Martigues

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Zavattoni ...

Vidéo publiée le : 13/04/2023 à 17:39:00

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Transcript
00:00 Déjà ce qu'il faut dire c'est qu'en Provence, tous les étés on est en période de sécheresse
00:03 puisqu'il n'y a pas d'orage contrairement au nord de la France ou dans le centre.
00:06 Et ce qui nous permet de passer l'été tranquillement c'est la réserve d'eau de Serre-Ponçon,
00:11 réserve d'eau qui se remplit à la fonte des neiges et qui devrait être théoriquement pleine au 1er juillet.
00:16 Comme les Alpes-Maritimes, on est le département qui est en zone rouge quand même en matière de sécheresse.
00:22 Ça c'est pour les zones qui sont non desservies par la société du canal de Provence.
00:26 Nous on est desservis par la société du canal de Provence donc on a un abonnement.
00:30 On paye un abonnement sur chaque borne, on a une dizaine de bornes de 50 000 litres à l'heure chacune.
00:36 Mais on a cette chance terrible d'avoir de l'eau sous pression et pour le moment elle n'est pas rationnée
00:42 si ce n'est son prix qui est dissuasif.
00:45 On ne risque pas de gaspiller l'eau du canal de Provence parce qu'elle est très chère.
00:48 Et donc forcément on fait très très attention.
00:51 Là on est où alors ?
00:52 On est sur une borne du canal de Provence de 50 000 litres à l'heure.
00:56 Alors comme vous pouvez le voir il y a un compteur.
00:59 Donc avec une numération ça compte au décalitre près.
01:02 C'est assez précis.
01:04 Au décalitre près quand vous ouvrez la borne, il y a l'eau qui sort avec 9 kg de pression.
01:09 9 kg de pression c'est énorme.
01:11 Vous ne pourrez pas rester devant si on vous met devant le jet d'eau, vous ne pouvez pas rester.
01:15 Donc du coup on ouvre la borne comme ça.
01:18 Vous entendez il y a l'eau qui sort et elle va arriver sur la rampe des Artichauts.
01:22 Alors au départ il faut que ça coince.
01:24 Ça pue un peu mais ça va coincer.
01:27 Par contre ce qu'on peut dire c'est qu'on a des gros déficits hydriques en hiver depuis 3 ans.
01:33 Et notamment cette année et l'année passée.
01:36 Donc d'habitude en hiver il pleut de façon assez conséquente.
01:40 Ça met l'eau en profondeur dans la terre.
01:42 Ça permet aux plantes qui ont des gros systèmes racinaires de se nourrir en eau
01:46 mais également de pouvoir pousser.
01:48 Alors que cette année il y a un petit mois on a eu dans une nuit 25 mm.
01:54 Ce qui est toujours appréciable mais qui n'est vraiment pas assez pour combler la sécheresse qu'on connaît hivernale.
02:01 J'imagine qu'avec un sol très dur 25 mm ça a du mal à creuser et à rester dans la terre ?
02:07 Alors c'est très bon pour tous les petits semis et tout.
02:09 Mais pour les labours après il nous faut des gros tracteurs pour défoncer le sol.
02:13 Et avec des fraises imposantes pour raffiner la terre.
02:16 C'est beaucoup plus difficile.
02:17 Est-ce que vous avez senti dans votre production certaines espèces de légumes ou fruits qui sont à la peine ?
02:25 Oui, tous les fruits et légumes sont à la peine parce que vous savez que l'eau du ciel c'est la meilleure.
02:29 Elle est chargée un petit peu en azote nitrique.
02:31 Ce qui fait que les plantes après une pluie vous les voyez bien vertes, bien en forme, bien droites.
02:36 Là on est obligé d'apporter l'eau.
02:38 Alors comme elle est très chère l'eau il faut l'économiser.
02:40 Donc on apporte juste ce qu'il faut.
02:42 Mais pas plus en espérant d'avoir une prochaine pluie rapidement.
02:45 Et si on ne l'a pas on rapporte encore un peu d'eau.
02:47 Ça nous donne du travail supplémentaire.
02:49 Mais c'est nécessaire parce que l'eau c'est quelque chose qu'on paye très cher puisqu'on a les compteurs sur les bornes.
02:54 Est-ce que vous avez des productions qui sont particulièrement gourmandes et lesquelles ?
02:59 Alors la production la plus gourmande à nous, c'est celle qu'on fait en automne et au printemps, c'est l'artichaut.
03:04 Au départ, comme le plan est tout petit puisque c'est une mini-motte, on les conduit au goutte à goutte.
03:08 Ça, ça nous permet d'économiser énormément d'eau.
03:11 Mais ce qu'il faut savoir c'est que les chiffres de l'artichaut c'est 5000 mètres cubes d'eau à l'hectare et par an.
03:17 Et 500 unités d'azote. Ça c'est les chiffres des artichauts.
03:20 Et on ne peut pas y déroger si on veut avoir une production normale.
03:23 Et ça représente quoi par rapport à d'autres productions pour avoir un ordre d'idée ?
03:27 L'artichaut quand il pleut, ça représente... Normalement on n'arrose qu'une fois au lieu de trois.
03:32 Cette année et l'an passé, on va les arroser trois fois les artichauts.
03:35 Donc ça va représenter le double par exemple ou le triple d'un champ de carottes par exemple.
03:41 Ou d'un champ de salade, ou d'un champ de radis, ou d'un champ de poireaux.
03:45 Parce que les poireaux, les salades, les radis sont des cultures qui ont des racines superficielles.
03:50 Et qui attrapent tout de suite l'eau qu'on leur donne.
03:54 Tandis que les artichauts qui sont des plantes qui font 80 cm de haut et qui font plus d'un mètre de large, 1,20 mètre, 1,50 mètre de large.
04:03 Quand il y a l'eau mistrale qui souffle, il y a un stress hydrique qui se met en place
04:07 si on ne compense pas les vapeurs de transpiration à cause du vent.
04:10 Et donc là il faut arroser beaucoup sinon on n'a pas de montée de capitule.
04:13 En 10-15 ans, c'est à dire presque hier, est-ce qu'il y a beaucoup de choses qui ont changé dans votre façon d'exploiter ?
04:20 Dans votre façon d'irriguer ? Dans la vente ? Dans la taille des légumes ?
04:25 Ah oui, il y a beaucoup de choses qui ont changé ces 10 dernières années.
04:29 La première chose c'est le coût de l'eau.
04:31 Sachant qu'on a des étés qui sont de plus en plus secs et de plus en plus venteux.
04:35 Avec du mistrale et sans orage et sans pluie.
04:38 Donc là forcément on est obligé d'économiser de l'eau alors on a des façons de travailler qui le permettent.
04:42 Par exemple l'artichaut, on ne la fait produire qu'au printemps la plante artichaut.
04:45 On ne la relance pas au mois de juin après la production de printemps.
04:48 On ne tente pas une culture d'automne parce qu'il faut arroser en été
04:51 et c'est beaucoup beaucoup d'eau alors qu'elle est très chère et on préfère s'orienter sur d'autres cultures.
04:56 Autre exemple d'évolution, de changement ?
04:59 L'évolution c'est au niveau des cultures.
05:01 Les semis de carottes, les semis de poireaux, les plantations de poireaux,
05:05 c'est tout retardé de 3 semaines à 1 mois.
05:07 Parce que quand vous retardez de 3 semaines à 1 mois en été ces plantations et ces semis,
05:12 vous retardez le temps d'arrosage puisqu'on s'approchera de l'hiver
05:16 et donc un mois sans arroser parce qu'on les a mis plus tard, ça économise un mois d'eau.
05:21 Est-ce que ça joue sur la taille des légumes ?
05:23 Est-ce que vous avez noté une diminution des tailles par exemple ?
05:25 Oui, une diminution des tailles non parce qu'après on peut apporter à la plante tout ce dont elle a besoin.
05:31 Mais c'est vrai qu'on a quand même une baisse de rendement
05:33 parce qu'on n'arrive jamais quand il ne pleut pas comme ça, qu'il fait vraiment très sec.
05:37 On a un stress hydrique des plantes, même si on arrose,
05:40 on arrive à avoir un stress hydrique des plantes avec la chaleur et le vent
05:44 qui fait que le rendement baisse.
05:45 Par exemple les chou-fleurs parfois sont plus petits,
05:48 les carottes au lieu de ramasser 50 tonnes à l'hectare on est à 30.
05:54 Mais bon après quand on fait de la vente directe,
05:56 ce n'est pas pareil que si on vend des agros, donc on arrive toujours à s'en sortir quand même.
06:01 Mais c'est vrai que ce n'est pas aussi facile.
06:03 La clientèle ?
06:04 La clientèle nous demande si on gaspille de l'eau et tout.
06:07 Alors nous on explique qu'on ne gaspille pas d'eau mais qu'on est très attentif à l'utilisation de l'eau.
06:11 C'est vrai que quand on leur dit que pour nous l'eau n'est pas rationnée,
06:14 c'est vrai que grâce au canal de Provence et grâce au fait que nos ancêtres ont été visionnaires
06:18 en créant le barrage de Saint-Reponçon,
06:21 on a une réserve d'eau énorme dans ce barrage
06:24 puisqu'on a, l'agriculture a acheté à EDF 200 millions de mètres cubes d'eau
06:30 qui sont à consommer entre le 1er juillet et le 31 août.
06:33 Et de ce fait, la Provence qui était un territoire généralement très sec l'été,
06:38 peut continuer à avoir de l'eau pour arroser les fruits et légumes.
06:42 Si on n'avait pas d'eau pour faire des légumes,
06:44 on ne pourrait pas cultiver, il faudrait qu'on s'arrête.
06:47 Vous êtes inquiet ou vous dites bon, on va s'adapter ?
06:51 Alors pour cette année, on n'est pas inquiet
06:53 puisqu'on sait qu'il a beaucoup neigé dans le 0,5°C.
06:55 On a eu un épisode, un retour d'Est
06:57 où il y a eu des mètres de neige qui sont tombés dans le département du 0,5°C.
07:01 Le département 0,5°C et les montagnes,
07:03 c'est la réserve de neige qui va fondre et qui va nous faire l'eau pour l'été.
07:06 Donc on n'est pas très inquiet.
07:08 Mais pour les autres années, il faudra voir comment ça va se passer.
07:11 Vous songez par exemple, si ça s'empirait encore,
07:14 à abandonner certaines productions ?
07:16 Dans la tête, se dire tiens...
07:18 Écoutez, de toute façon, nous avec mes frères, on est sur une vingtaine d'hectares.
07:22 Quand vous commencez à acheter les plants, à les planter,
07:24 mettre de goutte à goutte pour économiser l'eau justement,
07:28 les labours avec le prix du gasoil qui a doublé,
07:31 le GNR, le gasoil non routier pour les tracteurs,
07:34 quand vous avez le prix de l'azote qui a triplé
07:36 et que vous avez aussi le prix du plastique qui a doublé pour les serres,
07:40 on se pose des questions quand même.
07:41 Moi je me dis que tant que je pourrais proposer à mes clients des prix corrects,
07:46 je continuerai à travailler.
07:48 Sinon j'ai un peu l'âge de la retraite là.
07:51 J'y pense des fois, je me dis si je n'arrive plus à travailler de façon sereine,
07:54 je prendrai ma retraite.