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00:00 Là, j'entends les clés de l'appartement.
00:01 Lui qui revient, je lui dis "mais t'étais où ?"
00:03 Il me dit "là t'étais amorphe, tu servais à rien,
00:06 donc moi je suis parti voir d'autres mecs,
00:08 mais t'inquiète je te surveillais avec les caméras qui sont là, là et là".
00:11 Je suis chez un fou quoi.
00:14 Je m'appelle Isaac Garcia et je suis fier d'être qui je suis.
00:18 Le chemsex, c'est une pratique sexuelle sous produit stupéfiant.
00:22 L'été 2021, j'ouvre une application de rencontre qui s'appelle Grindr
00:27 et je vois le profil d'un garçon qui m'attire beaucoup.
00:31 Je lui envoie en premier le message, il m'envoie son adresse,
00:34 je monte dans un Uber et j'arrive chez lui.
00:37 Je me pose à côté de lui, on boit un petit coup etc.
00:40 et il me dit "est-ce que tu as déjà essayé le chemsex ?"
00:43 Et moi je ne savais pas du tout ce que c'était.
00:44 Du coup je lui dis "mais qu'est-ce que c'est ?"
00:46 Il me dit "bah c'est de prendre de la drogue pour être un peu plus chaud,
00:49 enfin non ça te chauffe etc."
00:51 Et je dis "non mais moi, oublie direct,
00:53 moi je suis là pour être vraiment dans l'instant présent".
00:55 On commence à chauffer etc.
00:57 Au bout de je ne sais pas 20-25 minutes, il me repose la question.
01:01 Il me dit "mais t'es sûr que tu ne veux pas essayer ?"
01:03 Et après il me dit "mais vas-y essaye, vraiment c'est rien,
01:04 je te jure, c'est vraiment, tu vas te détendre etc."
01:07 Lui en prenait, il n'avait pas l'air d'être plus ailleurs que ça etc.
01:10 donc c'est peut-être ça qui m'a "rassuré" pour dire "vas-y,
01:15 moi je vais en prendre aussi".
01:16 Ça s'appelle de la 3-MMC, c'est une drogue de synthèse qui est blanche,
01:21 c'est une poudre blanche qu'on prend en trace.
01:24 Il y a une espèce de chaleur qui envahit le corps
01:26 et vraiment ça fait baisser toutes les barrières.
01:29 On a hyper envie de la personne, c'est hyper bestial d'un coup.
01:32 Et après passe l'étape un petit peu au-dessus,
01:34 il me dit "est-ce que tu veux essayer du GHB ?"
01:36 Là je fais le lien, je dis "non mais c'est la drogue du violeur,
01:38 c'est ce qu'on met en boîte de nuit".
01:39 Il insistait sur le coup et moi comme j'étais déjà désinhibé
01:43 par rapport à ce que je venais de prendre avant,
01:45 je dis "vas-y mais tu m'en mets un petit peu".
01:47 Il me met quelques gouttes et c'est vrai que là l'effet,
01:49 je me suis senti vraiment tout de suite, c'est vraiment hyper smooth,
01:53 c'était vraiment kiffant.
01:55 Mais après, je vois qu'il m'en resserre,
01:57 je pense normalement que ça doit être entre 1,2 et 1,3,
02:00 il a dû mettre 2 mg directement,
02:02 alors que j'en avais pris une dose peut-être une heure avant.
02:04 Je me sens vraiment partir dans les vapes,
02:08 je me souviens vraiment tomber chez lui.
02:10 Et là ça prend carrément une autre dimension,
02:11 je me dis "non on n'est pas du tout dans le désir sexuel",
02:14 là je suis en train de lutter contre moi-même.
02:16 Et là gros black out,
02:19 je me réveille vraiment sur son canapé, sans le garçon.
02:22 Et là j'entends les clés de l'appartement,
02:25 lui qui revient, et je lui dis "mais t'étais où ?"
02:27 Il me dit "là t'étais amorphe, tu servais à rien,
02:29 donc moi je suis parti voir d'autres mecs,
02:31 mais t'inquiète je te surveillais avec les caméras qui sont là, là et là".
02:35 Et là je me dis "mais qu'est-ce que... je suis chez un fou".
02:38 Des heures s'étaient passées où j'étais vraiment inconscient,
02:41 j'étais effrayé de la situation.
02:43 Je récupère mes affaires, tant mieux que mal,
02:45 je bloque le garçon,
02:47 je rentre chez moi, je dors et j'essaie d'oublier cette histoire.
02:50 Je n'en parle à personne, je continue ma vie.
02:53 Deux semaines se passent,
02:54 et là j'étais dans mon lit,
02:56 je commençais à avoir les mains moites, à trembler,
02:58 je me dis "mais qu'est-ce qui m'arrive ?"
03:00 et j'étais obnubilé par cette idée de vouloir recommencer.
03:03 Je ne me souvenais que des moments de kiff du début.
03:05 Et du coup je débloque le garçon et j'y retourne.
03:09 Au début tout se passe bien, on se rechauffe,
03:10 des petites doses, et après il tente encore de me remettre des doses,
03:15 des surdoses, et pareil je repars dans les vapes,
03:18 je repars de chez ce garçon-là après ça,
03:22 et pareil je reprends la route,
03:23 c'est le même schéma qui recommence.
03:25 Et deux semaines après,
03:26 pareil, ressensation de manque,
03:28 j'avais les mains moites, ça dégoulinait dans mes mains,
03:32 je tremblais dans mon lit,
03:33 il était 3h du matin, j'étais prêt à partir dans la nuit
03:35 pour assouvir vraiment ce désir.
03:38 À chaque fois que j'allais chez ce garçon-là,
03:40 il y avait toujours vraiment cette...
03:41 à la fin où ça dérapait complètement,
03:43 il y avait cette perte de contrôle où je repartais en overdose.
03:47 Ça s'appelle un géol en fait.
03:49 Pendant ces périodes de trou noir,
03:50 je ne sais pas ce qui se passait.
03:51 Il aurait pu faire ou il a pu faire ce qu'il voulait,
03:54 je n'en sais rien.
03:55 Je m'éloignais de tout le monde et je plongeais tout seul dedans,
03:58 sans que personne ne sache ce qui se passe.
03:59 Et tout ça je me suis dit "stop, vraiment stop,
04:02 je vais en parler d'abord à ma mère".
04:03 J'ai laissé tomber mes amis, il est sorti,
04:05 parce que je savais que si j'allais boire de l'alcool,
04:07 qu'il y avait l'effet un peu fait, etc.,
04:09 j'allais forcément vouloir y retourner,
04:11 donc je me suis vraiment calfeutré chez moi.
04:13 Je sortais avec ma mère, on allait se balader,
04:15 prendre l'air, etc.
04:16 Dès que je ressentais le moment de manque,
04:18 je lui disais...
04:18 Je me souviens d'une anecdote où on était,
04:21 on allait manger une glace,
04:22 et je me souviens trembler,
04:23 et mettre à trembler avec ma glace, etc.
04:25 Et du coup ma mère tenait la main, etc.
04:27 pour me calmer.
04:28 Ça a duré tout l'été, c'était juillet-août.
04:30 À la rentrée, je reprends ma vie, etc.
04:32 Mais je veux fuir un peu cette idée de ce qui m'est arrivé,
04:35 c'est-à-dire que je sors de manière excessive.
04:38 Je ne me suis pas rendu compte, c'est mes amis qui m'ont dit
04:40 "Là, il s'est fait un souci vraiment avec l'alcool et la drogue."
04:44 Et vraiment, cette sensation-là, avec le recul,
04:46 j'avais l'impression que ce n'était pas une vie que j'avais,
04:47 c'est que je survivais, en fait.
04:49 Et il y a une fois, après une soirée excessive,
04:51 où j'avais pris et alcool et drogue,
04:54 je retrouve la sensation d'obnubiler par cette idée.
04:57 J'avais débloqué le mec que j'avais vu,
04:59 du traumatisme de l'année dernière,
05:01 et il était venu me chercher en bas.
05:03 Je me suis dit "Mais là, c'est une catastrophe."
05:04 Je me dis, un an après,
05:05 j'étais sûr de m'en être sorti,
05:08 de m'être libéré de ça.
05:10 Et en fait, pas du tout, j'y suis retourné.
05:13 Et là, ça posait plein de questions.
05:14 Je me suis dit "Mais attends, il y a un effet rebond,
05:16 on ne s'en sort jamais."
05:17 Ça a été vraiment le déclic où je me suis dit
05:20 "Mais plus jamais."
05:20 J'étais dans un état, vraiment, je me dégoûtais.
05:22 De là, je prends contact avec un centre de désintoxication.
05:27 J'explique tout mon parcours au docteur.
05:29 J'ai eu un suivi psychologique avec une technique
05:31 qui s'appelle EMDR.
05:33 En fait, c'est une technique qui traite les traumatismes.
05:36 On va être dans une espèce d'hypnose, un petit peu.
05:39 Et après, du coup, ce traumatisme-là ne viendra plus nous heurter,
05:43 nous happer comme ça peut faire.
05:44 Tout se reliait et vraiment, je me sentais vraiment apaisé.
05:47 C'est hyper important de continuer par contre
05:49 et de ne pas lâcher ce traitement-là
05:50 parce que du coup, c'est sur la durée que ça va fonctionner.
05:53 Je vis maintenant, tout simplement, je ne survis plus.
05:55 Ça me suivra très certainement toute ma vie,
05:57 mais ce sera à moi de faire attention.
05:59 Je me rends compte aujourd'hui avec le recul
06:01 que vraiment, c'est quelque chose qui est ultra courant,
06:04 notamment dans la communauté gay,
06:06 alors que c'est quelque chose qui est hyper dangereux.
06:09 Il y a des gens, malheureusement, qui décèdent d'overdose
06:13 les week-ends, quoi.
06:13 Si vous voulez essayer, c'est votre choix,
06:16 mais il faut vraiment faire attention avec la personne avec qui on va en prendre
06:19 parce qu'il y a des gens qui sont extrêmement mal attentionnés.
06:21 Et surtout, se rappeler qu'on est sur quelque chose
06:24 qui est modifié, c'est des drogues de synthèse.
06:26 Donc, c'est fait pour être addict.
06:28 J'ai vraiment galéré à m'en sortir.
06:30 Enfin, voilà, ça s'est étalé sur deux ans.
06:33 Il y a des traumatismes qui se créent,
06:34 donc il faut vraiment avoir conscience de tout ça
06:36 avant de prendre votre première trace
06:38 parce que ça peut vous impacter à vie.