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Quoc Dang Tran ("Parallèles", "Marianne") adapte le manga "Les gouttes de Dieu" pour AppleTV+ et France.tv.

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00:00 Bêta Série la radio, partenaire média du festival Série Mania.
00:05 Dans cet épisode d'Originals, on est au festival Série Mania 2023,
00:09 dont Bêta Série est partenaire.
00:11 Et au micro avec nous, Cook Dantran,
00:13 créateur de cette nouvelle version des "Gouttes de Dieu",
00:16 l'adaptation du manga du même nom,
00:18 qui arrivera le 21 avril prochain sur Apple TV+.
00:21 Bonjour à vous.
00:22 Bonjour.
00:23 Première petite question,
00:24 est-ce que vous pouvez nous "pitcher" les "Gouttes de Dieu" s'il vous plaît ?
00:27 Les "Gouttes de Dieu", c'est l'histoire d'une jeune femme, Camille,
00:30 qui doit se rendre à Tokyo pour l'enterrement de son père.
00:33 Son père qu'elle a très peu connu et qui est un oenologue reconnu.
00:37 Il laisse derrière lui une immense fortune
00:41 et une cave de vins absolument incroyable.
00:44 Et pour prétendre à cet héritage,
00:46 elle doit affronter dans une série d'épreuves
00:49 un jeune oenologue japonais,
00:51 Issei Tomine.
00:53 C'est une bataille qui est liée au vin et à sa dégustation.
01:00 Et le seul problème de Camille, c'est qu'elle n'y connaît rien en vin.
01:03 Il s'agit donc d'un manga assez connu qui a été édité chez nous d'ailleurs.
01:07 Comment vous avez pris connaissance de ce titre
01:10 et d'où vous êtes venu de faire une adaptation ?
01:12 Ce sont les producteurs Klaus Zimmermann et Sonia Moyerson
01:16 qui sont venus me voir il y a cinq ans maintenant
01:18 et qui m'ont demandé si ça m'intéressait de me pencher sur l'adaptation du manga.
01:25 Je l'ai lu, je l'ai trouvé magnifique mais très compliqué à adapter.
01:30 J'ai hésité un moment et finalement j'ai accepté.
01:34 Pas parce que c'était un manga sur le vin,
01:36 mais parce que l'histoire des personnages,
01:38 leur destin et leur trajectoire m'intéressaient.
01:41 Tout à fait, parce qu'il s'agit d'une adaptation assez libre au final,
01:44 notamment la transformation du personnage de Camille.
01:47 Comment avez-vous décidé de créer ce personnage ?
01:51 On s'est rendu compte très très vite,
01:55 enfin non pas si vite que ça, je dis n'importe quoi,
01:57 on s'est rendu compte que la série était trop masculine,
02:00 il y avait trop d'hommes dans cette série.
02:01 Comme beaucoup de tits japonais malheureusement, on peut le dire.
02:04 La décision a été prise à ce moment-là de changer un des personnages principaux
02:10 et de transformer un héros en héroïne.
02:16 La décision n'était pas simple à mettre en place,
02:22 mais on l'a fait et surtout ça a été salutaire,
02:25 parce qu'on se retrouve avec une jeune femme
02:27 qui est catapultée dans un monde très masculin,
02:32 un peu écrasant,
02:34 et donc ça rend sa trajectoire encore plus forte,
02:36 et sa combativité encore plus forte.
02:38 Tout l'aspect où on accompagne les personnages,
02:41 où j'apprends l'onéologie, est hyper intéressant évidemment.
02:44 D'ailleurs il y a cet espace sensoriel qu'on découvre dans les premiers épisodes.
02:49 Comment vous avez préparé au niveau de l'image, comment décrire tout ça ?
02:54 Ça, ça a été une vraie réflexion, parce que quand on lit le manga,
02:59 typiquement il y a un protagoniste qui goûte un vin
03:02 et ça lui rappelle un concert de rock de Queen à Wembley.
03:06 Et ça, typiquement, c'est magnifique dans le manga,
03:09 mais je me dis en fait, si on fait ça en série,
03:13 ça n'aura pas de sens, parce que c'est un souvenir personnel.
03:16 C'est comme, je sais pas moi, votre premier whisky-coca dans une boom,
03:20 dans un garage en brûlerie parisienne,
03:23 ça n'évoque ça que pour vous,
03:25 donc il fallait trouver quelque chose qui soit plus universel.
03:28 Et donc on a cherché des choses où tout le monde pouvait se connecter,
03:33 et donc on a cherché quelque chose à faire
03:36 qui ne soit pas des VFX avec fond vert,
03:40 où on se dit "Ok, on était déjà dans une histoire de vin, de terre,
03:43 quelque chose de très concret,
03:45 il ne fallait pas qu'on parte dans quelque chose qui soit complètement différent".
03:48 Donc on a essayé de rester vraiment pragmatique
03:51 et de jouer quelque chose d'organique en fait.
03:54 Vu cet aspect d'adaptation,
03:57 est-ce que vous avez quand même parlé avec l'auteur,
04:00 discuté justement de ces nouveaux personnages, cette nouvelle direction ou pas ?
04:03 Oui, alors les auteurs du manga sont un frère et une sœur,
04:08 donc on les a rencontrés, et non seulement on les a rencontrés,
04:11 mais en fait ils ont lu et adoubé tous les scénarios de la série.
04:15 Donc on est légitime, on est legit,
04:19 donc c'était très intéressant.
04:22 Une collaboration franco-japonaise, qu'est-ce que ça implique ?
04:26 Quelles sont peut-être des difficultés, des facilités ?
04:30 Alors en termes artistiques et au niveau créatif,
04:36 on a eu une grande liberté.
04:38 C'est-à-dire que pratiquement tout ce que j'ai pu,
04:42 ce que l'on a pu suggérer ou construire,
04:45 a été validé par les japonais,
04:47 donc il n'y a pas eu de choc culturel.
04:50 Je pense que j'ai été aussi très respectueux de la culture japonaise.
04:54 Alors moi je ne suis pas d'origine japonaise, je suis d'origine vietnamienne,
04:58 mais j'ai une grande fascination, comme beaucoup d'ailleurs,
05:01 pour la culture japonaise, et particulièrement pour un réalisateur qui s'appelle Kore-eda.
05:05 Il y a un de ses films que j'adore qui s'appelle "Tel père, tel fils",
05:09 qui questionne vraiment les liens du sang.
05:11 Et donc pour moi cette story-line japonaise,
05:13 typiquement c'est un hommage à Kore-eda.
05:16 Vous vous retrouvez dans un drame, alors qu'on n'est plus habitué à vous voir dans du genre,
05:20 c'est nouveau.
05:23 Donc c'est vraiment ça les liens familiaux qui vous ont attiré ?
05:28 Oui, c'est un sujet qui, en acceptant d'adapter le manga,
05:36 j'ai identifié un thème qui m'est cher,
05:39 qui est le thème de "Bémer avant qu'il ne soit trop tard".
05:43 Alors ça, ça vient particulièrement de mes origines,
05:45 puisque je suis un fils d'immigrés qui ont vécu au Vietnam,
05:50 et qui ont quitté leur pays pendant la guerre.
05:54 Donc du jour au lendemain, on perd absolument tout.
05:57 Et donc il y a ce drame incroyable,
06:00 et de dire qu'il y a des gens qu'on ne revoit plus du jour au lendemain.
06:03 Donc ça c'est un truc, c'est mon bagage psychanalytique,
06:06 mon héritage psychanalytique que m'ont légué mes parents,
06:09 qui m'ont dit "ok, la vie est précieuse,
06:11 et en fait tu ne prends pas les choses pour acquises,
06:14 du jour au lendemain tout peut s'effacer".
06:17 Et donc j'ai vu ça dans le manga,
06:19 je me suis dit "ok, ça c'est un truc, c'est un fil que je vais tirer,
06:22 et je vais construire".
06:23 Et donc c'est pour ça que je viens originellement du genre,
06:26 mais je me dis "est-ce que je suis capable d'écrire un drama ?"
06:29 Donc ça ce n'est pas à moi de décider si j'ai réussi ou pas,
06:32 mais en tout cas j'avais envie de me lancer là-dedans.
06:35 Vous avez dit que ce n'était pas forcément le vin qui vous avait attiré au début,
06:39 mais quel est votre rapport avec le vin ?
06:42 Il est très bon !
06:44 Mon rapport au vin, c'est un rapport de plaisir,
06:50 mais évidemment je ne suis pas un expert en vin,
06:53 et je pense que c'était important pour moi de ne pas l'être,
06:55 parce que sinon il y a des choses que je n'aurais pas vues.
06:58 Pour moi c'est important, c'est que la série s'adresse aussi bien
07:01 à des experts, des aficionados du vin,
07:03 que à des gens qui ne connaissent rien.
07:05 Là j'utilise un parallèle avec "Queen's Gambit",
07:08 où si on connaît les échecs, tant mieux,
07:11 mais si on ne connaît pas, ce n'est pas grave, l'histoire est quand même prenante.
07:14 Et donc il fallait que je trouve cette juste distance
07:17 entre "je connais tout" et "je ne connais rien".
07:20 Donc c'était ça mon point de départ.
07:23 Vous aviez mentionné dans une autre interview
07:25 que vous n'étiez pas forcément en raccord
07:27 avec le terme de "showrunner" en France.
07:29 Est-ce que vous êtes toujours campé sous cette position ?
07:32 Je n'ai pas changé, parce qu'effectivement,
07:36 mon grand plaisir c'est d'écrire,
07:38 c'est d'être presque tout seul devant mon ordinateur,
07:40 et d'écrire, d'inventer mes histoires.
07:42 Ensuite la fabrication c'est moins excitant pour moi,
07:45 parce que j'ai l'impression qu'on révèle les coulisses.
07:48 Quand je vais à Disneyland, je ne veux pas voir Mickey enlever son truc.
07:52 Son costume.
07:54 Donc j'ai envie de garder une part de magie.
07:58 Le tournage c'est moins de la magie pour moi.
08:00 Vos co-scénaristes, Clémence, Madeleine, Pedrilla et Alice Vial,
08:04 qui sont quand même deux figures de scénaristes femmes en France
08:09 qui sont en pente ascendante,
08:11 comment s'est passée cette collaboration ?
08:13 Déjà au départ ce sont des amis.
08:15 Comment ça s'est passé ?
08:17 Mais merveilleusement bien.
08:19 On a travaillé tous les trois, on travaillait chez moi,
08:23 et on échangeait.
08:25 C'était évidemment très respectueux, très détendu, très drôle.
08:29 C'est le meilleur métier du monde qu'on peut travailler avec ses amis.
08:32 Donc c'est ce qu'on a fait.
08:34 On s'est mis, je l'ai dit, autour d'une table.
08:37 Non, dans des canapés.
08:38 On a discuté, on a discuté, on a ébauché l'histoire, la série.
08:41 Et puis c'est comme ça que ça s'est passé.
08:43 Avoir un meilleur budget pour une production internationale,
08:47 quelle est l'inclusion que vous en tirez ?
08:50 Oui, il faut avoir de l'argent.
08:52 Évidemment c'est formidable d'avoir les moyens de ses ambitions,
08:58 mais moi ça m'a donné envie de davantage, de plus.
09:03 Parce que là c'est un budget qui est conséquent,
09:05 mais c'est pas non plus un budget, comparé au budget américain,
09:07 c'est rien du tout.
09:09 Et même il y a des séries françaises qui seront plus chères que les gouttes de Dieu.
09:12 Donc c'est un budget conséquent, mais qui a été travaillé vraiment
09:15 parce qu'on a un réalisateur et un producteur qui ont fait des miracles
09:19 avec l'argent qu'ils avaient.
09:21 Mais moi ça m'a donné envie.
09:22 Et du coup quand je regarde des séries américaines,
09:24 ou parfois en 10 minutes de série,
09:26 il y a l'entièreté d'un budget de séries françaises,
09:28 je me dis, ok, ils ont quand même un terrain de jeu qui est beaucoup plus vaste.
09:32 Et ça, j'avoue que ça me fait envie.
09:36 Donc bientôt un projet américain, si vous trouvez ?
09:39 Ou qu'est-ce qui se passe ?
09:40 Devin, c'est quoi le planning ?
09:41 Non, non, mais là je suis sous contrat, en deal avec Universal Studios,
09:46 donc la branche américaine.
09:48 Donc je développe deux projets pour eux.
09:51 Un projet fantastique et un projet de SF,
09:54 "Enterrement en anglais".
09:56 Donc du coup, je suis au début de l'ascension,
09:59 donc on ne sait pas ce qui va se passer,
10:01 mais en tout cas c'est génial pour l'instant.
10:04 Et pour conclure cette interview,
10:07 quelle est la dernière série que vous avez fortement appréciée ?
10:11 Alors la dernière série que je suis en train de la regarder,
10:14 je ne sais pas comment elle atterrit,
10:15 je vois le décollage que je trouve que j'adore,
10:19 ça s'appelle "The Consultant".
10:21 On peut trouver ça sur...
10:23 Prime Vidéo.
10:24 Pardon ?
10:25 Prime Vidéo, absolument, avec Christophe Waltz.
10:30 J'adore, j'adore, parce que c'est une série qui me met mal à l'aise,
10:34 mais qui est aussi une série qui a une thématique
10:37 que j'aime beaucoup, qui est très dans l'art du temps,
10:40 qui est l'ambiguïté morale,
10:41 et qu'on retrouve dans des séries comme "White Lotus" ou "Succession" d'ailleurs.
10:45 Donc je ne sais pas où va "The Consultant",
10:49 mais je dois être avec l'épisode 4 ou 5.
10:51 Et je suis fasciné parce que je trouve ça très bien écrit,
10:53 je trouve ça très intelligent.
10:54 Je pense que ce n'est pas pour tout le monde,
10:56 comme beaucoup de séries,
10:57 mais donc ça c'est la dernière série en date.
11:00 Eh bien merci beaucoup.
11:01 Merci beaucoup.
11:02 On retrouve "Les Gouttes de Dieu" le 21 avril sur Apple TV+.
11:06 Bêta Série La Radio, partenaire média du festival Série Mania.
11:10 [Musique]