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00:00 -Nous sommes avec Sophie Couturier,
00:02 co-scénariste du roman graphique
00:04 "Une farouche liberté".
00:06 Gisèle Halimi,
00:08 "La cause des femmes", aux éditions Grasset.
00:11 Et ancienne secrétaire générale
00:14 de "Choisir la cause des femmes",
00:16 créée en 1971 par Gisèle Halimi et Simone de Beauvoir.
00:20 Sophie Couturier, bonsoir. -Bonsoir.
00:22 -Sur France 24, Gisèle Halimi, on le sait,
00:24 a beaucoup fait pour l'avortement.
00:27 Cette annonce du chef de l'Etat qu'on vient d'entendre,
00:30 d'une inscription prochaine de l'IVG dans la Constitution,
00:34 c'est une victoire, l'aboutissement de son combat ?
00:38 -L'aboutissement de son combat, on peut dire
00:40 que quel plus bel hommage, au-delà de l'hommage national,
00:44 c'est formidable, aujourd'hui, 1 8 mars.
00:46 Mais quel bel hommage, alors que c'était le combat
00:49 de toute une vie.
00:50 Le droit à l'avortement,
00:52 on connaît les procès retentissants, le procès de Bobigny.
00:55 Ca a été vraiment le combat, l'investissement majeur
00:58 dans la vie de Gisèle, qui, au-delà du combat
01:01 pour le droit à l'IVG, qui a donné ensuite,
01:04 ce fameux procès de Bobigny, a ouvert la voie à la loi Veil,
01:07 eh bien, c'est un combat pour les droits humains
01:10 que menait Gisèle. Je ne vais pas dire
01:13 les droits de l'homme, mais les droits humains.
01:15 C'est un réel aboutissement. -Elle avait eu recours
01:18 à l'avortement. -Trois fois.
01:20 Elle ne s'en cachait pas. Elle avait déclaré,
01:23 elle avait eu une plaidoirie retentissante,
01:25 elle avait ouvert sa plaidoirie, justement, sur ça,
01:28 au procès de Bobigny. "Regardez-nous, messieurs,
01:31 "regardez-nous, messieurs, regardez-nous
01:33 "qui comparaissons devant vous." Ca, c'était très fort.
01:36 Et donc, c'était vraiment, comment dirais-je,
01:39 un cheminement très long. Elle avait créé son association
01:42 "Choisir" pour venir en aide aux femmes
01:45 qui avaient besoin d'avorter et qui prenaient des risques.
01:48 Il y avait eu aussi le manifeste des 343, juste avant,
01:51 le manifeste des 343, 72, le procès de Bobigny,
01:54 75, la loi Veil, et aujourd'hui, après tout le travail
01:57 qui a été mené au Sénat et à l'Assemblée nationale,
02:00 l'annonce du président de la République,
02:02 qui est en train de dire que nous allons faire rentrer
02:06 le droit à l'avortement dans la Constitution.
02:10 On est donc en train de sanctuariser ce droit.
02:13 Et pour les femmes, c'est absolument extraordinaire.
02:16 Je ne pense pas me tromper en disant qu'on va être
02:19 le premier pays au monde si tout cela aboutit.
02:21 -Le chemin risque d'être encore long,
02:24 mais cette procédure, ce qu'il propose,
02:26 ça évite un référendum, en tout cas, sur la question.
02:29 -C'est ça.
02:30 -Inscrire l'IVG dans la Constitution,
02:32 ça permettrait clairement d'éviter les reculs
02:35 qu'on voit dans d'autres pays, comme par exemple aux Etats-Unis.
02:39 On l'a vu en juin dernier, avec la Cour suprême,
02:42 qui a abrogé Roe v. Wade, ou encore la Hongrie,
02:45 ou encore la Pologne. -Exactement.
02:47 Et quel signal on envoie justement à tous ces pays ?
02:50 Quel signal la France envoie à ces pays,
02:52 Etats-Unis, Pologne, etc., comme vous le dites,
02:55 mais aussi en Iran, aussi en Afghanistan.
02:57 Je ne peux pas m'empêcher de penser à ces pays-là aujourd'hui,
03:01 quand on voit aussi ce qui se passe en Iran.
03:03 La révolution féministe, que disait Alimi,
03:06 appelée de ses vœux, elle a lieu aujourd'hui en Iran,
03:09 sous nos yeux. C'est même au-delà d'une révolution féministe.
03:12 Ce sont les femmes avec les hommes qui luttent
03:15 pour leur liberté. Et le message qu'on envoie aujourd'hui,
03:18 au-delà de notre hexagone, touche aussi tous ces pays.
03:21 Quand j'étais militante à choisir, on recevait des courriers
03:25 d'Iraniennes qui nous disaient "Ne laissez pas tomber,
03:28 "lutter contre le voile". J'y ai été en 2009,
03:31 en plein débat sur le voile. Elles nous interpellaient.
03:34 "Lutter, n'abandonnez pas, on a besoin de vous."
03:36 Gisèle Alimi est un symbole, un flambeau qu'on peut porter haut.
03:40 Et surtout, en ce moment, j'y pense beaucoup,
03:43 vers ces pays-là. -Emmanuel Macron
03:45 a rendu hommage tout à l'heure à l'avocate de la cause des femmes.
03:49 Elle y a dédié sa vie.
03:51 Vous étiez à cet hommage.
03:53 C'était très émouvant.
03:55 Il y a un de ses fils aussi qui s'est exprimé.
03:58 Son fils aîné.
03:59 -Son fils aîné, Jean-Yves, était là.
04:02 Il a ouvert cette cérémonie, très solennelle,
04:04 comme vous l'avez dit, très belle,
04:06 au Palais de justice de Paris. Quel autre endroit !
04:09 La justice, comme le disait Gisèle,
04:12 "la justice a été la grande affaire de ma vie".
04:15 C'est vrai que toute sa vie,
04:16 elle a lutté contre les injustices.
04:19 Jean-Yves Alimi était là.
04:20 -Il y a un autre de ses enfants, qui n'était pas là,
04:23 Serge Alimi, qui, comme d'autres associations féministes,
04:27 ont estimé qu'il y avait une forme de récupération politique
04:31 en plein mouvement contre la réforme des retraites,
04:35 que le moment était mal choisi par l'Elysée.
04:37 -Quel autre meilleur moment qu'un 8 mars 2023 ?
04:41 8 mars, Journée internationale des femmes.
04:44 2023, avec tout ce qui se passe dans le monde,
04:46 avec notre contexte à nous, MeToo, etc.
04:49 Quelle autre meilleure date ?
04:50 Certes, ça a mis deux ans à arriver.
04:52 Cet hommage devait avoir lieu en septembre 2020,
04:55 à la suite du décès d'Isa Alimi.
04:57 Il y a eu Beyrouth, le président a été obligé de se déplacer.
05:01 Après, le calendrier, c'était compliqué.
05:03 Il y a eu des tergiversations. Je reviendrai pas là-dessus.
05:06 Mais quelle autre date ?
05:08 Aujourd'hui, on peut baisser les armes, dire stop.
05:11 Il y a eu des associations qui ont appelé au boycott.
05:14 Serge Alimi n'a pas voulu y assister.
05:16 Emmanuel Faux, le 3e fils décédé cet été,
05:19 un grand journaliste à Europe 1,
05:21 a appelé de ses voeux cet hommage, haut par les justices,
05:24 rêvé d'un 8 mars.
05:25 Alors oui, ça a eu lieu aujourd'hui.
05:27 Oui, il y a des grèves.
05:29 Oui, il y a une réforme de la retraite.
05:31 Gisèle Alimi se serait impliquée dans ce sujet.
05:34 Je ne suis pas certaine qu'elle serait sortie dans la rue.
05:37 Je n'en sais rien, je ne parlerai pas à sa place.
05:40 En tout cas, aujourd'hui,
05:42 on pourrait peut-être s'arrêter un moment
05:44 et se réjouir de cet hommage qui est essentiel,
05:47 qui est important.
05:48 -Et de cette annonce. -Absolument.
05:51 -Merci beaucoup.
05:52 -Merci d'être venue sur ce plateau ce soir
05:56 pour revenir sur cet hommage à Gisèle Alimi.