Christophe Béchu, Ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, est l'invité du Grand entretien. Il revient sur la mobilisation contre les mégabassines, qui a tourné à l'affrontement violent ce week-end à Sainte-Soline, et sur le "plan eau" qu'il révélera jeudi. Plus d'info : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-invite-de-8h20-le-grand-entretien/l-invite-de-8h20-le-grand-entretien-du-lundi-27-mars-2023-8072201
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00:00 France Inter, Léa Salamé, Nicolas Demorand, le 7 9 30.
00:06 Et avec Léa Salamé, nous recevons ce matin le ministre de la Transition écologique et
00:11 de la Cohésion des Territoires.
00:13 Pour intervenir, amis auditeurs, amis auditrices, vous pouvez appeler le standard d'Inter, mais
00:18 en raison d'un mouvement de grève ce matin, vous ne pourrez pas passer à l'antenne.
00:22 Je lirai donc moi-même vos questions.
00:25 Vous pouvez par ailleurs passer par l'application de France Inter.
00:28 Christophe Béchu, bonjour.
00:30 Bonjour Nicolas Demorand.
00:31 Bonjour.
00:32 Et bienvenue à ce micro.
00:34 On va évoquer dans un instant votre plan eau qui doit être dévoilé cette semaine.
00:39 Mais revenons évidemment pour commencer à ce qui s'est passé samedi à Sainte-Soline
00:43 autour du projet de retenue d'eau ou de méga-bassines.
00:46 Selon les organisateurs du rassemblement, 200 manifestants ont été blessés dont 40
00:52 grièvement.
00:53 47 gendarmes ont été blessés dont deux étaient hier soir en urgence relative.
00:58 Et au moment où nous parlons, un manifestant âgé de 30 ans est encore entre la vie et
01:03 la mort.
01:04 Que pouvez-vous nous dire ce matin de son état de santé ? Avez-vous des informations
01:08 à nous donner ?
01:09 Je n'ai pas d'informations sur son état de santé parce que dès l'instant où il
01:13 a été admis à l'hôpital, c'est maintenant le secret médical qui s'applique.
01:16 Mais bien entendu, c'est une situation que nous suivons de près comme l'état de santé
01:25 des gendarmes.
01:26 Le déferlement de violences inouïes qui s'est passé ce week-end va déboucher sur des enquêtes,
01:32 en particulier pour qu'on sache les raisons, les conditions dans lesquelles une partie
01:36 de ces blessures graves sont arrivées.
01:38 Et je veux évidemment, en pensant à ceux qui aujourd'hui sont en train d'être
01:43 soignés, dans le même temps, avoir la condamnation la plus claire pour les scènes auxquelles
01:48 on a assisté, en particulier samedi.
01:50 Alors, comment on en est arrivé là, Christophe Béchoux ? Le déploiement des forces de l'ordre
01:54 pour encadrer la manifestation était considérable, alors qu'il n'y avait, selon la préfecture,
01:58 chiffre de la préfecture, que 6 000 personnes à la manifestation.
02:00 Plus de 3 000 gendarmes et policiers avaient été mobilisés, soit un policier pour deux
02:04 manifestants.
02:05 Ce qui fait dire aux députés européens, vers David Cormand, je suis estomaqué de
02:09 voir une telle débauche de moyens de la police.
02:11 Plus de 3 000 policiers pour protéger un trou.
02:13 S'il n'y avait pas eu de policiers présents, les gens seraient allés vers un le trou.
02:17 Quelques excités seraient allés dedans.
02:19 Le soir, on serait rentré au camp de base faire la fête et tout le monde serait reparti.
02:23 Il n'y aurait pas de policiers ni de manifestants blessés.
02:25 Vous lui répondez quoi ? Est-ce que vous avez vu trop gros sur le dispositif de police ?
02:29 Je réponds qu'il faut arrêter avec les fables.
02:31 La fable que des gens avaient prévue d'aller faire une petite balade bucolique pour aller
02:37 regarder un chantier, ça ne résiste pas à la réalité.
02:40 D'abord en amont, avec des notes du renseignement qu'on conduit à interdire cette manifestation.
02:45 Avec un précédent au mois d'octobre.
02:47 61 gendarmes blessés.
02:48 Avec la saisie de l'arsenal samedi.
02:51 Je ne sais pas pour vous, moi quand je vais me promener en famille ou avec des amis, j'emmène
02:55 pas des boules de pétanque, des bonbonnes de gaz, des cocktails Molotov et des battes
03:00 de baseball.
03:01 Ce sont des dizaines de couteaux, de machettes, de cocktails Molotov, de pierres, de pavés
03:08 qui ont été saisis par les gendarmes tout au long de la journée.
03:11 Et vous avez vu les images.
03:13 Vous avez vu des gens jeter des chandelles romaines ou des tirs de mortier sur les gendarmes.
03:17 Et on voudrait nous faire croire qu'à la fin, la responsabilité, elle serait du côté
03:21 des forces de l'ordre.
03:22 Cette manifestation, je le redis, elle était interdite compte tenu des précédentes.
03:26 Et elle était interdite également compte tenu des notes qui permettaient de s'attendre
03:31 à un millier d'événements radicalisés.
03:33 A cette violence policière à Sainte-Soline, à ces points d'exclamation, sans les braves,
03:38 sans ce cirque, il ne se passerait absolument rien d'autre qu'une marche dans les champs
03:42 a réagi Jean-Luc Mélenchon sur Twitter.
03:45 Là encore, vous lui répondez quoi ?
03:47 - Que c'est une réalité alternative ?
03:49 J'aimerais que monsieur Mélenchon mette autant d'énergie à condamner les casseurs,
03:56 ceux qui tirent sur des policiers, ceux qui participent d'une forme de barbarie qu'il
04:01 en met pour aller pointer des violences policières qui sont parfois inacceptables et qui débouchent
04:05 sur des saisines de l'IGPN comme après les propos intolérables qu'on a entendus au
04:09 début du week-end.
04:10 Mais on a vraiment le sentiment qu'il y a deux poids, deux mesures et que de façon
04:14 non systématique, certains ont perdu le réflexe qu'on devrait tous avoir de commencer
04:19 par protéger l'honneur et la réputation des forces de l'ordre.
04:22 C'est quoi une république dans laquelle à la fin, vous remettez en cause la légitimité
04:25 de la police ? C'est le retour des milices ?
04:27 - Vous venez d'employer le mot tout seul de violences policières.
04:30 De manière générale, la stratégie de maintien de l'ordre en France interroge.
04:34 On a vu des vidéos sur les réseaux sociaux montrant des scènes de violences pendant
04:36 les manifestations contre la réforme des retraites, à tel point que le Conseil de
04:39 l'Europe, là c'est pas Jean-Luc Mélenchon, c'est le Conseil de l'Europe, qui s'est
04:42 alarmé d'un usage excessif de la force par la police française.
04:45 On vous repose la question qu'on pose à chaque fois, y a-t-il un problème avec le
04:48 maintien de l'ordre en France ? Cette question avait déjà été posée pendant les Gilets
04:52 jaunes où la France avait été condamnée.
04:54 - On est aujourd'hui dans une phase où malheureusement, alors que 95% des manifestations se sont bien
05:01 passées depuis quelques jours, quelques semaines, on a une résurgence de la violence.
05:05 Il y a eu 441 gendarmes et policiers blessés jeudi dernier à Paris.
05:10 - Mais c'est totalement condamnable, mais c'est pas ma question.
05:12 - Ma question c'est est-ce qu'il y a un problème avec le maintien de l'ordre en France, avec
05:16 la stratégie de maintien de l'ordre en France ? C'est pas les agressions sur les policiers,
05:20 je pense que tout le monde les condamne.
05:22 - Malheureusement non.
05:23 - En tout cas nous les condamnons, on les annonce matin, mais ma question est sur la
05:26 stratégie de maintien de l'ordre.
05:27 - Je vais être le plus clair possible, madame Salamé.
05:28 Il n'y a aucune place pour les violences policières.
05:31 Il ne peut y avoir la moindre tolérance de façon systématique, c'est, c'est signe
05:36 de l'IGPN, enquête, sanction.
05:38 Et là-dessus, que ce soit le préfet de police, que ce soit le ministre de l'Intérieur, les
05:42 choses sont extrêmement claires.
05:43 - Alors, venons-en maintenant sur le fond du dossier de ces retenues d'eau, de ces mégabassines
05:48 auxquelles vous êtes favorable.
05:50 Ces dispositifs visent à garder de l'eau l'hiver afin que les agriculteurs puissent
05:54 l'utiliser l'été, pour le dire de manière simple.
05:57 Les écologistes dénoncent le pompage des nappes phréatiques qui sont déjà à sec en
06:02 cette période de sécheresse.
06:04 Ils dénoncent la défense d'un modèle d'agriculture très consommateur d'eau qui n'est plus
06:10 tenable selon eux.
06:11 Vous leur répondez quoi sur cette critique-là ?
06:15 - D'abord, je ne suis pas partisan des bassines.
06:18 Je considère qu'il n'y a aucune autre solution à moyen terme que la sobriété.
06:22 Que la meilleure des retenues des bassines, c'est la nappe phréatique.
06:25 Ensuite, il faut dans chaque département, dans chaque territoire, regarder quelle est
06:29 la réalité topographique, hydrographique, géologique.
06:32 Et là, en l'espèce, vous avez un consensus qui ne date pas de ce gouvernement, qui s'est
06:36 fait à la fin de l'année 2018 avec les socialistes de la région, les républicains du département,
06:41 même Mme Bateau qui a parafait un accord global avec des engagements de la part des
06:46 agriculteurs et en contrepartie des retenues qui ne sont alimentées que si le niveau des
06:50 nappes est suffisant.
06:51 Et par contre, vous avez un rapport du BRGM de l'année dernière qui dit que le projet,
06:57 celui-là, en l'état, il vaut le coup.
06:59 Sauf que les nappes phréatiques ont de moins en moins d'eau, sauf qu'on a vécu une
07:02 sécheresse record en hiver et que là, elles sont à sec les nappes phréatiques.
07:06 Donc aller pomper dans des nappes phréatiques qui sont à sec, c'est compliqué, non ?
07:09 C'est très simple.
07:10 Le protocole d'accord prévoit que si les nappes ne sont pas au bon niveau, il n'y
07:13 a pas de pompage.
07:14 C'est écrit noir sur blanc dans le protocole de Saint-Denis.
07:16 Je ne défends pas les bassines.
07:17 En soi, je dis qu'il faut sur chaque territoire regarder quelle est la réalité.
07:21 Alors justement, on va en parler avec quelqu'un qui a organisé cette manifestation.
07:24 C'est le président de l'Asile du Tertre.
07:29 Bonjour, merci d'être avec nous en ligne ce matin.
07:32 Vous êtes porte-parole du mouvement Les Soulèvements de la Terre.
07:36 C'est l'un des trois mouvements qui a organisé la manifestation de samedi à Sainte-Soline.
07:41 Expliquez-nous pourquoi vous êtes contre ces bassines.
07:46 Christophe Béchu vous répondra ensuite.
07:48 Bonjour Nicolas, bonjour Léa, bonjour France Inter.
07:52 Je suis très étonné par les propos de M. Béchu qui vient de nous dire, je ne suis
07:57 pas partisan des bassines, mais qui vient de justifier un dispositif délirant qui a
08:02 mené à de nombreux blessés.
08:03 On va y revenir.
08:04 Sur le fond du dossier, parce que c'est ça qui est vraiment important aujourd'hui,
08:07 qu'on ne fasse pas de diversion avec des prétendues boules de pétanque ou des prétendues
08:11 bêtes de baseball, ce qui est important aujourd'hui, c'est que les bassines, c'est une fausse solution.
08:15 Tous les hydrologues, tout le consensus scientifique nous explique que c'est une maladaptation
08:21 au changement climatique, qu'il ne sera pas possible de pomper l'eau dans les nappes
08:24 phréatiques en hiver parce qu'on est dans des sécheresses pluriannuelles et que les
08:27 nappes sont déjà à leur niveau le plus bas.
08:29 C'est juste une manière de détourner les restrictions estivales.
08:33 Le rapport du PRGM, le lave-même de ses concepteurs ne prend pas en compte le changement climatique.
08:39 Vous vous rendez compte ? Vous vous fondez sur un rapport dont les concepteurs disent
08:43 eux-mêmes qu'ils ne prennent pas en compte les conséquences du changement climatique.
08:45 Alors, réponse de Christophe Béchu.
08:47 Vous êtes ministre de la Transition écologique.
08:49 On n'est vraiment pas sérieux là.
08:50 Alors, réponse de Christophe Béchu.
08:52 Je n'ai pas fini, écoutez-moi.
08:54 Allez-y, allez-y.
08:55 L'ensemble des recours juridiques ont quasi systématiquement, a posteriori, donné
08:59 raison aux opposants.
09:00 Aujourd'hui, il y a des bassines illégales dans la laine qui continuent d'être exploitées.
09:04 Qu'est-ce que vous faites contre ces bassines illégales qui continuent d'être exploitées ?
09:07 Vous interdisez nos manifestations et vous laissez les exploitants encore utiliser des
09:11 bassines illégales à l'heure où je vous parle.
09:13 Il y a un maîtrise de la réglementation environnementale.
09:15 Alors, le ministre vous répond.
09:16 C'est un consensus scientifique qui dit que c'est une fausse solution.
09:18 Monsieur, vous racontez n'importe quoi.
09:21 C'est vous qui êtes dans une réalité alternative.
09:23 Et ce n'est pas tolérable de tenir ce genre de propos.
09:25 Ce n'est pas sérieux.
09:26 Quand on est ministre de la Transition écologique, de tenir ce genre de propos.
09:28 Alors, il vous répond, Basile Duterte.
09:30 Christophe Béchu.
09:31 Répéter des contre-vérités n'en fait pas une vérité.
09:33 Dire qu'il y a un consensus de tous les hydrologues, c'est faux.
09:36 Ce projet, il a un comité scientifique qui l'a défendu.
09:39 Il y a dans d'autres territoires, je pense à la Vendée, je pense à d'autres départements
09:43 de France, des projets de ce type dont aujourd'hui, les bienfaits, y compris d'un point de vue
09:47 hydrologique, sont reconnus.
09:48 Là où il y a un consensus, c'est sur le fait que ça n'est pas en mettant des bassines
09:52 partout qu'on va régler le problème.
09:53 Et je dis les choses, je le partage de manière complète.
09:56 Mais on va pas s'envoler.
09:57 A vos yeux, vous êtes ministre de la Transition écologique, il l'a rappelé, ça fait plusieurs
10:00 mois déjà.
10:01 Maintenant, vous êtes rentré dans le sujet.
10:02 C'est une bonne chose ou une mauvaise chose, les bassines ?
10:04 Question large.
10:05 Je sors de Saint-Seligne.
10:06 C'est quoi ?
10:07 On ne peut pas répondre par un oui ou un non à une question.
10:10 Il n'y a pas d'agriculture sans eau.
10:12 Il y a toute une partie, y compris d'un discours, qui à la fin aboutirait à ce qu'on puisse
10:16 plus produire.
10:17 Et donc on se retrouve à importer davantage.
10:19 Avec cette hypocrisie colossale d'augmenter notre empreinte tout en baissant nos émissions.
10:24 Ou qu'on change notre manière de produire.
10:26 Mais c'est évidemment une nécessité.
10:28 Et c'est par là que je commence en disant qu'il n'y a pas d'autre solution à moyen
10:32 terme que la sobriété.
10:33 Et cette sobriété, elle ne se décrète pas depuis Paris.
10:35 Elle dépend du sol dont on parle, de la nature des cultures que vous pouvez imaginer, en
10:39 fait.
10:40 Et en fait, dans les arguments qui sont répétés et répétés dans le cadre Sainte-Seligne,
10:43 on dit que c'est l'accaparement par l'agrobusiness.
10:45 Il y a 450 agriculteurs.
10:47 C'est de la polyculture élevage sur le territoire dont nous discutons.
10:51 Il y a une façon d'aller déformer les choses.
10:54 Le mot « accaparement par les agriculteurs », il renvoie à cette idée que ce serait
10:57 pour leur bien-être.
10:58 Comme si c'était pour remplir leur jacuzzi.
11:00 Il y a une telle outrance dans les propos qu'à la fin, c'est pas parce que vous avez
11:03 une telle coalition de gens qui sont contre qu'il faut perdre toute raison et cesser
11:07 de regarder les choses en face.
11:08 - Basile Dutertre, votre réponse, réaction, aux propos de Christophe Béchut ?
11:13 - Oui, écoutez, c'est vraiment n'importe quoi.
11:16 Un quart de l'eau consommée en France est à destination du maïs industriel.
11:19 Ne vous faites pas croire que cette eau cherche à nourrir les gens.
11:22 C'est pas vrai.
11:23 Elle cherche à nourrir un système qui est fondé sur une forme d'export, d'élevage
11:28 intensif, qui est désastreuse.
11:29 Elle bénéficie uniquement à une infime minorité d'agriculteurs.
11:32 6% dans les Deux-Sèvres.
11:34 Je veux dire, en Vienne, il y a un projet de Basile, même la Chambre d'agriculture
11:38 de la Vienne s'y oppose.
11:39 Et pourquoi la Chambre d'agriculture de la Vienne s'y oppose ? Parce qu'elle va bénéficier
11:42 qu'à 150 agriculteurs bénéficiaires sur 288 ans.
11:45 - Mais je ne suis pas en train de défendre Basile dans tous les départements, toujours
11:48 et tout le temps.
11:49 - Il est en train de vous raconter n'importe quoi.
11:51 Votre travail de journaliste, c'est de vérifier ces sources.
11:54 Et vous le ferez encore, j'imagine, dans les jours qui viennent.
11:57 Mais là, sur le fond du dossier, c'est pas possible de raconter de telles inepties.
12:03 - Quand on commence déjà en parlant de prétendues boules de pétanque et de prétendues battes
12:08 de baseball, quand on voit ce qui a été saisi par les policiers et les gendarmes dans
12:11 le cadre d'une manifestation interdite, on se discrédite pour la suite de son propos.
12:15 Que vous ne commenciez pas par condamner, de la manière la plus claire qui soit, le
12:18 fait qu'au milieu de gens de bonne foi, qui sont venus manifester, bien que cette manifestation
12:23 soit interdite, on se soit retrouvés avec des centaines de gens qui n'avaient comme
12:27 seul objectif que de casser du flic, en ayant préparé tout ce qu'il fallait en amont,
12:32 sincèrement.
12:33 A partir de ce moment-là, il y a toute une partie déjà du dialogue qui tombe.
12:37 - Basile Dutertre, merci d'avoir été avec nous ce matin.
12:40 Vous êtes, sur le rappel, porte-parole du mouvement Les Soulèvements de la Terre.
12:45 Un mot maintenant sur le plan Seycherest.
12:47 Vous savez, ce plan que vous nous promettez depuis des semaines et des semaines et que
12:50 vous ne cessez de reporter.
12:51 - C'est pour cette semaine, et je peux même vous dire que j'aurai l'occasion de le présenter
12:58 jeudi.
12:59 - C'est sûr ? - C'est certain.
13:00 - Parce qu'on a eu des jeudis précédents qui ont été reportés.
13:03 - Non, on n'avait jamais été aussi précis dans les annonces et dans la date.
13:06 - Alors, jeudi, le plan est bouclé.
13:08 Qu'est-ce que vous pouvez nous dire ce matin ? Qu'est-ce que vous pouvez déjà annoncer ?
13:11 Une mise en bouche ?
13:13 - Le fond de l'affaire, c'est bien ça.
13:15 C'est le fait de se retrouver, le rapport du GIEC le redit la semaine dernière, avec
13:18 un réchauffement climatique qui nous oblige à penser une sobriété dans l'eau entre
13:21 -10 et -40%.
13:23 Et donc, c'est bien pour ça qu'il faut faire bouger nos usages.
13:25 Ce plan, il va s'occuper de quantité, comme on fait avec moins.
13:30 Il va s'occuper de qualité.
13:31 On n'a que 44% des masses d'eau en France qui sont en bon état écologique.
13:35 C'est un sujet qui sera dedans.
13:36 On va parler de gouvernance, parce qu'on a aujourd'hui un système assez kafkaïen
13:40 sur la gestion.
13:41 Et puis on va évidemment parler moyens, parce qu'il n'y a pas de plan, il n'y a pas de finance.
13:44 - Alors, monsieur le ministre, qu'est-ce que vous pouvez nous annoncer ?
13:46 Sur quoi vous allez jouer ? Sur les utilisations des eaux usées ?
13:51 Est-ce que vous allez demander aux gens de faire des douches plutôt que des bains ?
13:53 Qu'est-ce que vous allez annoncer, je dis concrètement ?
13:55 - On va s'efforcer de jouer sur tous les paramètres.
13:57 Aussi bien la réglementation sur les forages.
13:59 Aujourd'hui, vous pouvez forer et prendre des milliers de mètres cubes
14:02 avec parfois très peu d'autorisation.
14:03 Il n'y a pas forcément de compteur.
14:04 Il y a des choses sur lesquelles il faut qu'on bouge pour la sobriété.
14:07 Lutter contre les gaspillages.
14:09 Un litre d'eau potable sur cinq qui part dans les fuites
14:12 et des endroits où c'est un sur deux, c'est juste pas possible.
14:15 - Vous allez faire quoi, par exemple, sur les fuites ?
14:17 - On va lisser les points noirs et regarder ensuite de façon très spécifique
14:22 avec les agences de l'eau, des plans qui permettent d'arrêter
14:25 d'avoir autant de pourcentage de fuites.
14:27 On va autoriser de nouveaux usages pour les eaux usées, pour les eaux grises.
14:31 Les eaux grises, c'est l'eau de votre machine à laver.
14:33 Aujourd'hui, vous avez de l'eau potable au fond de vos toilettes.
14:36 C'est totalement aberrant de se retrouver à utiliser de l'eau potable
14:39 alors qu'on a des sources d'eau que nous n'utilisons pas
14:41 et pour lesquelles aujourd'hui il y a des interdictions réglementaires.
14:44 - Donc là, à ce stade, effectivement, les eaux de la machine à laver,
14:48 c'est interdit de les utiliser dans les toilettes, par exemple.
14:51 - Vous allez l'utiliser, c'est ça ? Vous allez lever cette interdiction ?
14:53 - On va lever très concrètement cette interdiction.
14:56 On va prendre des mesures qui permettent de lutter contre le gaspillage
14:58 industriel, agricole, au niveau des particuliers.
15:02 On va investir les moyens financiers qui vont aussi permettre à ces agences de l'eau
15:06 de pouvoir jouer sur ces impératifs de quantité et de qualité.
15:09 - Et pour les particuliers, sur les douches, les bains, les piscines ?
15:12 - Je vous dirai la manière dont on avancera sur ces sujets.
15:15 - On aura le droit de remplir les piscines ou non ?
15:17 - On va pousser pour tous les usages qui sont vertueux et sensibiliser nos concitoyens à ce qu'ils en ont.
15:22 - Donc il n'y aura pas d'interdiction ou d'obligation ?
15:24 - Vous verrez ça jeudi.
15:26 - Manquera-t-on d'eau potable dans certaines régions cet été ?
15:29 - L'année dernière, on a 700 communes qui ont manqué d'eau potable.
15:33 Et parmi celles-là, 500 qui ont été alimentées ou par des citernes ou par des bouteilles en eau.
15:40 L'enjeu, c'est qu'on se retrouve dans une situation qui n'est pas le même type cet été.
15:44 Et on a des indicateurs, en particulier désormais dans la vallée du Rhône et sur le pourtour méditerranéen qui sont inquiétants.
15:49 Autant les pluies de ce début du mois de mars, elles ont permis sur la moitié nord
15:53 de nous éloigner de la situation très à risque que nous avions à la fin du mois de février.
15:57 Je ne dis pas que c'est satisfaisant pour autant, mais on a eu un bon mois de mars dans la moitié nord.
16:02 Autant dans le sud, il n'y a pas plus pluie dans la vallée du Rhône, il n'y a pas plus pluie sur le pourtour méditerranéen.
16:06 Et on a des communes, à la minute où je vous parle, qui ne sont pas sorties de l'alerte depuis l'été dernier.
16:13 Donc oui, nous avons des inquiétudes, nous avons des points de fixation, nous avons des communes que nous suivons avec les agences régionales de santé.
16:19 - Et donc qu'est-ce que vous allez faire pour le sud où il n'a pas plu ?
16:22 - On va utiliser tous les leviers dont nous disposons.
16:25 Ceux de la lutte contre le gaspillage, ceux des interconnexions potentielles de réseaux,
16:29 parce qu'une partie de ces communes, c'est parce qu'elles gèrent leur eau toutes seules.
16:32 Parfois d'ailleurs en revendiquant le fait qu'elles ne se connectent pas aux autres pour conserver un système qui soit un système local.
16:38 Il faut qu'on tire toutes les leçons de cet épisode de sécheresse, parce que ça n'est pas une sécheresse exceptionnelle.
16:44 Elle l'est à l'échelle du passé, mais elle ne sera pas à l'échelle du futur.
16:47 - Question sur l'application de France Inter de Le Brun.
16:51 Comptez-vous réglementer l'usage et l'achat de piscines privées ?
16:55 Et qu'en est-il des golfs également, et plus largement de l'usage ludique de l'eau ?
17:01 - Plusieurs choses.
17:03 D'abord, ce qu'on souhaite, c'est avoir une gestion qui soit territorialisée.
17:07 Ce n'est pas d'un kerk à Toulon d'avoir des règles qui soient nécessairement les mêmes.
17:11 La France est divisée en régions et en départements, tout le monde le sait.
17:14 Ce que les gens savent peut-être moins, c'est qu'elle est divisée en territoires pour la gestion de l'eau.
17:18 Et là, il y en a six, et puis il y a même jusqu'à 1100 sous-bassins qui ont chacun leur réalité.
17:22 L'idée, c'est d'avoir des règles qui s'adaptent à la réalité de ces territoires,
17:25 et qui ne sont pas les mêmes, puisque les masses d'eau ne sont pas les mêmes partout.
17:28 Évidemment que la question ludique et la question des usages, elle se pose.
17:33 Elle est déjà posée, puisque vous savez qu'au fur et à mesure des niveaux de crise ou de sécheresse qu'on rencontre,
17:39 de plus en plus d'usages sont interdits, en commençant par les usages ludiques
17:42 et en commençant par l'interdiction de remplir sa piscine.
17:45 - On a une question de Jean-Pierre.
17:47 Peut-on être informé, s'il vous plaît, d'une date où le président prendra la parole sur l'écologie ?
17:54 Quand va-t-il exposer un plan en faveur de l'écologie ?
17:57 Je pense qu'il y a de l'ironie dans cette question.
18:00 Je pense que si votre auditeur fait référence en particulier à son intervention de la semaine dernière,
18:04 il a annoncé que la planification écologique serait prête pour le mois de juin.
18:08 Ce sera très certainement une bonne occasion de montrer une fois de plus la réalité de l'engagement écologique de ce gouvernement.
18:16 - Un mot encore avant de passer à deux ou trois questions plus politiques.
18:19 Les pêcheurs, on l'apprend là, le port de Lorient est bloqué par des pêcheurs ce matin
18:23 qui contestent les nouveaux quotas de pêche et l'instauration de zones d'interdiction de pêche
18:27 pour éviter les captures accidentelles de dauphins.
18:30 Les pêcheurs de boulogne-sur-mer aussi ont bloqué le port cette semaine
18:33 contre les décisions de l'Europe qui veut interdire la pêche aux chaluts de fond
18:36 et les engins qui traînent dans les aires marines protégées.
18:39 L'Europe a raison d'un point de vue environnemental.
18:43 Emmanuel Macron défend les pêcheurs ou pas ?
18:47 - Non, on ne peut pas dire ça très clairement.
18:49 C'est une des conséquences de l'accord de Montréal, de la COP 15,
18:52 qui consiste à dire qu'on va protéger 30% de nos terres et de nos mers.
18:55 30% ça veut forcément dire qu'il restreint d'une partie des usages.
18:58 Le Conseil d'Etat a rappelé qu'il y avait une nécessité à changer de braquet
19:04 et à agir de façon beaucoup plus forte en ce qui concerne les captures accidentelles de dauphins.
19:08 On est à près de 1000 dauphins pendant l'hiver qui viennent de s'écouler.
19:12 Si on reste sur des niveaux de ce type, on peut avoir des inquiétudes par rapport à l'espèce.
19:16 On voit que les mesures des farouchements à ce stade,
19:19 parce qu'elles étaient sur une quantité de navires pas suffisante,
19:23 n'ont pas produit les résultats.
19:25 On va s'atteler précisément au sein du ministère de la Transition écologique
19:28 à regarder la manière dont on peut être nettement plus efficace.
19:32 Mais ça illustre bien les tensions qui existent de manière générale
19:36 entre écologie et économie et la difficulté d'aller trouver des chemins.
19:40 - Une question de Thibault sur la sécurisation de l'eau
19:46 par rapport aux grands groupes privés tels que Nestlé qui en font commerce.
19:51 Comment sécuriser ce bien commun, donc, j'imagine, par rapport à ceux qui le commercialisent ?
19:58 - L'enjeu c'est d'abord de rappeler que l'eau, la moins chère et le plus souvent de meilleure qualité,
20:03 c'est celle qui est produite par des villes,
20:06 sans qu'on se retrouve avec les mêmes émissions liées aux autres sources.
20:12 Pour le reste, on ne va pas tout changer en 24 heures.
20:15 Je sais qu'il y a des appels à la radicalité tous les jours.
20:18 Mais à chaque fois que vous prenez une décision radicale, vous vous retrouvez ensuite avec des réactions sociales
20:22 d'une partie de ceux qui sont concernés.
20:25 - Trois ou quatre questions politiques. Vous êtes membre d'Horizon,
20:27 le parti créé par Edouard Philippe qui tenait samedi son premier congrès,
20:31 depuis un an et demi qu'il a été créé.
20:33 Edouard Philippe qui plaidait pour un départ à la retraite pouvant aller jusqu'à 67 ans.
20:36 Est-ce que c'est votre position aussi ?
20:38 Si demain il se présentait à la présidentielle, Edouard Philippe, il défendrait les 67 ans ?
20:42 Il dirait 64. C'est rien. Il faut aller jusqu'à 67.
20:45 - Pas du tout. Edouard Philippe a dit que dans les pays qui nous entouraient,
20:48 l'âge de la retraite était de 65, 66 ou 67 ans.
20:51 - Non, il a dit "je n'exclus pas d'aller". "Je suis favorable à aller".
20:55 Il n'a pas parlé de la France.
20:57 - Il a pris ces dates pour comparer, j'invite vos auditeurs à le faire,
21:00 à comparer les âges de départ moyen à la retraite dans les pays qui nous entourent.
21:04 Et en pointant sur le fait qu'en Europe, ça allait jusqu'à 67 ans.
21:07 - Il a dit qu'il faudrait aller jusqu'à 65, 66 ou 67 ans en France.
21:10 - Il a dit qu'avant la réforme qui vient d'être adoptée,
21:14 nous avions la date de départ en retraite qui était la plus faible d'Europe.
21:19 Et ce qu'Edouard Philippe a pointé, c'est que c'est d'abord une question de démographie
21:22 avant d'être une question de politique.
21:25 - Laurent Berger demande à Emmanuel Macron de mettre la réforme des retraites sur pause,
21:31 une suspension. Emmanuel Macron reste inflexible.
21:36 Laurent Berger dit qu'il y aura un drame sinon.
21:40 Vous répondez quoi à ça ? C'est non ? Il ne faut pas bouger ?
21:43 - Je réponds que cette réforme, elle a été prise pour éviter qu'on se retrouve dans une impasse.
21:50 L'impasse de devoir baisser les pensions ou augmenter les impôts.
21:54 Comme dans tous les pays qui nous entourent, nous augmentons l'espérance de vie,
21:59 on se retrouve avec un nombre d'actifs de plus en plus faible par rapport aux retraités.
22:02 - Là, Laurent Berger parle d'un contexte très précis, ici et maintenant.
22:04 - Ce que je veux dire, c'est que si on ne se rappelle pas l'origine de cette réforme,
22:08 on ne comprend pas aussi la situation dans laquelle nous vivons.
22:10 - Les éléments de langage, tous les matins, vous les sortez, tous les matins, il n'y a rien qui change.
22:14 Je vous assure, je peux le réciter par cœur, ce que vous dites, on avait Olivier Vervan et Yot de jour,
22:18 c'est le même élément de langage. Pourquoi ça ne prend pas ? Pourquoi vous n'arrivez pas à convaincre ?
22:23 - Mon sujet, ce n'est pas pourquoi on n'arrive pas à convaincre, c'est est-ce que oui ou non,
22:26 cette réforme, on en a besoin et vous pourrez m'inviter tous les jours.
22:29 Je ne pourrais pas vous répondre autre chose.
22:31 - Vous avez dit que tous les pays qui nous entourent aient fait ce choix.
22:34 Comment ça se fait si vraiment c'est une lubie, si c'est une espèce d'idéologie ?
22:37 - Mais il ne se passe pas quelque chose en France là en ce moment.
22:39 - On voit déjà qu'on a une réalité démographique.
22:41 - Si ça avait cheu, il ne se passe pas quelque chose en France là en ce moment.
22:43 - Mais précisément, vous avez à la fois entendu le président de la République à la fin de la semaine
22:46 expliquant qu'il était à disposition pour aller recevoir l'intersyndical.
22:49 Vous avez entendu hier la Première Ministre disant qu'elle va, dans les jours qui viennent,
22:53 recevoir et les responsables de partis et les responsables d'organisations syndicales
22:57 pour refaire un calendrier pour les semaines qui viennent qui permet d'amener de l'apaisement.
23:01 Mais cette réforme, ce n'est pas un caprice, ce n'est pas une lubie.
23:05 C'est une nécessité pour sauvegarder notre système social de retraite.
23:08 - Un mot sur la législative partielle d'hier en Ariège.
23:11 Alors c'est une législative partielle, ça ne veut pas dire que c'est le cas sur toute la France.
23:14 La députée insoumise sortante est en tête.
23:16 Elle affrontera la candidate socialiste au second tour,
23:19 le PS qui prend 8 points sur les 10 mois par rapport aux résultats d'il y a 8 mois en mai dernier.
23:26 Quant à vous, la majorité, votre candidate, perd 10 points par rapport à mai dernier.
23:30 10 points, c'est beaucoup. Vous y voyez la conséquence directe du conflit des retraites ?
23:34 - J'y vois bien sûr une partie de la conséquence du conflit des retraites.
23:38 J'y vois la difficulté habituelle d'une majorité, quelle qu'elle soit,
23:40 quand il y a des élections législatives partielles.
23:42 En revanche, ce que je vois, c'est que la candidate socialiste qui a fait campagne
23:45 contre la France insoumise et contre la NUPES,
23:48 elle est aujourd'hui en bonne position pour ce deuxième tour.
23:52 Et ça dit aussi quelque chose. Le Front National recule.
23:55 - Non, le Front National prend 4 points.
23:57 - Pardon, ce que je veux dire, c'est qu'il se retrouve plus loin de sa qualification pour le deuxième tour.
24:03 La candidate de la majorité présidentielle, vous avez raison, elle divise son score par 2.
24:06 Et on a effectivement cette progression très impressionnante
24:10 d'une candidate dissidente qui faisait campagne contre la NUPES.
24:14 - On en reste là et je vous renvoie pour le report de l'âge légal à 65, 66 ou 67.
24:22 Au Parisien du 8 octobre 2022 où ces mots sont dans la bouche d'Edouard Philippe.
24:28 Merci Christophe Bélécher d'avoir été à notre micro ce matin.