Le discours policier et ses relais médiatiques

  • il y a 16 ans
Victor Hugo se flattait d’avoir « mis un bonnet rouge au vieux dictionnaire [1] ». C’est aujourd’hui la cagoule des policiers antiterroristes que l’on enfile sur le vocabulaire. Chacun choisit son symbole : la coiffe des sans-culottes de 1793 ou le masque anonyme du bourreau.

Néologismes et sémantique sont des moyens de la lutte des classes. Lewis Carroll a résumé le problème dans un court dialogue : « La question, dit Alice, est de savoir si vous avez le pouvoir de faire que les mots signifient autre chose que ce qu’ils veulent dire. La question, riposta Humpty Dumpty, est de savoir qui sera le maître… un point c’est tout [2] ».

Voilà. Ceux qui sont les maîtres, c’est-à-dire ceux qui disposent de la gendarmerie et des télévisions, ont le pouvoir de donner aux mots le sens qui leur convient. Ils ont le pouvoir de faire en sorte que les mots les servent, qu’ils soient le moins importuns possible pour eux. « Ils disent “voici telle ou telle chose”, remarquait Nietzsche, ils apposent sur toute chose et sur tout événement un son qui les différencie et par là même ils en prennent pour ainsi dire possession [3] ». Les mots, et partant les choses qu’ils désignent, sont serfs. Il n’est pas étonnant que les écrivains se soient soucié du sort du langage, leur outil, leur jouet, leur arme. Les écrivains, dit Hugo dans Les Contemplations, « ces bandits », « ces terroristes », « ont mis la langue en liberté ». Le souci de tous les pouvoirs est de la remettre en cage, de re-nommer sans cesse ce qui leur déplaît et les importune. Nommer pour normer. Définir pour en finir avec.

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