« Bernard - La fureur de vivre » : c’est le titre d’un ouvrage posthume sur Bernard Tapie signé par son épouse Dominique. Véritable femme de l’ombre, elle explique dans ce livre pourquoi elle a choisi de rester en retrait des médias. C’est seulement un an et demi après la mort de l’homme politique et grand supporter de football qu’elle décide de prendre la parole pour « poser sa voix sur la sienne » et ainsi rétablir certaines vérités que son défunt mari a tenté de faire éclater au grand jour de son vivant. Aujourd’hui, Dominique Tapie prolonge le combat.
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00:00 Il est 8h10, c'est l'interview d'actualité avec un témoignage fort ce matin, Julia, puisque vous recevez Dominique Tapie, l'épouse de Bernard Tapie.
00:06 Elle publie "Bernard, la fureur de vivre" aux éditions de l'Observatoire. Bonjour et bienvenue à vous.
00:11 Bonjour Dominique Tapie, merci d'avoir accepté notre invitation.
00:14 Alors, à la lecture de ce livre, on s'aperçoit que vous avez passé toute votre vie dans l'ombre de votre mari, en retrait en tout cas des médias.
00:22 Pourquoi vous avez choisi aujourd'hui pour sortir ce livre, un an et demi après la mort de Bernard ?
00:27 J'avais envie de poser ma voix sur la sienne, c'est-à-dire qui s'est toujours battue pour rétablir certaines vérités.
00:35 Sa voix n'a pas été entendue et j'espère, moi, que la mienne le sera.
00:40 Vous prolongez son combat en quelque sorte ?
00:43 Oui, en quelque sorte.
00:45 Je n'ai pas envie de trop m'engager parce que j'ai vu ce que ça donnait, mais c'est vrai qu'il y a quand même des vérités à rétablir.
00:55 C'est pour ça que vous avez notamment écrit ce livre maintenant.
00:58 Est-ce que vous pouvez nous raconter votre rencontre ?
01:01 On le lit dans votre livre, mais j'aimerais l'entendre de votre voix parce que je crois comprendre qu'au départ, ce n'était pas vraiment votre type d'homme.
01:08 Il était un peu trop show-off, c'est ça ? C'était quoi le problème ?
01:10 Oui, il prenait l'espace.
01:13 Quand il rentrait, tout le monde se focalisait sur lui.
01:17 Il avait une présence terrible, mais peut-être un peu trop à mon goût.
01:21 Après, ça ne m'a pas dérangé.
01:23 C'est vrai que quand je l'ai rencontré la première fois, je me suis demandé ce que c'était que cet énergumène.
01:29 Vous voulez dire qu'il était un peu trop boucan à votre goût ?
01:33 Je crois que vous n'aviez pas été particulièrement séduite et c'est ça par ailleurs qui l'a séduit, lui ?
01:38 Évidemment. Il y avait un challenge à relever.
01:42 Il fallait vous séduire à celle qui n'était pas séduite alors qu'il séduisait toutes les autres femmes, on est d'accord.
01:46 Tout à fait.
01:47 On découvre également dans votre livre que sa vie familiale reposait sur un équilibre très traditionnel.
01:55 Lui travaillait et vous vous restiez à la maison pour veiller sur le clan, comme vous dites.
02:00 C'était sa plus grande fierté ce clan ?
02:02 Oui, je crois. Et puis sa force.
02:06 Qu'est-ce qu'il trouvait dans ce cocon familial auprès de vous ?
02:09 Vous aviez les deux enfants que vous aviez eus avec lui.
02:12 Je crois que souvent, ces deux premiers enfants vivaient avec vous également.
02:15 Vous avez recomposé la famille ?
02:17 Oui, complètement.
02:19 Nous avons réussi à recréer ce qu'il avait connu avec ses parents, son frère.
02:28 Une entité comme ça, une cohésion familiale.
02:32 Et puis on a réussi à reconstituer ça aussi.
02:36 Et dans les moments où ça n'allait pas ? Parce qu'il y avait vraiment eu des hauts et des bas, si je puis dire.
02:40 Mais tout ce clan était autour de lui.
02:44 On était tous vent debout derrière lui.
02:50 Je pense que ça l'a beaucoup aidé.
02:52 Ça l'a aidé probablement à tenir, c'est ce qu'on comprend en lisant le livre.
02:56 On connaît la force de caractère de votre mari.
02:59 Il fallait forcément à ses côtés une femme de caractère comme vous pour lui résister.
03:03 Et notamment supporter sa jalousie maladive.
03:06 J'étais hallucinée de lire à quel point il était jaloux.
03:11 Vous racontez notamment qu'il a fait une scène de jalousie une semaine avant de mourir au médecin qui venait le voir, c'est ça ?
03:17 Oui, oui.
03:18 Qu'est-ce qui s'est passé ?
03:19 On avait appelé en urgence son médecin urgentiste.
03:23 Et à 2h du matin, il l'a trouvé dans la maison, évidemment, puisqu'on avait fait appel à lui.
03:32 Et ça l'a interpellé. Il était quand même un peu shooté.
03:35 Et il l'a apostrophé en lui disant "mais qu'est-ce que tu fais là, toi ?"
03:41 Le pauvre médecin lui a dit "mais vous m'avez appelé, je viens".
03:46 T'en as après ma femme, fais gaffe à ta gueule.
03:49 C'est vrai. Il avait encore l'énergie une semaine avant de mourir d'être jaloux.
03:53 Vous l'avez pris comment ? Comme un acte d'amour ?
03:55 Bah évidemment.
03:56 Les années 90 marquent le début de la tourmente, des scandales, des procès.
04:01 Vous, comment vous avez vécu, vous, en tant que femme ? Ça descend tout aux enfers.
04:05 C'était pas évident parce que je devais protéger les enfants.
04:12 J'avais quand même Sophie qui était toute petite.
04:15 Et voir son papa incarcéré, jeté en pâture dans les médias, c'était pas évident à vivre.
04:26 Donc ça a été dur mais encore une fois, le clan a fait bloc.
04:32 Alors ce que vous apprenez également, c'est que votre mari vous a impliqué dans ces affaires.
04:37 Vous l'ignoriez totalement, que vous aviez des parts dans son entreprise.
04:42 1% c'est ça, je crois. Il a fait signer des documents à votre place.
04:47 Comment vous avez vécu ça, j'imagine ?
04:49 Très mal.
04:50 Bah oui, comment on vit ça ? Il vous parlait pas du tout de ces affaires.
04:53 Il vous disait pas "je t'ai mis à hauteur de 1%" ?
04:56 Non, parce que je m'en occupais jamais.
04:58 Il aurait pu vous le dire, non ?
05:00 Il aurait pu, oui. Je suis d'accord.
05:03 Vous l'avez su ou pas ?
05:05 Je me suis aperçue quand on a été mis en liquidation la première fois.
05:08 Ah d'accord, donc vous l'avez su bien avant son décès, c'est ça ?
05:12 Bien sûr, quand le crédit lyonnais, on va dire, l'a roulé.
05:17 Et à ce moment-là, vous lui en avez voulu ? Qu'est-ce qui se dit ?
05:21 Bien sûr, je lui en ai voulu. Mais bon, qu'est-ce que je pouvais faire ?
05:26 Alors, à la mort de votre mari, vous découvrez une dette de 642 millions d'euros.
05:31 Vous êtes alors contrainte de vendre tous vos biens.
05:34 Aujourd'hui, comment vous vivez ? Comment vous envisagez l'avenir ?
05:38 Parce que 642 millions d'euros, ce ne sont que les intérêts, c'est ça, d'une dette ?
05:42 Oui, la dette a été complètement remboursée.
05:44 Par la vente des biens, justement, c'est ça ?
05:46 Oui, bien sûr, c'est ce qu'il affirmait d'ailleurs.
05:50 Il faisait ses comptes et il affirmait qu'il avait de quoi rembourser ce que l'arbitrage lui avait octroyé.
05:57 Mais vous n'aviez pas prévu qu'il y aurait des intérêts ?
05:59 Mais non, et lui non plus.
06:01 Et lui non plus ?
06:02 Vous ne pouvez pas imaginer qu'il y aurait des intérêts aussi importants.
06:06 Alors comment vous allez faire maintenant ?
06:08 Écoutez, je suis entre les mains d'un liquidateur, je le laisse faire et je verrai bien.
06:14 Il y a un moment, quand tous les actifs qui restent seront vendus, on va fermer le dossier.
06:20 Mais ce que je veux dire, c'est que ce n'est pas de l'argent public, ce sont des intérêts que l'État font fructifier.
06:28 Mais comment vous vivez-vous au quotidien ?
06:30 Je crois que vous êtes aidée par les amis de Berna, c'est ça ?
06:33 Oui.
06:34 C'est-à-dire, ça veut dire quoi aider ?
06:37 Aider par tous les moyens.
06:39 J'ai des amis qui m'aident financièrement et j'ai la moitié de sa retraite de député.
06:46 Qui représente ? 600 euros.
06:48 Oui.
06:49 Mais je n'ai pas envie de faire du misérabilisme avec tout ce qui se passe, vous voyez.
06:55 Bien sûr.
06:56 Non, non, mais on se pose tous la question.
06:58 Vous avez vécu très longtemps dans l'opulence et maintenant ce n'est plus le cas.
07:01 Il y a eu plus d'années galères que d'années d'opulence.
07:05 Donc vous êtes en train de me dire…
07:06 J'ai eu une vie exceptionnelle avec des hauts, des bas, des très très hauts et des très très bas.
07:11 Et alors en ce moment c'est plutôt le très très bas, mais malgré tout si c'est à refaire…
07:15 Il faut… oui, j'irai, je pense que j'ai eu une vie exceptionnelle avec un homme exceptionnel.
07:23 Alors un jour vers la fin, Berna vous a dit « tout ce que j'ai fait c'était pour t'épater ».
07:27 Oui, c'est vrai.
07:28 Est-ce qu'il y est parvenu ?
07:30 Ça il m'a épaté, oui, dans tous les sens du terme.
07:34 J'en demandais peut-être pas tant.
07:36 Mais on peut dire que la mission a réussi.
07:38 Oui, oui.
07:39 Eh bien merci beaucoup, Dominique Tapie, d'être venue ce matin.
07:42 Je rappelle que votre livre « Bernard, la fureur de vivre » est paru chez l'Observatoire.
07:47 Merci.