Ces idées qui gouvernent le monde - Sobriété et (dé)croissance

  • l’année dernière
Sobriété et croissance, un oxymore ou une contradiction à l'aune du en même temps en vue de réduire les consommations individuelles tout en déployant un agenda national de production; sobriété et décroissance, un défi social en même temps qu'un pari idéologique et lyrique : la sobre ivresse de la vie selon Ivan Illitch, l'apôtre inspiré de la décroissance. Si croissance et décroissance s'opposent terme à terme en vue de reconfigurer l'Etat providence, l'économie de marché, les modes de vie, la démographie, le progrès et la science, il en est différemment avec la sobriété évoquée sans discernement. Alors, simple mot valise ? Espèce de fourre-tout conceptuel à polarité positive quand il s'agit d'éviter tous les gaspillages à même de porter atteinte au climat, à la biodiversité, à la finitude de certaines ressources, à l'obésité consumériste des individus ? Ou trompe-l'oeil politique quand il est question d'arbitrer les pénuries par l'exhortation à des petits gestes individuels et de repousser aux calendes grecques la persistance des inégalités sociales chez nous comme plus gravement dans les pays du sud en quête de développement et de rattrapage pour mieux s'inscrire dans la mondialisation.
Vous l'avez compris, nous allons traiter d'un sujet autant politique et polémique que socio-économique et même axiologique dans la mesure où les valeurs de liberté, de démocratie et de solidarité sont concernées.

Émile Malet reçoit :
Boris Ravignon, Président de l'ADEME, maire de Charleville-Mézières
Hélène Peskine, Architecte urbaniste générale de l'Etat et Secrétaire permanente du PUCA
Olivier Lluansi, Spécialiste de l'industrie - PwC
Louis Gallois, Co-président de la Fabrique de l'industrie et ancien président d'Airbus et de la SNCF
Barbara Pompili, députée, ancienne ministre de la transition écologique

Présenté par Emile MALET
L'actualité dévoile chaque jour un monde qui s'agite, se déchire, s'attire, se confronte... Loin de l'enchevêtrement de ces images en continu, Emile Malet invite à regarder l'actualité autrement... avec le concours d´esprits éclectiques, sans ornières idéologiques pour mieux appréhender ces idées qui gouvernent le monde.

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Transcription
00:00 Générique
00:02 ...
00:23 -Bienvenue dans "Ces idées qui gouvernent le monde".
00:26 "Sobriété entre croissance et décroissance".
00:30 Alors, sobriété et croissance, d'abord.
00:32 Un oxymore, quasiment une contradiction,
00:35 à l'aune du "en même temps",
00:37 en vue de réduire les consommations individuelles
00:41 tout en déployant un agenda national de production.
00:45 Sobriété et décroissance,
00:47 un défi social en même temps qu'un pari idéologique et lyrique,
00:52 la sobre ivresse de la vie, selon Ivan Ilich,
00:56 l'apôtre inspiré de la décroissance.
00:59 Si croissance et décroissance s'opposent, terme à terme,
01:03 en vue de reconfigurer l'état-providence,
01:07 l'économie de marché, les modes de vie, la démographie,
01:10 le progrès et la science,
01:12 il en est différemment avec la sobriété,
01:15 évoquée sans discernement.
01:17 Alors, s'agit-il d'un simple mot-valise,
01:21 une espèce de fourre-tout conceptuel,
01:24 à polarité positive,
01:26 quand il s'agit d'éviter tous les gaspillages,
01:29 à même de porter atteinte au climat,
01:32 à la biodiversité, à la finitude de certaines ressources,
01:36 à l'obésité consumériste des individus,
01:39 ou s'agit-il d'un trompe-l'œil politique,
01:42 quand il est question d'arbitrer les pénuries
01:46 par l'exhortation à de petits gestes individuels
01:50 et de repousser au calende grec
01:52 la persistance des inégalités sociales chez nous,
01:56 comme, plus gravement dans les pays du Sud,
01:59 en quête de développement et de rattrapage
02:02 pour mieux s'inscrire dans la mondialisation ?
02:06 Alors, vous l'avez compris,
02:08 nous allons traiter d'un sujet
02:10 qui est autant politique que polémique,
02:13 autant socioéconomique qu'axiologique,
02:16 c'est-à-dire dépendant des valeurs,
02:18 notamment des valeurs de liberté,
02:21 de démocratie, de solidarité.
02:23 Pour en parler,
02:25 je signale que nous sommes en visioconférence
02:29 avec M. Boris Ravignon, qui est président de l'ADEME
02:33 et maire de Charleville-Mézières.
02:35 Bonjour, M. Ravignon.
02:37 -Bonjour, M. Malay.
02:39 -Bonjour, Hélène Pesquine.
02:42 Je rappelle que vous êtes architecte urbaniste
02:44 générale de l'Etat et secrétaire permanente du PUCA.
02:48 Bonjour, M. Olivier Luanzi.
02:50 Vous êtes spécialiste de l'industrie à PWC.
02:55 Bonjour, Louis Gallois.
02:56 Vous êtes coprésident de la fabrique de l'industrie,
02:59 ancien président d'Airbus et de la SNCF.
03:03 Et bonjour, Mme Barbara Pompili.
03:05 Vous êtes députée de la Somme.
03:08 Vous êtes ancienne ministre de la Transition écologique.
03:12 Musique rythmée
03:14 ...
03:19 Vous avez vu la citation de M. Castoriadis,
03:23 c'est cet imaginaire capitaliste
03:25 qui va dans le sens de la croissance et du développement.
03:30 Est-ce que vous pensez possible, aujourd'hui,
03:33 une reconversion écologique de notre économie
03:37 qui viendrait enserrer la croissance
03:41 dans des contraintes environnementales et sociales ?
03:44 Vous voulez commencer, M. Ravignon ?
03:46 -Alors, volontiers.
03:49 Volontiers, parce que je crois que ce sujet que vous évoquez là,
03:53 c'est un sujet qui est au coeur des travaux de prospective de l'ADEME,
03:57 que je préside maintenant depuis quelques semaines.
04:00 Donc j'ai pris connaissance, de manière assez approfondie,
04:03 des travaux que nous publions, que publie l'agence,
04:09 et notamment celui qui s'appelle "Transition 2050",
04:11 où on essaie d'imaginer les différents scénarios
04:14 qui vont nous permettre d'atteindre la décarbonation de l'économie
04:18 et de notre société.
04:20 Donc la neutralité carbone à l'horizon de 2050,
04:24 c'est vrai que c'est l'une des conditions du respect
04:26 des engagements de l'accord de Paris.
04:29 Et cet objectif-là, on a plusieurs moyens de l'atteindre.
04:34 Et c'est, je crois, la grande valeur ajoutée des travaux de l'ADEME,
04:38 d'avoir imaginé plusieurs scénarios.
04:40 L'un extrêmement sobre,
04:42 où on va jusqu'à diminuer par deux la consommation d'énergie.
04:46 Et puis, à l'autre opposé, scénario 4,
04:50 qui lui laisse finalement dériver la consommation d'énergie.
04:55 Puis des scénarios où il y a une composante de sobriété variable.
04:59 Eh bien, ce qu'on constate dans ces modèles,
05:03 et l'ADEME a absolument tenu à modéliser
05:06 un certain nombre de paramètres macroéconomiques
05:09 sur la croissance, sur l'emploi, sur la balance commerciale,
05:11 c'est que nous pouvons atteindre cette neutralité carbone
05:16 et qu'aucun des scénarios que nous avons retenus
05:20 ne prévoit une récession par rapport au niveau d'activité d'aujourd'hui.
05:24 -Vous êtes en train de nous dire que les scénarios
05:28 ne prévoient pas une récession, c'est-à-dire une chute de la croissance.
05:33 -Effectivement. -Et qu'on peut faire de la sobriété
05:36 tout en ayant de la croissance. C'est ce que vous dites.
05:38 -C'est ce que les modèles, effectivement, produisent.
05:42 Et alors, ces modèles...
05:44 Ce modèle, il est central, naturellement,
05:48 dans les anticipations.
05:49 Il a fait l'objet d'une analyse assez approfondie
05:52 par M. Pisaniferi, il y a encore quelques mois.
05:57 Et on a, je crois, une assez grande confiance
06:00 dans le fait qu'aujourd'hui, effectivement,
06:02 on peut remplacer les énergies fossiles
06:04 par des énergies renouvelables,
06:06 de diminuer, c'est prévu, effectivement,
06:08 sur cette trajectoire, la consommation
06:11 d'un certain nombre de biens manufacturés,
06:13 d'importations, pour les remplacer par des consommations plus locales,
06:17 par aussi une consommation de services
06:20 qui sont davantage produits localement,
06:22 mais aussi des trajectoires dans lesquelles on investit énormément
06:26 dans une meilleure efficacité énergétique de nos bâtiments,
06:29 qui, au niveau spécialement des prix de l'énergie que nous connaissons,
06:33 a un véritable rendement économique.
06:35 C'est-à-dire que non seulement on rembourse le capital qu'on emprunte
06:39 quand on fait des travaux d'isolation sur le bâti,
06:42 mais on dégage du revenu supplémentaire.
06:44 Donc on a, je crois, les éléments, effectivement,
06:48 non seulement d'un modèle de transition écologique
06:52 où on gagne en sobriété, en efficacité énergétique,
06:56 où on atteint nos objectifs écologiques,
06:58 mais où on ne dégrade pas la situation macroéconomique
07:01 et, au contraire, on continue à avoir une progression de la richesse.
07:05 -Alors, on vous a entendu, monsieur Ravignon.
07:08 Madame Pompili, vous avez été ministre de la transition écologique.
07:12 Ca change, des fois, ces transitions énergétiques, écologiques.
07:16 En tout cas, vous avez été tête pensante de l'écologie
07:20 dans un gouvernement de la majorité,
07:24 avec M. Macron comme président.
07:27 Pour vous, c'est possible d'enserrer la croissance
07:30 dans des contraintes écologiques ?
07:32 -Alors, je suis interpellée par la manière
07:35 dont vous posez la question, en fait.
07:37 Parce que vous dites "enserrer", vous dites "contrainte".
07:40 Donc, déjà, vous mettez quelque part même un jugement de valeur...
07:44 -Je n'en porte aucun, rassurez-vous.
07:46 -Dans le fait de faire la transition écologique.
07:49 Ca nécessite, effectivement, de se projeter
07:52 et d'essayer d'apporter,
07:54 face à un état des lieux du monde dans lequel nous vivons aujourd'hui,
07:59 un certain nombre de solutions.
08:01 Et je pense que M. Ravignon a expliqué très clairement
08:04 que les outils existent.
08:05 C'est pas une question d'outils. On a les outils.
08:08 Mais je crois profondément, pour avoir exercé des fonctions
08:11 qui m'ont permis de toucher du doigt le problème,
08:14 qu'on ne peut mettre en place tous ces outils
08:17 que si on réussit à raconter un récit,
08:22 un récit de ce qu'on veut construire.
08:24 -Quand vous dites "contrainte" et "enserrée",
08:27 vous présentez la transition écologique
08:29 comme, quelque part, l'adaptation
08:32 à quelque chose qui nous tombe dessus
08:34 et qui est quelque chose de négatif.
08:36 -On va rentrer dans le débat, mais vous verrez
08:39 qu'il faudra consommer moins d'énergie,
08:42 moins d'eau, etc.
08:43 Donc, ce sont des contraintes.
08:45 -Parce que, oui, mais la vie en société
08:48 est une vie qui est composée de contraintes.
08:51 Nous avons des lois, des règles,
08:53 et c'est marrant, parce que quand il s'agit d'écologie,
08:56 ce sont des contraintes, c'est difficile.
08:58 Or, ce sont des règles de vie en commun.
09:01 Ce que je trouve intéressant dans ce que nous vivons actuellement,
09:05 c'est que nous sommes obligés, ça, c'est vrai,
09:07 de réinterroger le monde dans lequel nous vivons
09:10 et les valeurs que nous avons portées pendant des années.
09:13 Est-ce que le monde dans lequel nous vivons
09:16 est un monde souhaitable et un monde heureux ?
09:19 Moi, je trouve que c'est passionnant
09:21 parce qu'on ne peut entraîner tout le monde
09:23 dans des changements de vie que si on les entraîne derrière nous
09:27 en leur expliquant vers où on veut aller.
09:29 Et aujourd'hui, je trouve que c'est ce qui manque.
09:32 On va trop vite vers l'outil sans expliquer
09:35 qu'on peut construire un monde
09:37 dans lequel on peut être mieux qu'aujourd'hui.
09:40 C'est pas parce qu'on achète deux fois moins de pulls
09:43 qu'on sera moins bien chauffé ou qu'on sera moins heureux.
09:47 Et c'est pas parce qu'on a une voiture
09:51 qui sera moins grosse et qui est avec un autre moteur
09:54 qu'on sera moins heureux.
09:55 C'est pas parce qu'on prend moins d'autres choses.
09:58 -Vous explicitez votre vision écologiste ou écologique.
10:03 La question que je vous pose est plus simple que ça
10:06 et sans jugement de valeur.
10:08 C'est de savoir si, en respectant
10:11 toutes ces...
10:13 Que vous appelez ça des normes, des contraintes,
10:16 ou que vous appelez ça simplement, pour vous, une nécessité,
10:20 est-ce qu'on arrivera à maintenir la croissance du pays ?
10:24 Voilà, c'est tout. C'est pas plus que ça.
10:26 -Oui, mais est-ce qu'on arrivera à maintenir
10:29 la croissance du pays, la croissance étant donc...
10:33 -On va rentrer dans le détail.
10:35 -...la faille de la politique publique ?
10:37 -Je vous pose la question. -Je vous dis simplement,
10:40 et c'était des grands exemples qu'on sortait depuis longtemps,
10:44 qu'une guerre booste très fort le taux de croissance d'un pays.
10:47 Est-ce que c'est forcément cela qu'on veut obtenir ?
10:50 Moi, je n'ai jamais été de ces gens
10:52 qui poussaient pour la décroissance totale.
10:56 Je pense qu'on peut avoir
10:57 un développement équilibré économique...
11:00 -On va rentrer dans le détail.
11:02 -...que, par exemple, la sobriété peut paradoxalement
11:05 entraîner une hausse du PIB,
11:07 puisque vous aurez beaucoup d'emplois
11:09 qui seront créés, par exemple,
11:11 dans la rénovation énergétique des bâtiments,
11:14 parce qu'on peut créer de nouvelles filières économiques.
11:17 -Votre question est oui, mais il me semble
11:19 qu'on va avoir un peu de temps pour développer.
11:22 -Tout à fait, on va rentrer dans le détail.
11:24 Louis Gallois, par rapport à la question posée,
11:27 qu'est-ce que vous dites, vous ?
11:31 -Moi, je crois que la décroissance
11:33 est un véritable risque,
11:36 sous deux aspects.
11:38 La remise en cause de l'état-providence,
11:42 puisqu'on n'aurait plus les ressources pour le financer,
11:46 ou alors il faudrait être extrêmement coercitif
11:48 sur la réduction des inégalités,
11:50 avec un gâteau qui se retrécit.
11:52 Et deuxièmement, on a besoin de croissance
11:56 pour financer les énormes investissements
11:59 que va susciter la transition énergétique en particulier,
12:02 la transition écologique en général,
12:05 mais la transition énergétique en particulier.
12:07 La question se pose, peut-il y avoir une croissance verte ?
12:11 Il y a un débat là-dessus.
12:12 -Et votre position ?
12:14 -Ma position, c'est que oui, mais il y a quatre conditions.
12:17 La première, c'est qu'il faut un effort de recherche considérable,
12:22 parce qu'un certain nombre de solutions
12:24 seront technologiques et supposent de franchir des étapes
12:28 le stockage de l'énergie.
12:29 On n'en est pas encore là.
12:31 Par exemple,
12:32 toutes les plastiques biodégradables,
12:37 tous ces éléments, je pourrais en citer une dizaine,
12:41 supposent un effort de recherche considérable.
12:44 Le second élément, c'est qu'il faut que l'industrie
12:47 modifie ses process pour les décarboner.
12:50 Il faut qu'elle décarbone ses process.
12:53 Ca va coûter énormément d'argent
12:55 et ça n'a pas de rentabilité pour les industriels.
12:58 Donc il faut trouver comment justifier ces investissements
13:01 du point de vue des industriels qui vont avoir à le faire
13:04 et qui, en faisant ces investissements,
13:06 ne pourront pas en faire d'autres.
13:09 C'est qu'on soit présent sur les nouveaux marchés,
13:11 les nouvelles opportunités qui se présentent
13:14 grâce à la croissance verte.
13:16 Vous avez cité les matériaux isolants.
13:21 Moi, je peux vous citer la viande végétale.
13:24 On peut citer, évidemment,
13:27 tout ce qui concerne la production industrielle d'énergie.
13:30 Je reviendrai sur ce point.
13:33 Les voitures, les batteries, etc.
13:36 Sur ces marchés, il faut se positionner.
13:39 C'est pas du tout évident.
13:41 -C'est pas évident, mais vous croyez
13:43 à une croissance verte.
13:44 -On va les consommer.
13:46 On va les consommer, ces produits.
13:48 Le fait qu'ils soient fabriqués en France,
13:50 c'est pas du tout évident.
13:52 On l'a vu pour les panneaux solaires.
13:54 Ils ne s'en fabriquent pas un en France
13:56 et nous importons 100 % des panneaux solaires.
13:59 Nous sommes pas loin de le faire sur les éoliennes.
14:02 La quatrième condition pour tout cela,
14:05 c'est qu'il faut une énergie décarbonée.
14:07 Il faut une production électrique
14:09 qui devra être nettement en progression,
14:12 puisque l'électricité,
14:13 qui représente à peu près 25 % du mix énergétique actuellement,
14:17 va représenter en 2050 55 % du mix énergétique.
14:21 Même si on consomme moins d'énergie,
14:23 on va consommer plus d'électricité.
14:25 Il faut produire cette électricité.
14:27 Je pense que c'est un point tout à fait clé
14:29 sur lequel on revient.
14:31 -En tout cas, vous êtes d'accord tous
14:33 en considérant que la chose est possible,
14:36 mais dès lors que...
14:39 L'aménagement puisse se faire.
14:45 Alors, essayons d'aller un peu plus loin là-dessus,
14:48 madame Peskin.
14:50 On sort d'une crise sanitaire.
14:54 Nous sommes confrontés à la guerre en Ukraine.
14:58 Les conséquences économiques sont devant nous.
15:02 Rareté, on l'a vu,
15:04 de certaines sources énergétiques,
15:06 les prix ont flambé, ne parlons pas de l'électricité.
15:10 C'est imposer cette notion de sobriété énergétique,
15:15 aujourd'hui. Pourquoi pas ?
15:17 De toute manière, les gens sont obligés de l'accepter,
15:20 et les résultats sont là,
15:22 puisque les citoyens se sont montrés citoyens.
15:25 Mais alors, la question qui se pose...
15:27 -L'industrie a moins consommé.
15:29 -L'industrie, mais aussi les particuliers.
15:32 -Beaucoup les particuliers.
15:34 -Disons que ce sont pour vous...
15:36 En tout cas, la question que je voudrais vous poser,
15:39 c'est tous ces gestes individuels
15:41 que l'on demande aux personnes de sobriété.
15:46 C'est une chose, mais en même temps,
15:49 la machine économique et industrielle
15:52 s'emploie à tourner à plein régime.
15:55 Il y a deux choses.
15:56 Est-ce qu'il n'y a pas ici une contradiction
15:59 dans les termes et même dans les intentions ?
16:02 -Je voudrais dire trois choses, peut-être, sur ce point.
16:07 D'abord, je pense que c'est plutôt salutaire
16:10 qu'on ait expérimenté tous, collectivement,
16:13 dans le monde entier, une sobriété obligatoire,
16:16 une contrainte très forte sur l'approvisionnement
16:19 pendant la crise sanitaire,
16:20 et de nouveau sur certains approvisionnements,
16:23 notamment en céréales et en énergie,
16:25 depuis la crise en Ukraine.
16:27 Ce signal pris, le signal le plus efficace
16:30 pour apprendre à être plus sobre
16:32 et à reconnaître de quoi on a besoin pour fonctionner,
16:35 c'est un apprentissage accéléré,
16:37 qui est bon pour la société.
16:39 On se rend mieux compte de quoi on dépend.
16:41 On dépend individuellement de beaucoup de choses.
16:44 Les collectivités locales et territoires
16:46 dépendent aussi de ressources très nombreuses
16:49 et variées avec des origines diverses.
16:51 L'Etat, la nation, les entreprises,
16:54 chacun dépend d'un certain nombre de ressources,
16:57 dont on ne mesurait peut-être pas avant ces deux grandes crises...
17:00 -Je ne suis pas sûre que les gens soient plus heureux
17:03 de payer beaucoup plus cher leur électricité.
17:06 -C'est une expérience suffisamment forte
17:08 pour qu'elles fassent prendre conscience d'enjeux
17:11 qu'on avait dans le contexte politique déjà évoqué,
17:14 mais qui n'étaient peut-être pas aussi fortement intégrés
17:17 par les gens individuellement.
17:19 C'est vrai pour les collectivités locales,
17:22 qui payent très cher leur énergie,
17:24 que pour les entreprises et les individus.
17:26 La deuxième chose, c'est qu'on a tendance
17:29 à réduire la notion de sobriété
17:31 ou l'ambition de sobriété à la sobriété énergétique.
17:34 Or, on a expérimenté encore l'été dernier
17:36 d'autres pénuries que celle de l'énergie,
17:39 notamment des problèmes de sécheresse
17:41 extrêmement importants l'été dernier.
17:44 Barbara Pompili, qui s'occupe de la gouvernance de l'eau,
17:47 pourra en parler mieux que moi.
17:49 On va devoir aussi apprendre à gérer d'autres types de pénuries
17:52 et donc d'autres formules de sobriété,
17:55 comme pour l'eau, sur les matières premières.
17:58 Je m'intéresse à la ville et à la construction.
18:00 On va bientôt manquer de sable pour le béton.
18:03 Cette difficulté à s'approvisionner,
18:05 devant nous, est de plus en plus forte.
18:08 Il faudra mettre en place des régulations
18:10 de l'approvisionnement.
18:12 Et le troisième point, c'est qu'on ne doit pas,
18:15 je pense, non plus réduire cette idée
18:17 de contrainte sur les petits gestes
18:19 aux individus.
18:20 En réalité, je le disais pour les collectivités locales,
18:24 les politiques de sobriété s'appliquent
18:26 à tous décideurs, individuels ou collectifs,
18:29 notamment aux décideurs territoriaux,
18:31 évidemment aux entreprises, qui, on l'a vu pendant l'automne,
18:35 ont transformé leur process industriel,
18:37 voire fermé des chaînes de production
18:39 face au prix de l'énergie,
18:41 et qui se posent la question de leur process industriel.
18:44 Cette notion de sobriété n'est pas à rapporter
18:47 qu'aux individus et aux petits gestes.
18:49 Elle est une question de transformation
18:52 qui fait face à son modèle économique.
18:55 -M. Olivier Levanzy, je reste sur ma question.
18:58 Est-ce que vous ne voyez pas une contradiction
19:03 entre ces gestes individuels
19:05 qui sont demandés aux individus
19:08 et en même temps,
19:09 la nécessité
19:12 de développer l'outil économique
19:16 de production française ?
19:17 On insiste beaucoup
19:20 pour qu'il y ait une réindustrialisation.
19:22 Parler de tout ça en demandant des gestes de sobriété
19:27 à des individus,
19:28 est-ce qu'il y a quelque chose à harmoniser entre les deux ?
19:32 -C'est pas là que je verrais la contradiction.
19:35 Est-ce qu'il y a un manque de cohérence globale et de direction ?
19:38 Je reprends ce que disait Mme Pompili.
19:41 Il faudrait qu'on ait un projet sur lequel on se raccroche.
19:44 On a eu un projet de société autour de l'équipement,
19:47 qui a même dérivé à la consommation de masse.
19:50 Et derrière, parce qu'il y avait une demande,
19:53 on a fait un outil productif de masse
19:55 avec toutes les prévarications qu'il a pu avoir sur l'environnement
19:58 et le fait qu'on atteigne un certain nombre de limites.
20:02 Ce modèle est dépassé.
20:03 On bascule vers un autre projet de société
20:05 qui n'est pas encore pleinement défini.
20:08 C'est sans doute la première brique
20:10 sur laquelle il faut travailler collectivement.
20:13 On a plusieurs défis. On parle de la sobriété.
20:15 Vous l'avez évoqué.
20:17 Entre les deux, il y a des injonctions contradictoires.
20:20 Il va falloir que, collectivement,
20:22 nous commencions à donner une direction un peu ferme
20:25 qui nous permette, en tous les cas,
20:27 de définir quel outil productif on veut.
20:30 Un outil productif de souveraineté, par exemple,
20:33 ça va demander d'ouvrir des mines en France.
20:35 Est-ce qu'on y est prêts ?
20:37 Alors qu'on voudrait préserver l'espace naturel.
20:40 Entre les deux, comment on choisit ?
20:42 Le choix, on n'a pas d'instance.
20:44 -Ouvrir une mine naturelle,
20:46 c'est pas dévisager le paysage français.
20:48 -Demander aux personnes qui vivent à côté,
20:51 regarder les difficultés qu'il peut y avoir.
20:54 Encore une fois, je pense qu'il va falloir réexploiter
20:57 les richesses qu'on a dans notre sous-sol.
20:59 Je pense que c'est une direction qu'on doit prendre.
21:02 Demander aux personnes qui vivent à côté de ces sites
21:06 comment ils le vivent.
21:07 On doit avoir cette obligation d'écouter les territoires,
21:10 les citoyens qui y vivent,
21:12 et de leur dire comment ils vivent.
21:14 -On a des questions sur le projet collectif.
21:17 -On a des questions sur le projet collectif.
21:20 On a des questions sur le projet collectif.
21:22 On a des questions sur le projet collectif.
21:25 On a des questions sur le projet collectif.
21:28 On a des questions sur le projet collectif.
21:31 On a des questions sur le projet collectif.
21:33 On a des questions sur le projet collectif.
21:36 On a des questions sur le projet collectif.
21:39 Si je devais donner un pari, c'est celui de circularité.
21:42 -Qu'est-ce que vous mettez dans cette circularité ?
21:45 -L'entièreté, notamment, des matières premières
21:48 et le fait d'être capable de reprendre un produit.
21:52 Le recyclage matière étant quasiment l'ultime solution,
21:55 mais la réparabilité, la récupération des pièces,
21:58 la démontabilité seront absolument clés
22:01 dans tous les objets du quotidien qu'on va avoir autour de nous.
22:04 Donc, l'industrie et tout ce qui produit nos objets,
22:08 cette chaise, des livres, nos stylos, nos smartphones,
22:11 est en face d'un défi dont on connaît pas exactement la direction,
22:15 mais qu'on sent bien, qui est de réinventer tous les produits.
22:19 Et là, on n'a pas encore tout à fait les solutions.
22:22 On ne sait pas faire la circularité, c'est compliqué,
22:25 de tous les produits autour de nous, mais c'est un défi fantastique.
22:29 Est-ce qu'il va être créateur d'activité ou pas ?
22:32 Il faut bien réfléchir à ce qui s'est passé sur la voiture.
22:35 On est passé d'une motorisation thermique
22:38 à la décision d'une motorisation électrique.
22:40 C'est une décision politique, symbolique.
22:43 On a dit 2035, terminé.
22:45 Quand on regarde les études, il faut un peu de discernement.
22:48 Il y a des cas où l'usage de la voiture électrique
22:51 n'est pas le meilleur pour l'environnement.
22:54 La première leçon de ça, c'est que dans les décisions,
22:57 il faut mettre du discernement et pas que du symbole.
23:01 On a du mal à le faire collectivement.
23:03 Le deuxième élément, c'est quand on a lancé
23:06 cette transition assez rapide,
23:08 on ne s'est pas réellement occupé de toute la filière.
23:11 100 000 emplois en France sont concernés.
23:13 S'est-on occupé de leur transformation ?
23:16 Est-ce qu'on veut un modèle de société ?
23:18 Ou c'est le marché qui va faire cette adaptation ?
23:22 Aujourd'hui, sans répondre à votre question,
23:24 sur CroixSociété, on a un véritable enjeu.
23:27 Quel est notre projet ?
23:29 Quelles sont les produits qui vont servir sur ce projet ?
23:32 Comment on organise la transition ? -On vous a entendu là-dessus.
23:36 Madame Pompili, sur cette dualité
23:40 entre l'individu d'un côté
23:42 et la collectivité de l'autre,
23:45 est-ce qu'il y a, vous qui êtes une politique,
23:48 est-ce qu'il n'y a pas un travail pédagogique à faire
23:51 pour que les gens comprennent
23:53 que les efforts qu'on leur demande
23:55 doivent être, si je puis dire,
23:59 à la mesure de ce que le pouvoir politique peut faire
24:04 pour transformer globalement tout le processus ?
24:08 -C'est un point central.
24:10 Je rejoins ce que vous disiez.
24:12 On a besoin d'un récit pour dire à tout le monde
24:16 vers où on veut aller.
24:17 Parce que si on n'a pas ce récit-là,
24:20 vous allez avoir des réactions qu'on voit aujourd'hui,
24:23 qui sont des réactions de peur, d'inquiétude face à l'avenir,
24:27 où on ne voit que les contraintes,
24:29 où on n'arrive pas à se projeter.
24:31 Ca entraîne des manifestations
24:33 dont la plus emblématique était celle des Gilets jaunes,
24:36 qui a bien montré qu'une partie de la population,
24:39 aujourd'hui, a le sentiment que le monde avance sans elles.
24:43 On peut d'ailleurs retranscrire ça au niveau mondial.
24:46 On a aussi un certain nombre de pays
24:48 qui ont l'impression que le monde avance sans eux
24:51 et qui ne se sentent pas partie prenante de cette transition.
24:55 On ne réussira pas à faire ce qu'on veut faire
24:58 si on ne trouvait pas tous les outils,
25:00 si on n'a pas cette adhésion au futur qu'on veut construire.
25:04 En plus, se rajoute à cela la complexité
25:06 que nous sommes dans un monde ouvert
25:08 et qu'on ne peut plus réfléchir à ses solutions
25:11 uniquement au niveau national ou même au niveau régional.
25:15 On a besoin d'avoir une visibilité
25:17 et d'avoir un travail que l'on fait au niveau continental,
25:21 au niveau mondial. -Est-ce que vous avez le sentiment
25:24 que le gouvernement fait ce que vous dites ?
25:28 -Je pense que... -Le gouvernement actuel.
25:31 -Le gouvernement actuel. -Où est-ce qu'il y a
25:33 une insuffisance de pédagogie ?
25:35 Je sais que c'est difficile de critiquer ses successeurs partout,
25:39 mais bon, est-ce que... -En plus, c'est un travail
25:41 de long terme. -Oui, oui, mais...
25:43 -Il y a une chose de très positive qui a été mise en place
25:47 par le gouvernement, c'est le fait de décider
25:49 d'avoir un organisme accolé à la Première ministre
25:52 qui est en charge de la planification.
25:55 Pourquoi ? Parce que ça oblige, quelque part,
25:59 tout le monde à prendre...
26:01 Je vais employer le terme de "charge mentale",
26:04 à prendre la charge mentale de la transition écologique,
26:07 qui avant était quand même laissée aux soins du ministre
26:10 en charge de l'environnement.
26:12 Je l'ai vécu, même s'il y a beaucoup d'efforts.
26:15 -Ca ne vous gêne pas que le ministre en charge
26:17 ne soit pas un écologiste, par exemple ?
26:20 Il n'appartienne pas à un parti écologiste ?
26:23 -Non, à partir du moment où tout le monde prend en compte
26:27 ce point.
26:29 Moi, ce qui me gêne un petit peu,
26:32 c'est qu'on a aussi des gens qui n'ont pas vraiment
26:36 une culture écologiste et qui ont simplement une conscience
26:40 qu'on a un objet,
26:42 qui est les émissions de gaz à effet de serre
26:45 qui sont trop importantes et qu'il faut réduire.
26:47 On a des gens qui réfléchissent à des outils
26:50 pour réduire ces émissions de gaz à effet de serre.
26:53 Ca, c'est très important,
26:55 mais c'est insuffisant, à mon sens,
26:57 si on veut avoir un récit collectif,
26:59 encore une fois, qui est la base de tout le travail...
27:03 -On a pu vous entendre. Hélène Peskin.
27:05 -Je voulais répondre sur ce que disait Olivier Hulmancy
27:08 à l'instant sur la nécessité de relocaliser l'industrie,
27:11 qui pourrait être en contradiction avec cette logique de sobriété
27:15 prenée par le pouvoir en place,
27:17 mais je crois qu'il faut arrêter de penser
27:20 que sobriété et croissance sont totalement divergents.
27:23 Je pense qu'aujourd'hui, on a fait la preuve
27:25 que des politiques de sobriété, d'efficacité énergétique,
27:29 d'économie de matière, d'énergie, sont créatrices d'emplois.
27:32 On l'a dit sur la rénovation des bâtiments,
27:35 c'est une stratégie, une politique publique
27:37 qui est créatrice d'emplois dans le bâtiment.
27:40 On le voit, justement, on parlait de relocalisation de mines.
27:43 On vient d'ouvrir une mine de lithium en Auvergne,
27:46 dans un ancien bassin minier.
27:48 En tout cas, le territoire accueille plutôt favorablement
27:51 cette ouverture de mine. C'est pas toujours vrai.
27:54 C'est pas toujours vrai, mais plutôt favorablement
27:57 dans le sens où ça redonne une activité économique
28:00 à un bassin d'emploi qui était plutôt en déprise.
28:02 On voit que sous réserve de comprendre
28:05 dans quel monde on se situe et pourquoi cette relocalisation
28:08 est bénéfique à l'environnement,
28:10 au sens où on diminue les distances parcourues par les matières,
28:13 on crée du positif avec un récit qui est reçu négativement.
28:17 Il y a effectivement besoin d'exemples très concrets
28:20 pour expliquer comment on crée de la croissance,
28:22 de la richesse et une forme de prospérité
28:25 à partir de politiques qui visent à réduire nos dépendances,
28:28 mais ce sont des kilomètres parcourus,
28:30 donc c'est du carbone émis dans l'atmosphère,
28:33 et améliorer notre capacité à être suffisante
28:35 dans un nombre de domaines économiques.
28:38 -M. Boris Ravignon, vous voulez intervenir là-dessus,
28:41 mais je voudrais également que vous interveniez
28:44 sur le point que je vous suggère.
28:48 Est-ce qu'à votre avis, sans signal prix,
28:51 c'est-à-dire une vraie...
28:53 taxation du carbone,
28:56 est-ce qu'on n'est pas réduit à faire du bricolage écologique ?
29:01 -Je vous réponds juste dans la foulée.
29:06 Je voulais simplement réagir au débat pour dire qu'on le voit bien,
29:10 c'est d'ailleurs un peu aussi le thème de notre émission d'aujourd'hui.
29:17 Il y a une forme d'éco-anxiété aujourd'hui.
29:20 Une inquiétude sur à la fois l'évolution écologique de notre planète,
29:26 la dégradation et le changement climatique
29:28 et tout ce qu'elle implique,
29:30 et puis l'inquiétude sur les voies, les trajectoires, les moyens
29:35 par lesquels passer pour atteindre les objectifs,
29:39 pour agir finalement et aller vers une amélioration de la situation.
29:46 Je crois quand même...
29:47 On peut toujours trouver le verre à moitié vide,
29:51 mais un certain nombre d'outils commencent à être en place.
29:55 Sur le fait, par exemple,
29:58 de planifier les évolutions,
30:02 et on ne parle pas de petites évolutions,
30:05 je vais prendre un exemple.
30:06 On sait qu'on doit, pour atteindre la neutralité carbone à l'horizon 2050,
30:11 faire que 90 % des logements,
30:15 des 37 millions de logements que nous avons,
30:19 se trouvent en 2050 avec des niveaux de consommation du BBC.
30:24 C'est un niveau extrêmement élevé,
30:26 c'est presque divisé par trois la consommation moyenne des logements
30:29 par mètre carré.
30:31 Pour faire ce travail-là,
30:32 il faut qu'on passe de 41 000 rénovations BBC
30:35 qu'on a faites sur la période récente à 700 000.
30:39 Accessoirement, ça va créer pas mal d'emplois,
30:43 mais ça requiert des investissements.
30:45 Aujourd'hui, on commence à avoir,
30:47 dans France 2030,
30:51 dans les politiques qui sont conduites,
30:53 des moyens pour accompagner ces investissements,
30:56 qui sont, à la différence de ceux dont parlait Louis Gallois,
31:01 pour une partie des industriels,
31:03 des investissements rentables.
31:04 Ils vont, au bout du compte,
31:07 dégager du revenu pour les locataires.
31:10 Une fois qu'ils auront remboursé leurs prêts,
31:12 ils vont se trouver mieux dans un logement mieux isolé.
31:15 Et puis, on commence à mettre en place
31:17 les moyens destinés à la décarbonation de l'industrie.
31:22 Ça a été rappelé, c'est crucial.
31:24 La moitié de France 2030,
31:26 les 54 milliards de France 2030,
31:27 est consacrée à la décarbonation de notre économie.
31:30 Les outils sont là.
31:31 Mais c'est vrai,
31:32 et je rejoins ce qui a été dit par Hélène Pesquine et Barbara Compili,
31:36 on a besoin aussi que les représentations évoluent.
31:40 Si le fait de...
31:42 Parce que le prix du carburant,
31:44 c'est un peu une réponse aussi à la question que vous posiez
31:47 sur les prix de l'énergie.
31:49 Si le prix du carburant vous incite à prendre votre vélo
31:53 plutôt que votre voiture,
31:54 vous le vivez comme, finalement, une déchéance totale.
31:59 Vous n'êtes plus capable de transporter votre SUV d'une tonne et demie
32:03 sur 300 ou 400 mètres pour aller chercher la baguette de pain
32:06 et vous êtes obligé de prendre votre vélo.
32:07 Si vous le vivez comme ça, effectivement,
32:09 le récit qu'on a de ce moment-là,
32:12 c'est une contrainte terrible
32:14 qui m'oblige à faire quelque chose d'extrêmement désagréable.
32:17 Si, en réalité, vous vous inscrivez dans le développement
32:21 de l'utilisation du vélo au quotidien,
32:25 qui est à la fois à des vertus écologiques, économiques,
32:28 parce que ça coûte quand même beaucoup moins cher
32:30 que de transporter des tonnes de métal
32:33 pour des toutes petites distances qu'on peut faire plus légèrement,
32:36 et aussi meilleure à votre santé,
32:38 vous n'avez pas exactement la même vision de cette même expérience.
32:42 Et donc, ça, effectivement...
32:43 -M. Ravignon, il faut faire rentrer, si je puis dire,
32:46 des sous dans la caisse.
32:47 Est-ce que sans une taxation du carbone,
32:50 mais qu'il soit une véritable taxation,
32:52 on peut réussir ?
32:54 Parce que ça met du temps, vous le savez bien,
32:57 pour les nouveaux...
32:58 -Là, je crois, ça a été dit par d'autres intervenants,
33:01 mais la hausse prodigieuse des prix de l'énergie
33:05 qu'on vient de connaître a, je crois, permis
33:07 de franchir un certain nombre de capes de sensibilisation.
33:10 Et on a aujourd'hui, moi, je peux vous le dire,
33:13 je rencontre des artisans, des chefs d'entreprise
33:15 et des ménages qui sont extrêmement sensibles,
33:18 parce qu'ils ont vu, justement, la hausse des prix de l'énergie
33:21 ces derniers mois,
33:24 et sont en train de rechercher, justement, les investissements
33:27 qui vont leur permettre d'être plus efficaces,
33:29 et ils sont en train de réfléchir à la sobriété.
33:32 Il y a des concepts qu'il faut qu'on arrive un peu à stabiliser.
33:35 L'efficacité, c'est quand vous ne changez pas vos usages,
33:38 mais vous avez simplement une utilisation de l'énergie,
33:42 de plus en plus d'électricité, comme ça a été dit,
33:45 qui est moindre,
33:46 vous arrivez, finalement, à améliorer
33:48 le fonctionnement du système énergétique.
33:51 Et puis, la sobriété, c'est de se dire,
33:53 est-ce que pour vivre seul, j'ai besoin de 186 m2 ?
33:57 C'est ça, et du coup, effectivement,
34:01 un certain nombre de ménages, d'acteurs économiques,
34:03 ménages ou entreprises, font ces choix-là,
34:06 et je crois qu'il n'y a pas...
34:08 Il me semble dans le contexte dans lequel on est,
34:10 il n'y aurait pas de nécessité
34:12 de rajouter un signal prix fiscal supplémentaire.
34:15 Il me semble que les prix de l'énergie,
34:17 tels qu'ils sont, ont déjà convaincu tout le monde
34:20 de se mettre en mouvement.
34:22 -Merci, monsieur Ravignan.
34:24 Mme Boppilli, je reviens vers vous sur la taxation du carbone.
34:27 Est-ce qu'il ne faut pas vraiment avoir un prix consolidé
34:31 du carbone pour réussir
34:35 ces avancées écologiques ?
34:37 -Si, évidemment.
34:39 Evidemment. On a besoin d'un prix pour le carbone
34:42 qui soit un juste prix, c'est-à-dire qui représente...
34:45 -C'est quoi le juste prix ? La tonne, ce serait...
34:50 -Il y a eu plusieurs projections qui ont été faites.
34:53 -Oui, mais...
34:54 -On était à 100 euros la tonne comme objectif.
34:57 Ca avait été une trajectoire qui avait été prévue
35:00 par les précédents gouvernements.
35:02 Ca a été stoppé net au moment de l'affaire des Gilets jaunes,
35:06 mais tout le monde est assez d'accord pour dire
35:08 qu'on a besoin de mettre en place une tarification,
35:11 une taxation du carbone, qui permettent d'ailleurs
35:14 de financer aussi des politiques de transition écologique.
35:18 Mais ça, ça doit aussi s'entendre, j'insiste là-dessus,
35:21 mais ça doit aussi s'entendre dans une relation
35:25 avec ce qu'on fait avec les autres pays.
35:27 Parce qu'on est dans un monde ouvert,
35:30 on est dans un monde où il y a des échanges commerciaux
35:33 avec le monde entier, et donc ça ne peut pas
35:36 s'entendre comme ça sans regarder les conséquences
35:39 que ça peut avoir sur nos entreprises
35:41 et sur nos consommateurs.
35:44 Quand l'Europe travaille un mécanisme
35:46 d'ajustement carbone aux frontières,
35:48 qui a été porté pendant très longtemps par la France
35:51 et qui a été enfin validé au niveau de l'Union européenne,
35:55 on est en pas vers une taxation mondiale du carbone
35:59 et en tout cas vers une harmonisation des règles
36:02 au niveau international sur cela.
36:04 On ne pourra pas y arriver
36:06 si on ne met pas en place ce genre de mécanisme.
36:08 Ça fait réagir.
36:09 On voit bien qu'il y a des réticences,
36:11 que ce soit les Etats-Unis, que ce soit la Chine,
36:14 mais des expériences se mettent en place
36:16 et je crois qu'on met en place quelque chose de vertueux
36:19 de ce point de vue-là. -Merci.
36:21 ...
36:28 -Louis Gallois, nous sommes tous favorables
36:31 à des investissements dans les biens communs,
36:34 qu'il s'agisse de l'eau, l'énergie, la santé,
36:38 le logement, l'éducation et autres services publics,
36:43 notamment avec le modèle social européen.
36:46 Sincèrement, est-ce qu'il est possible
36:49 de faire tous ces investissements
36:51 sans croissance ?
36:52 -Ma réponse, évidemment, c'est que non.
36:55 Mais je pense que...
36:57 Je...
37:00 J'ai pas participé au débat précédent.
37:03 Moi, je pense qu'on dit...
37:06 Un récit, il y a une sorte d'unanimité
37:08 qui se présente autour de ce cercle.
37:13 Cette unanimité, elle est pas dans le pays.
37:15 Les problèmes...
37:17 Nous devons affronter les problèmes.
37:20 Est-ce que sur l'énergie, par exemple,
37:24 on est d'accord entre le nucléaire et l'enouvelable ?
37:27 Qu'est-ce qu'on va faire sur le nucléaire ?
37:30 Est-ce que...
37:31 Vous parlez du prix de l'essence
37:34 comme un indicateur.
37:35 C'est très bien, mais il va falloir expliquer ça
37:38 aux gens qui... Aux Gilets jaunes.
37:41 Notre émission, il faut pas qu'elle soit regardée
37:44 par les Gilets jaunes, parce que nous allons avoir des effets
37:48 sur... Je sais pas.
37:50 -Essayer de prévenir les manifestations.
37:53 Alors, qu'est-ce qu'il faut dire ?
37:55 -Je pense qu'on ne peut pas...
37:57 établir un récit
38:01 où on intègre votre idée de financer les biens communs...
38:06 -Ils sont indispensables.
38:09 -Sans faire des choix qui soient clairs pour le pays.
38:12 Et je pense que ces choix ne peuvent être résultés
38:17 que d'un travail démocratique
38:19 mené avec beaucoup de soin
38:23 et ensuite une planification pour mettre en oeuvre.
38:26 Je suis désolé... -Dites-leur...
38:28 -Vous parliez tout à l'heure
38:30 de taxer le carbone.
38:33 Très bien.
38:34 Mais... -En quoi ça vous gêne ?
38:36 -Madame Pompilot l'a rappelé.
38:39 On vit dans un monde ouvert.
38:42 La balance commerciale de la France,
38:44 c'est 150 milliards de déficit.
38:46 Et ces 150 milliards de déficit, c'est du carbone que nous importons.
38:50 Et qui, lui, ne bénéficie d'aucune taxation.
38:56 Alors on va mettre en place un ajustement carbone.
38:59 Je considère que c'est
39:01 un geste symbolique important.
39:04 Je ne veux pas le nier.
39:06 -Vous êtes favorable à cet ajustement ?
39:09 -Il faut voir comment on se prend dans le détail.
39:12 On va ajuster...
39:15 On va taxer l'acier brut rentrant en Europe.
39:18 Très bien. Ca va faire que l'acier en Europe,
39:22 soit produit par les acierifs européennes,
39:27 soit importé, va valoir plus cher.
39:29 Les constructeurs automobiles vont construire leurs voitures
39:34 à l'extérieur de l'Europe pour avoir de l'acier moins cher.
39:37 Ils ont déjà commencé à le faire. Ils vont poursuivre.
39:41 Est-ce qu'il faut taxer les automobiles ?
39:43 Si on taxe les automobiles,
39:45 on se retrouve à l'OMC, l'Organisation mondiale du commerce.
39:49 Donc je pense qu'on a affaire
39:51 à des sujets extrêmement complexes
39:54 et qui supposent des choix politiques assez tranchés.
39:59 -Mais le fond de votre pensée,
40:01 Louis Gallois,
40:02 vous vous êtes fait le chantre
40:06 de la réindustrialisation. -Bien sûr.
40:09 -Vous pensez que c'est possible
40:13 en allant vers une transition écologique...
40:15 -Je l'ai expliqué tout à l'heure.
40:18 Les conditions d'une réindustrialisation,
40:20 c'est d'abord, je l'ai dit, un effort de recherche.
40:23 C'est ensuite que les process industriels
40:25 soient décarbonés.
40:27 Pour que ces process industriels soient décarbonés,
40:30 il va falloir que le pays et l'Europe
40:33 assurent les conditions de financement
40:35 de cette décarbonation. -Vous parlez des citoyens.
40:38 Mais les citoyens, aujourd'hui...
40:40 Vous parlez des Gilets jaunes, c'est une chose,
40:43 mais les citoyens, aujourd'hui, contestent la notion de PNB
40:47 comme seul indicateur économique.
40:49 Ils préfèrent aussi avoir un indicateur
40:53 qui soit plus social.
40:54 -C'est très bien qu'il y ait des indicateurs sociaux.
40:57 J'ai présidé une fédération de lutte contre la pauvreté.
41:01 J'ai quelques idées sur le sujet.
41:03 -Alors pourquoi vous ne donnez-les-nous ?
41:06 -Mais on a besoin de croissance financière
41:11 qui apporte de la ressource.
41:13 Vous parlez de financement de grandes infrastructures.
41:16 On a besoin d'argent pour cela.
41:18 Donc, moi, je pense que ceux qui plaident
41:21 pour la décroissance
41:22 plaident pour un modèle social différent
41:26 de celui dans lequel nous vivons.
41:28 C'est-à-dire la fin de l'Etat-providence.
41:30 En revanche, si on veut financer l'Etat-providence,
41:33 si on veut financer les investissements
41:35 que vous évoquez, il va falloir de la croissance.
41:38 Et cette croissance, je le répète,
41:40 c'est un, de la recherche,
41:42 deux, des processus décarbonés,
41:44 trois, de se positionner sur les industries d'avenir,
41:48 qui sont des industries liées
41:50 à la transition énergétique et écologique,
41:53 et quatre, c'est de produire de l'électricité en masse.
41:56 On ne décarbonera pas si on n'a pas beaucoup d'électricité
41:59 ou si on veut décarboner avec moins d'électricité.
42:02 On le fera en important l'essentiel des produits.
42:06 Donc, il nous faut de l'électricité pour produire en Europe.
42:09 -Qu'est-ce que vous dites, Barbara Pompili,
42:12 quand vous écoutez un grand patron comme Louis Gallois dire
42:16 qu'on a besoin de croissance
42:18 si on veut financer les biens publics
42:22 qui sont requis par la communauté nationale ?
42:25 -Je pense que c'est une vision que j'entends depuis toujours.
42:30 Je suis d'accord sur le fait qu'il va falloir investir beaucoup
42:33 et que pour ça, il faut de l'argent et des moyens.
42:36 Maintenant, on ne peut pas investir
42:40 en ayant en tête de faire comme avant,
42:42 de faire business as usual. -J'ai dit l'inverse.
42:45 -Quand vous dites qu'il va falloir beaucoup plus d'électricité,
42:48 je partage, et d'ailleurs, maintenant, toutes les analyses...
42:52 -La programmation pluriannuelle d'énergie que vous avez,
42:55 de votre époque, ne prévoyait pas
42:57 une augmentation d'électricité. -Pardon, ça date d'avant 2015,
43:01 ça date d'avant l'accord de Paris,
43:04 ça date d'avant les objectifs de 2030.
43:09 -C'est ce qui nous a fait fermer Fessenheim.
43:11 -Oui, mais vous parliez tout à l'heure de symboles,
43:14 en voilà un, c'est très gentil de parler de symboles,
43:18 moi, je parle d'efficacité.
43:19 Aujourd'hui, nous avons des objectifs de baisse
43:22 d'émissions de gaz à effet de serre que nous n'avions pas
43:25 au moment où nous avons fait la LTE-CV,
43:28 nous avons des contraintes qui ne sont plus les mêmes
43:31 qu'à l'époque, et donc, tout le monde a revu
43:34 les objectifs. On avait aussi, d'ailleurs,
43:36 à l'époque de la PPE, de la planification
43:39 pluriannuelle d'énergie, pris des engagements...
43:41 -Date de 2020, je vous rappelle. -Pris des engagements
43:44 sur les renouvelables que nous n'avons pas tenus.
43:47 A partir du moment où nous ne tenons pas des engagements
43:50 de plus de production d'électricité, on ne va pas s'étonner
43:54 après qu'on ait des problèmes de mettre en face
43:56 la production et la consommation. Moi, je suis très contente
44:00 d'avoir été une des actrices du discours de Belfort
44:03 au président de la République. Pourquoi ?
44:05 Alors que je ne suis pas une défenseuse acharnée
44:08 du nucléaire, et vous le savez très bien.
44:10 Pourquoi ? Parce qu'enfin, on a tous, collectivement,
44:14 essayé de sortir de nos propres dogmes
44:16 pour essayer de regarder la situation en face.
44:19 Nous avons demandé d'avoir des rapports
44:21 avec des projections. C'est RTE qui l'a fait,
44:24 l'Agence internationale de l'énergie qui l'a fait,
44:27 Négawatt le fait aussi, avec ses propres analyses,
44:31 qui ont toutes dit la même chose, qui ont dit
44:33 "Nous allons avoir besoin, pour baisser nos émissions
44:36 "de gaz à effet de serre, de plus d'électricité."
44:39 Tout le monde est d'accord là-dessus.
44:41 Pour pouvoir faire face à ces besoins,
44:44 les solutions sont différentes selon les pays,
44:46 mais concernant la France, on va avoir besoin de trois choses.
44:50 De trois choses, M. Gallois.
44:52 Première chose, développer massivement
44:54 les énergies renouvelables, beaucoup plus que ce qu'on a fait
44:58 aujourd'hui, ce qui nécessite aussi beaucoup d'investissement.
45:01 On va devoir encore se fonder sur du nucléaire.
45:04 Et là, je rajoute, il faut quelques nouveaux réacteurs,
45:07 parce que se fonder uniquement sur les réacteurs anciens,
45:11 c'est prendre un risque trop important, à mon avis.
45:13 Et troisièmement, beaucoup de sobriété.
45:17 Et ce trépied-là, qui a été proposé par le président Macron,
45:21 me semble être le plus raisonnable et réaliste
45:24 dans la période actuelle.
45:26 Maintenant, il faut qu'il y ait, je vous rejoins là-dessus,
45:29 un débat démocratique pour valider tout ça.
45:31 Ce débat démocratique, il est en cours.
45:34 Il y a en ce moment des consultations des citoyens
45:37 sur le sujet du programme global.
45:39 Il va y avoir une consultation par la CNDP
45:42 sur les nouveaux réacteurs nucléaires.
45:44 Il va y avoir, et c'était une demande très forte
45:47 que nous avions exprimée quand j'étais députée avec d'autres,
45:51 une loi de programmation pluriannuelle de l'énergie
45:54 de l'Assemblée nationale,
45:55 c'est-à-dire dans le lieu clé de la démocratie de notre pays,
45:59 pour pouvoir donner les grandes orientations,
46:02 en tenant compte, évidemment, de nos objectifs.
46:04 -Merci, Barbara. Vous voulez dire un mot ?
46:07 On demande le point de vue de M. Ravignon là-dessus.
46:10 -Je pense que...
46:11 La politique énergétique qui a été menée par le pays
46:17 depuis 20 ans est une politique totalement erratique.
46:21 -Eh bien, justement.
46:23 -Entendez, madame la députée.
46:24 -Mais j'ai approuvé le discours de Belfort.
46:27 J'ai pas de problème avec le discours de Belfort.
46:30 Je pense que nous avons besoin d'énergie renouvelable.
46:33 Je trouve absolument scandaleux
46:35 que l'Union européenne nous accuse
46:37 de ne pas avoir atteint nos objectifs
46:39 en énergie renouvelable.
46:40 Quand on voit l'énergie décarbonée,
46:43 l'électricité décarbonée en France,
46:45 comparée à celle de l'Allemagne,
46:47 en France, nous avons produit
46:49 une électricité avec 107...
46:52 grammes par kWh.
46:56 Les Allemands sont à 700 grammes.
46:58 Les Allemands se font encenser par la Commission
47:01 car ils ont développé l'énergie renouvelable
47:03 et nous nous faisons accabler par la Commission.
47:06 -Vous montrez très clairement
47:08 que les Allemands produisent de l'énergie hypercarbonée
47:11 et que la Commission européenne ne dit rien.
47:14 -C'est d'ailleurs ce qui était paradoxal.
47:17 -Un chouïa caricatural.
47:19 -C'est une réalité, madame Pompidou.
47:21 -A cette heure de midi,
47:22 c'est que la France était à 28 % de renouvelables
47:25 et l'Allemagne à 29.
47:27 Comme il n'y avait pas de vent,
47:28 comme il n'y avait pas de soleil,
47:30 les énergies renouvelables françaises,
47:33 c'était de l'hydraulique,
47:34 et les énergies renouvelables allemandes, de la biomasse.
47:37 -On va demander l'avis de M. Ravignon
47:40 sur ce débat autour de la croissance.
47:42 Qu'en pensez-vous ?
47:43 -Je vais m'appuyer, là encore,
47:45 sur les travaux de Prospecty
47:47 et les transitions de l'ADEME,
47:49 les transitions 2050.
47:51 Ce qu'on y voit, c'est que pour atteindre
47:53 cet objectif de neutralité carbone,
47:55 qui est fondamental, sans quoi on ne remet pas,
47:58 on n'arrivera pas à stabiliser les choses
48:00 sur le plan du changement climatique,
48:03 on a un gros effort de sobriété à faire.
48:05 Ca a été dit, je crois bien expliqué.
48:07 On a un effort important aussi
48:09 de développement de la production décarbonée d'électricité,
48:13 avec des renouvelables, avec du nucléaire.
48:16 C'est au coeur des discussions,
48:17 les proportions sont au coeur de la PPE.
48:20 Il nous faudra développer de manière assez considérable
48:23 les énergies renouvelables,
48:25 parce que, comme ça a été bien dit,
48:27 même si on baisse, grâce à la sobriété,
48:29 un peu notre consommation d'énergie,
48:32 on va devoir avoir une proportion d'électricité plus importante.
48:35 J'ajouterais qu'il y a deux conditions supplémentaires
48:38 pour qu'on n'oppose pas,
48:40 c'était le thème un peu provocateur de La Réunion,
48:43 sobriété et croissance.
48:45 C'est qu'on soit, et Olivier Luancy l'évoquait,
48:48 sur un registre aussi de souveraineté.
48:50 Je crois vraiment que ce sujet mérite d'être investi
48:54 et que dans toutes les démarches que nous ferons,
48:57 dans tout le soutien que nous apportons
48:59 au développement de telles énergies,
49:02 on ait toujours ce réflexe de raisonner en filière.
49:04 On l'a fait, l'éolien en est le plus bel exemple.
49:07 Aujourd'hui, je crois qu'une grande partie
49:10 des difficultés d'acceptation locale que nous rencontrons
49:13 s'est liée aussi au fait qu'il n'y a pas de champion national
49:16 sur cette énergie-là
49:18 et qu'on a bien du mal à expliquer
49:21 les emplois qui se trouvent derrière.
49:23 -Vous l'avez dit, monsieur Ravignon.
49:26 Vous vouliez ajouter un point rapidement.
49:28 -La dernière condition, c'est celle de la solidarité.
49:31 Les transitions que nous avons à accomplir,
49:34 elles ne doivent jamais oublier les plus modestes de nos concitoyens,
49:38 sans quoi, effectivement, on va aller vers des difficultés
49:42 et de nouveaux épisodes sociaux difficiles.
49:44 -Ecoutez, ce débat est très intéressant,
49:46 mais pour conclure et pour que les téléspectateurs
49:49 soient bien au courant,
49:51 est-ce que vous diriez que la sobriété,
49:54 aujourd'hui, c'est une opportunité
49:57 pour, justement, cette croissance verte, régulée,
50:01 sans atteinte écologique,
50:04 en préservant l'environnement,
50:06 où, finalement, il y a aussi
50:11 une part un peu d'hypocrisie
50:13 et que c'est un fauné pour une décroissance pour certains ?
50:17 Je commence par vous, Olivier Luanzi.
50:19 -La sobriété ira avec le développement
50:22 de notre outil productif,
50:23 et donc, sans doute, avec de la croissance.
50:26 Est-ce que c'est quantifiable ou pas ?
50:28 Je pense que c'est trop tôt.
50:29 Le deuxième élément que ça apportera,
50:32 outre la souveraineté,
50:33 c'est qu'un outil productif s'installe dans les territoires,
50:37 auprès des villes moyennes,
50:38 et ça va baisser un peu l'intensité
50:40 de ce que j'appelle le poison de la division,
50:43 qui a été nourri par notre économie très tertiaire,
50:46 avec une concentration de la richesse dans les métropoles,
50:49 aux dépens des territoires.
50:51 Nous avons besoin de cette cohésion territoriale
50:54 comme sociale pour faire face aux défis qui sont les nôtres,
50:57 que ce soit ceux de la souveraineté ou de la transition écologique,
51:01 qui coûtera beaucoup d'investissements,
51:03 mais aussi l'effort de changer nos habitudes.
51:06 Ce ne sont que des solutions technologiques
51:08 que l'industrie apportera,
51:10 mais aussi des changements de comportement.
51:13 - Merci, monsieur Lemondi. Hélène Pesquine ?
51:15 - Je suis un peu gênée de ce débat autour de la croissance,
51:18 qui est un terme aujourd'hui,
51:20 enfin, en tout cas, une quantité qu'on mesure
51:23 à partir des consommations.
51:25 On ne sait pas décorréler croissance et consommation.
51:28 Or, on peut imaginer un développement alternatif,
51:31 qui pourrait être prospère,
51:32 créer des emplois et des richesses,
51:35 systématiquement corrélés à des consommations
51:37 qui, elles, peuvent être néfastes,
51:39 on l'a dit, pour l'environnement,
51:42 mais aussi pour les inégalités au sein de la société.
51:45 Je voudrais donner un exemple très concret,
51:47 parce qu'on en a donné assez peu,
51:49 de sobriété heureuse, j'allais dire,
51:52 sur laquelle on a trouvé des alternatives,
51:54 qui devront être financées.
51:56 C'est la sobriété en sol, la sobriété foncière,
51:59 pour lutter contre l'étalement urbain
52:01 et la disparition de la biodiversité
52:03 autour des villes.
52:04 On sait qu'il existe des alternatives
52:07 à l'étalement urbain, c'est la reconstruction
52:09 de la ville sur elle-même,
52:11 c'est de réinvestir des friches,
52:13 déjà occupées par des fonctionnaires urbains,
52:16 c'est éventuellement augmenter la densité de l'habitat,
52:19 réutiliser des logements vacants, etc.
52:22 On voit bien qu'on a des solutions
52:24 qui existent déjà, qui sont créatrices d'emplois,
52:27 qui sont créatives, même, et qui ont un coût supplémentaire,
52:31 sans contrainte ou difficulté à être réalisées.
52:33 Je pense que ça revient quand même à la notion de récit,
52:36 mais on a besoin de représentations
52:38 de ces alternatives, qui sont de la croissance
52:41 ou du développement, c'est du développement urbain,
52:44 mais c'est de la sobriété, puisqu'on n'étalera pas
52:47 sur des espaces naturels des constructions nouvelles.
52:50 Là encore, moi, j'appelle à en avoir
52:53 une idée beaucoup plus concrète
52:55 de ce qu'est cette sobriété
52:57 dans tous les enjeux de sobriété.
52:59 -Merci. Écoutez, c'est un débat fort intéressant.
53:02 Je rappelle une brève bibliographie.
53:06 Alors, le "Pucaz",
53:08 vous avez publié, dans le cadre un petit peu de cette émission,
53:13 "Quand la métropole cesse de s'étaler",
53:16 et Anne Peskin dit un mot là-dessus.
53:19 -Ca résonne avec ce que je disais à l'instant,
53:21 puisque c'est justement un recueil
53:23 sur les alternatives à l'étalement urbain,
53:26 c'est-à-dire un récit de la manière
53:28 dont on peut transformer la ville sur elle-même
53:30 sans perdre des opportunités de développement.
53:33 -Sur la décroissance, il y a de nombreux ouvrages.
53:36 On en donne deux, un ancien, un récent.
53:38 Serge Latouche, "Le pari de la décroissance",
53:42 c'est un classique, pour ceux qui s'intéressent à ce sujet,
53:46 et plus actuel, de Timothée Parique,
53:50 "Ralentir ou périr",
53:53 qui vient d'être publié au Seuil.
53:57 Ca vous intéresse, Louis Gallois ?
53:58 -Je ne sais pas. Je ne l'ai pas lu, je ne connais pas.
54:02 -Je vais vous l'offrir, non pas pour vous convertir.
54:05 -Vous êtes émanat.
54:06 -Je ne vais pas vous convertir là-dessus,
54:08 mais bon, je voudrais signaler aussi,
54:11 Olivier Luanzi,
54:13 vous avez publié, vers la renaissance industrielle,
54:17 édition Marie,
54:19 vous pouvez dire un mot, cette renaissance industrielle,
54:22 parce qu'on parle que de désindustrialisation.
54:25 C'est quoi, cette renaissance industrielle ?
54:27 Vous la constatez ?
54:29 -Il y a quelques éléments qu'on a indiqués.
54:31 Oui, on a commencé à la constater.
54:33 Oui, la crise de l'énergie
54:35 risque de casser un peu la dynamique.
54:37 C'est un des risques.
54:38 On est dans une économie ouverte, avec une concurrence,
54:41 notamment de nos amis américains, qui ont pris des modèles
54:45 sur le carbone différent des nôtres.
54:47 La renaissance industrielle était liée à plusieurs idées.
54:50 On n'a pas appelé ça une révolution,
54:52 mais on est convaincus que pour réussir cette réindustrialisation,
54:56 il faut les nouvelles techniques, les nouveaux outils digitaux
54:59 et environnementaux des nouvelles générations.
55:02 Toute l'expérience acquise, produire quelque chose,
55:04 c'est 50 % de savoir, 50 % de savoir-faire.
55:07 C'est pas une révolution, c'est une continuité
55:09 fondée sur les savoirs, qui va transformer notre outil productif
55:13 au service d'un nouveau projet de société.
55:15 -Merci infiniment. Je voudrais remercier
55:18 M. Boris Ravignon.
55:19 Merci d'avoir été avec nous
55:21 depuis cette très belle ville de Charleville-Mézières
55:25 et cette place majestueuse.
55:27 Vous voyez qu'on peut aller dans le Grand Est
55:31 et voir du territoire et du patrimoine.
55:35 Merci.
55:36 Merci, Mme Pompili, d'avoir été avec nous.
55:40 Merci, Hélène Peskin.
55:41 Merci, Louis Gallois. Merci, Olivier Eluanzi.
55:45 -L'ouvrage a été coécrit avec Annalise Voygilis.
55:48 -Voilà. Merci.
55:49 Merci à l'équipe d'LCP d'avoir permis la réalisation
55:53 de cette émission.
55:54 Je rappelle que nous aurons l'occasion d'aller plus loin,
55:59 parce que c'est une question centrale, aujourd'hui,
56:02 sur laquelle tout le monde s'interroge
56:04 en se demandant comment y arriver
56:07 et qu'est-ce qu'il est possible de faire.
56:09 Je crois que la narration qui a été fournie,
56:12 ce récit national,
56:14 nous avons apporté Modeste Pierre à ce récit,
56:18 et avant de nous quitter,
56:20 je voudrais vous suggérer cette pensée.
56:23 "Il est impossible de réduire sérieusement
56:26 "les émissions de gaz à effet de serre
56:29 "sans une discussion sur la sobriété énergétique."
56:33 C'est de notre économiste prix Nobel,
56:36 Esther Duflo.
56:38 SOUS-TITRAGE : RED BEE MEDIA
56:41 Générique
56:43 ...

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