociaux.
15:11 C'est pour ça, parce qu'ils sont extrêmement rassurants.
15:15 Et j'y reviendrai tout à l'heure
15:17 sur l'importance de rassurer toujours les enfants
15:21 dans des rôles sociaux antérieurs.
15:24 Parler, continuer à parler ukrainien à la maison,
15:27 même si on utilise le français.
15:29 Parce que ça, c'est fondamental, justement,
15:31 parce que cette confiance en soi,
15:33 elle va toujours être...
15:34 On va toujours aller s'abreuver,
15:36 se ressourcer, au sens propre,
15:38 à ce qui fait l'affectivité première
15:42 dans nos rôles sociaux,
15:43 qu'on a acquis très tôt.
15:45 Alors, ça, c'était le plan personnel.
15:47 Si on regarde maintenant sur le plan collectif,
15:49 qu'est-ce qu'on voit ?
15:50 On voit que les représentations
15:52 et les idéologies linguistiques,
15:53 ce qu'on appelle les idéologies linguistiques,
15:56 c'est-à-dire les systèmes de valeurs
15:58 qui sont organisés autour des langues,
16:01 et bien, en fait, ces représentations
16:05 et ces idéologies linguistiques,
16:07 elles se réorganisent régulièrement
16:09 et elles réorganisent régulièrement les répertoires.
16:11 Elles viennent bouleverser régulièrement
16:14 nos répertoires langagers.
16:16 Ça a des conséquences directes
16:18 d'un point de vue émotionnel,
16:20 donc sur le plan social,
16:21 par exemple la honte, la loyauté, la fierté.
16:25 Ça, c'est les attitudes émotionnelles,
16:28 mais qui vont avoir des conséquences
16:30 sur la prise de parole.
16:31 Vous vous souvenez, la prise de parole individuelle.
16:33 Et là, ça va provoquer quoi ?
16:35 Soit le mutisme, on en a beaucoup parlé,
16:37 la révolte, l'adhésion,
16:39 le choix d'une langue ou l'oubli d'une autre, etc.
16:42 Et là, on a une palette infinie
16:44 de conséquences, de relations
16:48 entre attitudes émotionnelles
16:51 très socialement situées,
16:53 qui viennent effectivement des chocs qu'on a pu...
16:55 Voilà, c'est clair, le choc, le traumatisme,
16:59 mais aussi la représentation
17:01 qu'on a de soi parmi les autres
17:03 quand on arrive dans un endroit
17:04 où on ne comprend rien, par exemple, etc.
17:07 Il se trouve que les politiques linguistiques
17:09 et éducatives viennent naturaliser
17:11 toutes ces représentations.
17:12 Naturaliser, pour moi, ça veut dire
17:14 rendre naturel, comme si tout était toujours naturel,
17:18 avec des préjugés, des croyances,
17:20 beaucoup d'ethnocentrisme autour de ça.
17:22 Je vois d'ailleurs ici que c'est tout l'inverse
17:25 qu'on nous a montré.
17:26 C'est vraiment extraordinaire
17:28 de voir à quel point l'engagement
17:31 des collègues, l'engagement
17:33 des jeunes élèves et adolescents français
17:36 dans cette démarche d'accueil des Ukrainiens
17:39 nous montre précisément qu'on est en train
17:41 de bouleverser beaucoup de choses
17:42 autour de ces questions-là.
17:44 Pourtant, il faut quand même reconnaître
17:46 qu'il y a beaucoup de...
17:47 Il y a un impact très fort
17:49 dans l'enseignement-apprentissage
17:51 et notamment dans le choc
17:52 des cultures éducatives.
17:54 Qu'est-ce que c'est que les plurilinguismes
17:56 et comment on peut mieux les comprendre
17:59 en tant qu'expérience,
18:00 ce que moi j'appelle des expériences encadrées ?
18:03 Encadrées parce qu'on ne peut pas
18:05 penser le plurilinguisme ou les plurilinguismes
18:08 sans les penser à ces deux échelles,
18:09 personnelles et collectives.
18:11 C'est pour ça que la question
18:12 de la solitude est fondamentale.
18:14 D'abord, ce qu'il faut bien dire,
18:15 c'est que l'humanité, elle est plurilingue,
18:17 qu'on le veuille ou non.
18:18 En ce moment, c'est en régression,
18:20 mais environ 7000 langues parlées
18:22 sur la planète, on a à peine 200 États.
18:25 Donc le calcul est vite fait.
18:27 Ce qu'on voit quand même aussi,
18:28 c'est que la mondialisation de l'école
18:30 depuis la fin des années 1980
18:32 a augmenté bien sûr le taux de scolarisation
18:36 et en augmentant le taux de scolarisation,
18:38 a augmenté le taux des mobilités personnelles
18:41 et aussi, avec toutes les implications
18:44 que nous voyons,
18:45 toutes les migrations et exil.
18:47 Donc là, on est dans une phase,
18:49 je dirais au 21e siècle,
18:51 on est dans une phase que l'humanité
18:52 a déjà connue sur ces questions-là,
18:54 mais pas dans ces dimensions-là.
18:56 Ce qu'on voit, c'est que le potentiel,
18:58 l'importance des langues,
19:00 est fondamentale.
19:01 D'ailleurs, on l'a bien entendu.
19:03 Il faut l'anglais.
19:04 On reparlera de l'anglais.
19:05 Oui, il faut l'anglais, bien sûr,
19:07 dans un monde mondialisé.
19:08 Les langues sont des biens économiques.
19:10 Mais ce qu'on voit aussi,
19:11 c'est que plus l'école s'est implantée
19:14 sur la planète,
19:15 depuis la fin du 20e siècle, clairement,
19:18 et plus elle a en même temps offert
19:20 une offre, il y a une offre linguistique.
19:22 Donc, ça veut dire que le plurilinguisme
19:24 s'installe à plusieurs niveaux.
19:27 D'ailleurs, de toute façon,
19:28 le plurilinguisme, il est historique.
19:30 On a des archives très claires,
19:32 très intéressantes, du Moyen Âge
19:35 jusqu'au 18e siècle,
19:37 où de toute façon,
19:38 on voit très bien que les humains
19:41 sont plurilingues.
19:42 Ils mélangent les langues, etc.
19:43 C'est vraiment depuis la fin du 18e siècle
19:46 qu'on voit, en Occident en tout cas,
19:47 une suspicion avec le projet politique
19:51 d'État-nation,
19:52 une suspicion envers les bilingues,
19:55 des traites dégénérées.
19:57 On va souvent appeler d'ailleurs
19:59 les bilingues des gens...
20:01 Pendant longtemps, on les a considérés
20:03 comme des gens, je dirais, dégénérés.
20:05 Il faut attendre vraiment
20:06 le milieu du 20e siècle
20:07 pour voir que ça se retourne.
20:09 Donc déjà, voilà,
20:10 ça c'est une idéologie linguistique
20:12 qui s'est transformée,
20:14 mais qui a laissé des traces,
20:16 qui laisse beaucoup de traces
20:17 dans cette question,
20:18 dans nos univers mentaux.
20:21 Ce qu'il faut voir aussi,
20:22 c'est que les cadres nationaux
20:23 dans lesquels nous vivons,
20:25 et d'ailleurs qui sont des cadres
20:27 très forts,
20:28 puisqu'il est question de frontières
20:29 et qu'on défend ces frontières d'ailleurs,
20:31 eh bien, ces cadres nationaux
20:33 vont gérer très différemment
20:35 le rapport entre diversité,
20:36 altérité, linguistique.
20:38 Prenons le cas de la France,
20:40 où on voit, et je pense que là,
20:42 ça va nous permettre de mieux saisir
20:43 aussi ce qui se passe actuellement
20:45 avec les élèves ukrainiens
20:47 que nous accueillons.
20:48 Le monolinguiste officiel
20:50 de l'État français,
20:51 il est très important,
20:52 c'est-à-dire qu'il y a
20:53 une continuité très forte
20:54 entre le français langue maternelle,
20:56 pensée comme langue maternelle,
20:58 dominante,
20:59 mais aussi comme langue officielle,
21:00 mais aussi comme langue d'enseignement
21:02 et comme langue de scolarisation.
21:03 Moi, je fais une différence
21:04 entre les deux,
21:05 mais bon.
21:06 Ici, donc, c'est pensé
21:07 de manière tout à fait
21:08 dans un continuum,
21:10 mais en fait, la France,
21:11 elle est présente
21:12 sur les cinq continents.
21:13 Là, je vous renvoie donc
21:14 à la délégation générale
21:15 de la langue,
21:16 toutes les références
21:17 sont en bibliographie,
21:18 que je vous laisserai,
21:19 bien sûr,
21:20 je laisse le PowerPoint.
21:21 La délégation générale
21:22 à la langue française
21:23 et aux langues de France,
21:24 qui répertorie 73 langues
21:26 sur le sol français.
21:28 Quand on parle du sol français,
21:29 on parle du sol métropolitain
21:30 et ultramarin, bien sûr.
21:32 Ça provoque évidemment
21:33 de très fortes tensions,
21:34 vous voyez à nouveau ça,
21:35 cette question toujours
21:36 de la tension
21:37 entre le personnel,
21:38 le répertoire personnel,
21:40 et la tension vers le collectif.
21:43 On voit un statut varié
21:45 des langues,
21:46 et surtout,
21:47 on voit un point de vue
21:48 interne et externe.
21:49 Et là, je voudrais
21:50 revenir là-dessus,
21:51 parce que ce point de vue
21:52 interne et externe,
21:53 il va nous aider
21:54 pour comprendre
21:55 l'exemple de nos élèves ukrainiens,
21:57 notamment par rapport aux Russes.
21:59 Je pense qu'on ne peut pas
22:00 négliger ça.
22:01 On ne peut pas du tout
22:02 négliger ce rapport aux Russes,
22:03 parce que je pense
22:04 qu'il fait entièrement
22:05 partie du répertoire
22:06 et qui produit
22:07 beaucoup d'effets
22:08 chez les enfants
22:10 et chez les adultes aussi.
22:12 Peut-être,
22:14 on en est arrivé là tout de suite.
22:15 Pourquoi ?
22:16 Parce que le rapport
22:17 à la langue russe,
22:18 on voit bien cette tension
22:19 interne et externe.
22:20 Je ne peux pas rentrer
22:21 dans tous les détails,
22:22 mais on sait bien
22:23 que, évidemment,
22:24 le russe et l'ukrainien
22:25 sont des langues apparentées,
22:27 mais ce sont des langues
22:28 très différentes.
22:29 Cependant,
22:30 nous le savons aussi,
22:31 le russe a été là
22:33 la grande langue d'enseignement
22:34 pendant très longtemps,
22:35 et donc,
22:36 sur le territoire ukrainien.
22:38 Et forcément,
22:39 nous l'avons vu
22:40 en fonction des générations,
22:41 on a des usages,
22:43 des répertoires ukrainiens et russes,
22:45 nous l'avons vu
22:46 avec le cas de Lula,
22:47 qui sont extrêmement différents,
22:49 qui créent beaucoup de tensions.
22:50 Si on rajoute ça
22:51 au fait qu'il est très difficile
22:53 actuellement,
22:54 dans notre pensée post-moderne,
22:56 de différencier
22:57 la langue de la nation,
22:58 ce qui n'était pas le cas avant,
23:00 mais il est très difficile
23:01 maintenant de dissocier
23:02 le russe de la Russie,
23:04 du territoire,
23:06 le français et de la France,
23:08 alors qu'en fait,
23:09 dans la réalité,
23:10 ça se dissocie très bien,
23:12 mais dans nos représentations,
23:14 ce n'est pas dissocié.
23:15 Donc, ça laisse des traces
23:16 qui vont jouer nécessairement
23:18 dans l'acquisition
23:19 des autres langues.
23:21 Quelles sont les ressources
23:23 des plurilingues ?
23:24 Il y en a beaucoup.
23:25 On l'a dit,
23:26 on est tous plurilingues
23:27 à des niveaux différents,
23:28 mais quelles sont
23:29 les ressources principales
23:30 des plurilingues ?
23:31 Et je pense que c'est important
23:32 pour comprendre,
23:33 pour aller dans le sens
23:34 de ce que disait Anna
23:35 et pour illustrer
23:36 tout ce qui a été dit ce matin
23:37 de toutes les manières.
23:38 Si on observe
23:39 la relation
23:40 entre le plurilinguisme
23:42 et le monolinguisme,
23:43 on voit qu'en fait,
23:44 ce qui différencie,
23:45 qu'on constate vraiment
23:46 ces deux propositions,
23:48 ces deux configurations,
23:49 c'est le choc,
23:50 l'expérience,
23:51 le choc que produit
23:53 le plurilinguisme
23:54 quand on est dans la relation
23:55 langue-pensée-réalité.
23:57 Pourquoi ?
23:58 Parce qu'en fait,
23:59 quand on est dans du monolinguisme,
24:01 on a tendance à penser
24:02 qu'il y a un continuum
24:04 entre la réalité que je vois,
24:06 la pensée que j'ai dans ma tête
24:08 et la manière dont j'exprime.
24:09 On a l'impression
24:10 que tout ça, c'est continu.
24:12 Mais en fait, dans la réalité,
24:13 ce n'est pas du tout comme ça
24:14 que ça marche.
24:15 La relation,
24:16 elle est complètement dénaturalisée,
24:17 elle n'est plus naturelle
24:19 dès qu'on sort de ça,
24:21 dès qu'on sort de ce monolinguisme
24:24 et qu'on introduit d'autres langues
24:25 et que tout le monde l'a vécu.
24:26 Dès qu'on entre dans une autre langue,
24:28 tout à coup,
24:29 le monde est différent.
24:31 Pourquoi ?
24:32 Non pas que le monde est différent,
24:33 c'est toujours le même,
24:34 mais il se dit différemment.
24:35 C'est-à-dire qu'on découvre là
24:38 quelque chose
24:39 de la non-maîtrise du langage,
24:41 de la non-maîtrise des langues
24:43 qui nous ouvre un monde insoupçonné.
24:45 Bien sûr, la découverte,
24:47 la psychanalyse avait déjà mis ça en évidence,
24:50 avec les lapsus, etc.,
24:51 qu'on ne peut pas maîtriser le langage.
24:53 Mais avec le plurilinguisme,
24:54 il y a une déliaison entre tout ça
24:56 qui produit un choc extrêmement intéressant
24:58 et surtout qui nous permet de comprendre
25:00 que les langues ne disent pas le monde,
25:02 elles le créent,
25:04 et elles ne renvoient qu'à elles-mêmes.
25:06 C'est toute la réflexion sur la linguistique,
25:09 elles ne renvoient qu'à elles-mêmes,
25:10 c'est-à-dire que c'est dans la syntaxe et le lexique
25:12 qu'on va trouver l'organisation linguistique.
25:15 Et plus on a de langues
25:16 avec des syntaxes et des lexiques différents,
25:19 ce qui est le cas ici,
25:21 et bien en fait,
25:22 on a une nouvelle,
25:23 là, tout à coup,
25:24 on a une possibilité de création sémantique,
25:27 de création lexicale,
25:28 de création tout court.
25:31 C'est pour ça que l'art-thérapie
25:33 en question dont on nous a parlé,
25:35 me paraît être un soutien essentiel
25:37 pour soutenir cette possibilité de créativité.
25:40 Donc ça, c'est vraiment quelque chose
25:42 d'intrès important,
25:43 très important,
25:44 mais aussi quand on rencontre d'autres,
25:46 avec d'autres langues,
25:47 on modifie l'expérience de l'altérité
25:49 et on ouvre la diversité.
25:50 Ça, on l'a tous vécu et on le sait.
25:52 C'est-à-dire que l'étrangeté de la langue
25:55 nous ouvre des univers
25:57 qui parfois font qu'on va se découvrir soi-même.
25:59 Vous savez que quand on change de langue,
26:01 on change de voix,
26:02 c'est pour ça que la question de la voix,
26:04 V-O-X, est très importante,
26:05 parce que le changement de langue,
26:07 quand on la parle, en tout cas,
26:08 indique le changement de son, de voix,
26:11 parce qu'on n'organise pas la bouche
26:15 de la même manière,
26:16 donc c'est comme si on changeait
26:18 d'instrument de musique.
26:20 Et cette découverte-là de soi-même
26:22 dans la langue,
26:23 c'est quelque chose de très important,
26:24 qu'il faut faire prendre conscience
26:25 à tout le monde,
26:26 pour voir tout ce que ça peut produire.
26:28 Donc le plurilinguisme,
26:29 ce sont des phénomènes transformateurs.
26:31 Et ce qui est très important,
26:33 c'est que,
26:34 nous l'avons bien entendu ce matin aussi,
26:36 c'est une dynamique, le plurilinguisme.
26:39 Ça s'oppose à l'illusion d'identité fixe.
26:43 C'est pour ça que c'est très troublant
26:45 pour les enfants.
26:46 C'est pour ça que,
26:47 si le plurilinguisme peut devenir
26:52 une forme d'obstacle,
26:54 pourquoi ?
26:55 Parce que tout à coup,
26:56 ça met en cause l'illusion
26:57 qu'on avait d'être soi-même,
26:59 l'identité fixe dont on a parlé précédemment.
27:02 On a l'impression de perdre quelque chose
27:04 et on ne sait pas encore ce qu'on va gagner.
27:06 Donc là, on voit bien que ce chemin,
27:08 cette dynamique qui s'opère généralement
27:10 de manière entourée,
27:12 quand on n'est pas dans une situation de crise,
27:14 quand on est en situation de crise,
27:16 tout à coup c'est criant.
27:17 Ça apparaît comme quelque chose d'abyssal,
27:21 comme une impasse,
27:23 et ça va provoquer une peur,
27:25 une peur fondamentale.
27:27 Et c'est là que j'insiste beaucoup sur,
27:30 effectivement,
27:31 les langues pour renforcer la conscience en soi
27:33 et pour rassurer, apaiser
27:35 l'apaisement nécessaire
27:37 pour pouvoir continuer la transformation.
27:41 On voit bien, il y a trois plans.
27:43 La personne et le plurilingue elle-même,
27:45 et souvent on ne le sait pas.
27:46 Et là, en fait, moi je m'adresse aussi,
27:48 c'est l'occasion de parler de tous les enfants,
27:51 quels qu'ils soient,
27:52 dont on ne sait pas forcément qu'ils sont plurilingues.
27:55 Il y a la compétence plurilingue,
27:56 c'est-à-dire on sait se servir de ce plurilinguisme,
27:59 notamment dans les stratégies d'apprentissage,
28:01 j'y reviendrai,
28:02 et il y a les parler plurilingues,
28:03 c'est-à-dire comment ça apparaît dans le discours social,
28:07 comment ça apparaît, comment on parle.
28:08 Vous voyez, ces trois niveaux-là, en fait,
28:10 tant qu'on ne les a pas complètement explorés,
28:12 eh bien cette dynamique,
28:13 elle n'est pas encore complètement ouverte.
28:16 Donc on voit bien qu'il y a de très vastes ressources cognitives
28:19 pour les plurilingues.
28:20 Les répertoires sont pluriels.
28:22 Les expériences et les stratégies discursives sont pluriels,
28:24 ça c'est très important.
28:25 Il y a un vivier énonciatif,
28:27 c'est-à-dire on peut piocher dans tout son vivier énonciatif
28:30 si on nous a montré comment ça a fonctionné,
28:32 et surtout si on nous a laissé la possibilité de le faire.
28:37 Et ce que nous voyons aussi, c'est très important pour nous,
28:40 il y a des expériences de stratégie d'auto-apprentissage.
28:44 Le vivier plurilingue est un vivier d'auto-apprentissage.
28:47 Alors je sais que pour les profs, c'est difficile à entendre,
28:50 mais en fait c'est ça.
28:51 C'est-à-dire qu'en fait, l'enseignement et l'apprentissage,
28:55 ici, peuvent parfois se rencontrer,
28:57 mais peut-être pas toujours.
28:58 Pourquoi ?
28:59 Parce qu'on va s'apercevoir que chez les plurilingues,
29:01 quand ils sont capables,
29:03 quand ils ont cette compétence d'utilisation de leur plurilinguiste,
29:06 ils ont des capacités, des stratégies d'auto-apprentissage
29:10 qui échappent à l'enseignement.
29:11 Et ils vont passer par des stratégies qui sont souvent inconscientes
29:15 ou qu'ils ont eux-mêmes mis au point.
29:17 Et ce n'est pas seulement la traduction, loin de là.
29:21 Ça peut être beaucoup d'autres choses que la traduction,
29:23 mais il y a aussi la traduction.
29:25 Et donc tout ça, évidemment, ça fait quelque chose d'extrêmement riche
29:28 que les plurilingues utilisent dans la vie de manière extrêmement forte,
29:32 avec beaucoup de créativité.
29:33 Donc on le voit, il faut considérer que le plurilinguisme,
29:36 et moi je le considère comme ça,
29:38 les plurilinguistes, ce sont des espaces de rencontres et de découvertes.
29:41 Il faut les considérer comme ça.
29:43 C'est pas seulement métaphorique.
29:45 C'est métaphorique d'une certaine manière, mais pas seulement.
29:48 D'ailleurs, on l'a vu tout à l'heure,
29:49 l'utilisation des dessins, de la poésie, par exemple, du poème,
29:52 ça pourrait aller encore plus loin,
29:54 parce qu'on pourrait travailler sur le poème, justement, plurilingue,
29:57 pour la découverte de soi et des autres.
30:00 Mais en même temps, on le voit,
30:01 c'est des espaces de conflictuels et de tensions,
30:04 très fortes conflits intérieurs.
30:06 Pourquoi ?
30:07 Parce que cet encadrement affectif, empathique,
30:11 et le temps qui est nécessaire pour que cette dynamique se mette en place,
30:14 ils peuvent faire défaut, et c'est ce qu'on voit ici, très clairement.
30:18 Alors, ils font d'autant plus défaut que,
30:21 ici, on est dans un cadre de français langue seconde.
30:24 J'ai vu que ce n'était pas toujours le cas,
30:26 mais je voudrais rappeler quand même quelques éléments
30:28 de politique linguistique et éducative,
30:31 sauf que c'est ma spécialité,
30:33 qui provoquent des tensions et des décalages,
30:35 bien que ce soit avec beaucoup de bienveillance et de générosité.
30:38 Je ne remets pas du tout en cause la question,
30:40 mais je voudrais quand même montrer à quel point, parfois,
30:42 certains dispositifs peuvent provoquer des décalages,
30:46 avec les enfants qu'on accueille.
30:48 Déjà, le fait que, je vous le rappelle,
30:50 le français langue seconde, ce n'est pas une langue, pas du tout,
30:53 ni le français langue étrangère non plus, d'ailleurs.
30:55 Ce sont des situations, des contextes.
30:58 Et comme on parle de français langue seconde,
31:00 on revient toujours à cette position collective.
31:02 Quand on parle de français langue seconde,
31:04 on considère que le français a un statut collectif,
31:07 ce qui est tout à fait congruent dans notre situation,
31:11 et en fait, qui nous rappelle que nous sommes dans une France,
31:15 effectivement, métropolitaine,
31:17 dont le français est la langue officielle,
31:19 la langue de scandinciennement, la langue de scolarisation,
31:21 et peut-être la langue maternelle dominante.
31:24 Mais en fait, ce qu'il faut voir, c'est qu'en fait,
31:26 c'est une langue non maternelle, dans certains contextes,
31:29 c'est ça le français langue seconde,
31:31 dont le statut est très important, rôle social, cognitif,
31:34 on apprend en français, on a une personnalité en français.
31:37 Donc, on a des traces historiques et mémoriales qui sont très importantes.
31:41 Je renvoie à tous mes travaux sur cette question-là,
31:44 je ne vais pas développer.
31:45 Si on regarde ce qui se passe dans la situation du français langue seconde,
31:49 en France métropolitaine, j'insiste sur la France métropolitaine,
31:53 ce qu'on voit, c'est que ce sont des dispositifs
31:55 qui sont pensés pour la scolarisation, c'est-à-dire l'intégration sociale,
31:58 et on l'a très bien vu tout à l'heure, ou citoyenne.
32:01 Mais ces principes sont très ambivalents.
32:03 Pourquoi ? Parce que d'un côté, on accepte l'altérité,
32:06 et d'ailleurs avec beaucoup de générosité, on le voit,
32:08 mais en même temps, on fait régresser cette altérité,
32:10 notamment linguistique, au profit de l'identité linguistique.
32:14 Cette tension qu'on voit très clairement chez les enfants,
32:17 dont on a parlé tout à l'heure,
32:19 cette tension entre altérité et identité.
32:21 Qui suis-je ? Quelle est mon identité ?
32:24 Qui apparaît dans les langues ?
32:25 Ce sont des questions de transition linguistique.
32:27 Et on voit bien que l'identité linguistique culturelle,
32:30 ou citoyenne, finalement, elle est projetée sur un avenir.
32:34 D'ailleurs, je remercie aussi Bogdan, vraiment,
32:37 qui parle de pages blanches, par exemple,
32:40 ou « quel est mon avenir ? ».
32:42 On voit très bien comment ce sont des questions fondamentales,
32:45 qui passent par des questions linguistiques.
32:47 Et évidemment, on peut dire que l'indiversité linguistique,
32:52 dans notre système indicatif, elle est un pensée.
32:54 Elle est laissée, finalement, on voit,
32:57 à la générosité des institutions, du casenave,
33:00 de chefs d'établissement, de collègues,
33:03 qui vont s'emparer de cette question-là.
33:06 Je vous rappelle qu'on a quand même une déclaration universelle
33:08 sur la diversité culturelle promulguée en 2001,
33:11 qui est fondamentale, et qu'il faut absolument aussi y revenir.
33:15 Notre politique éducative franco-française,
33:19 c'est une culture éducative, on le voit,
33:21 qui est structurée autour de la maîtrise de la langue,
33:23 autour de la force de l'écrit,
33:25 et avec une forte normativité linguistique.
33:27 Ce qui fait qu'on a une culture éducative
33:30 qui a tendance, qui aurait tendance,
33:33 de manière assez cartésienne,
33:36 à projeter sur la pensée et à adopter
33:39 une position corporelle qui va dans le sens de cette maîtrise-là.
33:43 On voit ici, par exemple, quand on parle des enfants
33:46 qui sont agités dans la classe,
33:48 on voit bien que cette déconnexion entre la pensée et le corps,
33:52 chez les enfants, les petits, par exemple,
33:54 elle est intéressante parce qu'elle nous montre bien
33:57 cette difficulté à rentrer dans cette maîtrise du corps
34:01 et de la pensée.
34:03 Il suffit de changer de culture éducative
34:05 et d'aller dans des systèmes éducatifs
34:07 où le corps n'est pas du tout géré comme ça
34:09 pour s'apercevoir que notre système fonctionne de cette manière-là.
34:12 Pour avoir visité beaucoup de classes, un peu partout dans le monde,
34:15 on voit bien que ce n'est pas du tout une liaison naturelle.
34:18 Évidemment, quand on a des enfants comme ça,
34:21 qui tout à coup montrent cette déliaison
34:23 entre le corps et l'esprit,
34:25 ça nous interroge sur la manière de construire cette relation.
34:29 La sectorisation des langues, pour nous,
34:31 elle est intéressante parce que si on est dans un univers plurilingue,
34:35 linguistique plurilingue,
34:36 le système éducatif est plutôt multilingue.
34:39 Il y a une superposition des langues,
34:41 mais on a beaucoup de sectorisation des langues
34:45 et on a peu de passerelles entre les langues.
34:48 Les enfants qui viennent d'ailleurs,
34:50 ils le voient immédiatement, ils le comprennent immédiatement.
34:53 Ça veut dire que cette prise en compte du fonctionnement
34:56 du répertoire langagier dans l'école,
34:58 clairement, même avec beaucoup de volonté,
35:00 on ne peut pas dire que ça existe.
35:02 Par contre, ce qu'on voit, c'est qu'il y a beaucoup de croyances,
35:04 de représentations et d'idéologies linguistiques
35:07 qui viennent prendre le pas sur les savoirs.
35:09 Par exemple, le rapport entre la langue maternelle
35:11 et la langue étrangère ou seconde,
35:13 la question des erreurs,
35:15 la question du métissage,
35:17 que nous on appelle les interlangues,
35:18 le fait qu'on mélange les langues,
35:20 le fait, par exemple, qu'on pense qu'il faut toujours parler français,
35:23 le bain d'immersion, il est nécessaire.
35:25 Je pense que là, vraiment, on l'a très bien montré.
35:27 Mais, par contre, le bain d'immersion,
35:29 il ne peut pas remplacer l'affectivité dans la langue.
35:32 Même si on est entouré d'amis,
35:34 même si on a beaucoup d'amis,
35:36 mais en fait, ce qui revient souvent, c'est la solitude.
35:39 Or, cette solitude, elle ne peut pas être remplacée,
35:41 elle ne peut pas être comblée par la langue étrangère
35:44 ou la langue seconde.
35:45 Pourquoi ? Parce qu'il y a des choses
35:46 qui se disent dans la langue maternelle,
35:48 l'affectivité dans la langue maternelle
35:50 ou dans la langue première, peu importe,
35:52 eh bien, c'est une affectivité
35:53 qui ne passe pas nécessairement par les mots
35:56 et qui...
35:58 Ce que nous savons maintenant, c'est que,
36:00 pour avancer dans la langue étrangère
36:02 ou la langue seconde,
36:03 il faut être bien structuré,
36:04 effectivement, dans sa langue maternelle.
36:06 Si on cesse de parler dans la langue maternelle,
36:09 donc ici, l'ukrainien,
36:10 ou peut-être le russe, je ne sais pas,
36:12 là, il faut être prudent.
36:13 C'est très intime, ces questions-là.
36:15 Il ne faut pas rentrer trop dans ces questions, je pense.
36:17 Il faut laisser les gens libres.
36:19 Eh bien, si on met un frein,
36:21 si on dit aux parents "parlez français à la maison",
36:23 on va bloquer complètement le système affectif
36:25 et on va bloquer, tout en croyant bien faire,
36:28 la progression en français.
36:30 Donc, oui au bain immersif, complètement,
36:32 à l'école, etc.,
36:34 mais oui aussi à la stratégie affective
36:37 dans la langue maternelle.
36:39 Et là, on laisse les parents libres.
36:41 À partir de tout ce qu'on a pu voir,
36:43 ces tensions, ces phénomènes de tensions,
36:46 je pense qu'on peut les...
36:47 on peut essayer de les comprendre mieux,
36:49 à la lumière de tout ce qu'on a entendu ce matin
36:52 et de quelques propositions que j'avance.
36:54 D'abord, un cadre réflexif important pour moi,
36:57 avec quelques...
36:59 je vous ai mis ici quelques références,
37:01 d'abord de neuroscientifiques.
37:04 Moi, je ne suis pas toujours d'accord avec les neurosciences,
37:06 mais il y a certains, quand même,
37:07 propositions qui sont très importantes.
37:09 Jean-Pierre Changeux, c'est un de nos grands spécialistes,
37:12 dès 2002, qui dit quelque chose d'important,
37:14 "Apprendre, c'est éliminer, c'est oublier.
37:16 Pour apprendre, il faut oublier quelque chose de soi."
37:19 Pourquoi ? Parce qu'on le voit bien,
37:20 c'est une sorte de dialectique.
37:21 Donc ça, c'est dangereux pour certains élèves.
37:23 Apprendre, c'est éliminer,
37:25 sauf si on leur apprend qu'on n'est pas obligé d'éliminer tout.
37:29 Donc la question linguistique, on le voit bien, c'est
37:31 "Et si j'apprends une nouvelle langue, je vais éliminer ma langue
37:34 et donc ça veut dire que je ne serai plus le même."
37:36 Ou peut-être l'avenir ne sera plus en ukrainien, par exemple.
37:40 On l'a dit aussi, l'expérience continuelle
37:42 de l'expérience sur les cerveaux,
37:44 ça, c'est fondamental,
37:45 et l'expérience neuronale des plurilingues,
37:48 elle est extrêmement importante et intéressante,
37:51 mais aussi un philosophe de l'éducation qui est très important,
37:55 qui s'appelle John Dewey,
37:56 qui dit "L'éducation, c'est aussi la reconstruction continue de l'expérience."
38:01 Ça veut dire que là, par exemple, on l'a vu très bien
38:03 dans les témoignages au niveau de l'école de survie,
38:08 à Poissy, la manière dont effectivement
38:11 on reconstruit l'expérience par le système éducatif,
38:15 en mettant en relation,
38:17 ça me paraît très important.
38:19 Et enfin, un principe très important,
38:21 qu'on a souvent oublié,
38:22 qui a été créé en...
38:23 un concept très important en 1953,
38:26 Weinrach, qui crée le concept de loyauté linguistique.
38:29 C'est fondamental.
38:30 La loyauté linguistique,
38:31 c'est une loyauté qui nous dit
38:33 "Attention, si je parle ou si j'apprends une autre langue,
38:37 je serai déloyale à ma langue première.
38:39 Je serai déloyale à tous les gens."
38:42 Et là, on comprend très bien ce que ça veut dire.
38:44 Donc là, la loyauté linguistique,
38:46 c'est un principe intime qui fonctionne
38:50 et qui va, par exemple, produire,
38:52 chez toute personne qui se sent investie de cette loyauté,
38:56 généralement des refus catégoriques,
38:58 d'entrer dans la nouvelle langue,
39:00 du mutisme, de la révolte,
39:02 parfois même du rejet total.
39:04 Or, ce principe de loyauté, il faut le respecter.
39:07 C'est-à-dire, il faut comprendre ce que ça indique,
39:09 parce que c'est toujours fondé
39:10 sur l'idée d'une représentation très forte.
39:13 Et on voit bien ici comment le collectif a toujours un rapport,
39:17 la pensée collective a un rapport avec la pensée individuelle.
39:20 Alors, ne pas laisser les enfants seuls face à eux-mêmes.
39:23 Voilà, c'est ce qu'on nous a dit tout à l'heure,
39:24 ce qu'Anna nous a dit.
39:25 Je vous renvoie aux travaux de Siervolnik,
39:27 mais aussi un podcast qui a été sorti en 2023,
39:30 la France Culture sur la résilience,
39:32 qui est remarquable.
39:33 Je vous ai mis le lien en bibliographie.
39:36 Être patient, ne pas se laisser décourager
39:40 par les échecs apparents.
39:41 Ça, c'est le compte.
39:43 Toujours la question du sens.
39:44 Oui, les plurilingues, par nature,
39:47 parce qu'ils sont dans le risque du plurilinguisme,
39:50 ils vont échouer beaucoup.
39:52 Et c'est pour ça que le mutisme aussi
39:54 permet de vaincre l'échec.
39:56 Parce que quand on ne parle pas,
39:57 on ne peut pas être jugé.
39:59 Ça, c'est pour tous les élèves en général.
40:01 Donc, en fait, le risque de prendre la parole,
40:03 le risque de la prise de parole dans une autre langue,
40:07 c'est s'affronter aussi à cette question-là.
40:09 Donc, ça veut dire que...
40:10 Ça signifie quoi ?
40:11 Ça veut dire que la culture éducative, à côté,
40:13 doit permettre, doit laisser la place à cette marge,
40:16 à cette marge de l'échec.
40:18 Or, on l'a vu, la question de la maîtrise de la langue
40:21 dans la structure éducative franco-française,
40:24 elle est très forte.
40:25 Donc là, il y a quelque chose à travailler, forcément.
40:28 Et rappelons-nous aussi quelque chose de très important,
40:31 le stress, la peur inhibe complètement
40:33 les capacités d'apprentissage.
40:35 Et ça, dans toutes les situations,
40:36 de milieux sensibles, de bombardements, de guerres,
40:40 on le sait très bien.
40:41 C'est-à-dire que là, il y a un figement total
40:46 des capacités d'apprentissage.
40:47 Pourquoi ? Parce que l'énergie,
40:49 l'énergie, elle est mise ailleurs.
40:51 Mais aussi parce que, on l'a vu,
40:53 capacité d'apprentissage, ça veut dire
40:55 transformation de soi.
40:56 Ça veut dire dynamisme.
40:58 Ça veut dire quelque chose qui est toujours en mouvement.
41:02 Et c'est donc...
41:03 Ça veut dire qu'on est dans le risque.
41:06 Si je résume, ça veut dire que le répertoire plurilingue,
41:08 il est métissé, affectif,
41:10 qu'il est profondément lié au sentiment,
41:12 lié à la sécurisation de soi.
41:15 Ce que, voilà, Anna nous a très bien expliqué tout à l'heure.
41:20 Le phénomène est toujours en construction.
41:22 Il est soumis au poids des représentations sociales,
41:24 donc extrêmement fragile.
41:26 Et aussi, on voit, si on essaye d'aller un petit peu plus loin,
41:29 on voit par exemple qu'il y a une tension très forte
41:31 chez les plurilingues, et forcément
41:33 chez les élèves ukrainiens,
41:34 entre le raisonnement et les stratégies,
41:37 entre sentir et raisonner.
41:39 Pourquoi ? Parce qu'il y a beaucoup de processus inconscients,
41:41 comme les pertes de mots, les oublis, etc.
41:44 Mais il y a aussi beaucoup de stratégies d'apprentissage,
41:47 des créations de langues,
41:49 des mélanges de langues.
41:51 C'est-à-dire qu'on va utiliser le vivier plurilingue
41:55 pour créer de la nouvelle langue.
41:57 Or, ça, cette stratégie d'apprentissage,
41:59 elle peut être complètement en décalage
42:01 avec l'enseignement.
42:03 Donc là, il se fait que tout à coup,
42:05 on peut se trouver complètement en décalage,
42:07 d'où le sentiment de grande solitude.
42:09 Donc, après plus d'un an d'expérience,
42:12 les plurilinguismes, est-ce que ce sont des voies
42:14 et des voies de résilience ?
42:16 Pour moi, oui.
42:17 Mais pourquoi ? Parce que ça veut dire que ces enfants,
42:19 et pas seulement les enfants, hein, tous,
42:22 vont faire quelque chose avec ce qui est arrivé.
42:25 C'est-à-dire, ce qui est arrivé, c'est la guerre et l'exil.
42:27 Mais c'est quoi ?
42:29 Ça veut dire un statut de réfugié d'entre deux.
42:31 Qui sont-ils ? Quel est leur avenir ?
42:33 Est-ce que ce sont des citoyens du monde ?
42:35 Est-ce que ce sont des Ukrainiens ?
42:37 Est-ce que ce sont des citoyens français ?
42:39 Quelle est l'assignation identitaire ?
42:41 Et là, on voit bien que les langues ont un rôle à jouer.
42:43 Donc, plus on va ouvrir le champ des langues,
42:45 et moins on va...
42:47 Et plus on va donner la capacité aux élèves
42:49 de se sentir libres.
42:51 Évidemment.
42:52 D'où l'importance de ce quadruple
42:55 ukrainien, russe, anglais, l'anglais,
42:59 n'oublions pas l'anglais, et le français.
43:01 Le français arrive en quatrième position dans l'apertoire.
43:04 Donc, ça veut dire que quand on arrive en français
43:06 après ces trois autres langues-là,
43:08 les autres langues vont servir de support d'apprentissage.
43:11 Faut le savoir, hein.
43:13 Et donc...
43:15 Mais on voit bien aussi qu'on pourrait en rajouter une cinquième.
43:17 Là, il n'y a pas de limite pour nos cerveaux.
43:19 Il n'y a pas de limite pour les plurilingues.
43:21 Il faut bien le savoir.
43:23 Il y a un équivalent dans toutes les langues,
43:24 mais il n'y a pas de limite.
43:26 Donc là, peut-être, ces répertoires métissés,
43:29 ces expériences de translangues,
43:31 il faut savoir pour quels usages.
43:32 Qu'est-ce qu'on en fait, de tout ça ?
43:35 Les stratégies d'apprentissage ne sont pas partagées.
43:38 Cette solitude expérientielle des plurilingues,
43:40 et notamment des élèves ukrainiens,
43:41 elle doit être très forte.
43:43 Pourquoi ? Parce qu'on l'a dit, il y a un décalage
43:44 avec les enseignements et les croyances
43:46 de la culture éducative française.
43:47 C'est-à-dire qu'il y a une invisibilisation des répertoires.
43:50 Moi, j'aime beaucoup quand Anna dit
43:51 qu'il faut partager la langue ukrainienne avec tout le monde.
43:55 Oui, bien sûr, c'est ça qu'il faut faire.
43:56 Ça, c'est sûr, mais ce n'est pas facile.
43:58 On le voit, l'insécurité et les loyautés linguistiques
44:01 vont provoquer beaucoup, en fonction des âges,
44:04 des agitations, du mutisme, du rejet.
44:07 Ça veut dire qu'on n'a pas beaucoup,
44:09 mais ça c'est normal, on n'a pas beaucoup de recherches
44:11 sur ces questions-là,
44:12 et c'est pour des questions éthiques,
44:13 ce n'est pas facile de le penser d'ailleurs.
44:15 Quelle représentation avaient les enfants
44:17 avant d'arriver en France ?
44:19 Aucune du français, sinon peut-être par les mamans,
44:22 comme Julia, qui sont des profs de français,
44:24 mais elle nous l'a dit.
44:26 Elle pensait que c'était son rêve
44:28 que ses enfants parlent français,
44:30 mais on voit bien que ce n'était pas dans le projet.
44:32 Quelles représentations maintenant
44:34 qu'ils ont l'usage de cette langue dans l'exil ?
44:37 Quelles représentations ils en ont ?
44:39 Ça aussi, ça veut dire qu'on a besoin de recherches,
44:42 on a besoin de gens qui viennent nous dire un petit peu,
44:45 mais en respectant, et ce n'est pas facile,
44:46 en respectant l'intimité des répertoires plurilingues,
44:50 ce n'est pas facile.
44:52 Alors pour pratiquement terminer,
44:54 les plurilinguismes comme voient VOIE,
44:58 VOIX de résilience,
45:00 faire avec ce qui est arrivé.
45:03 Ici, l'exil, ça veut dire reconstruire les répertoires.
45:06 J'ai beaucoup aimé la question de l'empathie,
45:09 mais pas de la compassion.
45:10 Moi, je trouve que c'est fondamental.
45:12 Partager les répertoires, c'est-à-dire montrer l'empathie,
45:14 c'est-à-dire la connaissance située,
45:16 se placer à la place d'eux,
45:20 mais j'insiste, partager les répertoires,
45:23 ça veut dire partager les répertoires de tout le monde.
45:26 Parce que cette solitude des enfants,
45:31 elle est liée au fait aussi qu'ils ont l'impression
45:33 que les autres ne sont pas comme eux.
45:35 Mais en fait, peut-être que si on creuse,
45:36 on va voir qu'ils sont comme eux.
45:38 Et en tout cas, le partage des répertoires,
45:39 ça veut dire provoquer de l'empathie,
45:42 c'est-à-dire la connaissance située
45:44 par le biais de récits, de dessins.
45:46 On peut faire dessiner les répertoires,
45:48 c'est très beau, ça donne toujours de très belles choses.
45:51 Et en tout cas, pas de la compassion.
45:53 Découvrir ensemble la richesse des répertoires
45:55 de plurilingue de tous les élèves,
45:58 de tous les élèves,
45:59 pas seulement des Ukrainiens, de tous.
46:01 Pourquoi ? Parce qu'on l'a vu,
46:03 les plurilinguistes sont des espaces de rencontre.
46:06 Je suis complètement d'accord avec Anna.
46:08 Ces espaces de rencontre,
46:10 il faut les enrichir par les arts,
46:13 la littérature, le cinéma, j'ai entendu la poésie.
46:17 Il me semble que la poésie,
46:19 j'ai l'impression que la poésie,
46:20 ça répond là vraiment à quelque chose de fort.
46:24 Je vous renvoie à tous les travaux de Martin Hussbaum
46:27 sur ces questions-là,
46:28 sur la question des arts et des humanités
46:32 dans l'éducation.
46:34 Il me semble aussi qu'on a, par exemple,
46:36 des traductions.
46:38 On a aussi des poètes
46:41 et des grands écrivains ukrainiens
46:44 qu'on peut faire connaître à tous.
46:46 On pense à des gens qui sont traduits
46:50 et puis des gens qui ont déjà,
46:55 je pense à Korkov par exemple,
46:58 Andrei Korkov,
46:59 mais qui ont aussi produit de la littérature de jeunesse
47:02 pour la faire découvrir,
47:03 peut-être même en espaces bilingues.
47:05 Donc, introduire,
47:07 transformer cet espace de rencontre
47:09 en un espace artistique,
47:11 j'ai l'impression que c'est la meilleure des voies.
47:15 Il ne faut pas négliger la question des traductions
47:17 et il ne faut pas négliger les langues d'étayage,
47:20 ce qu'on appelle les langues d'étayage.
47:22 L'anglais est une langue d'étayage, visiblement,
47:24 mais c'est normal puisque l'anglais,
47:26 c'est la première langue étrangère apprise
47:28 dans le système ukrainien.
47:30 Donc, ça veut dire que la première langue étrangère apprise,
47:33 elle est un support d'apprentissage énorme pour les élèves.
47:36 Alors, en fonction de leur âge, bien sûr,
47:39 mais ça veut dire qu'il y a déjà des stratégies d'apprentissage
47:42 qui sont ancrées dans le répertoire
47:44 grâce à cette langue-là.
47:46 Découvrir l'ukrainien pour tous,
47:48 ça me paraît une très bonne idée.
47:50 Pourquoi ?
47:51 Parce que ça veut dire que dans ce cas-là,
47:52 tout le monde bouge et se transforme,
47:54 et pas seulement...
47:55 Et c'est d'ailleurs ce qu'on a vu très bien,
47:56 bravo à toutes les initiatives.
47:59 J'ai beaucoup aimé le RAT,
48:01 l'Université de l'Humanité entre adolescents et relations transterritoriales,
48:04 c'est magnifique, ce titre qui devient RAT.
48:06 Vraiment, je trouve que là, il y a vraiment beaucoup,
48:09 là, il y a quelque chose à chercher,
48:11 à développer, à transmettre.
48:14 Mais ça veut dire aussi qu'il ne faut pas laisser
48:17 les enfants seuls,
48:19 mais il ne faut pas laisser non plus les profs seuls
48:21 face à cette richesse.
48:22 Et on voit bien que la générosité
48:26 et l'accueil des enfants ukrainiens et de leur famille,
48:30 ça doit nous permettre aussi à nous
48:32 de faire bouger les lignes de notre politique éducative et linguistique,
48:36 qui sont des questions politiques et éthiques très fortes.
48:39 Je vous remercie beaucoup pour votre attention.
48:42 Eh bien, merci beaucoup Valérie,
48:47 c'est une prouesse d'avoir tissé
48:52 votre exposé aux paroles qui ont été prononcées
48:58 tout à l'heure par les élèves,
49:01 et par les élèves ukrainiens notamment.
49:06 Moi, je vais laisser la parole à la synthétiseuse experte
49:13 qui est Françoise Savigne,
49:14 mais quand même, en vous écoutant,
49:16 j'ai une vraie question,
49:19 moi IPR de Lettres à l'origine,
49:22 et professeure de Lettres,
49:24 sur ce que vous interrogez,
49:28 et d'une certaine manière peut-être mettez en cause,
49:31 sur la centralité de la langue française à l'école,
49:35 son espèce d'hégémonisme,
49:38 qui, à vous entendre,
49:41 nous rend notre propre représentation du monde
49:46 très très étroite.
49:48 Je ne dirais pas…
49:51 Merci Corinne, merci beaucoup.
49:52 Étroite, je ne crois pas,
49:54 simplement, je ne crois pas,
49:56 parce qu'on a la richesse de notre littérature,
49:59 la richesse de notre langue, c'est énorme.
50:01 Non, je ne crois pas du tout que ce soit étroit,
50:03 je crois simplement que c'est peut-être…
50:06 Justement, ce qui est intéressant,
50:08 c'est l'ouverture qu'on pourrait avoir,
50:10 d'ailleurs que ça existe,
50:11 parce que la francophonie c'est quand même…
50:13 c'est très important,
50:14 et on voit bien que dans la francophonie,
50:16 on a toutes sortes de propositions.
50:17 Moi, je crois simplement que,
50:19 voilà, on est dans une culture éducative
50:21 qui forme des gens de manière très spécialisée,
50:24 qui sont excellents d'ailleurs.
50:26 Et d'ailleurs, on voit le résultat aussi,
50:29 des enfants qui parlent français,
50:31 déjà très très bien.
50:32 Mais peut-être que ce n'est plus complètement adapté
50:37 à ce qui se passe actuellement.
50:38 C'est-à-dire que cette excellence,
50:40 on le voit,
50:42 elle est peut-être à réinterroger
50:44 pour plus d'ouverture.
50:45 Donc moi, je ne parlerais pas d'étroité,
50:47 je pense au contraire que c'est assez grand
50:49 pour accueillir tout le monde,
50:51 si on a la capacité aussi à montrer
50:54 comment ça fonctionne en fait,
50:56 comment ça fonctionne dans la tête des gens,
50:58 notamment des élèves.
51:00 Avant d'entendre Ariane,
51:03 le fèvre qui va peut-être essayer
51:08 de tenter des transpositions
51:10 pour la classe ordinaire,
51:12 pas pour l'UPE 2A,
51:13 pour la classe ordinaire,
51:14 je voudrais laisser la parole
51:16 à ma collègue Françoise Savigne,
51:18 qui va tenter de tirer quelques leçons
51:21 pour nous de cet exposé
51:24 si nourri et si riche.
51:27 Voilà, les leçons seront naturellement
51:29 très synthétiques par rapport
51:31 au caractère très étoffé
51:33 et passionnant de la conférence
51:35 que nous venons d'entendre.
51:36 Je voudrais revenir sur un premier point,
51:38 pour faire la boucle avec la synthèse précédente,
51:40 c'est que notre admiration pour tous ces jeunes gens
51:43 ne va pas naturellement
51:45 sans la conscience de la profondeur
51:47 de leurs souffrances et des traumatismes
51:49 qu'ils ont affrontés.
51:51 Bien sûr, rien n'est facile.
51:53 Pour la conférence que nous venons d'entendre,
51:56 je voudrais mettre l'accent sur plusieurs points.
51:59 Non, la langue n'est pas un outil.
52:02 C'est une expérience de vie.
52:04 La langue, c'est nous.
52:06 Et en tant qu'IPRD,
52:08 je suis assez fière d'avoir ce champ
52:11 à partager avec vous tous
52:13 et avec tous les réfugiés ou migrants
52:15 que nous accueillons.
52:16 C'est un espace de la construction de soi.
52:19 Ça n'est pas un outil, ça veut dire que
52:22 c'est un apprentissage qui n'est pas sous forme
52:25 de leçons et on s'arrête,
52:27 qui n'est pas sous forme de juxtaposition d'exercices,
52:30 qui n'est pas neutre,
52:32 qui n'est pas froid.
52:34 Ça, c'est la première chose.
52:36 Deuxième point, et sur la deuxième partie
52:39 de ma synthèse, c'est vraiment
52:42 comment cette réflexion sur la langue
52:44 vaut pour nous tous.
52:45 Enseignant, quelles que soient nos fonctions,
52:47 elle vaut pour l'ensemble de nos élèves.
52:49 Et je pensais à l'ensemble de nos élèves
52:51 en vous écoutant, madame.
52:53 C'est une vision pour tous nos élèves.
52:55 Pourquoi ? Parce que vous venez de nous rappeler
52:57 qu'apprendre, c'est un risque.
52:58 Et apprendre, c'est un risque pour tous les élèves.
53:00 Il est plus sensible, plus immédiat
53:03 pour nos jeunes Ukrainiens,
53:05 mais il est sensible pour tous.
53:07 Et parfois, oui, dans d'autres langues,
53:10 on a coupé les élèves de leur langue source.
53:13 Et nous parlons tous peut-être plusieurs langues.
53:16 Il faut pouvoir, à l'école, affirmer tous les sois,
53:19 même si on est en français langue seconde.
53:22 Deuxième point pour l'ensemble des élèves,
53:25 cette expérience du plurilinguisme,
53:27 c'est l'expérience du pluriel,
53:29 avec lequel nous avons un peu de mal en France.
53:33 Pourquoi avons-nous du mal ?
53:35 Parce que ces fameux répertoires pluriels
53:37 dont vous avez parlé,
53:39 relèvent du caractère indépassable
53:46 de l'hétérogénéité.
53:48 Vous pouvez aimer ce que vous avez dit
53:50 sur ces répertoires pluriels
53:52 qui sont à la fois spécialisés et métissés.
53:55 On est dans quelque chose de complexe.
53:58 On n'est pas dans quelque chose qui est uniforme.
54:01 Et je pense que tous les élèves ont besoin
54:05 et sont eux-mêmes dans un apprentissage
54:07 qui relève de l'hétérogène.
54:08 Oui, dans cet hétérogène,
54:10 il y a des fulgurances,
54:11 il y a des moments magnifiques,
54:12 il y a de grandes compétences,
54:14 il y a la place de l'erreur,
54:15 il y a la place du multilingue.
54:17 Et peut-être ne faisons-nous pas assez de place
54:20 à cette complexité qui est celle de l'hétérogène.
54:23 Et enfin, et alors là, c'est mon moment de délice,
54:26 je voudrais faire retour sur le fantasme français,
54:30 il y en a beaucoup, mais c'est celui-là,
54:32 aujourd'hui, qui est au cœur du sujet,
54:34 qui est la maîtrise de la langue.
54:37 Je dois confier, je ne maîtrise pas le français
54:40 et je n'ai pas du tout envie de le maîtriser.
54:43 J'ai envie à chaque instant qu'il soit une découverte
54:47 et pour qu'il soit une découverte,
54:48 il ne faut pas que je le maîtrise,
54:51 il faut que j'en approfondisse la découverte.
54:53 Penser qu'on peut maîtriser le français,
54:56 c'est absolument fatal pour l'apprentissage
54:58 de tous les élèves,
54:59 parce qu'ils sont sans cesse dans le sentiment
55:01 qu'ils risquent à chaque instant la faute
55:04 ou l'erreur, mais l'erreur ne cache pas
55:08 la dimension de culpabilité qui est dans la faute.
55:11 On est dans la faute, on est dans la gêne
55:14 et on n'est pas dans la langue
55:15 comme un espace à explorer.
55:18 Voilà, le risque pour nous, enseignants, inspecteurs,
55:23 chefs d'établissement ou autres,
55:25 c'est de voir l'enseignement du français
55:28 comme un enseignement de la conformité,
55:30 comme un enseignement de l'univocité
55:33 et effectivement, même avec les meilleures intentions
55:36 du monde, voilà, et des idées tout à fait louables,
55:41 respectueuses, ouvertes, généreuses,
55:43 on pourrait, si on n'est pas vigilant,
55:46 dispenser un enseignement qui exclut le métissage
55:50 et notamment dans la langue, mais pas seulement.
55:53 Et mon dernier point portera sur l'inclusion.
55:56 Je crois qu'il y a beaucoup dans notre auditoire
55:59 de professeurs du PE2A, j'aurais aimé
56:01 qu'il y ait davantage de professeurs de classe ordinaire
56:04 et ils seront les bienvenus pour réécouter
56:06 votre conférence, madame, parce que l'inclusion,
56:09 ce n'est pas l'absorption, ce n'est pas l'altérité
56:14 à laquelle on invite chaque réfugié à échapper.
56:18 C'est donner, au contraire, de la visibilité
56:21 à d'autres langues, donner la visibilité
56:24 et la possibilité d'exercer d'autres visions
56:27 sur la langue. Sans doute que les métissages
56:30 linguistiques, les erreurs éventuelles
56:33 des enfants accueillis dans une classe
56:36 dans le cadre d'inclusion m'apprennent beaucoup
56:39 sur ma propre langue, m'apprennent beaucoup
56:41 sur d'autres systèmes et apprennent peut-être,
56:44 comme vous l'avez dit magnifiquement
56:46 et simplement, madame, que tout le monde bouge.
56:49 [SILENCE]

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