"Je dis laxisme judiciaire. J’accuse le Syndicat de la magistrature d’être totalement politisé."
> Interdire aux magistrats de se syndiquer ? "On peut en discuter. Pour des raisons professionnelles, oui, mais pas la politisation." estime Bruno Retailleau, président du groupe Les Républicains au Sénat, sénateur de la Vendée.
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> Interdire aux magistrats de se syndiquer ? "On peut en discuter. Pour des raisons professionnelles, oui, mais pas la politisation." estime Bruno Retailleau, président du groupe Les Républicains au Sénat, sénateur de la Vendée.
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00:00 – Et notre invité politique ce matin c'est Bruno Retailleau, bonjour.
00:02 – Bonjour.
00:03 – Merci beaucoup d'être avec nous, sénateur de Vendée,
00:05 président du groupe Les Républicains ici au Sénat.
00:07 On est ensemble pendant 20 minutes pour une interview avec la presse régionale
00:10 représentée par Julien Lécuyer de la Voix du Nord. Bonjour Julien.
00:13 – Bonjour Auriane, bonjour M. Retailleau.
00:15 – Bonjour Julien Lécuyer.
00:16 – Bruno Retailleau, le Conseil constitutionnel n'a donc pas validé
00:19 la demande de référendum qui avait été déposée par les sénateurs de gauche.
00:23 Est-ce que consulter les Français n'aurait pas été la meilleure manière
00:26 de sortir de cette crise ?
00:27 – Non mais c'était un secret de Paul Heschinelle que cette deuxième formulation du RIP
00:32 serait retoquée par le Conseil constitutionnel parce qu'elle a été écrite par des militants,
00:36 pas par des juristes et le Conseil constitutionnel y juge en droit.
00:39 Moi je pense qu'il y a un dévoiement, vous voyez, du RIP.
00:42 Tous ceux qui sont attachés, et je le suis moi, attachés au référendum.
00:44 Je pense que la crise démocratique que nous traversons,
00:47 de la démocratie aussi représentative, devrait nous amener
00:51 à une pratique référendaire plus fréquente.
00:53 On ne peut pas élire un président tous les 5 ans et ne rien faire,
00:56 pratiquement, en 5 ans.
00:58 Quand je parle de dévoiement, qu'est-ce que je veux dire ?
01:00 Je pense que le RIP a été fait pour faire la loi.
01:03 Faire la loi quand le Parlement, par exemple, s'était soit opposé
01:08 ou n'avait pas mis dans son ordre du jour un sujet particulier.
01:11 Faire la loi mais pas pour défaire la loi.
01:14 Et moi je pense que le processus démocratique qu'a subi,
01:19 qu'a parcouru le texte sur les retraites est un vrai parcours
01:24 conforme à nos institutions.
01:26 Le Sénat, nous l'avons voté une première fois en première lecture.
01:29 Nous l'avons ratifié en commission mixte parité avec les députés.
01:33 Revoté ensuite.
01:35 Donc ça correspond à nos institutions de la Ve République.
01:38 – Donc vous dites finalement à la gauche et à tous les opposants
01:42 à la réforme des retraites que le cheminement démocratique,
01:46 selon les mots du gouvernement, est désormais terminé
01:49 et qu'il faut passer à autre chose.
01:51 – Et je dis à l'intersyndical, quand on voit les violences,
01:55 je dis qu'il faut savoir terminer une grève.
01:57 Parce qu'on voit bien que c'est en train de dégénérer.
02:00 – Donc ne pas faire de nouvelles journées de mobilisation.
02:02 – Exactement.
02:03 Je pense qu'à chaque fois qu'il y a une nouvelle journée de mobilisation,
02:05 il y a des risques qui sont des risques de violences, d'hyper-violence.
02:08 Et cette responsabilité, il faut que chacun l'assume.
02:10 – Mais ils ne vont pas arrêter la mobilisation parce qu'il y a des violences.
02:13 – Non, j'ai quand même noté qu'il y a une fissure dans l'intersyndical.
02:18 On voit bien que la CFDT, la CFTC et d'autres commencent à se dire
02:22 "si le gouvernement nous tend la main, nous la prendrons".
02:25 On voit bien que les jusqu'au-boutistes sont du côté de la CGT,
02:29 les syndicats réformistes entrent dans une nouvelle phase.
02:33 On l'a très bien senti aux dernières déclarations il y a quelques jours,
02:36 notamment du leader de la CFDT.
02:39 – Mais ils sont tous d'accord pour faire une mobilisation le 6 juin.
02:41 Vous vous dites "il ne faut pas faire cette mobilisation le 6 juin".
02:43 – Mais c'est leur responsabilité.
02:45 Non, c'est un risque de la grève.
02:46 – Mais c'est prendre un risque des violences de la dernière fois ?
02:48 – Mais bien sûr, et on a un vrai sujet.
02:50 On a un vrai sujet, la loi anti-casseurs, anti-Black Blocs, c'est votre serviteur.
02:55 C'est nous qui l'avions votée d'ailleurs contre le gouvernement à l'époque au Sénat.
03:00 Simplement, il y a deux problèmes.
03:02 Il y a un problème avant et un problème après.
03:04 Avant, on avait prévu dans ce texte, à l'article 3,
03:06 j'avais prévu un dispositif qui permette, un peu comme les hooligans
03:09 qui sont interdits de pénétrer dans des stades
03:11 quand ils ont été convaincus de violences.
03:13 J'avais prévu dans l'article 3 un mécanisme qui permettait au préfet
03:17 d'interdire à des gens dangereux de manifester avec des conditions…
03:20 – Préventivement, préventivement.
03:21 – Préventivement, très restrictive.
03:23 – Mais qui a été jugé anticonstitutionnel.
03:25 – Non, non, c'est pas mon texte qui a été jugé anticonstitutionnel.
03:28 C'est le texte qui avait été voté par les députés à la demande de Christophe Castaner.
03:31 Moi, j'avais prévu des conditions très resserrées.
03:34 Par exemple, que le préfet pouvait interdire
03:37 simplement pour la durée d'une manifestation,
03:39 aux abords et dans la manifestation.
03:41 Et sous l'impulsion de M. Castaner, les députés avaient voté
03:44 quelque chose de beaucoup plus large sur tout le territoire national.
03:46 – Donc vous dites…
03:47 – Pendant un mois.
03:48 Et donc le Conseil constitutionnel, laissez-moi terminer, pardon,
03:50 a jugé que c'était disproportionné.
03:52 Moi, je pense qu'il y a un trou dans la raquette.
03:54 Il y a une guérilla que nous mènent les cagoules noires.
03:57 Et il faut s'y adapter.
03:58 C'est des techniques paramilitaires.
04:00 Donc le bouclier que doit constituer la loi doit être plus ferme.
04:05 Ça c'est avant.
04:07 Mais il y a un problème aussi après.
04:09 Je m'explique. Je prends seulement un exemple.
04:12 Les manifestations, la Concorde, la nuit du 16 ou 17 mars,
04:17 293 ou 14 arrestations.
04:20 Là-dessus, il y aura 97% de classements sans suite.
04:25 C'est-à-dire aucune suite judiciaire, aucune sanction.
04:28 Et ça c'est un encouragement à aller de l'avant.
04:31 Donc on voit bien que préventivement…
04:32 – C'est un peu du laxisme judiciaire.
04:33 – Vous dites laxisme judiciaire.
04:35 Les défenseurs des droits disent qu'il y a un abus de…
04:39 – Non, je dis laxisme judiciaire.
04:42 – Vous accusez les juges de ne pas faire leur travail en fait.
04:45 – Non, je n'accuse pas les juges de ne pas faire leur travail.
04:48 J'accuse le syndicat de la magistrature,
04:51 qui a beaucoup d'adhérents dans le corps des magistrats,
04:55 d'être totalement politisé.
04:57 Quand le syndicat de la magistrature publie un communiqué avec le titre,
05:01 justement au mois de mars, que l'autorité judiciaire
05:04 ne peut pas être au service de la répression sociale,
05:07 quelle répression sociale ?
05:08 Quand le même syndicat de la magistrature envoie ses adhérents,
05:12 quelques jours avant l'opération Mbouchou à Mayotte,
05:16 qu'on ne doit pas être non plus au service de la violation des droits humains,
05:20 et que, comme par hasard, son ancienne vice-présidente détourne,
05:24 pour moi c'est un détournement,
05:26 quand elle a arrêté justement l'acte préfectoral,
05:30 en essayant de s'appuyer sur la détournement de…
05:34 comment dire, d'une voie de fait, c'est un détournement.
05:36 Pourquoi ? Parce qu'elle dit,
05:37 détournement, voie de fait,
05:39 dans la mesure où il y a violation du droit de propriété.
05:42 Mais ces gens-là, dans les bidonvilles,
05:43 ils n'ont pas de droit de propriété.
05:45 J'espère que la cour d'appel, il remettra bon droit.
05:48 – Là, vous mettez en jeu deux procédures.
05:51 – Je dis deux choses.
05:52 Qu'est-ce qu'il faut faire ?
05:53 Première proposition, reprendre le texte que j'avais proposé,
05:57 équilibré, et je pense qu'il passera les mailles du Conseil constitutionnel
06:00 pour appliquer ce qu'on…
06:02 – Donc vous dites au gouvernement, il faut reprendre mon texte.
06:04 – Vous appelez le ministre de l'Intérieur
06:06 à finalement travailler avec vous pour…
06:08 – C'est une erreur de gouvernement.
06:10 Ils ont dénaturé mon texte, ils se sont fait censurer.
06:13 Première chose.
06:14 Et je pense, là aussi, alors on est sur la justice,
06:17 qu'il faut dépolitiser la justice.
06:18 – Mais comment ? Qu'est-ce que ça veut dire ?
06:19 Parce qu'on parle d'un syndicat, un syndicat de la magistrature.
06:22 Vous n'allez pas enlever le droit au juge d'être syndiqué ?
06:26 – Ça, on peut en discuter.
06:27 – Tiens donc.
06:28 – Syndiquer pour des raisons professionnelles, oui,
06:29 mais pour une politisation,
06:31 la justice doit être au-dessous de tout soupçon.
06:33 Je vais reprendre ma démonstration.
06:35 Souvenez-vous de l'affaire du mur des cons.
06:38 Lamentable, de la part du syndicat de la magistrature.
06:41 Ce n'est pas le ministre, le garde des Sceaux de l'époque
06:43 qui a poursuivi.
06:45 C'est grâce au parti civil, dont par exemple,
06:48 un général dont la fille avait été massacrée.
06:51 Ils ont persisté, les partis civils ont obtenu une condamnation,
06:54 grâce aussi, je dois le dire, à une magistrate courageuse.
06:57 Mais pas grâce, vous voyez, au garde des Sceaux,
06:59 au ministre de la Justice de l'époque.
07:01 Et depuis, finalement, la sanction, petite sanction,
07:06 et ensuite, cette dame-là, à l'époque, a été promue.
07:09 Donc on voit bien qu'il y a un problème,
07:11 problème du Conseil supérieur de la magistrature,
07:14 qui est totalement corporatiste.
07:16 Il faudra enlever le monopole des syndicats,
07:18 du syndicat de la magistrature,
07:20 si on veut avoir une justice impartiale.
07:23 Que la justice est indé…
07:24 – Enlever le monopole, oui, qu'est-ce que c'est du monde au garde des Sceaux ?
07:27 – De réformer le Conseil supérieur de la magistrature,
07:30 voilà, par exemple.
07:31 – Et contre le syndicat de la magistrature ?
07:33 – Je pense qu'il faut des sanctions,
07:34 je pense que quand il y a des fautes, il y a un problème disciplinaire.
07:36 – Mais quelles sanctions ?
07:38 C'est-à-dire que vous faites un lien entre une décision de justice
07:41 et puis l'appartenance à un syndicat.
07:43 Mais encore une fois, c'est…
07:44 – Oui, je fais un lien.
07:45 – Oui, mais c'est…
07:46 – Bien sûr, je fais un lien.
07:47 – Ce serait de faire la même chose avec n'importe quelle personne qui est syndiquée.
07:51 En fait, j'ai du mal à saisir comment vous résolvez ça.
07:54 – Mais je ne résous rien du tout.
07:55 Je dis simplement que dans la justice, parce que c'est trop important,
07:58 une majorité de Français ne croient plus dans la justice,
08:01 parce que les délais sont trop longs, mais aussi parce qu'il y a un dévoiement.
08:04 On voit bien qu'il y a un laxisme judiciaire.
08:07 Moi, je pense que la question de la sécurité en France,
08:09 ce n'est pas plus de policiers, ce n'est pas plus de gendarmes.
08:12 C'est la réponse pénale qui n'est plus à la hauteur.
08:15 C'est ce que sent très bien les Français.
08:16 – Il faut l'interdire ?
08:17 Est-ce qu'il faut interdire aux juges d'être syndiqués ?
08:18 Qu'est-ce qu'il faut faire ?
08:19 – Moi, je pense que la syndicalisation du corps des magistrats,
08:24 je pense que c'est excessif.
08:25 Ça n'est pas normal.
08:26 Les préfets, les militaires ne sont pas syndiqués.
08:28 – Éric, là, ce qu'on pense ensuite, excusez-moi,
08:30 mais c'est corroboré aussi par la défenseur des droits
08:33 qui a noté un abus de procédure,
08:35 des procédures, des interpellations préventives basées sur absolument rien,
08:40 des procès-verbaux qui étaient remplis à la va-vite,
08:43 voire même de façon automatique.
08:44 Il y a quand même aussi des interrogations.
08:46 – Bien sûr, il y a la question des nullités.
08:48 Il faut que la judiciarisation, dans ces cas-là, soit plus précise.
08:51 Il faut des moyens, il faut un certain nombre de choses.
08:53 Il y a aussi la question de la simplification,
08:55 parce que c'est tellement compliqué désormais que tout est nul.
08:58 Est-ce que vous croyez normal que sur près de 300 arrestations,
09:02 97% il n'y a aucune condamnation ?
09:05 Ces déclassements sans suite.
09:06 Les Français sont choqués, alors qu'on voit bien des gens
09:08 qui viennent pour tuer du flic.
09:10 Est-ce qu'on peut continuer comme ça ?
09:12 Pour que demain, vous voyez qu'il y a un policier
09:15 qui était grièvement blessé, il va emporter à vie des stigmates.
09:19 Et alors on ne fait rien, on ne bouge pas.
09:21 Encore une fois, le mur des cons.
09:23 Et la personne responsable de cette faute magistrale,
09:27 j'utilise le qualificatif abonné-scient,
09:30 elle est promue ensuite.
09:31 Vous trouvez ça normal, Julien Lécuyer ?
09:33 – Et sur les Black Blocs, puisque une interrogation a été faite
09:36 sur les Black Blocs, sur les moyens d'y répondre,
09:38 est-ce que vous avez une proposition pour justement lutter contre cette…
09:41 – Pardon Julien Lécuyer, j'ai fait une proposition,
09:44 mon texte déjà a été adopté.
09:46 Première chose, il a été dénaturé.
09:47 Je vous parlais de l'article 3,
09:49 je pense qu'il faut revenir sur cet article 3.
09:52 Il faut que le Conseil constitutionnel puisse,
09:54 si j'ose dire, ne pas le censurer.
09:56 Pour qu'il ne soit pas censuré, il faut être mesuré.
09:59 Je veux dire qu'on est dans un état de droit.
10:01 C'est pour ça que j'avais demandé, moi,
10:02 est-ce que l'arrêté préfectoral concerne un périmètre
10:05 dans l'espace très précis, concerne dans le temps,
10:08 là encore un périmètre très restreint à la seule durée de la manifestation.
10:12 – Comment vous avez jugé les… – Pourquoi, par exemple,
10:14 vous et Emmanuel Macron ?
10:14 – Oui, justement, Emmanuel Macron et Elisabeth Borne
10:17 ont attaqué mercredi Jean-Luc Mélenchon,
10:18 ça a un lien, puisqu'eux-mêmes ont parlé du fait des propos
10:23 de Jean-Luc Mélenchon qui semblait justifier,
10:26 ou en tout cas attaquer les policiers,
10:29 mais aussi qui ferait, selon le Président de la République,
10:32 la courte échelle au Rassemblement national.
10:34 Est-ce que vous êtes d'accord sur ce diagnostic ?
10:37 – Moi, je pense que l'extrême-gauche a eu de la responsabilité en France.
10:41 Leur objectif, en réalité, ce n'est pas d'abattre la réforme des retraites,
10:45 c'est d'abattre la Ve République.
10:47 Vous avez vu, comme moi, les images à l'Assemblée nationale
10:50 de la lecture du texte sur les retraites.
10:53 Vous avez vu cette violence verbale ?
10:55 La violence verbale, c'est l'antichambre de la violence tout court.
10:58 Voilà, donc il y a une forme de complicité.
11:01 Sainte-Seline, moi j'ai vécu aussi, Notre-Dame-des-Landes,
11:04 je sais ce qui s'est passé.
11:07 Soulèvement de la terre, c'est né où ?
11:09 C'est né à Notre-Dame-des-Landes.
11:11 La faute originelle est bien celle d'Édouard Philippe et d'Emmanuel Macron,
11:15 puisque pour les beaux yeux de M. Hulot,
11:16 éphémère ministre à l'époque de l'environnement,
11:20 on a sacrifié un projet qui était un projet qui,
11:23 politiquement, de droite, de gauche, du centre et d'ailleurs,
11:26 était porté par tous les responsables.
11:29 Avec 179 décisions de justice positives, favorables à ce grand aéroport,
11:34 et on a cédé à la violence.
11:36 On a donné un permis de casser, c'est tout.
11:38 Donc là encore, la politique doit être une politique cohérente.
11:42 On ne peut pas donner un jour raison aux casseurs,
11:45 aux ultra-violents à Notre-Dame-des-Landes,
11:48 et demain, leur donner tort et les combattre à Sainte-Seline.
11:51 La politique, c'est la cohérence.
11:52 C'est ce qui manque d'ailleurs à Emmanuel Macron.
11:54 Le "a" en même temps, c'est par définition le double langage.
11:57 Donc l'incohérence.
11:59 – Sur la suite, pour les opposants, et notamment la proposition de loi de Lyott
12:02 qui serait exéminée le 8 juin, Julien.
12:03 – Oui, puisqu'on parle de cohérence, il y en a un qui s'en réclame,
12:06 c'est Aurélien Pradié qui a annoncé qu'il votera la proposition de loi
12:11 portée par le groupe Lyott le 8 juin,
12:13 qui vise à abroger la réforme des retraites.
12:17 Est-ce qu'il va trop loin, Aurélien Pradié, quand il parle de ça ?
12:21 – Peu importe, je ne vais plus commenter ce que dit, ce que fait ce député.
12:27 Simplement, ce que je dis, moi, pour prendre un peu de recul et de hauteur,
12:31 sur cette proposition de loi Lyott, qu'est-ce qu'on fait ?
12:35 Dans les 10 ans, ce n'est pas 150 milliards de déficit qu'on va avoir en réalité.
12:39 On le voit bien maintenant, aussi bien sur la croissance,
12:42 sur le taux de productivité, sur toutes ces hypothèses
12:44 qui fondent ce calcul de 150 milliards de déficit sur les régimes de retraite en 10 ans.
12:50 On ne sera plus près de 200 milliards.
12:52 Donc la proposition Lyott, qu'est-ce qui est dit à nos concitoyens ?
12:56 Qu'on ne fait rien ? Qu'on sacrifie le pouvoir d'achat des retraités ?
12:59 Qu'on sacrifie les jeunes demain, puisqu'il y a toujours plus de retraités
13:03 et toujours moins d'actifs, de cotisants ?
13:05 Qu'est-ce qu'on fait exactement ? Ça résout les problèmes de la France ?
13:08 Et Mme Le Pen, dont je vois qu'elle vient déposer une PPL,
13:12 où elle revient à la fois sur la réforme de 2010, les 62 ans,
13:16 et sur la réforme de droite, donc, et la réforme de gauche,
13:19 la réforme Touraine, en matière d'annuité.
13:22 Elle ruine la France, elle ruine les retraités, elle ruine la jeunesse,
13:25 et elle encourage l'immigration.
13:27 Incohérence ! Attendez, incohérence, juste, pardonnez-moi,
13:31 relevons cette chose-là.
13:33 Je parlais de cohérence, d'incohérence d'Emmanuel Macron,
13:36 incohérence de Mme Le Pen.
13:37 Vous ne pouvez pas, si j'ose dire, restreindre le travail,
13:41 alors qu'on est un des pays qui parle plutôt en retraite,
13:44 il nous manque des seniors dans l'emploi,
13:46 et ne pas vouloir l'immigration, évidemment.
13:48 Vous vous souvenez des déclarations, à l'époque, de celui qui s'occupait,
13:51 M. Delevoye, au commissaire à retraite, il dit,
13:54 il faudrait 50 millions d'immigrants en plus,
13:56 si on ne fait rien en 2050.
13:58 – Non mais, vous parlez de cohérence,
14:00 est-ce qu'on peut être député Les Républicains
14:02 et voter un texte qui abroge la réforme des retraites, que vous défendez ?
14:05 – Il y a la liberté, moi je pense que ce n'est pas cohérent.
14:09 Je pense que c'est d'autant moins cohérent
14:12 que la même personne dont vous me parlez,
14:14 quand on a eu cette élection, cette campagne pour la présidence de LR,
14:18 soutenait une retraite à 67 ans, puisqu'il soutenait 45 annuités.
14:22 45 annuités alors que la moyenne d'entrée sur le marché du travail,
14:25 c'est plus de 22 ans.
14:27 22 ans plus 45 annuités, égale combien ? 67 ans.
14:31 – Non mais vous parlez de liberté.
14:34 – Il faut répondre à ces aspes, à ces déclarements.
14:38 – Est-ce que LR ne se meurt pas de ce genre d'errance idéologique ?
14:44 – Ce n'est pas moi qui faut le dire,
14:46 je pense que plus on est faible, et nous sommes faibles politiquement,
14:49 plus on doit être cohérent, plus on doit être rassemblés.
14:52 Parce que si on n'est pas cohérent,
14:53 et c'est pour ça que pour nous, cette réforme des retraites,
14:55 elle était, je le dis, absolument désastreuse.
15:00 Parce qu'elle a dit aux Français, mais finalement,
15:02 c'est quoi les Républicains ? Qu'est-ce qu'ils pensent ?
15:05 Mais ces gens-là pensent qu'ils pourront s'en tirer, si j'ose dire,
15:10 sans un mouvement fort, puissant, etc.
15:12 Mais il n'y aura pas de petit bonheur privé au sein d'un grand malheur collectif.
15:18 – Mais justement, est-ce que du coup, il ne faut pas clarifier la situation
15:21 et dire à Aurélien Pradié, si tu continues sur ces positions,
15:24 il faut quitter le parti ?
15:25 – Les choses, écoutez, les choses étaient tranchées par Éric Ciotti,
15:28 par Olivier Marlex, moi je suis responsable d'un groupe
15:31 qui n'est pas un groupe de députés, qui est un groupe de sénateurs.
15:33 Vous aurez observé qu'il y a chez nous une cohésion qui est beaucoup plus forte.
15:38 – Sur le parti, sur les Républicains ?
15:40 – Oui, parce que vous rejoignez en fait ce que disait Éric Ciotti,
15:43 vos mots se rejoignent, ce qui nous a abîmés, c'est la dispersion.
15:48 Vous dites, nous sommes apparus incohérents,
15:50 maintenant il faut remonter la pente.
15:52 Mais alors justement, comment remonter cette pente ?
15:55 – Il n'y a pas 36 solutions.
15:58 Qu'est-ce qui aimante dans la vie politique l'attention de nos compatriotes ?
16:04 C'est le pouvoir, parce que le pouvoir fascine souvent,
16:06 quand on a le pouvoir on est puissant, on attire,
16:09 on n'a pas le pouvoir, on est loin du pouvoir.
16:12 L'autre puissance d'attraction ce sont les idées.
16:14 Et l'utilité, parce qu'il faut qu'on soit utile,
16:17 les Républicains, c'est pas écrit, c'est écrit nulle part dans le marbre
16:21 qu'on doit exister à perpétuité.
16:24 L'utilité qu'on doit avoir c'est l'utilité pour nos idées.
16:27 On doit être disruptif, on doit proposer dans le débat public
16:30 quelque chose de nouveau.
16:31 Or moi je pense que le monde, la France, on est arrivé à un bout de cycle.
16:36 Le monde qui est dangereux, une mondialisation qui se reconfigure
16:39 sur des blocs idéologiques, continentaux.
16:42 La France, la fête est finie, il n'y a plus d'argent magique.
16:46 J'ai observé que le taux d'emprunt pour les OAT, les emprunts d'État,
16:51 plus de 3,2% au mois de mars.
16:54 – Pas d'argent magique, M. Rattayou, ça fait 20 ans, 30 ans
16:58 qu'on entend parler de cette formule.
17:01 – Ce que je propose, c'est que nous n'aurons d'avenir,
17:03 ça tombe bien, il va y avoir des États généraux,
17:05 nous n'aurons d'avenir que si sur chaque point,
17:09 nous avons des idées de rupture.
17:11 Ils n'ont pas traité les conséquences,
17:13 j'entendais encore sur le lycée professionnel,
17:15 c'est toujours plus d'argent public.
17:17 Emmanuel Macron confond la réforme et la dépense publique,
17:21 il les associe.
17:22 C'est ce qu'on fait remarquer depuis 30 ans ou 40 ans.
17:25 Eh bien nous, je pense que, je veux vous parler de la sécurité,
17:28 la question de la sécurité aujourd'hui en France,
17:31 ce n'est pas une question de moyens.
17:32 Si, il faut construire plus de places de prison,
17:34 mais c'est une question de réponse pénale.
17:36 Bien sûr, il faut plus de magistrats,
17:37 mais ça ne sert à rien d'avoir plus de magistrats
17:40 s'il y a du laxisme judiciaire.
17:42 Autre, l'hôpital, là encore, on déverse des milliards,
17:45 mais ce n'est pas comme ça qu'on donnera à nos soignants
17:48 le sens de ce qu'ils font, la quête du sens de leur métier.
17:53 C'est en déburocratisant l'hôpital,
17:55 en changeant la gouvernance,
17:56 en la mettant du côté des soignants
17:58 plutôt que du côté de la bureaucratie.
18:00 Pareil pour l'école.
18:02 Pape Indien, il s'en prend au privé.
18:04 Privé, ça marche.
18:05 Alors laissons le privé vivre.
18:07 Parce qu'il y a, d'ailleurs il le comprend si bien,
18:09 que ses enfants sont à l'école alsacienne,
18:11 qui est une école privée, une des plus chères.
18:13 Vous voyez, tartuffe, tartuffe.
18:15 Bon, c'est, vous voyez, à chaque fois, on doit être,
18:18 et pour l'école publique, nous avons proposé,
18:20 nous avons voté un texte au Sénat,
18:21 qu'on crée des écoles publiques, autonomes, gratuites,
18:26 pour que, on ait, comment dire, des nouvelles pédagogies.
18:29 – Et sur l'immigration,
18:30 vous comptez aussi faire preuve de disruption ?
18:33 – Absolument, absolument, sur l'immigration.
18:35 C'est bien pour ça que le gouvernement craignait
18:38 l'examen du texte, notamment au Sénat,
18:40 et qu'il y ait renoncé, parce qu'ils n'ont pas renoncé
18:42 parce que nous, on serait divisé.
18:44 On n'est pas du tout divisé avec les députés.
18:46 Pour preuve, on déposera prochainement un texte de loi.
18:49 – Quand ?
18:50 – Dans les prochaines semaines.
18:52 Mais on devait…
18:53 – Mais là, avant l'été ?
18:55 – Oui, avant l'été, bien sûr, avant l'été.
18:57 Ce que je veux dire, c'est que, je prends cet exemple-là,
19:00 à quoi ça sert de faire un texte migratoire
19:03 si les pompes aspirantes tournent toujours à fond ?
19:07 Si vous en rajoutez le fameux article 3,
19:10 l'article 4 du texte de M. Darmanin,
19:12 c'était la régularisation massive des sans-papiers.
19:16 Non, et je pense…
19:17 – C'est pas ce que dit M. Darmanin.
19:18 – Exactement, ni Olivier Dussopt.
19:20 On parle de plusieurs milliers de personnes.
19:24 – Mais je vais vous dire, regardez ce qui se passe à Mayotte.
19:28 Regardez ce qui se passe à Mayotte.
19:29 À Mayotte, où désormais, c'est le cas au migratoire,
19:32 50% de la population, ce sont des étrangers,
19:35 et 50% de ces étrangers sont des irréguliers.
19:38 Et Marine Le Pen a fait 59%,
19:41 son père, il y a 20 ans, n'avait fait que 11,7%.
19:45 – Ce que vous dites, c'est que ce qui se passe à Mayotte,
19:47 finalement, le cas au migratoire que vous exposez,
19:50 ça pourrait être la France dans quelques années ?
19:53 – Pas dans la même proportion aujourd'hui, bien sûr.
19:55 Mais j'ai pris Mayotte, on aurait pu prendre d'autres grands pays européens.
19:59 On aurait pu prendre la Suède, le Danemark.
20:02 Regardez le Danemark.
20:03 Le Danemark, pourtant, ce sont des sociodémocrates.
20:05 Un tour de vis sans précédent, disruptif.
20:08 La rupture, eux, ils ont fait la rupture.
20:09 La rupture que je demande sur l'immigration,
20:12 eh bien eux, ils l'ont fait.
20:13 – Mais la rupture sur l'immigration, ça veut dire…
20:14 – Mais vous avez vu ce qu'ont fait les…
20:16 le parti d'extrême droite.
20:18 Il a été réduit, il faisait plus de 20% il y a quelques années,
20:21 à moins de 3%.
20:22 La Suède, c'est l'inverse.
20:23 Ils n'ont pas été capables de maîtriser, justement, l'immigration.
20:27 Et du coup, l'extrême droite est aux portes du pouvoir.
20:29 – Vous dites au gouvernement que s'il ne suit pas votre ligne sur l'immigration,
20:31 c'est ouvrir la voie à Marine Le Pen dans les prochaines années ?
20:33 – Bien sûr, c'est du kérosène extraordinaire.
20:36 Elle doit mettre des cierges tous les jours pour que le gouvernement…
20:42 – Que vous vous rejoignez.
20:43 – … persiste.
20:44 – Vous vous rejoignez sur cette question.
20:46 Il faudra un référendum sur la question de la…
20:48 – Mais je le dis depuis des années.
20:49 J'avais proposé, vous voyez, j'avais travaillé sur les 100 jours
20:52 pour Valérie Pécresse, je pourrais vous les fournir,
20:54 c'est un document que vous pourrez facilement travailler.
20:56 Et j'avais proposé, bien sûr, une réforme constitutionnelle.
20:59 Pourquoi là encore ?
21:00 Parce qu'on tombe dans le gouvernement des juges.
21:02 Et qu'il faudra autoriser, modifier l'article 11 de la Constitution
21:06 pour permettre au peuple français de se prononcer défensivement
21:11 sur les questions migratoires.
21:13 Et ce que dit un référendum, le Conseil constitutionnel
21:15 ne peut pas en juger.
21:17 Donc ce sera enfin la souveraineté populaire.
21:19 Et ça ne sera pas le gouvernement des juges.
21:20 Parce que cette question, c'est une question qui désormais
21:24 peut menacer notre cohérence, notre cohésion sociale.
21:27 Il faut choisir entre ouvrir les frontières
21:30 et maintenir un haut niveau de protection sociale.
21:33 Il faut choisir l'un ou l'autre.
21:35 Je choisis un modèle français qu'il va falloir réinventer.
21:38 C'est ce que LR doit faire.
21:40 Réinventer un système à bout de souffle.
21:42 Être disruptif, être en rupture par rapport à ce qui a été fait avant.
21:47 À ce que nous-mêmes nous avons fait.
21:48 À ce que des gouvernements LR, des présidents de la République,
21:52 Nicolas Sarkozy ou d'autres ont fait.
21:55 – Mais est-ce que le meilleur moyen de mettre en œuvre vos idées,
21:57 de les faire entendre, de les appliquer rapidement,
21:58 c'est pas de passer dans les prochains mois un accord de gouvernement ?
22:01 – Mais la politique, je disais, c'est des idées.
22:05 Avec qui passer un accord ?
22:06 Avec Leo Macron qui donne satisfaction aux zadistes de Notre-Dame-des-Landes
22:13 ou celui qui combat les mêmes zadistes à Saint-Saëline ?
22:16 Est-ce qu'on doit passer un accord avec M. Macron qui nomme M. Papandiaï
22:20 qui est une sorte de wokiste bon teint, bon chic, etc. ?
22:28 Ou avec le même Macron qui avait nommé d'ailleurs M. Blanquer
22:31 qui était assez intransigeant sur la laïcité ?
22:33 Avec qui passer un accord ?
22:34 Je pense que c'est les idées qui commandent la politique.
22:38 – Mais si c'est avec Emmanuel Macron qui va dans votre sens,
22:39 il y a aussi beaucoup de choses qui vont dans votre sens.
22:41 Est-ce que si c'est avec Emmanuel Macron qui va dans votre sens,
22:44 il vous tend quand même la main sur plusieurs sujets Emmanuel Macron ?
22:47 – Ne serait-ce que sur la réforme des retraites par exemple,
22:48 il ne la tiendra pas vers vous.
22:49 – Mais regardez…
22:50 – Sur la fraude sociale qu'il va présenter dans les prochains jours.
22:52 – Bien sûr, et sur la réforme des retraites, nous l'avons votée.
22:55 Ce qui veut dire qu'il y a un chemin possible,
22:57 que le Sénat pratique depuis des années, texte par texte.
23:00 Quand un texte est bon, moi je ne réagis pas.
23:03 En fonction d'Emmanuel Macron, ma boussole n'est pas Emmanuel Macron,
23:06 ma boussole c'est l'intérêt national du pays et des Français.
23:08 – Donc votre souhait ce n'est pas un Premier ministre issu de vos rangs ?
23:11 – Mon souhait c'est une politique de redressement de la France.
23:14 Et aujourd'hui, je ne vois pas…
23:15 – Portée par le Premier ministre issu de vos rangs ?
23:16 – Je ne vois pas, ce n'est pas le problème, c'est les idées, c'est les convictions.
23:20 La dépense publique, Bruno Le Maire se promène de plein dos en plateau
23:23 pour dire "stop" maintenant quoi qu'il en coûte.
23:25 On vient de nous transmettre un document important sur la stabilité
23:28 que Bruxelles demande, la prévision de dépenses publiques à 2027,
23:33 c'est plus 30 milliards, 30 milliards de plus de dépenses publiques
23:36 que ce que l'on nous disait dans le projet de programmation
23:39 des finances publiques il y a seulement 5 mois.
23:41 – Donc le "quoi qu'il en coûte" continue, c'est ça que vous voulez dire ?
23:43 – Bien sûr, et il continue au moment où justement les taux s'envolent,
23:47 où le service de la dette coûte de plus en plus cher.
23:50 Et là maintenant, ce goulet d'étranglement,
23:55 on arrive à son terme et ça menace en réalité la France.
23:57 – Donc la fête est finie, vous avez…
23:59 – Regardez Fitch, Fitch ça n'a rien bouleversé,
24:03 c'est simplement un avertissement, c'est un coup de semence, c'est tout.
24:07 Mais derrière Fitch, il peut y avoir beaucoup plus grave que cela,
24:09 beaucoup plus grave quand on a une dette de 3 000 milliards…
24:12 – C'est quoi beaucoup plus grave ?
24:13 – Le relèvement des taux encore ?
24:14 – Bien sûr, encore plus justement de service de la dette,
24:18 une dette qui va nous coûter beaucoup plus cher
24:20 et ce qu'on doit dépenser par exemple pour la transition écologique,
24:23 ce qu'on doit dépenser pour un certain nombre d'investissements d'avenir,
24:26 on n'aura pas cet argent, cet argent on devra simplement le dépenser
24:30 pour les marchés financiers.
24:32 – Merci Bruno Retailleau, merci beaucoup d'avoir été notre invité ce matin.
24:35 Julien, regardez "À l'une de la Voie du Nord",
24:37 les stars s'invitent au stade Pierre-Mauroy.
24:39 – Oui, avec un gros doute sur la présence de Stromae en juin.
24:43 – On suivra tout ça dans "La Voie du Nord".
24:45 – Croise les doigts.
24:46 – Merci Bruno Retailleau, on passe au Club des territoires.