"En voulant la fin des moteurs thermiques, l'Europe sacrifie son industrie automobile" - N. Meilhan - Vidéo Dailymotion

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Transcript

00:00 Lundi, hier, décision historique de l'Europe, de l'Union européenne.

00:06 Le texte est enfin voté à l'unanimité.

00:10 Interdit définitif, avant 35, en tout cas d'ici 35, des véhicules essence, diesel et hybrides,

00:18 au profit du tout électrique. Voilà, large soutien général.

00:22 Et puis on vous rappelait, on veut la neutralité carbone à l'horizon 2050, donc pour ça, voilà.

00:28 - Ah bon, alors comment ça va se passer ?

00:30 Eh bien, on est avec Nicolas Méian, qui est ingénieur de transports et énergie.

00:34 Alors, Nicolas Méian, franchement, 35, c'est dans 12 ans.

00:38 On va pouvoir le faire, et qu'est-ce que ça veut dire, et qu'est-ce que ça implique ?

00:42 - Bah, malheureusement, je crois qu'ils vont essayer de le faire.

00:46 Je suis pas sûr qu'ils y arrivent, c'est comme Paris, vous savez,

00:48 normalement, le 1er janvier prochain, il n'y a plus de voiture diesel.

00:51 J'y crois pas une seconde.

00:53 Les engagements, surtout quand ils sont à long terme, ils sont pas forcément faits pour être tenus.

00:57 Mais qu'est-ce que ça veut dire ?

00:59 C'est-à-dire que le plan...

01:00 - Mais concrètement, supposez qu'ils y arrivent.

01:01 - L'Europe continue avec son plan de désindustrialisation.

01:05 C'est-à-dire que là, elle vient de sacrifier son industrie automobile,

01:08 parce qu'en gros, la seule chose en Europe, le seul secteur où on était très protectionniste,

01:13 c'était l'industrie automobile.

01:15 Pas parce qu'on avait des taxes aux importations, mais parce qu'on a des normes

01:18 qui nous protègent, notamment des voitures chinoises.

01:21 C'est pour ça que dans Paris, vous ne voyez pas les voitures chinoises,

01:23 parce qu'elles ne peuvent pas être homologuées.

01:25 Les normes sont trop difficiles sur le crash et sur la pollution atmosphérique.

01:29 Et là, on leur déroule le tapis rouge à la Chine.

01:31 Donc, on va détruire...

01:33 C'était le seul objet qu'on achetait qui n'était pas encore made in China.

01:36 - Et on avait une industrie automobile florissante.

01:38 - Voilà, donc c'est quand même 12 millions d'emplois en Europe.

01:41 C'est terrible, c'est 1 million d'emplois en France,

01:44 quand on prend les emplois de l'industrie et les emplois indirects,

01:47 parce qu'un emploi industriel, c'est 4 emplois à côté.

01:49 Et donc, on continue sur ce rythme-là.

01:52 Vous avez les États-Unis qui sont très agressifs

01:55 avec leur "Inflation Reduction Act",

01:58 qui ne subventionne que les voitures...

02:01 - Qu'est-ce que c'est que le "Inflation Reduction Act" ?

02:03 - En gros, c'est sous couvert de l'environnement,

02:07 on va subventionner que les voitures électriques qui sont fabriquées aux États-Unis,

02:11 avec leurs batteries qui sont fabriquées aux États-Unis.

02:13 Et l'impact de ça, c'est que toutes les usines européennes de batteries,

02:17 les Gigafactory, vous savez, le fameux Airbus de la batterie,

02:21 vous avez 70 projets qui sont en risque,

02:23 vous avez Tesla qui, au lieu de faire son usine à Berlin, va la faire au Texas,

02:27 et donc cet Airbus de la batterie est en train de se transformer en Boeing de la batterie.

02:32 Donc on est complètement en Europe béni-oui-oui,

02:35 les Chinois se protègent, les Américains se protègent,

02:37 et nous on déroule le tapis rouge aux Chinois.

02:40 - Mais attendez, les voitures du tout électrique vont-elles fabriquer en Europe, quand même ?

02:44 - Bien sûr que non !

02:46 La Chine, s'il vous plaît, qui ne vend pas une seule voiture essence ou diesel en or,

02:49 pas une seule, aujourd'hui, l'an dernier, elle était déjà

02:53 le deuxième fabricant de voitures électriques vendues en Europe,

02:55 devant la France ! - Déjà ?

02:57 - Déjà, l'an dernier, parce que toutes les Tesla qu'on achète,

03:00 modèle 3, modèle Y, venaient de l'usine de Shanghai,

03:03 la Dacia Spring, qui est une super voiture vendue par Renault,

03:06 manque de bol, elle a été délocalisée de la Roumanie en Chine.

03:10 Et aujourd'hui, c'est la voiture la plus vendue en France.

03:12 Donc aujourd'hui, il faut qu'on se réveille,

03:14 et moi, quand j'étais à France Stratégie, ce qu'on a proposé, par exemple, c'est de dire

03:18 on conditionne les aides à l'achat à l'empreinte carbone de la fabrication de la batterie.

03:24 Vous savez, en France, on a une électricité décarbonée,

03:26 même si ça gêne beaucoup les Allemands.

03:28 Eh bien, on en profite, et on arrête, aujourd'hui, on subventionne

03:31 la Chine et la Pologne à hauteur de plusieurs centaines de millions d'euros par an,

03:37 puisque les subventions, vu que la batterie est fabriquée en Chine,

03:40 elles vont chez eux. Est-ce que les Chinois ont besoin de cet argent ?

03:43 - Oui, donc le fameux hub qu'on va créer au nord de la France,

03:46 ça va être un hub chinois, quoi. - Non, ça c'est très bien,

03:49 mais le problème, c'est que cette voiture, par exemple,

03:52 vous parlez d'Electric City, le projet de Renault à Douai,

03:54 cette voiture R5 est très belle, on va faire revivre la R5, très bien,

03:58 mais elle va coûter combien ? 25 000, 30 000 euros ?

04:01 Alors qu'après, on aura des voitures à moins de 10 000 euros qui viendront de Chine.

04:05 Le problème du développement de la voiture électrique aujourd'hui,

04:07 pourquoi ça représente 20% des ventes de voitures neuves,

04:09 ce qui est bien, mais les ventes de voitures, c'est 7 millions par an,

04:13 et le budget moyen, c'est 3 000 euros pour acheter une voiture d'occasion.

04:16 - Qui va acheter un 25 000 ou un 100 000 ? - Mais personne, c'est trop cher,

04:20 et donc quand la voiture électrique va arriver de Chine,

04:22 et qu'elle coûtera moins de 10 000 euros,

04:24 un petit peu, si vous voulez, comme les gens ont acheté beaucoup de Dacia,

04:27 quand elle est arrivée au début de l'année 2000,

04:28 elle venait de Roumanie, elle ne coûtait rien,

04:30 donc les gens ont des moyens plus modestes,

04:33 ont pu s'acheter cette voiture-là,

04:34 et bien, on va avoir les voitures électriques, on va pouvoir...

04:36 Aujourd'hui, les panneaux solaires, en Europe, en France,

04:40 viennent tous de Chine, c'est pour ça que ça se développe.

04:42 Si on les fabriquait en France, on n'en aurait pas autant.

04:44 - Oui, c'est tout à fait...

04:46 Non, ce qui est terrible dans toute cette histoire,

04:49 c'est que voilà, comme vous dites,

04:50 c'est-à-dire, voilà, tout le monde est d'accord,

04:51 et l'Europe, voilà, elle abandonne,

04:54 elle brate complètement une industrie automobile,

04:56 qui a fait sa richesse,

04:58 et on sait très bien que du point de vue du CO2,

05:00 enfin, parlons-en du CO2, c'est encore une autre question,

05:03 mais en quoi on décarbone plus comme ça ?

05:05 Mais alors justement, en même temps,

05:07 en même temps, vous vous rappelez, on disait le nucléaire,

05:09 et maintenant, ça y est, après avoir dit "Fesselheim", terminé,

05:13 on va arrêter 50% du parc,

05:18 on ne va plus former d'ingénieurs pour la restauration,

05:21 pour s'occuper des centrales,

05:22 et maintenant, attention, attention,

05:24 on remet, non pas du fuel, mais on remet justement,

05:28 de l'énergie dans les centrales.

05:31 Mais, mais, mais, la Commission européenne

05:32 ne l'est pas d'accord du tout.

05:34 Vous avez vu que, justement,

05:36 hier avant-hier, la chère Ursula von der Leyen

05:40 a dit "pas question que le nucléaire

05:44 soit subventionné parce que

05:47 on n'estime pas, effectivement,

05:51 que... voilà, l'énergie nucléaire",

05:54 je cite exactement ce qui a été dit,

05:57 "n'apparaît pas dans la définition des technologies stratégiques

06:00 à zéro émission qui bénéficieront d'un soutien particulier".

06:04 Ça veut dire quoi, ça, Nicolas Véan ?

06:06 - Ça veut dire que l'Union européenne a décidé

06:08 de 100% de voiture électrique en 2035.

06:11 Dans son discours de l'Union,

06:14 qu'elle a prononcé l'an dernier, Ursula a dit

06:17 "Ah tiens, faudra faire attention parce qu'il y a quand même des métaux dans les batteries,

06:21 alors on va regarder, on va se faire des stocks stratégiques de métaux".

06:24 Bon, ben c'est bien, mais je pense que la prochaine étape,

06:26 c'est qu'elle va découvrir que pour charger une voiture électrique,

06:29 il faut de l'électricité.

06:30 Et pour l'instant, en Europe, si vous voulez,

06:32 nous on a publié avec France Stratégie une note

06:34 début 2021, avant la guerre en Ukraine,

06:37 avant l'augmentation du prix de l'électricité et du gaz,

06:39 on a dit "Attention, tous les pays européens ont fermé

06:41 leur centrale à gaz, leur centrale à charbon, leur centrale nucléaire,

06:44 sans se concerter, sans se parler,

06:46 ça va mal se passer, parce qu'on va plus avoir les marges

06:49 pour pouvoir produire, et l'électricité c'est un bien qui ne se stocke pas,

06:52 on a besoin d'avoir des marges de manœuvre".

06:53 On les a toutes supprimées avec le marché européen de l'électricité,

06:57 et donc ça va très mal se passer.

07:00 - Mais alors, très mal se passer, en quel sens ?

07:02 C'est-à-dire qu'à partir du moment où on dit

07:04 "On ne va pas subventionner, on ne va pas faire de subvention

07:07 à l'énergie nucléaire", ça veut dire que quoi ?

07:09 On va vers une espèce de manque, on va avoir un...

07:12 Je veux dire, on ne va pas avoir, on ne va pas pouvoir...

07:15 Nos besoins ne seront pas suffisants.

07:18 - Alors déjà, si vous voulez, la situation qu'on a vécue l'hiver dernier,

07:21 on l'a vécue un peu dans la peur du délestage,

07:24 de la coupure de courant, de la thermondisation de notre pays,

07:28 elle risque de se reproduire assez régulièrement,

07:31 jusqu'à ce que ces nouveaux réacteurs nucléaires hypothétiques,

07:34 on parle des 6 EPR, on ne va pas les avoir tout de suite.

07:37 C'est plutôt 2035 pour ces réacteurs.

07:40 Si on va avoir de l'énergie nucléaire tout de suite, on sait ce qu'il faut faire.

07:43 Il faut rouvrir S-Nahim.

07:44 C'est 2 milliards d'euros, 2 ans, ça coûtera moins cher que 15 milliards 15 ans.

07:47 Donc si on est pragmatique, mais malheureusement Emmanuel Macron

07:50 ne se déjugera pas là-dessus, mais la centrale qui fonctionne,

07:53 elle a fait S-Nahim, il suffit juste de la réouvrir et de la faire marcher.

07:57 Mais ce qui est terrible, si vous voulez, c'est que ça va prendre 15 ans.

08:01 Alors, je vais essayer de donner une bonne nouvelle quand même.

08:03 Quand on lit entre les lignes, ce que dit Madame van der Leyen,

08:08 c'est que la 4ème génération, vous savez le projet Astrid,

08:13 qui était d'abord Superphénix, fermé par les écolo et Dominique Voynet en 1997,

08:17 puis fermé par Emmanuel Macron, Astrid en 2019,

08:20 c'est ce qu'elle lit, ça, ça peut être subventionné.

08:22 Donc tant mieux, on va pouvoir travailler sur la...

08:24 - Respirer un peu.

08:25 - Voilà, et puis aussi, quand on lit entre les lignes,

08:28 il y a les petits réacteurs qui vont être subventionnés,

08:30 ça tombe bien puisque la Pologne a décidé de mettre beaucoup de petits réacteurs chez elle,

08:33 mais en fait, en gros, on n'a pas réussi à récupérer les subventions pour nos EPR.

08:38 Donc nos EPR, on va les payer de notre poche,

08:40 il faut qu'on se débrouille, sachant qu'on a 3 milliards d'euros de dettes sur la tête,

08:44 plus le taux d'intérêt qui monte, et donc l'Allemagne qui nous tient.

08:49 - Mais tout ce que vous dites, Nicolas Mélenchon, ce qu'on voit,

08:52 c'est que ce soit pour les voitures ou pour le nucléaire,

08:55 en fait c'est l'Europe qui décide de tout.

08:57 Nous, on ne décide plus de rien, soyons clairs.

08:59 - Normalement, si vous voulez, pour les voitures, oui,

09:01 ça c'est des réglementations qui sont européennes,

09:03 mais pour l'énergie, c'est les États membres qui décident ce qu'ils veulent faire,

09:07 et d'ailleurs c'est ça le problème, c'est que pas sur l'électricité,

09:10 ça devrait être un projet commun, c'est comme ça qu'est née l'Europe.

09:13 L'Europe, la CK, Comité Européenne du Charbon et de l'Acier,

09:17 l'électricité, ça ne se stocke pas, mais ça se transporte très bien.

09:21 Donc c'est pour ça qu'on a beaucoup d'interconnexions,

09:23 d'ailleurs qui changent d'une heure à une autre entre la France, l'Allemagne,

09:27 l'Espagne, l'Italie, le Royaume-Uni.

09:29 Mais il faut se parler, et il faut se mettre d'accord.

09:32 Bon, on s'assoit autour d'une table, toi t'es en Espagne,

09:34 qu'est-ce qui se passe chez toi ? T'as du soleil ? Très bien,

09:36 mettons des panneaux solaires chez toi. T'es dans la mer du Nord, t'as du vent ?

09:39 Mets des éoliennes. Et qui s'occupe d'avoir d'électricité en base

09:42 s'il n'y a pas de soleil et pas de vent ?

09:44 - Oui, c'est ça. - Il n'y a personne ? C'est ça la question ?

09:46 - C'est toujours la même question. - Aujourd'hui, Mme Van der Heelen,

09:48 elle est gentille, elle nous dit que les technologies stratégiques, c'est les panneaux solaires,

09:52 ce serait bien de les produire chez nous plutôt qu'en Chine,

09:54 les éoliennes et les électrolyseurs.

09:56 Mais, qu'est-ce qui se passe quand il fait nuit et qu'il n'y a pas de vent ?

09:59 - On oublie que ce sont des intermittents.

10:01 - On oublie qu'en fait il faut tout doubler.

10:03 On est obligé de tout doubler, et c'est pour ça qu'en fait,

10:06 malheureusement, quand on double tout, on double aussi le prix.

10:09 Et ça c'est un problème. - C'est extraordinaire, c'est vraiment la phrase de Lenich,

10:12 l'Europe, on ne sait pas où on va, mais on y va.

10:14 C'est un peu ça.

10:16 - Merci beaucoup Nicolas Méhen,

10:18 on continuera à en parler avec vous,

10:20 parce que je crois que tout ça n'est pas fini.

10:22 Et juste une dernière chose, à votre avis,

10:25 est-ce qu'il y aura encore, on va faire une petite prédiction comme ça,

10:28 il y aura encore des voitures thermiques après 2035 ?

10:31 - Ah mais, l'interdiction ne concerne que des voitures neuves.

10:34 - Oui, bien sûr.

10:35 - Je rappelle que les voitures neuves, c'est 15% des ventes de voitures.

10:39 Donc, je vais vous dire, je vais faire une petite prédiction.

10:42 Non seulement il y en aura encore, mais elles seront plus chères que les voitures neuves.

10:46 Puisque ça deviendra une rareté.

10:49 Et donc je vous conseille, si vous avez des voitures thermiques, surtout gardez-les,

10:52 parce qu'en 2035, vous pourrez vous gagner beaucoup d'argent pour les vendre.

10:56 - Merci Nicolas Méhen, voilà, c'est un beau conseil donné par l'ingénieur.

"En voulant la fin des moteurs thermiques, l'Europe sacrifie son industrie automobile" - N. Meilhan

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