"240 000 personnes" : le constat en chiffre du business de la drogue en France

Touche pas à mon poste

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Transcript

00:00 - Il y a beaucoup de Français qui travaillent sur le marché de la drogue.

00:01 Vous dites 240 000 personnes.

00:03 - Rien que sur la France, ça représente...

00:06 Là où il y a 20 ans, il y avait 2 points de deal, il y en a 20 ou 50 aujourd'hui.

00:10 Et bien qu'ils s'entretuent en permanence pour contrôler ces terrains,

00:15 il reste effectivement énormément de gens qui travaillent là-dessus.

00:19 - Ça paye bien ?

00:21 - Comment ?

00:22 - Ça paye bien ?

00:22 - Comment il gagne un mec qui fait le gai toute la journée ?

00:25 - Il y a tous les échelons.

00:27 Vous avez les barons de la drogue qui sont à Dubaï ou au Maroc ou ailleurs et qui dirigent le business.

00:36 Ceux-là, ils sont pas en première ligne, ils prennent pas de balles, ils sont à distance.

00:39 Leur job, c'est de faire peur de manière à ce qu'on leur obéisse et à ce qu'on leur envoie les montagnes d'argent.

00:45 Donc, ils entretiennent un climat de terreur.

00:47 Ensuite, vous avez ceux qui sont sur place et qui sont les chefs de file, on va dire, sur les terrains.

00:53 Et eux, c'est pas "touche pas à mon poste", c'est "touche pas à mon terrain".

00:56 Comme autrefois, les vieux voyous, c'était "touche pas à ma discothèque" ou bien "touche pas à mon casino".

01:01 Aujourd'hui, c'est vraiment "touche pas à mon four, touche pas à mon terrain".

01:04 Et là, eux, ils sont prêts à tout, effectivement, pour maintenir.

01:10 Et puis, pas seulement pour maintenir leur four en état, leur terrain en état, mais pour conquérir en général celui du voisin.

01:16 Et c'est ce qui met un peu le bordel.

01:18 Mais pour finir sur l'argent, donc en bas, vous avez des gens qui, en bas, ceux qui sont en bas de l'échelle,

01:24 ceux qui sont en première ligne, ceux qui prennent les balles, eux, ils gagnent environ 3000 euros par mois sans payer d'impôt.

01:31 Donc c'est déjà pas mal.

01:34 Et en plus, on leur livre éventuellement à midi la canette et le kebab.

01:38 C'est gratuit, ça fait partie du deal.

01:40 - Et eux, c'est eux qui participent, on va dire, au petit blanchiment,

01:45 qui est celui qu'on assiste dans toutes les banlieues du monde, touché par l'argent sale,

01:48 sous forme de réinjection dans l'économie propre, c'est-à-dire les fringues, les voilà, les vêtements.

01:54 Là aussi, vous avez une économie mondialisée du crime qui brasse des milliards et qui intéresse les banques.

02:01 Je rappelle qu'en 2018, lors de la grande crise économique, les banques ont absorbé plus de 2000 milliards d'argent sale pour se rééquilibrer.

02:08 Il y a eu même des procès là-dessus aux États-Unis.

02:11 Donc vous avez ce niveau-là.

02:12 Et vous avez tout en bas de l'échelle, effectivement...

02:14 Moi, j'ai rencontré un jeune un jour en Seine-Saint-Denis, dans un quartier.

02:19 Il avait 16-17 ans.

02:21 Il avait commencé tout en bas et son rêve, c'était de prendre la place du chef, évidemment, comme à chaque fois dans ces cas-là.

02:27 Et lui, il avait déjà, à 16 ans, investi dans son pays d'origine, qui était pour lui le Congo-Brasalville,

02:34 où il avait investi dans une crêperie.

02:36 Il avait créé une crêperie au pays.

02:37 Donc vous avez ce niveau-là.

02:39 Et vous avez le blanchiment, on va dire...

02:41 D'abord, il y a aussi le blanchiment quotidien.

02:43 C'est-à-dire que vous allez dans les magasins de luxe.

02:45 – C'est pour ça qu'il y a plus de 500 euros.

02:47 C'est pour ça qu'on ne peut plus payer plus de 1000 euros.

02:49 C'est pour éviter le blanchiment.

02:50 – Et à quoi ça sert quand on a 25 ans et qu'on se crame la vie tous les jours

02:53 et qu'on sait qu'on va mourir à 27 ?

02:55 À quoi ça sert d'avoir autant d'argent, en gros, si on ne peut pas se payer une Rolex ?

02:58 Je peux répondre ?

02:59 Je dirais que c'est ça.

03:00 C'est en gros la Rolex.

03:02 La Rolex, c'est obligatoire.

03:03 Le fait d'acheter une petite Austin aussi à sa maîtresse.

03:06 Puisqu'il y a plusieurs maîtresses, il faut acheter plusieurs Austins.

03:09 Le fait d'aller au free...

03:11 Il y a eu une vente aux enchères il y a quelques jours de bien saisir chez les criminels.

03:14 Et dedans, il y avait notamment un pyjama Dior.

03:17 Voilà. Si on ne peut pas se payer ça,

03:18 si on a 25 ans et qu'on risque sa vie tous les jours

03:20 et qu'on ne peut pas se payer le pyjama Dior et la Rolex, on a tout raté.

03:24 Donc ce n'est pas 50 ans, c'est 25 ans, l'âge limite.

03:27 Donc effectivement, ça c'est du blanchiment.

03:29 C'est de la dépense quotidienne.

03:31 Et ensuite, vous avez le blanchiment d'ultra proximité.

03:34 Et dans les quartiers, si vous enquêtez un peu,

03:36 vous vous rendez compte que souvent, la petite épicerie, le salon de coiffure,

03:40 c'est vraiment du bas de gamme.

03:43 Mais ce n'est pas inutile parce qu'ils t'achètent ça.

03:46 Et après, ça sert de lessiveuse.

03:48 C'est-à-dire que si vous avez un kebab, mais que vous avez trois clients par jour,

03:53 vous en avez plus, vous avez trois clients par jour,

03:56 vous allez en déclarer 100.

04:00 Donc évidemment, le kebab, vu le prix que ça coûte,

04:02 c'est des espèces, ça fait rentrer de l'espèce.

04:04 À la fin, vous allez éventuellement payer des impôts

04:06 sur les 100 que vous n'avez pas vendus.

04:09 Donc vous blanchissez, c'est une manière très simple.

04:11 En fait, c'est une technique assez simple pour blanchir localement l'argent.

04:15 [Musique]

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