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00:00 Quand j'étais à l'hôpital, il me tenait la main, il me regardait, il s'asseyait,
00:02 il ne parlait pas pendant que je parlais, il ne me coupait pas la parole.
00:05 C'est ça le problème, c'est d'avoir été surprise par l'humanité d'un médecin.
00:10 J'en veux à mon médecin traitant qui ne m'a pas écoutée tout de suite
00:13 et peut-être après à ceux qui ont essayé de minimiser le truc en me disant "ça va quoi".
00:18 Moi mes premiers symptômes, honnêtement ceux qui m'ont le plus inquiété,
00:22 ça a été des saignements.
00:23 En dehors de mes menstruations, j'avais des saignements totalement irréguliers
00:26 et en plus de ça, je me rendais très très souvent aux toilettes, peut-être 10 fois par nuit.
00:31 J'avais mal aussi.
00:33 Je suis allée chez un médecin que je connaissais parce que j'étais plus en confiance,
00:35 donc mon médecin traitant, elle m'a dit que je n'avais rien,
00:38 que comme j'étais jeune, il n'y avait rien à craindre.
00:41 J'ai dû retourner la voir peut-être deux ou trois fois
00:43 et à chaque fois, elle mettait ça un peu sous le tapis.
00:45 J'ai donc décidé d'aller voir un autre médecin spécialisé en gynéco
00:48 qui m'a prescrit une échographie endopelvienne
00:52 et là, elle me dit dans le plus grand des calmes
00:54 "Bon, vous avez un fibrome qui fait 5 cm."
00:57 Et je dis "Mais attendez, mais c'est quoi un petit fibrome de 5 cm ?"
00:59 Et il me dit "C'est une petite boule que vous avez dans l'utérus, mais rien de grave.
01:04 Le seul truc qui est peut-être un petit peu surprenant,
01:07 c'est que vous êtes très jeune, puisque moi j'avais 20 ans,
01:09 mais à part ça, vous inquiétez pas, etc."
01:11 Tout ce qui était gynéco pour moi, c'était hyper important
01:13 et qu'on me dise que mon utérus était potentiellement affecté par un problème,
01:18 ça m'a mis un coup.
01:20 Moi, je suis rentrée dans ma voiture et j'ai pleuré, pleuré, pleuré
01:23 pendant genre une demi-heure sans m'arrêter.
01:25 Et ce qui s'est passé, c'est que ce monsieur-là, justement, de l'échographie m'a dit
01:28 "Il faudra revenir me voir dans un an pour qu'on vérifie qu'il est resté à la même taille."
01:32 Et malheureusement, on peut pas opérer...
01:35 On risque de t'endommager l'utérus pour pas grand-chose.
01:38 En fait, moi je me disais "C'est hors de question que pendant un an,
01:42 je vive avec ça, tout en sachant pas ce qui se passe,
01:44 tout en sachant pas si ça grossit, si ça diminue."
01:46 Pour moi, c'était limite viscéral de savoir ce qui se passait.
01:51 Et donc, je suis allée voir d'autres médecins un peu partout sur Paris
01:53 et j'allais leur demander justement des échographies.
01:56 Petit à petit, j'ai commencé aussi à monter dans mes exigences en termes de centre d'imagerie.
02:00 J'ai commencé à voir les spécialistes, des spécialistes.
02:02 J'ai commencé vraiment à me sentir rassurée d'un côté, mais aussi très apeurée
02:06 parce que je voyais dans leurs regards qu'il y a quelque chose qui allait pas trop.
02:11 Chacun avait un peu sa version.
02:12 Ils sont tous médecins, donc il n'y en a pas un en soi qui est mieux que l'autre.
02:15 Et je pense que ce qui m'a fait arriver là, c'est le fait de me sentir hyper infantilisée,
02:19 pas crue, pas écoutée.
02:20 C'était mon corps et pourtant j'avais l'impression que c'était des autres
02:22 qui faisaient les choix à ma place.
02:23 Ce qui s'est passé avec mon fibrome, c'est que,
02:25 dans l'espace d'un an, il a, un an et quelques mois,
02:29 il a grossi jusqu'à 11 cm.
02:32 Quand je suis partie voir la dernière gynécologue pour lui expliquer ça,
02:35 pour lui montrer le résultat de mon IRM, elle m'a dit "bon, là, en fait,
02:40 j'ai pas envie de vous inquiéter, mais un fibrome, normalement, ça grossit pas aussi vite.
02:43 J'ai pas envie de vous dire que vous avez un cancer,
02:46 parce que j'ai pas envie de vous faire paniquer,
02:49 mais honnêtement, il y a des chances.
02:50 Donc là, la question se pose plus, il faut absolument opérer."
02:53 Alors l'opération, honnêtement, ça, ça a été, je pense,
02:57 le summum de la douleur et du manque d'écoute.
03:02 Pourquoi ? Parce que mon opération s'est, en soi, bien passée.
03:05 Ils ont réussi à enlever le fibrome.
03:07 Le produit qu'ils ont fait passer pour mieux voir mon corps pendant l'IRM,
03:11 en fait, a été mis tellement puissamment que ça a fait péter ma veine.
03:15 Je leur disais "écoutez, là, j'ai très mal à la main.
03:17 Non, non, non, vous inquiétez pas, j'ai passé toute la nuit comme ça,
03:19 à pleurer, à dire "mais s'il vous plaît, j'ai mal à la main".
03:23 Jusqu'au lendemain midi, où en fait, une infirmière est venue débouler dans ma chambre
03:27 parce qu'elle en avait marre, et elle s'est rendue compte qu'il y avait des bouchons
03:30 qui avaient été formés dans les fils qui m'alimentaient.
03:32 Et en fait, elle a commencé à cramper.
03:34 J'ai eu tellement mal que j'ai crié et qu'elle m'a crié dessus,
03:38 m'a hurlé dessus en me disant "ça suffit, maintenant vous arrêtez de crier, etc."
03:41 Donc elle a appelé deux autres infirmières qui sont venues,
03:44 qui ont regardé ma main et qui ont dit "en fait, c'est pas possible,
03:46 il y a un gros gros problème".
03:47 Elles m'ont tout de suite enlevé le cathéter et ma main, en 30 minutes, a explosé.
03:52 Ça a créé une couche en plus dans ma douleur,
03:56 dans le sens où je pouvais pas m'alimenter, je pouvais pas marcher,
03:59 je pouvais pas aller aux toilettes, je ne pouvais rien faire.
04:00 Et en plus de ça, je pouvais même pas utiliser mes mains.
04:02 La convalescence a été très très longue.
04:04 Moi j'ai commencé à me sentir mieux, honnêtement, il y a peut-être 5 ou 6 mois,
04:07 alors que je me suis fait opérer il y a presque 1 an et demi.
04:10 Tous les 6 mois, je vais encore faire des IRM ou des échographies
04:14 pour voir si ça revient pas, parce que ça peut revenir, un fibrome peut revenir.
04:18 Est-ce que je peux avoir des enfants ?
04:20 Alors, tous les médecins s'accordent à dire que oui,
04:23 que peut-être, ça sera peut-être un peu plus difficile,
04:25 que je pourrais peut-être pas accoucher par voix basse,
04:28 qu'il faudrait que je passe par la césarienne peut-être.
04:30 C'est pas que l'accouchement, c'est le fait d'avoir des enfants,
04:33 c'est de se dire que je suis jeune.
04:36 Moi, j'étais à un moment de ma vie où je pensais absolument pas aux enfants,
04:41 à la grossesse, j'avais 20 ans, pour moi ce qui comptait, c'était pas du tout ça.
04:46 Et en fait, ça a planté une graine dans mon cerveau où je me suis dit, imagine.
04:50 Et ça commence à créer une peur en moi, imagine je peux pas avoir d'enfants.
04:53 Et moi je sais que j'en aurais voulu peut-être toute ma vie à ces médecins-là,
04:57 si à cause d'eux, on avait dû m'enlever par exemple une partie de l'utérus,
05:01 puisque ça se fait aussi, ou un ovaire.
05:03 Les examens ont été faits, mais ça a été de mon fait, ça a été de mon initiative.
05:07 Honnêtement, j'en veux pas aux médecins dans le sens où j'ai rencontré des médecins magnifiques.
05:13 Mon anesthésiste pendant mon opération,
05:15 c'est lui qui m'a vraiment montré qu'il y avait des médecins incroyables.
05:19 Quand j'étais à l'hôpital, il me tenait la main, il me regardait, il s'asseyait,
05:22 il ne parlait pas pendant que je parlais, il ne me coupait pas la parole.
05:24 Ça a été magnifique, ouais.
05:26 C'est ça le problème, c'est d'avoir été surprise par l'humanité d'un médecin.
05:30 Moi, j'en veux pas aux médecins, j'en veux à mon médecin traitant qui ne m'a pas écoutée tout de suite,
05:35 et peut-être après à ceux qui ont essayé de minimiser le truc en me disant "ah bah c'est pas... ça va quoi".
05:42 Soit je suis tombée sur des médecins qui ne m'ont pas écoutée,
05:44 soit je suis tombée sur des médecins qui m'ont écoutée,
05:46 mais qui toujours me montraient qu'ils savaient mieux que moi.
05:49 Maintenant, ça a totalement changé ma manière aussi d'aborder les choses.
05:52 Quand je vais chez le médecin, je ne pars pas de son cabinet tant que je n'ai pas ce que je veux.
05:56 Je pose beaucoup plus de questions.
05:57 Si un jour j'arrive à tomber enceinte, je sais que je ne vais pas le lâcher.
06:01 Je sais que je ne vais pas le lâcher, que je poserai un milliard de questions,
06:04 et que maintenant limite autour de moi on m'appelle la chiante, je m'en fiche.
06:08 Si un médecin a fait 15 ans d'études, ce n'est pas pour rien,
06:11 mais en attendant il ne sera jamais mieux placé que toi pour savoir ce qui se passe à l'intérieur de toi.
06:16 Il faut être critique vis-à-vis du corps médical.
06:20 Et donc si un médecin vous dit quelque chose et que vous sentez au fond de vous que ce n'est pas suffisant,
06:25 vous n'arrêtez pas à ça.
06:26 Mon corps, c'est mon corps et je sais ce qui se passe.
06:28 S'il y a quelque chose qui ne va pas, je le sais et il faut rester critique vis-à-vis de ça.