• l’année dernière
Alors que le hijab de sport est porté par de nombreuses athlètes dans le monde, la Fédération française de basket l’interdit à ses joueuses en compétition. Pourtant les Jeux olympiques de Paris 2024 l’autoriseront pour les joueuses étrangères. Une « injustice » selon Salimata Sylla, basketteuse depuis plus de dix ans, qui nous raconte sa première exclusion d’une compétition.

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Transcription
00:00 Jamais j'aurais pu imaginer en 13 ans de pratique,
00:02 qu'on me dirait "bah non, tu peux pas jouer au basket".
00:05 Ce que je souhaite, c'est uniquement de pouvoir faire du sport.
00:09 C'est dingue de dire ça en 2023.
00:12 Je m'appelle Sally Matasila, mais tout le monde m'appelle Sally.
00:15 J'ai 25 ans, j'habite à Paris.
00:16 Et aujourd'hui, on m'empêche de jouer en compétition
00:19 parce que je porte un couvre-chef alors même qu'il est homologué.
00:22 On est partie avec Odin jouer notre match officiel.
00:42 Je me suis échauffée avec tout le monde.
00:44 Et il y a deux minutes avant de commencer la rencontre,
00:47 mon coach me dit que l'arbitre ne me laisse pas rentrer sur le terrain.
00:50 J'ai été bouleversée parce que j'ai fait trois heures de car.
00:54 Je me suis levée un dimanche pour aller jouer le sport que j'aime
00:59 et que je fais depuis 13 ans.
01:00 Et on m'interdit parce que j'ai un couvre-chef.
01:03 Et un couvre-chef qui est homologué,
01:05 c'est-à-dire qu'il n'y a aucune question de sécurité ni d'hygiène.
01:09 Je joue avec depuis plus de deux ans.
01:11 Ça ne bouge pas, ça ne blesse pas, ça n'étrangle pas.
01:14 Ça a été fait pour ça.
01:15 Ça a été fait pour la pratique.
01:16 Il y a une recrudescence de faits similaires
01:19 recensés un peu partout en France
01:21 de jeunes demoiselles qui se retrouvent à ne pas pouvoir pratiquer.
01:24 Donc non, on n'est pas sur un cas isolé.
01:26 Moi, je l'assimile plus un peu à une chasse aux sorcières
01:28 parce que c'était effectivement dans les textes depuis trois ou quatre ans.
01:33 Mais il y a des documents qui vont à l'encontre
01:35 de ces textes qui ont été écrits par la FED
01:37 puisqu'en 2018, ils ont sorti une charte éthique
01:39 qui parle d'absence de discrimination,
01:41 d'encourager la pratique féminine.
01:43 Donc il y a plein de choses qui vont à l'encontre
01:45 de cette exécution des textes
01:46 qui est appliquée de manière un peu plus stricte depuis un mois.
01:49 Moi, ma position aujourd'hui,
02:03 elle est de ne pas incriminer une instance plus qu'une autre,
02:06 de dire qu'elle est responsable ou elle n'est pas responsable.
02:08 C'est de dire qu'aujourd'hui, il y a une règle.
02:10 Elle n'est pas forcément juste.
02:11 Qu'est-ce qu'on fait pour que personne ne soit alésé
02:14 mais qu'on puisse justement ne pas discriminer ?
02:16 Aujourd'hui, le sport, c'est un espace hors du temps
02:20 parce que légalement, il n'y a rien dans les textes de loi
02:22 qui dise qu'on ne peut pas faire du sport avec un voile.
02:26 Est-ce que tu t'imagines un jour dans une technique plus robuste ?
02:29 Franchement, pas une seconde.
02:32 Parce que la manière dont j'aime le basket,
02:34 la manière dont je m'investis au quotidien,
02:37 je suis dans le domaine associatif
02:39 et j'entreprends dans le monde du basket.
02:41 Donc j'invite tous les jours des jeunes filles,
02:43 des jeunes garçons à pouvoir jouer au basket
02:45 et que maintenant, je sois mis de côté,
02:47 ça n'a aucun sens et je suis triste en fait.
02:50 Parce que je ne peux pas être dans mon quotidien,
02:53 parler basket, manger basket, vivre basket, partager basket
02:57 et que derrière, on me dise "tu ne peux pas jouer pour ce que tu es".
03:01 J'ai le droit d'être ce que je suis et on ne me prend pas entièrement.
03:05 Donc c'est ça qui me touche le plus.
03:08 Il n'y a pas de raison que certaines femmes
03:11 puissent avoir le privilège de jouer
03:13 et que certaines autres soient contraintes
03:16 dans leur liberté de pratiquer leur sport.
03:18 Ce simple effet-là déjà, c'est juste écœurant.
03:22 À une époque, c'est vrai qu'il n'y avait pas forcément
03:25 les outils adaptés à leur pratique.
03:27 Donc c'était un foulard un peu attaché de manière un peu succincte
03:31 avec une épingle.
03:32 Donc je peux comprendre cette époque.
03:34 Aujourd'hui, il y a des équipementiers type Nike ou Jordan ou autre
03:37 qui permettent aux femmes de pouvoir pratiquer le sport
03:40 avec justement une technologie plutôt avancée.
03:42 C'était plutôt plaqué, donc plutôt sécurisant.
03:44 Donc aujourd'hui, la partie sécuritaire,
03:46 il n'y a aucun danger pour les gens qui vont affronter.
03:49 Si on oblige les gens à être en dehors d'un système,
03:51 ils vont créer leur propre système.
03:52 Et le but, ce n'est pas de les sortir du système,
03:54 c'est de les inclure parce qu'on est sur le sport
03:56 et le sport, c'est de vivre ensemble.
03:58 Donc si on commence à faire des formes de discrimination,
04:01 on va forcer le communautarisme
04:03 et créer quelque chose qui ne va pas forcément être bon
04:05 pour tout le monde en fait.
04:07 Là, on va recevoir les JO dans un an
04:09 et des femmes comme moi,
04:10 des femmes comme une partie des jeunes femmes en France
04:13 vont pouvoir concourir en France.
04:15 Et nous, on est exclues aujourd'hui.
04:16 Donc du coup, j'ai du mal à comprendre.
04:18 Je vois ça fortement comme une injustice.
04:21 La plupart de mes amis,
04:27 c'est des gens qui sont du milieu du basket.
04:29 Et là, j'ai l'impression d'être exclue.
04:31 Là, je parle en mon nom, mais la réalité, c'est qu'il y a
04:35 une partie des femmes, une partie des jeunes filles
04:38 qui ont juste envie de jouer au basket
04:40 et qui ne pourront pas jouer au basket.
04:42 Et ça, c'est le plus triste.
04:43 [Musique]

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