Chaque dimanche, #LeGrandRDV reçoit un invité politique dans le Grand Rendez-Vous, en partenariat avec Europe 1 et Les Echos.
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00:00 Bonjour à tous et bienvenue à vous. Bonjour Yael Bronte-Pivet.
00:05 Bonjour. C'est votre grand rendez-vous ce dimanche.
00:07 Vous êtes la présidente de l'Assemblée nationale. Vous occupez un poste-clé dans
00:11 un contexte social toujours éruptif alors que l'exécutif cherche encore une sortie
00:16 de crise. Comment imaginez-vous la suite du quinquennat quand certains sentent déjà
00:20 un parfum de fin de reine ? Nos institutions sont-elles encore adaptées ? Les divisions
00:25 françaises sont réelles et profondes ? Que faut-il changer selon vous de fond en comble
00:30 ? Et puis on s'intéressera aussi dans cette émission à votre parcours alors que certains
00:34 vous imaginent, peut-être que ça vous fait plaisir certainement, propulsés en 2027.
00:39 Pour vous interroger à mes côtés mes camarades Stéphane Dupont-Deseco, bonjour Stéphane.
00:43 Bonjour. Et Mathieu Bockcôté, bonjour à vous Mathieu.
00:45 Bonjour. Tout d'abord Yael Bronte-Pivet, j'imagine
00:48 que vous avez suivi cette cérémonie, une liturgie impressionnante hier, un véritable
00:52 sacre du roi Charles III. Que vous a inspiré ce moment évidemment très particulier et
00:57 mondial ? Je trouvais que c'était très touchant. Très
01:01 touchant de voir un peuple qui communie autour d'une personne, autour d'une famille, autour
01:09 aussi et surtout de son histoire, de ses traditions. Et j'ai trouvé que les Anglais avaient cela
01:18 de particulier et ça fait partie d'eux-mêmes. Et je trouve cela touchant parce que cela
01:23 fait partie profondément de ce qu'il fait le Royaume-Uni, ce qui est constitutif de
01:31 leur nation. Et j'ai trouvé ça très intéressant de voir que cela perdure et que tout le peuple
01:40 communie encore autour de ces traditions. Mais de fois vous dites communion, c'est-à-dire
01:43 qu'il y a des moments d'union possibles. Alors là évidemment c'est une monarchie,
01:47 c'est très particulier autour de la figure du roi. Communion encore possible dans certains
01:51 pays avec un peuple rassemblé. Justement.
01:53 On voit peut-être un miroir inversé par rapport à la…
01:56 Voilà, justement, vous mettez je crois les bons mots sur ces sujets-là. Nous avons besoin
02:01 de nous rassembler, nous avons besoin de faire société. Et lorsque l'on voit un peuple
02:06 faire société, je trouve cela inspirant et c'est ce dont nous avons besoin ici en
02:12 France plus que jamais. On parle beaucoup de division, on parle de conflictualité.
02:16 Eh bien, parlons plutôt de ce que l'on peut faire ensemble en tant que nation.
02:21 Vous parlez de communion, vous parlez d'un peuple rassemblé autour de son histoire.
02:24 Il y avait quelque chose d'un peu sacré pourrait-on dire dans l'événement en Grande-Bretagne.
02:28 Est-ce qu'un tel sacré est possible en France, dans un pays qui a peut-être moins
02:31 le sens de son unité ? Alors, c'est intéressant. Vous savez, à
02:37 l'Assemblée nationale, il y a un lieu qu'on définit comme étant sacré. C'est le périmètre
02:42 sacré. C'est le périmètre autour de l'hémicycle qui est sacré et qui est sacré pour notre
02:48 République parce que c'est là où le Parlement vote la loi.
02:52 Donc, il y a encore du sacré au Parlement français ?
02:55 Il y a encore un périmètre sacré. Et je crois que dans notre République, ce qui est
02:59 sacré, ce sont nos valeurs, ce sont nos principes fondateurs. Et effectivement, je fais partie
03:07 de ceux qui pensent que nos institutions sont sacrées, que le Parlement est sacré. Et
03:12 c'est la raison pour laquelle, lorsque je suis au perchoir, inlassablement, je lutte
03:17 pour que chacun dans l'hémicycle se souvienne que ce lieu est sacré et qu'on ne peut pas
03:23 y avoir n'importe quelle tenue vestimentaire, qu'on ne peut pas y avoir n'importe quelle
03:28 attitude, qu'on ne peut pas dire n'importe quoi dans cet hémicycle parce que, oui, l'hémicycle
03:33 en France aujourd'hui, je crois, est sacré. Et pourtant, il en a été dit des choses.
03:36 Il y a eu certains comportements, évidemment, les Français ont assisté ces derniers mois
03:40 à des comportements irruptifs, je ne dirais pas jamais vus, puisque quand même l'Assemblée
03:44 nationale a souvent été un chaudron bouillant. Vous avez été choquée vous-même qu'il
03:49 y ait une sorte de rupture, comme vous dites, par rapport à une attitude qui devrait être
03:53 assez responsable, peut-être digne dans ce lieu particulier ?
03:56 Oui, par moment, je suis choquée. Par moment, effectivement, je trouve ça choquant. Mais
04:01 à l'instar des Français, moi, à chaque fois que je me déplace sur le territoire,
04:06 que je vais à la rencontre des Français, c'est ce qu'ils me disent en premier.
04:09 En premier. Et la faute à qui ?
04:11 Et ils me disent que nous avons raison de ne rien laisser passer et que nous avons raison
04:17 de sanctionner les comportements lorsqu'ils ne sont pas tolérables, parce que justement,
04:22 pour les Français aussi, leur démocratie, les institutions, le Parlement, l'Assemblée
04:26 nationale, c'est sacré.
04:27 Ce qui se passe à l'Assemblée, là, ce qu'on a vu, le spectacle, notamment pendant
04:30 les discussions sur la réforme des retraites, c'est symptomatique de quoi, selon vous,
04:34 une crise démocratique ? Qu'est-ce qui se passe dans le pays ? Pourquoi ça va aussi
04:37 mal ?
04:38 Alors, je crois qu'il ne faut pas tout mélanger et il ne faudrait pas penser que ce qui s'est
04:44 passé à l'Assemblée nationale pendant la réforme des retraites constitue le quotidien
04:48 de l'Assemblée nationale. Ça n'est vraiment pas le cas. L'Assemblée nationale…
04:51 On voit les Français en tous les cas.
04:53 Mais ils ne voient pas que ça. Ils voient aussi une Assemblée nationale qui est au
04:56 travail, qui vote des textes, plus de 25 textes votés de façon définitive.
04:59 Je ne sais pas si ils ont en fait ce nombre de textes et elles bronchent tous les fois
05:02 pour être réalistes.
05:03 Ils ne voient pas le nombre de textes mais ils voient surtout les mesures que l'on
05:06 a votées. Parce que vous avez raison, ce n'est pas le nombre de textes qui importe.
05:10 Exemple, dites-nous ce matin une mesure emblématique qui impacte le quotidien des Français que
05:14 vous avez votés.
05:15 Les mesures que nous avons adoptées sur le pouvoir d'achat à l'été où nous avons
05:20 revalorisé les retraites, revalorisé le point d'intêtre d'indice des fonctionnaires.
05:26 Nous avons adopté la déconjugalisation de l'allocation adultes handicapés. Ceux-là,
05:32 ce sont des mesures très concrètes qui impactent le quotidien des Français à tout moment.
05:36 Pourquoi vous ne voulez pas reprendre l'expression crise démocratique ? Pourquoi vous la niez
05:42 et vous estimez que ce n'est pas la réalité de ce que nous sommes en train de vivre dans
05:45 le pays ?
05:46 On est dans un moment effectivement particulier. Certains le qualifient comme crise. Moi, je
05:52 ne vais pas jusque-là. On est dans un moment de tension, de crispation extrêmement importante.
05:57 Mais pour autant, nos institutions sont parfaitement en état de marche. Parce que quand je vous
06:03 dis que nous votons des textes, ce n'est pas rien. Cela veut dire que notre Assemblée
06:10 nationale fonctionne. Et surtout, et c'est très important aussi, nous obtenons de façon
06:15 systématique des accords avec le Sénat.
06:18 Je viens de vous dire qu'il y avait des moments de tension et de crispation. Mais
06:24 pour autant, il ne faut pas décrire les choses tout noir ou tout blanc. Il faut nuancer
06:29 le tableau. C'est ce que je fais parce qu'il y a des choses qui fonctionnent. Et à nous
06:34 aujourd'hui et demain de faire en sorte qu'il y en ait encore plus qui fonctionnent. A nous
06:38 de faire en sorte que notre Assemblée puisse encore plus remplir sa mission. A nous d'effacer
06:43 ces moments de tension qui effectivement, par cet effet grossissant, donnent l'impression
06:51 que cela ne marche pas. A nous de mettre encore tous nos efforts pour faire en sorte que cela
06:57 marche mieux.
06:58 Qui est responsable de cette crispation et de ces tensions ? C'est le Président de
07:01 la République ? C'est ce que disent les oppositions ?
07:04 Oui, après, vous savez, les oppositions, elles sont promptes à chercher des coupables
07:10 et des responsables qui ne sont surtout pas eux. Moi, ce n'est pas du tout ma façon
07:14 de faire de la politique. Moi, en faisant de la politique, j'ai des convictions, mais
07:19 je prends surtout mes responsabilités. Et donc, considérer qu'à chaque fois qu'il
07:25 y a quelque chose qui va mal, il faut désigner un coupable qui soit surtout extérieur, ce
07:29 n'est pas ma façon de faire. J'ai envie de vous dire, mais nous sommes tous responsables.
07:35 Parce qu'à partir du moment où nous sommes engagés dans la vie politique, nous avons
07:39 tous une action à mener et une responsabilité.
07:42 Si la crise de confiance perdure, si le lien avec les Français continue de se distendre,
07:48 Emmanuel Macron pourra-t-il vraiment éviter, vous en êtes la Présidente, la dissolution
07:51 de l'Assemblée nationale ? Est-ce qu'il peut l'éviter, cette dissolution, compte
07:55 tenu de la situation que nous avons ?
07:57 Mais, à nouveau, certains cherchent un responsable, d'autres cherchent une solution miracle,
08:03 le référendum, la dissolution, je ne sais quoi d'autre. Moi, je ne crois ni en l'un
08:08 ni en l'autre. Je ne crois ni au responsable unique, ni à la solution miracle. Moi, je
08:13 crois au travail, moi, je crois au fait de faire un maximum d'efforts pour aller chercher
08:20 des compromis, pour essayer de faire en sorte de se mettre d'accord sur un certain nombre
08:24 de constats et une façon de travailler. Mais c'est, à nouveau, ce que l'on fait depuis
08:29 des mois à l'Assemblée nationale.
08:31 Le Président peut-il continuer ? Alors, écartons finalement la dissolution, etc. Est-ce qu'il
08:35 peut continuer ainsi sans rien changer sur la méthode et sur lui-même, le président
08:39 de la République ? Vous parlez de façon de travailler.
08:42 Mais parce que la façon de travailler pour moi est essentielle, entre le président de
08:46 la République, le gouvernement et le Parlement. Et moi, vous voyez, je fais partie de ceux
08:51 qui pensent qu'aujourd'hui, une partie de la solution est au Parlement, qu'une partie
08:56 de la solution est à l'Assemblée nationale. Parce qu'à l'Assemblée nationale, nous
09:00 arrivons, nous sommes tous réunis. Nous sommes tous réunis. Mais un Parlement, moi, j'ai
09:06 plaidé depuis longtemps pour un plaidoyer, j'ai fait un plaidoyer pour un Parlement renforcé.
09:11 Parce qu'à l'Assemblée nationale, nous travaillons dans des commissions, nous travaillons
09:14 dans des missions. Nous, nous côtoyons au quotidien. Nous côtoyons toutes les oppositions
09:19 au quotidien.
09:20 Mais diriez-vous que toutes les oppositions sont légitimes aujourd'hui ?
09:22 Toutes les oppositions.
09:23 Souvent, je résume la question. On entend d'un côté le gouvernement qui dit il y a
09:28 les extrêmes, de l'autre côté il y a les oppositions qui disent le gouvernement est
09:31 coupé de la population. Diriez-vous, est-ce que vous utiliseriez, dis-je, le terme les
09:36 extrêmes pour parler de la France insoumise ou du RN par exemple ?
09:39 Il y a deux choses différentes dans votre question. Que les oppositions soient légitimes,
09:45 me paraît, c'est une évidence. Chaque député qui siège à l'Assemblée nationale a été
09:50 élu.
09:51 Tous sont républicains.
09:52 A été élu par les Français. Donc, ils sont légitimes à siéger à l'Assemblée
09:55 nationale et je ne fais pas partie de ceux qui considèrent qu'il faut faire le tri
09:59 entre les députés. Et je l'ai dit dès mon accession au perchoir. Cela étant, cela
10:05 n'empêche pas de qualifier après politiquement ce qui est porté par tel ou tel parti politique
10:10 et donc considérer que les positions des uns et des autres puissent être des positions
10:16 extrêmes incarnant soit l'extrême droite soit l'extrême gauche, c'est autre chose
10:20 et c'est quelque chose que j'assume parfaitement.
10:22 Et moi je pense qu'effectivement il y a dans l'hémicycle de l'Assemblée nationale
10:27 certains parlementaires qui visent et dont l'objectif est d'installer le chaos et de
10:34 faire en sorte que notre institution ne fonctionne pas. C'est l'objectif de certains parlementaires.
10:39 Je ne dis pas que c'est l'objectif de groupes politiques dans leur ensemble mais il y a
10:45 clairement certains parlementaires, des individualités qui ne sont pas dans une logique d'exercer
10:53 leur mandat d'une façon constructive pour essayer…
10:57 C'est une accusation grave qui ?
10:58 Non, ce n'est pas une accusation…
10:59 Oui, c'est grave de ce que vous dites, donnez-lui des noms.
11:02 Mais je n'ai pas à citer un tel ou un tel. Nous avons parlé en début d'émission
11:08 de ceux qui ne respectaient pas l'institution, de ceux qui faisaient régner le désordre,
11:15 donc c'est ceux-là dont je parle qui effectivement ne sont pas dans une logique institutionnelle.
11:19 Mais ceux-là, ils le font pourquoi ? À votre avis ? Ils le font parce que c'est un projet
11:26 politique qui est de dire "nous, nous souhaitons instaurer une 6e République, donc nous considérons
11:32 que la 5e République, elle est complètement défaillante et donc nous en faisons la démonstration
11:38 dans le hémicycle et nous légitimons notre projet politique". Eh bien oui, je trouve
11:42 que c'est dangereux parce que dans des périodes de tension, lorsqu'il y a un pays qui est
11:48 crispé, moi je pense que nos institutions nous protègent et qu'elles protègent les
11:53 droits et libertés de chacun de nos concitoyens. Donc certes, il faut les adapter et probablement
11:58 les adapter profondément, mais il ne faut pas renverser la table. Je pense que ça serait
12:03 grave et dangereux pour notre pays.
12:05 Alors justement, on va en parler, on va marquer une courte pause. Yael Broun-Pivet, président
12:08 de l'Assemblée nationale. Comment réformer ? Parce que vous ne voulez pas révolutionner
12:12 et en même temps justement répondre à la crise actuelle. On marque une courte pause
12:17 et on se retrouve sur Europe 1 et C News.
12:19 Et merci à vous de nous suivre ce dimanche en direct avec notre invité politique, la
12:26 présidente de l'Assemblée nationale, Yael Broun-Pivet. On va parler évidemment de la
12:30 réforme des institutions, vous parlez de cette volonté, cette légitimité à réformer.
12:36 Un mot quand même sur votre rôle, la manière dont vous êtes perçue. Certains vous qualifient
12:40 de chef de bande aux perchoirs, notamment les insoumis. Comment vous répondez à cela ?
12:45 C'est dans la droite ligne de ce qu'on vient de se dire, c'est-à-dire qu'il n'y a pas
12:51 de respect et que justement, d'aucuns considèrent que les institutions et que le mandat n'est
12:56 pas quelque chose de sacré dans une république. Moi je crois que dans une république justement,
13:01 dans une démocratie, il n'y a rien de plus sacré que le mandat.
13:05 Vous reproche de rouler pour votre camp, la Macronie.
13:08 Alors c'est assez amusant parce que les mêmes pensaient l'inverse et disaient l'inverse
13:14 il y a quelques mois de cela. Donc à nouveau c'est parfaitement agiométrie variable.
13:19 Mais lorsque j'entends d'autres présidents de groupes de l'opposition, je crois qu'ils
13:24 sont unanimes pour dire que justement, je suis une présidente de l'Assemblée nationale
13:29 qui défend avant tout son institution et l'institution et donc l'ensemble des parlementaires
13:32 qui est ici.
13:33 Vous la défendez Yael Bourron-Pivet avec une volonté aussi de la réformer, réformer
13:36 nos institutions mais pas révolutionner. Dites-vous, on pense tout de suite à la 6ème
13:41 république de Jean-Luc Mélenchon que vous qualifiez de dangereuse. En quoi ce serait
13:44 dangereux ?
13:45 Je crois déjà qu'il faut toucher aux institutions de façon profonde lorsque le climat est apaisé.
13:53 Et donc aujourd'hui je n'ai pas le sentiment et je pense que vous le partagerez avec moi
13:57 que le climat est propice pour dire on fait une constituante et on rebat toutes les cartes
14:04 de notre régime. Je ne suis pas convaincue que nous aurions une majorité pour ce faire.
14:09 Vous êtes lucide.
14:10 Mais en revanche, je pense qu'il faut les adapter. J'entends ce que nous disent nos
14:15 concitoyens. J'entends qu'ils souhaitent plus de parlement parce que le parlement c'est
14:21 le lieu de l'expression de la pluralité politique que les Français ont voulu puisqu'ils ont
14:26 élu un parlement avec 10 groupes politiques représentés et sans majorité absolue. J'entends
14:32 que les Français veulent davantage participer donc il faut travailler sur la participation
14:36 de ces citoyens.
14:37 Plus de parlement alors que vous avez été de celles qui ont milité pour le 49.3 ? Il
14:41 y a de quoi être tombé de sa tête ce matin.
14:43 Pas du tout.
14:44 Vous voulez que le parlement contourne le parlement ?
14:45 Non parce que le 49.3 pour moi n'est pas un contournement du parlement.
14:49 Le 49.3 ?
14:50 Non, le 49.3 est un outil constitutionnel qui a été créé dès l'origine et vous
14:55 le savez aussi bien que moi pour faire face à deux situations, une majorité relative
15:00 ou une situation d'obstruction. Nous avons été dans cette situation sur les deux aspects,
15:07 obstruction parlementaire et nous sommes en majorité relative. Ce n'est pas anormal
15:11 d'utiliser, que le gouvernement utilise le 49.3 qui est au demeurant extrêmement limité
15:16 depuis la réforme de 2008. En revanche, je pense aujourd'hui que le parlement peut être
15:21 la solution ou une des solutions parce qu'au parlement toutes les expressions politiques
15:27 sont représentées et parce qu'au parlement nous avons les moyens de parvenir à des compromis
15:32 en amont.
15:33 Et pourquoi c'est une solution ?
15:34 Parce que nous pouvons parvenir à des compromis en amont. C'est-à-dire qu'au parlement
15:39 nous arrivons à travailler ensemble sur de longs mois, sur ce qu'on appelle des missions
15:43 d'information qui allient majorité et opposition. Et par exemple, je vous donne un simple exemple
15:49 très clair. Pendant que j'étais présidente de la Commission des lois, nous avons fait
15:53 un rapport mené par les Républicains et le groupe démocrate sur un sujet qui intéresse
15:59 les Français au plus, les consommateurs sur les actions de groupe. Vous savez ces actions
16:03 qui marchent bien de l'autre côté de l'Atlantique et qui permettent aux consommateurs de se
16:08 mettre ensemble et de pouvoir attaquer une entreprise, etc. Et bien en France, ce dispositif
16:13 ne marche pas, ne marche pas bien. Et donc ces députés ont travaillé pendant des mois
16:18 et des mois pour essayer de trouver les mécanismes pour décoincer ce dispositif. Ils ont abouti
16:24 à un rapport d'information. J'ai saisi le Conseil d'État sur une proposition de loi
16:28 qu'ils avaient formulée. Cette proposition de loi a été examinée dans l'hémicycle
16:32 et votée à l'unanimité.
16:34 Heureusement, il y a des choses qui fonctionnent.
16:36 Mais c'est important parce que c'est la méthode.
16:38 Le compte d'accord a été perçu, que vous le vouliez ou pas, par une partie des Français
16:42 comme un contournement de la démocratie. Dans les différents sondages et un récent
16:45 sondage, une majorité de Français estime que la démocratie est abîmée. On en est
16:50 là aujourd'hui. Que des choses fonctionnent très bien, mais par rapport à une démocratie
16:55 à tort ou à raison qui est perçue comme abîmée, c'est un électrochoc, il faut un
16:59 sursaut.
17:00 Il faut, je crois, un sursaut. Vous avez raison. C'est la raison pour laquelle moi,
17:05 je suis très alente, extrêmement alente sur la réforme institutionnelle, ce que le président
17:12 de la République a souhaité organiser. Il a proposé pendant la campagne présidentielle
17:18 qu'on fasse une réforme constitutionnelle, institutionnelle et qu'on réunisse les différents
17:23 groupes politiques. Il nous a chargé avec le président du Sénat de mener ces consultations
17:28 politiques dans nos assemblées respectives. Et c'est ce que nous allons faire très rapidement
17:33 parce que je crois qu'effectivement, c'est un élément de réponse essentiel. Et j'ajouterai
17:38 même que ça, c'est la discussion que nous allons avoir entre nous. Mais moi, je pense
17:43 que c'est une discussion, évidemment, dans laquelle nous devons échanger avec les Français.
17:47 Et moi, j'ai décidé et j'ai commencé à échanger avec eux en allant sur le terrain,
17:54 en faisant des réunions publiques et qui seront évidemment ouvertes à tout le monde.
18:00 Et j'irai sur tout le territoire pour pouvoir échanger avec les Français sur cette question.
18:05 Ça n'est pas une campagne, mais il faut être à l'écoute.
18:07 Ça fait 6 ans que ça dure. C'était déjà dans la campagne d'Emmanuel Macron en 2017,
18:14 cette réforme institutionnelle, réforme constitutionnelle, ça a débouché sur rien.
18:18 Comment est-ce que les Français peuvent-ils vous croire ?
18:19 Ça n'est pas complètement exact que ça n'a débouché sur rien, puisque nous avons
18:25 voté dès 2017, en juillet-août 2017, ce qu'on appelle les lois confiance pour la
18:31 vie politique, dans lesquelles nous avons adopté un certain nombre de mesures réclamées
18:35 par les Français. L'interdiction des emplois familiaux, un meilleur contrôle des conflits
18:40 d'intérêts. Je vous rappelle qu'à cet égard, nous avions également instauré un
18:43 contrôle des frais de mandat des parlementaires qui n'existait pas auparavant. Et c'était
18:47 la première brique de la réforme institutionnelle. Il est vrai qu'après, nous n'avons pas réussi
18:52 à aboutir sur la réforme constitutionnelle. C'est justement toute l'idée qu'a le président
18:59 de la République d'avoir un changement de méthode et de commencer par une consultation
19:03 des forces politiques pour aller chercher les points de convergence et les points de
19:08 divergence. Vous êtes d'accord sur quoi ? Vous n'êtes pas d'accord sur quoi ? Et
19:12 comment on arrive à dessiner les contours d'une réforme sur laquelle on aurait une
19:17 majorité ? Qu'est-ce que vous voulez comme mesure ? Quelle
19:20 proposition vous faites pour une réforme institutionnelle ? Vous appelez de vos vœux
19:23 une réforme institutionnelle. Concrètement, qu'est-ce que vous voulez ?
19:25 Moi, ce que je souhaiterais à titre personnel, c'est une réforme institutionnelle qui permette
19:32 de garantir une meilleure participation à nos concitoyens dans la vie politique. C'est-à-dire
19:37 qu'aujourd'hui, on voit et on vient de le voir de façon éclatante, les outils référendaires
19:45 à l'initiative des citoyens ne fonctionnent pas. Le référendum d'initiative partagée
19:49 vient d'être à nouveau rejeté par le Conseil constitutionnel. Il existe depuis 2008, nous
19:55 sommes en 2023, il n'a jamais réussi à être activé.
19:58 Donc il faudrait faciliter l'usage du référendum en France.
19:59 Donc il faut faciliter l'usage du référendum en France, que ce soit un référendum d'initiative
20:03 citoyenne ou un référendum d'initiative citoyenne. Là, je crois qu'il y a un vrai
20:09 sujet à travailler ensemble.
20:10 Arrêtons-nous sur cette proposition. Elle est importante, puisque vous dites depuis
20:13 tout à l'heure à l'écoute des Français. Je pense que vous le dites aussi à la Macronie
20:19 et à la tête de l'exécutif. Et donc, vous pensez que ça passe aussi par cette voie référendaire,
20:24 c'est important ?
20:25 Oui. Moi, je pense que c'est important et je pense que c'est un des moyens, d'une part,
20:31 de redonner la parole à nos concitoyens, de les intéresser à la vie politique en
20:36 dehors des échéances électorales, en dehors du fait simplement de mettre un bulletin de
20:42 vote. Et il faut évidemment, pour retrouver la confiance, que l'issue du référendum
20:47 soit...
20:48 Ça passe par une réforme constitutionnelle, donc par une large majorité dans les deux
20:51 champs.
20:52 Alors, l'aménagement du référendum, effectivement, vous avez raison, passe par une réforme constitutionnelle,
20:56 puisqu'il s'agit de modifier l'article 11 de la Constitution.
21:00 Ça, vous n'avez pas réussi à le faire dans le premier quinquennat, pourquoi vous y arrivez
21:02 ?
21:03 Parce qu'aujourd'hui, on va mettre tout le monde autour de la table et j'espère, compte
21:08 tenu de l'évolution de la situation, compte tenu des demandes répétées de nos compatriotes,
21:14 j'espère que nous pourrons avoir un consensus politique sur ce principe et sur, après,
21:22 la concrétisation dans les textes de la réforme.
21:24 Vous appelez à la responsabilité pour trouver ce consensus sur les institutions et sur,
21:31 justement, cette facilitation du référendum ?
21:32 Oui, et j'appelle à la responsabilité plus largement, d'ailleurs, parce que, finalement,
21:38 nous devons tous, collectivement, tirer les conclusions de l'absence de majorité absolue
21:44 et de cette représentation si variée à l'Assemblée nationale. Et ces conclusions, c'est quoi
21:49 ?
21:50 C'est que, finalement, aujourd'hui, on ne peut pas être uniquement dans un bloc de
21:54 ceux qui sont pour, ceux qui sont contre et les opposants n'ont qu'un objectif, c'est
22:00 de devenir un jour majoritaire pour remplacer... Non, mais ça, c'était avant. Moi, je crois
22:05 que ça, c'était avant. Je crois qu'aujourd'hui, et on le voit dans les sondages, les Français
22:10 expriment massivement leur satisfaction devant ce visage de l'Assemblée nationale et donc
22:16 ça induit une responsabilité, évidemment, de ceux qui sont au pouvoir et qui sont majoritaires,
22:23 de rassembler largement et ça induit, évidemment, du côté de ceux qui ne sont pas dans la
22:28 majorité, de rentrer dans cette démarche-là, dans l'intérêt des Français.
22:31 On va continuer à en parler avec un maître mot, ce matin, dans votre bouche, la responsabilité
22:36 dans cette situation. On en parlera aussi sur des thèmes toujours clivants, l'immigration,
22:41 justement. Est-ce qu'il aurait fallu, est-ce qu'il faut un référendum sur ce sujet ? On
22:44 en parle juste après la pause. A tout de suite.
22:46 Et ce dimanche, elle est dans l'actualité la présidente de l'Assemblée nationale, Yael
22:54 Braune-Pivet. Vous avez également donné une interview dans le journal du dimanche,
22:59 justement, sur la réforme des institutions. Vous évoquez la fameuse dose proportionnelle
23:03 aux législatives. Alors, c'est vraiment le serpent de mer de votre histoire politique.
23:07 J'allais dire, ça ne mange pas de pain de le proposer.
23:09 Pourquoi ça ne mange pas de pain ?
23:10 Parce qu'à chaque fois, on le propose et puis rien ne se passe. Vous n'êtes pas d'accord
23:13 ?
23:14 Je pense que c'est effectivement quelque chose, en tout cas, qui revient fréquemment
23:19 le mode de scrutin du parlementaire. Ce n'est pas une question simple parce que certains,
23:26 les tenants d'un scrutin majoritaire, considèrent que le parlementaire doit être très ancré
23:29 sur un territoire et donc doit avoir une circonscription d'élections. Et puis d'autres pensent que
23:34 le parlementaire doit plus représenter des courants politiques et donc sont plus tenants
23:39 de la proportionnelle. Donc, s'il y a un vrai débat, pas philosophique, mais politique
23:44 de fond sur ce sujet.
23:45 Maintenant, je constate que les Français la souhaitent de façon récurrente depuis
23:52 très longtemps. Donc, il faut en discuter. Moi, très clairement, je suis favorable à
23:57 ce que les Français aient une représentation la plus parfaite dans l'hémicycle. Et je
24:01 vois qu'effectivement, à tout le moins, une forte dose de proportionnel permettrait
24:06 d'atteindre cette meilleure représentation. Donc, moi, j'y suis plutôt favorable.
24:10 Mais à l'Assemblée, vous seriez de moins en moins gouvernables parce qu'il y aurait
24:13 probablement encore une majorité plus relative et plus de groupes. Ça serait plus dispersé.
24:19 C'est la raison pour laquelle il faut vraiment changer de paradigme dans notre vie politique
24:24 et dans la façon d'agir des responsables politiques. Il ne faut pas espérer de façon
24:32 inconditionnelle une majorité. Il faut être capable. On en vit tout le temps, les pays
24:37 autour de nous, l'Allemagne, les pays nordiques, ils fonctionnent en coalition. Sans parler
24:41 forcément de coalition, quand on est aux responsabilités qu'on a été élus, il faut
24:49 œuvrer dans l'intérêt des Français. Et donc, il faut aller chercher des solutions.
24:53 Donc, il faut rentrer dans une logique de construction de la solution et ne pas être
24:57 uniquement dans la logique de votre solution n'est pas la bonne.
25:00 Vous avez imaginé, vous dites qu'il faut des majorités. Les majorités se construisent
25:04 aussi potentiellement par référendum. Vous l'avez évoqué il y a quelques instants,
25:08 vous êtes favorable à l'usage du référendum, soit d'initiative présidentielle, soit d'initiative
25:12 populaire. Autour de quelles questions faudrait-il user du référendum par exemple aujourd'hui?
25:15 Beaucoup de Français le souhaitaient sur les retraites, ce n'est peut-être pas votre
25:17 cas. Mais autour de quelles questions le référendum pourrait être utile aujourd'hui?
25:21 C'est une bonne question. Au hasard, moi j'aurais plutôt dit la fin de vie. Mais ça n'est
25:33 pas nécessairement un des grands sujets de société, mais qui justement ne rentre pas
25:39 nécessairement dans le cadre des référendums tels qu'ils existent aujourd'hui.
25:42 Il y a plusieurs suggestions sur l'immigration. Après sur l'immigration, il faudrait voir
25:48 quelles questions. Parce qu'en fait, un référendum n'a de sens que si vous posez une question
25:55 qui est des questions qui sont précises, qui sont des questions à enjeu et sur lesquelles
26:00 effectivement vous avez une controverse politique. Donc il faut regarder.
26:06 Ecoutez, je vous donne une question au hasard. Il faut-il aller vers la régularisation des
26:10 sans-papiers dans les métiers en tension? Voilà une question simple qu'on pourrait
26:13 poser aux Français.
26:14 Pourquoi pas? Mais vous savez qu'il y a d'autres sujets. Ça peut être sur les sujets
26:21 justement institutionnels. Il pourrait y avoir des questions qui pourraient être intéressantes.
26:27 Ou alors si nous aboutissons à un accord, au lieu de faire une réforme par les trois
26:32 cinquièmes au Congrès, pourquoi nous ne demanderions pas leur avis aux Français sur
26:36 l'évolution institutionnelle de notre pays dans le cadre de la procédure, et je le précise,
26:40 de l'article 89 de la Constitution qui prévoit d'abord l'adoption d'un texte conforme dans
26:45 les deux chambres. C'est très important.
26:47 On vous parle de ce sujet sur l'immigration parce que faute de majorité, le gouvernement
26:52 a ajourné son projet de loi qui sera présenté finalement à l'automne. Est-ce que pour
26:57 vous il faut faire cette réforme?
26:59 Alors oui, parce qu'il y a un certain nombre de sujets qu'il nous faut régler et nous
27:06 avons pour ce faire besoin d'une loi.
27:08 Vous pensez qu'une loi règle les problèmes d'immigration aujourd'hui?
27:13 Pas seulement. Mais nous avons notamment des questions autour de la procédure qui est
27:19 devenue extrêmement complexe, qui embolise des juridictions et donc sur le plan procédural
27:27 notamment, une loi qui viserait à simplifier la procédure et c'est les travaux de François
27:33 Noël Buffet, président de la Commission des lois du Sénat, qui vont dans ce sens.
27:38 Mais une loi, évidemment, ne fait pas tout.
27:41 Moi, je vous disais tout à l'heure, je ne crois pas dans le pouvoir magique ni la responsabilité
27:46 d'un seul. C'est la présidente de l'Assemblée nationale qui vous le dit. Ne comptez pas
27:52 sur simplement une loi pour régler le problème.
27:54 On est tous d'accord. Pour le problème migratoire, nous avons l'action européenne et on voit
28:00 que...
28:01 L'action ou l'inaction européenne?
28:02 L'action.
28:03 Parce qu'à écouter les propos de M. Darmanin accusant la Première ministre italienne,
28:07 Giorgia Melloni, c'est une inaction. Elle n'est pas capable de régler les problèmes
28:10 migratoires.
28:11 L'action européenne, c'est-à-dire avec le pacte sur la migration et sur l'asile,
28:16 le Parlement l'a adopté la semaine dernière.
28:18 Non, mais c'est important.
28:21 Vous savez vous-même qu'il y a plein de trucs dans la raquette.
28:24 Mais il y a justement. Et c'est ce pacte européen qui vise à en régler un certain
28:29 nombre avec notamment des procédures d'asile à la frontière, avec notamment une meilleure
28:35 solidarité européenne qui pourrait permettre d'alléger la charge qui pèse sur certains
28:40 pays.
28:41 Dans le milieu mondial, il n'y a pas de solidarité.
28:42 Mais ça avance.
28:43 Il n'y a pas de solidarité.
28:44 Ça avance.
28:45 Les textes sont en cours de préparation au niveau européen et nous avons tous pour
28:50 espoir d'aboutir avant les élections européennes.
28:52 Donc c'est d'ici un an.
28:54 Donc c'est à l'action européenne.
28:55 Il y a l'action très concrète que nous menons au quotidien sous l'égide de Gérald Darmanin.
29:00 Le nombre de reconduites qui a doublé entre 2021 et 2022.
29:05 Il y a des choses qui sont faites.
29:07 Le président du Rassemblement national en déplacement dans les Alpes-Maritimes, Jordan
29:11 Bardella, a affirmé que le gouvernement ne veut pas en réalité lutter contre l'immigration
29:14 et il ajoute "les chiffres de l'immigration sont ceux de l'insécurité de main et les
29:18 chiffres de la délinquance aujourd'hui sont ceux de l'immigration d'hier".
29:22 En quoi est-il tort selon vous ?
29:25 J'ai trouvé cette phrase très choquante.
29:27 Dites-nous pourquoi.
29:28 Parce que vous savez, je ne sais pas si certains s'en souviennent, mais moi quand j'étais
29:33 enfant et que j'allais à l'école dans les années 80, je voyais une affiche où c'était
29:39 un million de chômeurs égal un million d'immigrés de trop.
29:42 C'est ça qu'on disait.
29:44 Eh bien là, ça relève exactement du même amalgame.
29:49 Mais le lien entre immigration et délinquance avec toutes les nuances qui sont des sœurs
29:54 a été fait par Gérald Darmanin et par le président de la République aussi.
29:57 Sont-ils nos hérables ces deux-là aussi ?
29:58 Il y a des études.
30:02 Moi, je me réfère aux études sur le lien entre l'immigration et la délinquance.
30:06 Et on voit que la surreprésentation parfois de populations d'origine immigrée a de nombreuses
30:14 explications et de biais sociologiques et statistiques.
30:17 Vous les connaissez aussi bien que moi.
30:20 Surreprésentation des étrangers dans les villes, surreprésentation des personnes qui
30:27 font une délinquance d'appropriation parce qu'elles sont en situation irrégulière,
30:32 etc.
30:33 Donc moi, je ne mets pas de signe égal entre immigration et délinquance.
30:35 Je veux simplement savoir quand Gérald Darmanin a reconnu un lien entre immigration et délinquance,
30:40 je ne me trompe pas en disant ça, est-ce que c'était l'activité d'Osea Bon ?
30:43 Non, parce que le lien, il existe lorsqu'on regarde les chiffres, mais il y a un certain
30:49 nombre de biais qu'il ne faut pas occulter.
30:52 C'est sûr, le projet de loi pourrait être très concret parce qu'on sait que la majorité
30:58 est très divisée.
31:00 Il y a une aile gauche qui ne veut pas d'un texte assez durci.
31:04 Comment vous allez avancer vous-même avant de trouver une majorité sur ce texte justement ?
31:08 Moi, je ne vois pas la majorité divisée sur ce texte parce que justement, la recherche
31:15 qui a été faite par le ministre de l'Intérieur et le ministre du Travail, c'est de trouver
31:19 les bons équilibres.
31:20 Et donc, les bons équilibres sont dans le texte avec la régularisation notamment des
31:26 métiers en tension, avec une meilleure intégration de ceux qui souhaitent rester sur notre territoire
31:32 et par ailleurs, une attitude de fermeté à l'égard de ceux qui ne souhaitent pas.
31:39 Donc, il n'y a pas forcément parfait, mais en tout cas un texte équilibré qui doit après
31:45 être discuté.
31:46 Après moi, là où j'ai exprimé des réticences ou des réserves, c'est sur la temporalité
31:53 et sur la méthode.
31:55 Moi, je crois d'une part qu'aujourd'hui, suite à l'épisode retraite, il faut aborder
32:01 d'autres sujets et c'est ce que nous allons faire au Parlement.
32:04 La loi de programmation justice, la loi de programmation militaire, la loi sur le partage
32:09 de la valeur, la loi sur l'industrie verte qui va nous permettre d'accélérer la réindustrialisation
32:15 de notre pays.
32:16 Il faut parler d'immigration, il faut le faire un petit peu plus tard et il faut surtout
32:20 réussir à créer du consensus politique.
32:22 À l'automne ?
32:23 Non mais à l'automne.
32:24 Moi, je suis sur cette ligne-là parce que ces quelques mois supplémentaires, moi je
32:29 crois doivent être mis à profit pour trouver une majorité.
32:32 Malgré les sujets d'urgence pour les Français dans les sondages sur l'immigration parce
32:34 que les Français, quand vous les interrogez, ils ont moins de pudeur.
32:37 Oui, mais alors, vous savez, les sondages, je m'en méfie toujours et lorsque l'on regarde
32:43 les préoccupations du Français, quand on dézoome un petit peu, l'immigration ne vient
32:47 pas en premier.
32:48 La première préoccupation des Français, c'est le pouvoir d'achat.
32:51 La deuxième, c'est la santé et les questions sociales.
32:54 Ils ne placent pas l'immigration dans le top 3 de leurs préoccupations.
32:57 Donc, ça fait partie de leurs préoccupations, mais il ne faut pas non plus en faire la préoccupation
33:03 majeure.
33:04 Ça ne sera pas possible de garder le « en même temps » que vous trouvez formidable
33:08 entre ce qu'a dit le ministre d'Armenie et le ministre d'Ussop parce que ça sera
33:13 voté forcément avec les voix de la droite et la droite va durcir le texte.
33:16 Donc, ce « en même temps » ne pourra pas durer et il risque d'y avoir des divisions
33:21 dans la majorité.
33:22 Comment est-ce que vous allez résoudre ce problème ?
33:23 Nous le résoudrons en temps utile.
33:27 C'est pour ça que je pense qu'il faut se donner encore un peu de temps pour essayer
33:32 de faire un texte qui soit le plus équilibré possible et le plus consensuel possible.
33:37 Et puis, il faut laisser le temps de la discussion parlementaire.
33:40 Moi, vous savez, je suis bien trop souvent rentrée dans l'hémicycle en me disant
33:44 « mais personne ne votera ce texte, nous n'aurons pas de majorité ». Et finalement,
33:47 nous en avons trouvé une par le travail, par les débats et par aussi l'écoulement
33:53 du temps.
33:54 En fait, nous avons des institutions qui permettent l'exercice.
33:56 Mais oui, mais vous savez, moi, c'est ce que j'entendais sur le texte sur les énergies
34:01 renouvelables, sur l'accélération des énergies renouvelables.
34:03 On nous disait que nous n'aurions pas de majorité.
34:06 Oui, mais ça échoue.
34:07 Eh bien, ça échoue.
34:08 Non, mais voilà, dans les deux sens.
34:09 Donc, on va voir ce qui est en train.
34:10 Mais à nous de les… Mais non, mais c'est difficile.
34:11 Mais c'est difficile de construire des majorités.
34:12 Ça ne tombe pas du ciel.
34:13 On va parler de votre méthode, Yael Braun-Pippe.
34:14 On a compris le dialogue, convaincre, responsabilité.
34:15 Et puis, vous avez dit cette phrase qui nous rappelle aussi ce qu'a dit Edouard Philippe,
34:25 libre et loyal.
34:26 On vous dira jusqu'où vous êtes libre et loyal.
34:32 Elle préside une assemblée nationale chahutée, éruptive, mais diverse.
34:39 Yael Braun-Pippe est notre invité ce dimanche.
34:41 Vous avez employé cette expression dans le journal du dimanche.
34:44 « Je suis libre et loyal ». Edouard Philippe avait utilisé la même expression et on a
34:49 découvert dans le livre de notre confrère Ludovic Wigand intitulé « Les 100 jours
34:53 », que cette expression avait beaucoup, beaucoup, beaucoup hérité Emmanuel Macron.
34:56 Vous la maintenez.
34:57 Vous êtes libre et loyal aussi.
34:58 Tout à fait.
34:59 Tout à fait.
35:00 Et ça va jusqu'où, la liberté ? La liberté, c'est, je crois, essentiel
35:07 lorsque l'on fait de la politique parce que quand on fait de la politique, on a des convictions
35:14 et nos concitoyens nous demandent de porter ces convictions.
35:19 Et donc, effectivement, il ne faut pas revenir sur vos convictions.
35:24 Et donc, pour moi, la liberté est la façon de pouvoir exercer pleinement mon mandat politique.
35:32 Je suis allée dire à un moment au président de la République que ce n'est pas ainsi qu'il
35:35 faut faire.
35:36 C'est un exercice du pouvoir trop vertical.
35:39 Est-ce que vous faites partie de ceux qui parlent au président de la République et
35:41 qui l'écoutent surtout ?
35:42 Je fais partie de celles qui avaient dit qu'il ne fallait pas passer par la voie d'amendement
35:49 sur la réforme des retraites à l'automne.
35:51 Je fais partie de ceux qui, effectivement, disent les choses.
35:56 Mais parce que je suis à la tête d'une institution qui est pluraliste et mon rôle
36:02 est avant tout de présider l'Assemblée nationale.
36:06 Et il faut parfois être un peu schizophrène parce qu'il y a ce rôle très institutionnel.
36:10 Si je suis une femme politique avec des convictions.
36:13 Vous dites les choses, mais est-ce que le président vous écoute ? Parce qu'on a l'impression
36:16 que beaucoup de gens lui disent des choses, mais qu'il n'écoute pas beaucoup.
36:18 Ce n'est pas exact.
36:20 Moi, je vois que le président écoute.
36:22 Je vois que sur ces derniers temps, il a énormément consulté les personnalités de la majorité,
36:30 dont moi.
36:31 Et à plusieurs reprises, j'ai beaucoup retrouvé de ce que je lui avais dit.
36:35 Ce n'est pas un exercice solitaire et vertical du pouvoir ?
36:39 Quand on est seul à exercer une fonction, on est forcément solitaire.
36:43 Vous savez, moi, quand je suis au perchoir et que je dois prendre des décisions, je
36:47 suis seule pour les prendre.
36:48 Je suis seule pour les prendre et les assumer.
36:50 Donc je comprends que quand on est unique à exercer une responsabilité, la première
36:55 ministre, le président du Sénat, le président de la République, on est toujours seul à
36:59 les prendre.
37:00 On est seul à les assumer.
37:01 Ça ne veut pas dire qu'on ne consulte pas.
37:03 Ça ne veut pas dire qu'on n'est pas dans des équipes.
37:05 Ça ne veut pas dire qu'on n'est pas dans des collectifs.
37:07 Mais il y a des moments où effectivement, on est seul.
37:11 Est-ce que le pays a besoin aujourd'hui d'un nouveau souffle, d'un nouveau cap ?
37:14 Je crois qu'il a besoin…
37:16 Par exemple, d'un nouveau premier ministre pour être plus concret ?
37:18 Ce n'est pas pareil.
37:20 Ce n'est pas pareil.
37:21 On a envie effectivement, tous, et c'est l'objet d'une campagne présidentielle
37:26 qui vient de se dérouler, de savoir où est-ce qu'on veut aller, où est-ce qu'on
37:30 va ensemble.
37:31 Au début de cette émission, on parlait de faire société.
37:33 Mais faire société, ça veut dire quoi ? Ça veut dire pourquoi ?
37:37 Où est-ce qu'on veut aller ensemble ?
37:39 Ça ne veut plus dire grand-chose malheureusement.
37:40 On ne sait même pas ce qui va se passer dans cette année pour savoir ce qui va se passer
37:43 dans la suite du quinquennat, madame Maëlle Brontilvet.
37:46 C'est pas vrai.
37:47 C'est très clair.
37:48 Nous, ce que nous voulons faire avec le président de la République, nous voulons aller vers
37:53 une société décarbonée.
37:54 Et donc, nous avons adopté un certain nombre de textes qui permettent de développer les
37:59 énergies renouvelables avec de l'éolien, du solaire, de développer le nucléaire.
38:03 Ce sont deux textes qui ont été examinés à l'Assemblée nationale et votés pour
38:07 le nucléaire.
38:08 Pourquoi les Français aujourd'hui jugent ainsi l'exécutif et le président de la
38:11 République ? Ils ne voient pas ce que vous êtes en train de décrire.
38:14 Qui n'a pas compris l'autre ?
38:15 Non mais c'est à nous de leur donner envie, à nous de continuer à les aider.
38:20 Ça n'a pas trop mal marché puisque le président de la République a été réélu.
38:24 Dans quelles conditions ?
38:25 Oui, mais il a été réélu.
38:26 Et donc, on ne peut pas considérer qu'il n'avait pas de cap et que nous sommes complètement
38:32 déboussolés.
38:33 Ça n'est pas exact.
38:34 Le cap est fixé.
38:35 Nous devons y aller.
38:36 C'est une société décarbonée, une société qui se réindustrialise.
38:40 Pour la première fois, nous recréons des emplois industriels.
38:42 Et une société qui ne connaît plus le chômage.
38:45 Qui ne connaît plus le chômage.
38:47 Le chômage en 2016, juste avant que le président de la République arrive, était, vous savez
38:53 quoi, la première préoccupation des Français.
38:56 Aujourd'hui, c'est la dixième.
38:57 Mais je vous cite, vous dites qu'il faut redonner envie aux Français, il faut leur
39:01 redonner un désir, une forme d'enthousiasme.
39:04 S'il faut leur redonner, c'est qu'il n'est plus là en ce moment.
39:07 Comment expliquer cette espèce de rupture profonde ou d'absence de désir pour poursuivre
39:12 votre image ?
39:13 Parce que je crois qu'avec les problèmes de pouvoir d'achat, avec les problèmes internationaux,
39:20 de tensions à l'extérieur de l'Europe, avec l'Ukraine, etc.
39:24 Je pense qu'avec des questions qu'on entend, de déclassement, etc.
39:28 Les Français, il y a une certaine déprime, une certaine morosité.
39:34 Et c'est à nous, collectivement, de réveiller notre pays et de leur donner à nouveau de
39:41 l'envie et de les inscrire dans un projet, de nous inscrire, mais collectivement dans
39:45 un projet.
39:46 A vous entendre, on comprend bien qu'un changement de Premier ministre ne va pas suffire.
39:51 Évidemment, malgré tout, c'est forcément dans les tuyaux.
39:54 Est-ce qu'on voit beaucoup de personnalités qui sont citées ?
39:58 Peut-être que ça va vous faire sourire, mais c'est quand même votre homologue au
40:00 Sénat.
40:01 Est-ce que quelqu'un comme Gérard Larcher à Matignon, vous y voyez quelque chose de
40:07 l'ordre du sursaut pour la suite ?
40:08 Moi, en fait, à nouveau, je ne vois pas de solution magique.
40:14 Donc le changement de Premier ministre, la dissolution, le référendum.
40:17 Non, mais ça ne suffit pas.
40:19 Il faudra en passer par là.
40:21 Un changement de Premier ministre s'impose.
40:23 Non, c'est rien.
40:24 Et c'est les prérogatives du Président de la République.
40:27 Et je me garderai bien d'empiéter sur celle-ci, comme on parlait de liberté tout à l'heure.
40:32 Moi, j'entends bien que personne n'empiète sur mes prérogatives.
40:36 Ça n'est pas de la langue de bois.
40:37 Moi, ce que je constate au quotidien, si vous voulez tout savoir, c'est que je travaille
40:41 très bien avec Elisabeth Borne en tant que Première ministre et je travaille très bien
40:44 avec Gérard Larcher en tant que Président du Sénat.
40:47 Est-ce que, justement, pour aller, pour appréhender votre méthode, est-ce que vous diriez, parce
40:52 qu'on apprend aussi à vous connaître, vous avez un parcours, vous avez été avocate,
40:56 vous êtes maintenant au perchoir, est-ce que vous diriez que vous avez une main de
40:59 velours dans un gant de fer ou une main de fer dans un gant de velours à choisir ?
41:02 Effectivement, c'est en même temps à moi.
41:06 Certains disent la fermeté souriante.
41:08 Et effectivement, je crois que c'est ce qui me caractérise.
41:11 J'essaye et je reste moi-même.
41:15 J'essaye d'être moi-même.
41:17 Où serez-vous dans quatre ans, vous-même ?
41:19 Je n'en sais rien.
41:20 Vous ne savez pas ?
41:21 Pas de plan, pas d'ambition ?
41:22 Aucun plan.
41:23 Mais vous savez, parce qu'il y a quatre ans, je ne m'imaginais pas au perchoir.
41:26 Et quatre ans avant, je ne m'imaginais pas faire de la politique.
41:29 Donc, je n'en sais rien.
41:31 Et si ça se trouve, j'irais ailleurs que dans la politique.
41:35 Je n'en sais rien.
41:36 En fait, parce qu'aujourd'hui, moi, ce qui m'intéresse, c'est ce que je fais aujourd'hui.
41:40 Je suis très concrète, je suis très pragmatique, je suis très basique.
41:43 Moi, aujourd'hui, je suis présidente de l'Assemblée nationale et je suis à fond dans cet exercice-là.
41:48 Vous avez été ministre très peu de temps après la réélection d'Emmanuel Macron.
41:51 Ce n'est pas un regret de ne pas être au gouvernement ?
41:53 Non, puisque j'ai fait le choix de l'Assemblée nationale et du perchoir.
41:57 Vous avez plus de pouvoir au perchoir.
41:58 Vous avez vu cet article dans le journal du dimanche.
42:01 « Ministre amer », titre le JDD.
42:02 « La fonction de ministre avec cet exécutif nature plus grand monde ».
42:05 Ils ont l'impression, ce n'est pas qu'une impression, qu'ils n'ont plus de pouvoir.
42:08 Vous, vous avez le vrai pouvoir.
42:09 Moi, j'ai surtout une double légitimité qui me porte.
42:13 J'ai été élue par mes concitoyens dans ma circonscription et j'ai été élue par
42:16 mes pères.
42:17 Ce n'est pas rien.
42:18 Ce n'est pas rien.
42:19 Ça me porte, ça m'oblige.
42:20 Donc, le vrai pouvoir est au Parlement aujourd'hui ?
42:22 Je ne réfléchis pas en termes de pouvoir, parce que je…
42:26 De responsabilité.
42:27 Voilà, de responsabilité.
42:28 Mais je ne suis pas…
42:29 Et moi, je me sens très, très utile en ce moment à l'Assemblée nationale, à justement
42:34 essayer de nouer des liens, de chercher des compromis, d'aller vers les Français.
42:38 C'est peut-être une nouvelle façon de faire de la politique.
42:41 Peut-être qu'elle s'explique parce que je n'ai pas de carrière politique, ni en
42:45 amont, ni en aval.
42:46 Et vous croyez possible d'avoir une culture du compromis à l'Assemblée nationale entre
42:49 la majorité, entre les Républicains, entre le Français soumis ou la NUPAS, le RN ?
42:55 Tous ces gens peuvent trouver des compromis raisonnables entre eux ?
42:58 Nous avons adopté plus d'une quinzaine de textes à l'unanimité.
43:01 Cela démontre que nous sommes capables d'aboutir.
43:04 Donc, chaque groupe parlementaire est capable d'être raisonnable, finalement ?
43:07 Je l'espère.
43:08 On va finir par la phrase "libre et loyal".
43:10 Quand Edouard Philippe la prononce, on imagine toutes les arrières-pensées.
43:14 Et vous, vous nous dites ce matin que vous la prononcez sans aucune arrière-pensée.
43:18 Et il faut vous croire.
43:19 Il faut me croire.
43:20 Moi, je n'ai jamais d'arrière-pensée parce que je pense… voilà, c'est très négatif.
43:29 C'est les surconsens qui feront peut-être les opportunités ?
43:31 Non, mais je crois que les Français attendent de leurs élus qu'ils remplissent le mandat
43:35 pour lequel ils ont été élus.
43:37 Donc, présidente de l'Assemblée nationale.
43:39 Présidente de l'Assemblée nationale.
43:40 Merci à Elbron-Pivet d'avoir été notre invitée ce dimanche en compagnie de mes
43:43 camarades, que je remercie Stéphane et Mathieu.
43:45 Merci beaucoup évidemment aux téléspectateurs et auditeurs.
43:48 On vous souhaite tous un très bon dimanche et à très bientôt.
43:51 Merci.